Principes de l’édition
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Œuvres complètes. Tome V. Œuvres politiques et pédagogiques : Vœux d’un solitaire et textes périphériques
- Pages : 789 à 791
- Collection : Bibliothèque du xviiie siècle, n° 59
Principes de l’édition
Nous avons choisi, pour l’établissement du texte de cette nouvelle édition des Œuvres complètes de Bernardin de Saint-Pierre, de partir du manuscrit 38 de l’académie de Besançon et non de la version publiée par Aimé-Martin, tout en mettant en regard les deux textes, même s’ils ne présentent pas, tout compte fait, de différences substantielles, contrairement à ce que laisseraient penser la longue liste de variantes ainsi que les propos de Maurice Souriau1.
Le manuscrit 38 constitue un état du texte – le dernier à notre avis – vu et validé par Bernardin de Saint-Pierre, qui a pris soin d’envoyer cette copie nette pour sa participation au concours. Le fait mérite d’être signalé tant il est rare pour tout éditeur de Bernardin de travailler sur une copie à ce point lisible. Aimé-Martin, pour son édition de 1818, n’a pas eu accès à cette version finie du texte : il dit avoir travaillé à partir de brouillons peu commodes, comme il le précise dans l’« Avis de l’Éditeur » : « Le manuscrit qui est entre nos mains était surchargé de notes et de corrections, ce qui a rendu notre travail assez difficile. Cette copie est sans doute une première esquisse, mais nous avons fait de vaines recherches pour nous en procurer une plus correcte2. » Les brouillons à partir desquels le secrétaire a travaillé ont été identifiés par Maurice Souriau et Malcolm Cook comme étant les Ms 4414 et 98A de la Bibliothèque municipale du Havre.
Nous avons pu consulter ces deux manuscrits numérisés3 sur le site de l’université d’Exeter4. Le Ms 4414 est à certains endroits 790raturé et corrigé, ou par Bernardin, semble-t-il, ou par Aimé-Martin lui-même : ces corrections correspondent parfois au texte du Ms 38 de Besançon, parfois à celui du Ms 98A ainsi qu’au texte de l’édition d’Aimé-Martin. Le Ms 98A, visiblement postérieur, porte la mention « copie ». Il comporte l’Avis de l’éditeur, tel, à peu de chose près, qu’on le trouve dans l’édition5. Il reprend, souvent au propre, c’est-à-dire sans les ratures du précédent, les modifications portées dans le Ms 4414 tout en procédant lui-même à de nouvelles corrections qui correspondent en général au texte de l’édition.
Apparaissent, dans les deux textes, des ratures de suppression (le segment, barré ou hachuré quand il s’agit d’un passage plus long, est éliminé), des ratures de substitution (le segment est barré et remplacé, en marge rarement, le plus souvent dans l’intervalle interlinéaire, au-dessus de la rature), des ratures de transfert (modification dans l’ordre des mots), ou des ajouts, si bien qu’on comprend aisément quelles ont été les difficultés du premier éditeur. Cependant les différences entre le texte publié par Aimé-Martin et le Ms 38, quoique nombreuses, sont souvent infimes, voire insignifiantes comme le lecteur peut le constater dans les variantes6 : elles portent sur l’ordre de certains mots ou groupes de mots dans la phrase7 ; sur quelques ajouts8, omissions 791ou effacements progressifs9, hésitations10 ou reformulations11 ; sur des changements de temps (présent / passé composé), etc. Les variantes que nous mentionnons renvoient au texte de l’édition d’Aimé-Martin en regard du Ms 38 que nous considérons comme le texte définitif de Bernardin. Nous précisons toutefois, dans le cours du texte et en note de bas de page, le cas échéant, les changements significatifs entre les Ms 38, 4414, et 98A.
L’orthographe a été normalisée et modernisée conformément à la règle suivie dans les OC,mais nous avons rencontré assez peu de problèmes, le texte ayant été soigneusement orthographié vu sa destination. Tous les alinéas ont été maintenus : ils diffèrent de la version d’Aimé-Martin, plus compacte. Si nous avons respecté la structure des phrases, délimitées par le point final, nous avons dû introduire les majuscules initiales ainsi que celles des noms propres. En revanche, si la ponctuation interne a été respectée, elle a dû souvent être complétée en fonction du sens, Bernardin de Saint-Pierre faisant un usage limité voire insuffisant des virgules et autres ponctuations intermédiaires. Nous avons également donné de la visibilité aux dialogues par l’ajout des deux points d’ouverture, de guillemets parfois absents ou par un passage à la ligne.
