Actualité mirbellienne de l’année 2021
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Cahiers Octave Mirbeau
2022, n° 29. varia - Pages : 421 à 430
- Revue : Cahiers Octave Mirbeau
ACTUALITÉ MIRBELLIENNE DE L’ANNÉE 2021
Nous remercions une nouvelle fois nos adhérents et correspondants de France et de l’étranger pour leurs contributions à cette rubrique. Depuis bientôt trente ans, la Société Octave Mirbeau, grâce à ses publications et à ses fidèles adhérents et sympathisants, œuvre efficacement à la présence d’Octave Mirbeau dans la presse, dans l’édition ou sur scène, tant en France qu’à l’international.
Janvier
–Le romancier espagnol Francisco Gil Craviotto, membre de l’Académie des Belles Lettres de Grenade, traducteur de Sébastien Roch (2014), publie un recueil de 40 textes intitulé Orillas de Sena (Rives de Seine), aux éditions Alhulia. Le chapitre XXV est consacré à Octave Mirbeau. L’auteur désapprouve son appel à la grève des électeurs, mais partage sa défense de la cause animale. Une page est consacrée à Dingo.
–Le numéro de janvier du mensuel Causeur publie un article signé Jérôme Leroy mettant en parallèle les quatre romans de Mirbeau publiés en novembre 2020 par Pierre Glaudes avec le roman de G.K. Chesterton L’Homme qu’on appelait Jeudi publié en 1908 et réédité récemment aux éditions de l’Arbre Vengeur. Chesterton et Mirbeau ont tous les deux le « sens joyeux de la satire et de l’humour noir, du paradoxe et de la provocation ».
–La revue italienne Amedit publie dans son numéro 43 – Hiver 2020/2021 – sous les formes papier et numérique un article intitulé « L’Ebetudine della moltitudine » (« L’Hébétude de la multitude ») du mirbellien Massimiliano Sardina, inspiré de deux contes de Mirbeau, parus sous le titre de « Paysage de foule ».
–Nouveau compte rendu de l’édition des quatre romans de Mirbeau édités par Pierre Glaudes dans la collection Bouquins. Il émane cette fois-ci du quotidien suisse Le Temps daté du 17 janvier dans 422–lequel Philippe Simon évoque « les mélodies en sous-sol d’Octave Mirbeau, artilleur en chef des lettres françaises de la soi-disant Belle Époque…Mirbeau, ce fut quelqu’un qui eut le courage de regarder son ombre dans les yeux, et de nettoyer ses tripes – à témoin le dossier de son antisémitisme : lorsque dans les années 1880 il était à la tête de l’hebdomadaire Les Grimaces il pataugeait dans l’infamie. Mais il s’en repentit ».
–Dans la revue numérique de l’université de Medellin, Mutatis Mutandis, Lucia Campanella, de l’université de Montevideo, révèle et commente la traduction des Vingt et un jours d’un neurasthénique publiée comme roman-feuilleton en 1904 dans les vingt-six éphémères numéros d’un journal anarchiste de Montevideo Nuevo Rumbo. Lucia Campanella se propose de « revisiter cette traduction oubliée en tenant compte de son caractère premier. L’analyse adopte le cadre théorique des études sur les mouvements politiques transnationaux (Saunier, Bantman) et s’interroge sur l’opportunité d’utiliser le concept de traduction comme accumulation de capital littéraire (Casanova) dans un contexte de publication hautement idéologique et internationaliste ».
–Le site Internet « Choses normandes » publie des textes d’auteurs normands traduits en langue normande. Il a ainsi mis en ligne un conte de Mirbeau, « Le Lièvre », traduit en normand sous le titre « Le lyive ». « Le lièvre » est un conte paru dans L’Écho de Paris du 30 mai 1893. Accessible sur le site : https://www.choses-normandes.com/groupe-de-traduction (consulté le 12 mai 2022).
Février
–L’éditeur italien Robin publie dans sa collection « Biblioteca del Vascello » un volume contenant six pièces des Farces et moralités : Vecchio matrimonio (Vieux ménages), L’Epidemia (L’Épidémie), Gli amanti (Les Amants), Il Portafogli (Le Portefeuille), Scrupoli (Scrupules) et Intervista (Interview). Traduction du poète génois Albino Crovetto.
–Le 6 février, dans le cadre de son émission « Les nuits de France Culture » animée par Philippe Garbit, France Culture a diffusé L’Épidémie, pièce en un acte d’Octave Mirbeau, une farce tragique créée en 1898 au théâtre Antoine à Paris, diffusée pour la première fois le 14 juillet 1961 sur France II Régionale dans une mise en scène du Théâtre populaire Juin 44.
