Annexe VI Variante du Préambule
- Publication type: Book chapter
- Book: Œuvres complètes. Tome IV. Œuvres philosophiques : Harmonies de la Nature et textes périphériques
- Pages: 1069 to 1070
- Collection: Eighteenth-Century Library, n° 61
Annexe VI
Variante du Préambule
Introduction
Ces deux paragraphes constituent une autre version de la fin du Préambule. Ils sont tirés d’un manuscrit de la Bibliothèque Armand Salacrou du Havre (LH 170 : 45). Ils sont de la main de Bernardin de Saint-Pierre. À la marge gauche, on lit « bon pour la fin ». Contrairement à la version imprimée, il n’y a aucune marque dans le manuscrit qui indique qu’il s’agit d’un discours oral. Les mots en gras signalent les variantes par rapport à la version imprimée par Aimé-Martin dans le Préambule (p. 1045-1068).
Texte
Soyez mes guides1, filles du ciel et de la terre, divines harmonies ! c’est vous qui assemblez et divisez les éléments ; c’est vous qui organisez tous les êtres qui végètent et tous ceux qui respirent. La nature a réuni dans vos mains le double flambeau de l’existence2. Une de ses extrémités brûle des feux de l’amour et l’autre de ceux de la guerre. Avec les feux de l’amour vous touchez la matière, et vous faites naître le rocher et ses fontaines, l’arbre et ses fruits, l’oiseau et ses petits, trois aimants différents réunis par de ravissants rapports. Avec les feux de la guerre vous enflammez la même 1070matière et il en sort le faucon, la tempête et le volcan, qui rendent l’oiseau, l’arbre et le rocher aux éléments. Tour à tour vous étendez sur la terre et vous retirez à vous les filets de la vie non pour le plaisir d’abattre ce que vous aviez élevé mais pour y conserver l’équilibre de la vie et de la mort d’après des plans inconnus aux mortels. Si vous ne n’y faisiez pas mourir, rien ne pourrait y vivre ; si vous ne n’y détruisiez pas, rien n’y pourrait renaître. Sans vous tout serait dans un éternel repos ; mais partout où vous portez vos doubles flambeaux vous faites naître les doux contrastes des couleurs, des formes, des mouvements. Les amours vous précèdent et les générations vous suivent. Toujours vigilantes, vous vous levez avant l’astre des jours et vous ne vous couchez point avec celui des nuits. Vous agissez sans cesse au sein de la terre, au fond des mers, au haut des airs. Planant dans les régions du ciel, vous entourez ce globe de vos danses éternelles, vous étendez vos cercles infinis d’horizons en horizons, de sphères en sphères, de constellations en constellations, et, ravies d’admiration et d’amour, vous attachez les chaînes innombrables de l’être au trône de celui qui est.
Sœurs immortelles, du sein de la gloire abaissez-vous vers un enfant de la poussière. Donnez-moi sur le penchant de la vie d ’ en tracer le cours aux enfants de ma patrie sans les égarer 3 . Ah, si vous m ’ inspirez des leçons qui les rende [ nt ] dignes de la liberté que leurs pères ont conquise, mon couchant vaudra mieux que mon aurore. Puisse leur bonheur influer un jour sur celui de l ’ univers ! Filles de la sagesse éternelle ! harmonies de la nature ! tous les hommes sont vos enfants. Ils ont sans cesse besoin de vos secours matériels. Sans vous, ils ont nus, misérables, discordants partout, de langues, de mœurs, d’opinions. Mais vous les appelez par leurs besoins à toutes les jouissances, par leur diversité à l’union, par leur faiblesse à l’empire. Vous les admettrez par les lumières et la vertu au partage de vos bienfaits et de votre puissance. Ils sont les seuls de tous les êtres qui jouissent de tous vos travaux, et les seuls qui les imitent ; ils ne sont savants que de votre science ; ils ne sont sages que de votre sagesse ; ils ne sont religieux que de vos inspirations. Sans vous il n’y a point de beauté dans les corps4, d’intelligence dans les esprits, de bonheur sur la terre, et d’espoir dans les cieux5.
1 Bernardin avait écrit d’abord « astres » avant de biffer ce mot. On trouve dans la version de ce texte dans le Livre VI « astres ».
2 Les mots placés ici dans la version imprimée, « de la mort », ne sont pas dans le manuscrit et sont donc un ajout d’Aimé-Martin.
3 Comme proposé dans l’Introduction, il s’agit peut-être d’une référence à son poste de professeur de morale républicaine à l’École Normale. Aimé-Martin n’a pas imprimé les références que Bernardin a faites aux écoles primaires dans le manuscrit des Harmonies de la Nature.
4 Il y a des mots illisibles ajoutés au-dessus.
5 Au-dessous écrit d’une autre main, « fin du préambule ».
- CLIL theme: 3439 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moderne (<1799)
- ISBN: 978-2-406-14876-0
- EAN: 9782406148760
- ISSN: 2258-3556
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-14876-0.p.1069
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 10-31-2023
- Language: French