1 Maurice Souriau parle d’une édition « fautive » (Bernardin de Saint-Pierre d’après ses manuscrits, Paris, Société Française d’Imprimerie et de Librairie, 1905, p. 180).
2 Bernardin de Saint-Pierre, Œuvres complètes. Mélanges, Paris, Méquignon-Marvis, 1818, « Avis de l’éditeur », p. 124.
3 Le 4414 est composé de 10 feuillets (20 pages in folio), le 98A de 17 feuillets (34 pages in-folio). C’est une copie d’Aimé-Martin.
4 https://projects.exeter.ac.uk/bsp/frameset.htm.
5 On signalera ce passage biffé entre la deuxième et la troisième phrase de l’« Avis » : « Il est pourtant nécessaire de remarquer qu’étant résolu de ne jamais publier ce discours il en avait détaché quelques fragments pour les introduire dans ses divers ouvrages » (Ms 98A).
6 Nous donnons ces modifications dans la section « Variantes » qui se trouve à la fin du texte. Elles sont signalées dans le texte par des lettres de renvoi, conformément au protocole éditorial.
7 Exemple : « Parler aux hommes de fortune, d’arts, de sciences, de gloire, de liberté même, c’est n’en intéresser qu’un petit nombre de propriétaires » (Ms 38) / « Parler aux hommes d’arts, de sciences, de gloire, de fortune, de liberté même, c’est n’en intéresser qu’un petit nombre » (Ms 4414, 98A et édition).
8 Comme cette note de bas de page, présente dans l’édition, renvoyant à Montesquieu, qui apparaît de façon peu lisible, en surcharge de la graphie primitive dans le Ms 4414 et plus nettement dans le Ms 98A ; l’éditeur y donne son avis : « Montesquieu vante le courage de Sylla, parce qu’il abdiqua la dictature, et redevint simple citoyen, prêt à rendre compte de sa conduite. Mais Montesquieu y pensait-il ? Ce sénat, devant lequel un citoyen eût pu appeler Sylla, n’était-il pas plein de ses créatures, de ses complices, qui avaient trempé dans ses proscriptions ? Je trouve, moi, que ce fut la crainte de devenir seul l’objet de la vengeance publique qui le fit abdiquer. En abdiquant, il assurait sa personne ; le sénat seul se trouvait chargé de la haine ; et quel sénat puissant, puisque les femmes étaient pour lui ! »
9 Cette phrase, biffée dans le Ms 4414, disparaît dans le 98A ainsi que dans l’édition : « Le Musulman lui-même, toujours fidèle à sa loi, vaincu de toutes parts, s’étonne aujourd’hui de ne plus effrayer les peuples chrétiens. »
10 Le dernier paragraphe de la première partie est suivi d’une réécriture dans le Ms 441 : au lieu de « deux torrents », il est question d’« un torrent » venu des Alpes et d’« un autre torrent » venu du Midi, le deuxième interrompant le cours impétueux du premier et formant avec lui un fleuve. Le Ms 98A reprend le paragraphe en intégrant les corrections du premier, mais finit par le hachurer et l’éliminer de la version publiée.
11 « Plusieurs fils ont nourri leur père dans l’indigence mais il n’est entré que dans le cœur d’une jeune femme d’imaginer de nourrir de son propre lait, sa mère condamnée à mourir de faim » (Ms 38, Ms 4414, Ms 98A) / « Plusieurs fils ont nourri leur père dans l’indigence ; mais combien elle est admirable cette jeune femme qui imagina de nourrir de son propre lait, son père condamné à mourir de faim ! » (idem dans l’édition).
- Thème CLIL : 3439 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moderne (<1799)
- ISBN : 978-2-406-14098-6
- EAN : 9782406140986
- ISSN : 2258-3556
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14098-6.p.0789
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 18/01/2023
- Langue : Français