423–Grèce – Dans ΤΑΝΕΑ du 20 février (Les Nouvelles), l’écrivain grec Philip Dracodaidis, publie un article intitulé « οκτάβΜιρμπό – Ανατομίαενόςθανάτου » (“Octave Mirbeau – Anatomie d’une mort”), compte rendu de la traduction grecque de La Mort de Balzac, illustré par la statue du Balzac de Rodin.
Mars
–Octave Mirbeau en Amérique. L’écrivain, dramaturge, musicologue américain Doug Skinner vient de publier, chez Black Scat Books, éditeur californien, un nouveau volume consacré au « 2 + 2 = 5 » publié en 1895 par Alphonse Allais. Bien qu’une seule ligne des 343 pages de l’édition originale fasse allusion à Octave Mirbeau, Doug Skinner fait référence à quatre textes concernant Octave : « The Fugitive Cucumber (Le Concombre fugitif, p. 248-251), Explosive and Ambulatory (Explosif et baladeur, p. 255-258), To Please Mirbeau (Pour faire plaisir à Mirbeau, p. 252-254) », et Letter to M. Hortus (Lettre à M. Hortus, p. 259-262). – Rappelons que le jardinier Hortus imaginé par Mirbeau est « une espèce d’original, très amusant, dont la coquetterie est de posséder des fleurs que personne ne possède ».
–Collection Bouquins encore et toujours. Dans son numéro du 26 mars, l’hebdomadaire Marianne publie une interview de Pierre Glaudes par Matthieu Giroux. Pierre Glaudes met Octave en face de ses contradictions. Il n’omet pas de rappeler la période antisémite d’Octave dont il tentera plus tard de se laver en réglant ses comptes avec lui-même. Bourgeois lui-même, « il prend le parti de l’exagération accusatrice, de la carnavalisation crépusculaire du monde bourgeois ». Anarchiste, il dépense sans compter pour se procurer les plus belles voitures. Pour le reste, rien n’échappe à sa vindicte : le nationalisme, l’armée, l’église, l’école, la famille, la science, le progrès. Dans l’évangile selon Octave tout est perversion.
–Les 13 et 14 mars, la troupe de La Salle Blanche a joué à Paris La Grande Peur des bien-portants, pièce inspirée par deux textes d’Octave Mirbeau, L’Épidémie et La Grève des électeurs. Les comédiens de La Salle blanche revendiquent la nécessité impérieuse de penser, de créer coûte que coûte, de rire à ce qu’ils perçoivent comme une farce. Adaptation de Florient Azoulay. On notera avec un certain sourire cette référence à Bernanos, l’anti-Mirbeau s’il en est.
424–Parution du numéro 2 de la revue ligérienne Octave Mirbeau – études et actualités. Le titre est suivi du slogan commercial : « Découvreur de son temps, inspirateur de notre époque ».
–Le magazine Le Pays d’Auge, dans son numéro 2 de mars-avril 2021, mentionne Octave Mirbeau « accusant le doyen Brouardel de donner raison aux riches dans les affaires civiles où l’on a recours à ses lumières d’expert » (Le Journal, 25 juillet 1897). Paul Brouardel (1837-1903) était professeur d’hygiène à la Faculté de médecine et membre de l’Académie de médecine.
Avril
–Le 28 avril, une représentation de L’Épidémie a été donnée dans la ville de Tioumen (800.000 habitants) située en Sibérie occidentale. La pièce est adaptée et mise en scène pour le théâtre local, le Cosmos de la jeunesse, par Valeria Sharapova.
–La revue italienne Amedit publie dans son numéro 44 – Printemps 2021 – sous les formes papier et numérique un conte de Mirbeau : « Sacré Barjeot » publié le 1er octobre 1889 dans L’Écho de Paris, et rebaptisé par la suite « Un gendarme » dans le recueil La Pipe de cidre (1919). Ce conte est présenté et commenté par le mirbeauphile Massimiliano Sardina.
–« L’Arbre vengeur » publie une nouvelle édition des 21 jours d’un neurasthénique préfacée par Serge Sanchez avec une couverture illustrée par Stéphane Trapier.
Mai
–Le samedi 22 et le dimanche 23 mai, à Sarteano (Toscane), ont été données, en italien, deux représentations d’une adaptation théâtrale du Journal d’une femme de chambre, intitulée Vi chiamerò Marie (Je vous appellerai Marie). Célestine était interprétée par Livia Castellana. Mise en scène de Stefano Bernardini.
