Conclusion
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : « Briller par la diversité ». Les recueils collectifs de poésies au xviie siècle (1597-1671)
- Pages : 661 à 662
- Collection : Lire le xviie siècle, n° 66
- Série : Voix poétiques, n° 9
Conclusion
Comment lire ces publications hétérogènes que sont les recueils collectifs de poésies ? Telle est l’interrogation qui a conduit cette troisième et dernière partie du présent travail.
Reflets d’une production poétique d’un moment, la succession des recueils livre une histoire de la poésie du xviie siècle. Les premiers historiens de la littérature française, conscients du rôle qui revenait à ces publications en leur temps, n’hésitent pas à les alléguer comme sources. Les compilations sont le terrain où se construit la notoriété d’un auteur. Mais elles constituent aussi des observatoires privilégiés pour déceler d’éventuelles campagnes de publicité, orchestrées par les éditeurs, voire les auteurs eux-mêmes, ou pour dégager des tensions entre différentes esthétiques et les poètes qui les représentent.
Mais le recueil collectif n’est pas seulement le support pour la diffusion d’une esthétique. Le recueil, parce qu’il est composé de pièces contemporaines de sa publication, est aussi gazette. Il cherche à satisfaire la curiosité du public du moment et en fait même un de ses arguments de vente. Partant, c’est bien dans le choix des pièces et de leur présentation dans le recueil, opérations de prime importance, que réside la tâche du compilateur. En fonction de la manière dont il orchestre les pièces réunis dans le livre, il influe sur la réception de celui-ci. Son rôle se rapproche ainsi de celui d’un auteur. La sélection et la dispositio des pièces sont décisives pour le succès du recueil auprès du public, dont les préférences changent au fil du siècle. Mais plus important encore, elles programment les lectures et usages du recueil.
Quasiment tous les recueils du corpus permettent au lecteur de s’informer sur les poètes ou les pièces à la mode et sur l’esthétique poétique du moment. La grande variété qui s’observe au sujet de l’organisation interne des compilations amène en revanche à penser que les lectures différaient en fonction des lecteurs et des époques. Tantôt, en effet, la compilation se présente comme un secrétaire en vers, proposant des 662textes offerts à l’imitation ou au réemploi, tantôt elle se veut modèle linguistique, tantôt, elle se revendique art poétique en acte, école du poète réduite en exemples.
Malgré ces différences entre les recueils de notre corpus et leur répertoire, une constante se dégage. La compilation poétique apparaît véritablement comme un carrefour où lecture et écriture se croisent. Elle n’est pas un produit de consommation passive. À des échelles variables, en fonction des moments de publication, le recueil est un Janus, tourné à la fois vers la lecture, invitant le lecteur à admirer les compositions réunies, et vers l’écriture, incitant le poète amateur à se lancer lui-même dans la création et, dès lors, à participer lui aussi au foisonnement poétique dont le recueil se fait le miroir.