– Vigousse, le petit hebdomadaire humoristique romand, publie une critique signée de son rédacteur en chef Bernard Quiriny sur l’édition des 21 jours d’un neurasthénique publiée par « l’Arbre vengeur ». « Une entreprise jouissive assez indépassable de démolition de la bêtise, de la bassesse et de la barbarie servie par un style fulgurant et un humour qui ne se fixe aucune limite ».
425Juin
–Le 3 juin, l’universitaire chinoise Chunyue Zhou a soutenu une thèse de doctorat à l’université de Pékin intitulée : 世纪末法国“作家艺术批评”主体性研究 – 以于斯曼斯和米尔博为例 L’étude porte sur la subjectivité de la critique d’art des écrivains : le cas de Huysmans et de Mirbeau.
–Le 19 juin, une nouvelle représentation du Journal d’une femme de chambre a été jouée à Paris, au Musée Auguste-Comte avec Isabelle Mentré dans le rôle de Célestine. Adaptation et mise en scène de Christophe David.
–Le 19 juin, lecture de « La Grève des électeurs » à Fouilloy (Oise), par Patrice Bousquet, du théâtre de l’Orage.
–Le 20 juin, a été donnée une conférence sur l’actualité d’Octave Mirbeau à Saint-Saturnin-sur-Loire (Maine-et-Loire) par M. Michel dans le cadre de Ruralivres, manifestation organisée par les éditions du Petit Pavé.
–Une nouvelle adaptation du Journal d’une femme de chambre, signée Louise Caron et intitulée La Célestine, a été représentée à Lyon au théâtre du Trancanoir pour sept représentations du 23 au 27 juin. Mise en scène de Gilles Champion.
–Les 24, 25 et 26 juin, la troupe de la Salle Blanche a repris, dans la salle des écuries du château de Valençay, La Grande Peur des bien-portants, précédemment jouée en mars. (Voir ci-dessus).
Juillet
–Dans son numéro du 20 juillet, le quotidien L’Opinion publie une critique signée Bernard Quiriny sur l’édition des 21 jours d’un neurasthénique publiée par « l’Arbre vengeur ». « L’un des livres les plus noirs et désopilants de l’auteur ».
–Le 29 juillet, à Trouville, sur la scène du Musée Villa Montebello, a eu lieu une lecture musicale de cinq contes cruels d’Octave Mirbeau, intitulée « Au vitriol », par la Compagnie Le Grain de Sable, dans le cadre de la vingtième édition des « Rencontres d’été – Théâtre & lecture en Normandie ».
–Le 31 juillet, dans le cadre du Festival d’Art Lyrique de Luchon, le Théâtre du casino de Luchon a produit une nouvelle création intitulée Les Montagnes, composée par Isabelle Aboulker et interprétée 426–par Sylvia Cazeneuve, soprano dramatique, sur un texte d’Octave Mirbeau extrait des 21 jours d’un neurasthénique (1901).
–La revue italienne Amedit, sous le titre : « Les morts vont seuls… », publie dans son numéro 45 – Été 2021 une étude du conte « Les deux voyages » rédigée par Massimiliano Sardina.
Août
–Édition en Blu-ray et en DVD du film The Diaryof a Chambermaid, version américaine du Journal d’une femme de chambre de Jean Renoir (1946). Résumé : A chambermaid plots to climb the social ladder by marrying a wealthy man1.
–Mise en ligne sur le site russe « Flicker » d’une traduction russe de La 628-E8.
–L’éditeur argentin « Ediciones de la Mirándola » publie en version digitale El jardín de los suplicios, traduction du Jardin des supplices traduit, annoté et préfacé par Carlos Cámara et Miguel Ángel Frontán. 203 pages.
Septembre
–La troupe les Comédiens de la Tour de Triel-sur-Seine a donné deux représentations de L’Épidémie, la farce de Mirbeau, le dimanche 19 septembre, à Chambourcy, Yvelines, dans le cadre du magnifique Désert de Retz.
–Jeudi 17 septembre, France-Culture a invité Pierre Glaudes, spécialiste français d’Octave Mirbeau, pour évoquer dans une émission de 53 minutes l’auteur dont ces présents cahiers réussissent à maintenir la mémoire.
–Dans le quotidien espagnol Ideal du 23 septembre, Francisco Gil Craviotto poète, romancier, dramaturge, critique littéraire et philosophe, membre de « l’Academia de buenas letras de Granada » publie un article mettant en parallèle Octave Mirbeau et Miguel de Unamuno (1864-1936).
–Miguel Ángel Frontán, poète et traducteur argentin, publie en espagnol un chapitre des Promenades littéraires publié en 1903 par 427–Remy de Gourmont, consacré à Octave Mirbeau. Extrait : « il poursuivit également et avec la même générosité foncière, l’injustice sociale et l’injustice esthétique. Il s’adonna à cette double guerre avec une fougue merveilleuse à voir, mais souvent excessive ; il blessa ses ennemis et aussi quelques-uns de ses amis. »
Octobre
–Le quotidien L’Humanité du 7 octobre contient un article intitulé : « Connaissez-vous Sébastien Roch ? » Auteur : Pierre Serna.
–Le samedi 23 octobre, à Triel-sur-Seine, à l’issue de l’assemblée générale de notre Société Octave Mirbeau, devant une salle des mariages comble, la troupe des Comédiens de la Tour a lu des textes d’Octave Mirbeau.
Décembre
–Le 1er décembre, au Théâtre Traversière, à Paris, la compagnie « Lire autrement » a présenté un spectacle évoquant la vie et l’œuvre de Claude Monet. Au cours de cette soirée les comédiens Simone Hérault et Xavier Clion ont lu des extraits de la correspondance échangée entre le peintre et Octave Mirbeau.
–Le 10 décembre, l’étude Pierre Bergé a mis aux enchères à l’hôtel Drouot 8 lots mirbelliens dont le manuscrit du Jardin des supplices adjugé 20000 euros. Le total des enchères s’est élevé à 33300 €. Le détail est consultable sur le site de l’étude Pierre Bergé et Associés.
428SOUTENANCES DE TRAVAUX UNIVERSITAIRES
Soutenance d’une habilitation à diriger des recherches, Influences décadentes, dissidences naturalistes et renouveau chrétien de 1870 à 1925 par Samuel Lair, sous la direction du Professeur Yann Mortelette, le 29 avril 2022. Le jury est composé de Mme Véronique Léonard-Roques et de MM. Pierre-Jean Dufief, Olivier Lumbroso, Yann Mortelette, Alain Pagès et Jean-Luc Steinmetz.
À la suite de sa thèse Octave Mirbeau et le mythe de la nature soutenue à l’UBO en 2002 et publiée aux PuR en 2004, Samuel Lair a poursuivi ses travaux dans ce même champ d’investigation de l’histoire littéraire, selon trois directions : les influences décadentes, les dissidences naturalistes et le renouveau chrétien ont parcouru la littérature fin-de-siècle et se sont prolongés jusqu’à l’entre-deux-guerres.
Le dernier tiers du xixe siècle fut en effet traversé par des thèmes et des préoccupations stylistiques relevant du décadentisme. Paradigme de cette littérature hybride, l’œuvre d’Octave Mirbeau s’enracine dans un terreau de motifs singuliers : la souffrance, l’incommunicabilité, la place de l’art. Elle exhibe des excès rhétoriques qui permettent l’essor d’une esthétique composite, entre naturalisme et décadence. La cohérence de son œuvre est à chercher dans le traitement romanesque du thème de la nature d’où découlent une certaine attitude face à l’existence, ainsi que des choix d’écriture marqués par leur diversité.
Dans les soixante-quatorze articles qu’a rédigés Samuel Lair depuis sa thèse, il s’est efforcé de montrer l’inflexion prise par la littérature française de 1870 à 1925. La porosité entre esthétique réaliste et esthétique décadente est sensible chez des écrivains considérés comme naturalistes ; Zola, Maupassant, Huysmans, Lemonnier participent de ce mélange des genres qui constitue l’une des marques de la décadence. Loin de se limiter à la prose, la déconstruction de la forme et la séduction qu’exerce la décomposition touchent aussi la poésie. Avant la fin-de-siècle, l’œuvre de Tristan Corbière concourt déjà à la mise en place d’une nouvelle poétique, où peuvent se croiser le goût pour la juxtaposition des contraires et l’attrait pour des thématiques comme la séduction de l’artificiel : à ce titre, Corbière annonce le décadentisme.
429L’œuvre de Gustave Geffroy, quant à elle, n’est guère connue du grand public. Composée de romans, de pièces de théâtre, de recueils de critique d’art et d’innombrables articles de presse, elle est protéiforme. Pour la première fois, Samuel Lair a réuni sa correspondance générale (1 970 lettres) dans l’ouvrage inédit de son dossier d’habilitation. Son travail a consisté à retrouver ces lettres, à les transcrire, à les dater et à les annoter. Elles font apparaître la diversité des destinataires et la richesse des activités du collaborateur de Clemenceau à La Justice : les noms de Monet, Carrière, Rodin rappellent son importance dans l’histoire de la critique d’art ; ceux de Goncourt, Descaves, Daudet et Zola témoignent d’une place littéraire qui justifia son élection parmi les premiers membres de l’académie Goncourt. Participant aux grandes crises de son temps comme aux petits scandales qui animèrent la vie artistique et littéraire de ses contemporains, Geffroy a été un témoin du xixe siècle aussi bien qu’un acteur déterminant du premier quart du xxe siècle : son statut de président de l’académie Goncourt lui permit notamment de promouvoir l’œuvre de Proust. Cette édition de correspondance apporte un éclairage inédit sur la vie intellectuelle, littéraire et politique française entre 1875 et 1926.
L’idéologie positiviste du xixe siècle vit éclore, par réaction, les conversions discrètes ou spectaculaires de nombreux écrivains. Villiers de L’Isle-Adam, Huysmans, Bloy et Paul Claudel ont contribué à former un mouvement de renouveau chrétien. Le cheminement spirituel, ses répercussions sur l’œuvre littéraire et sur la représentation du monde, l’écriture de la conversion, les périodes de doute sont autant de jalons dans l’approche de l’œuvre de ces hommes de lettres. Le dossier d’habilitation de Samuel Lair montre que leur foi ne fut pas monolithique, mais qu’elle laissa apparaître de nombreuses fêlures.
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Soutenance de la thèse de littérature française, La Poétique du dégoût dans l’œuvre d’Octave Mirbeau, par Loïc Le Sayec, à Amiens, le mercredi 28 septembre 2022, sous la direction de Mme Marie-Françoise Melmoux-Montaubin, Professeure, Université de Picardie Jules Verne. Le jury est composé de M. Pierre Glaudes, Professeur, Sorbonne Université, M. Bertrand Marquer, Professeur, Université de Strasbourg, M. Christophe Reffait, Professeur, Université de Picardie Jules Verne, Mme Éléonore Reverzy, Professeure, Université Sorbonne Nouvelle.
Loïc Le Sayec montre dans sa thèse que, souvent jugée incohérente et outrancière, l’œuvre d’Octave Mirbeau laisse peu de lecteurs indifférents. Coutumier des excès, l’auteur s’est en effet distingué par des prises de position radicales et apparemment contradictoires – en exprimant par exemple tour à tour des sympathies antisémites puis dreyfusardes, royalistes puis anarchistes – en même temps que par une écriture que beaucoup jugèrent répugnante. Cette dernière caractéristique revenant constamment sous la plume de ses contemporains pour la décrire, on peut se demander si elle n’est pas un facteur capital pour comprendre son œuvre par-delà ses contradictions manifestes et la diversité générique dont elle fait montre. Si Mirbeau se défend souvent d’être dégoûtant, il revendique en revanche la libre expression de son dégoût. La constance de cette revendication invite à la considérer comme un élément structurant de son écriture. Non seulement cette émotion est surreprésentée dans les textes, mais son expression est encore largement méditée et commentée par l’auteur. Cette thèse entend dégager les fondements notionnels, psychologiques et historiques d’une poétique du dégoût chez Mirbeau. Il s’agira de définir précisément cette émotion et son périmètre d’application dans les textes, d’étudier son fonctionnement et sa conception chez l’auteur puis d’envisager ce que l’expression du dégoût et l’attrait pour les objets répugnants doivent à une sensibilité contemporaine partagée. Penser une poétique du dégoût implique aussi d’interroger les conceptions littéraires de Mirbeau. L’expression de cette émotion semble intimement liée à une croyance en les pouvoirs du verbe et à la construction d’un ethos d’auteur dégoûté permettant d’unifier une œuvre diverse et apparemment contradictoire. L’unité de l’œuvre est garantie par l’élaboration d’une voix qui travaille à se faire reconnaître grâce à la mise au point de différents procédés caractéristiques devant rendre l’expression des dégoûts de Mirbeau la plus efficace et la plus singulière possible.
1 Pour connaître la genèse et l’accueil de ce film, lire l’article de Frédéric Levéziel, « La Réception américaine de The dairy of a chambermaid », Cahiers Octave Mirbeau, no 28, 2021, p. 123-143.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-14651-3
- EAN : 9782406146513
- ISSN : 2726-0518
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14651-3.p.0421
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 08/03/2023
- Périodicité : Annuelle
- Langue : Français