Introduction
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Œuvres complètes. Tome II. Relation autobiographique, entretiens et textes divers
- Pages : 21 à 23
- Collection : Univers Port-Royal, n° 52
Introduction
Quand elle est de retour à Port-Royal des Champs le 4 décembre 1654, la mère Angélique Arnauld vient d’être déchargée de ses fonctions d’abbesse : la mère Marie des Anges Suireau a été élue au monastère de Paris, le 26 novembre, pour lui succéder. La mère Angélique peut alors se consacrer, loin des bruits du monde et dans la tranquillité, à la rédaction d’un petit ouvrage : « Elle nous disait […] qu’il lui prenait quelquefois envie d’écrire ce Livre de la Providence », écrit Angélique de Saint-Jean dans son Avertissement à l’édition imprimée du texte1.
La mère Angélique fait allusion elle-même dans sa Relation à cette entreprise de mémoire à laquelle elle s’est pourtant toujours refusée jusque-là : elle y évoque son passé, dit-elle, écrivant « et n’écrivant que ce qui concerne la conduite et la Providence de Dieu sur cette maison ». Mais, pour en arriver là, il aura fallu que le directeur de la mère Angélique, Antoine Singlin, lui fît obligation de rédiger ce texte qu’elle commence par ces mots : « Je fais par obéissance une relation de ce qui s’est passé dans cette maison ». Elle se retire « dans une petite cellule écartée », selon les termes d’Angélique de Saint-Jean, « donnant plus de temps à prier qu’à écrire », et, après quelques jours, elle interrompt la rédaction de sa Relation, au moment où elle rapporte l’arrestation de l’abbé de Saint-Cyran en mai 1638.
Il ne fait aucun doute que le manuscrit autographe de la mère Angélique fait l’objet des soins attentifs et de la vénération des moniales. Au moment de la grande persécution contre les religieuses, il est confié en 1664 à Antoine Arnauld, comme de nombreux autres documents précieux, et sans doute emporté aux Champs dès 1665 ou lors de la Paix de l’Église en 1668-1669. On ne sait ce qu’il devient par la suite : copié à plusieurs reprises, l’autographe semble aujourd’hui perdu.
22Si Angélique de Saint-Jean, nièce de la mère Angélique, précise dans l’Avertissement les conditions dans lesquelles l’abbesse a composé sa Relation, elle ne fait que lever le voile sur un projet beaucoup plus vaste : rassembler « des mémoires de tout ce que nous avions pu apprendre sur le rapport des anciennes de Port-Royal et d’elle-même [la mère Angélique], touchant ce qu’elle avait fait pour y établir la réforme, et depuis ». En 1651-1652, Angélique de Saint-Jean se met à rassembler des documents dont elle tirera une notice de haute tenue sur la réformatrice de Port-Royal ; elle annote la Relation de la mère Angélique (nous avons placé ses remarques en notes), comme elle revoit avec soin et minutie tous les documents concernant sa tante.
Le texte de la Relation autobiographique de la mère Angélique qu’on va lire dans la présente publication a été établi à partir de la copie manuscrite de la Bibliothèque Nationale de France (BnF), fonds français, 17795. Ce manuscrit fait partie en effet de la collection constituée, pour l’essentiel, du vivant même de la mère Angélique et conservée à l’abbaye de Port-Royal des Champs jusqu’à la dispersion des religieuses en 1709 : elle fut sauvée grâce à Marguerite de Joncoux, puis placée chez les bénédictins de Saint-Germain-des-Prés, et par la suite à la Bibliothèque Nationale. Nous avons en outre collationné les trois autres copies manuscrites connues de la Relation : l’une est conservée à la Bibliothèque Municipale de Rouen – elle provient de la bibliothèque des frères prêcheurs de cette ville – et les deux autres à la Bibliothèque de la Société de Port-Royal (BSPR), cotés PR 26 et 27. Les copies de la BnF, de la B. M. de Rouen et du ms. PR 26 de la BSPR présentent des ressemblances frappantes entre elles, tandis que le ms. PR 27 de cette dernière bibliothèque fait penser, par certains côtés, à un texte préparé en vue d’une édition. C’est du reste le manuscrit qu’a choisi et retenu, pour son édition de 1949, l’abbé Louis Cognet, qui considérait que c’était « assurément le meilleur ». Notre texte diffère ainsi de manière sensible de celui de L. Cognet : nous avons reproduit scrupuleusement la copie de la BnF, avec quelques emprunts, signalés dans les notes, aux trois autres manuscrits ; et nous avons tenté, en modernisant l’orthographe et la ponctuation, et en proposant, en italiques, des titres de chapitres, d’éviter les défauts de l’édition de L. Cognet, défauts qu’il reprochait lui-même à ceux qui ont édité le texte de la Relation au xviie siècle : suppressions, additions ou inversions de termes, coupures de phrases, “rajeunissement” ou “nivellement” du texte jusqu’à l’altération.
23Sources
Bibl. municipale de Rouen, ms. 1368 (U 120), p. 151-207.
BnF, f. fr. 17795, p. 1-61.
BSPR, PR 26, p. 227-307 ; PR 27, p. 1-65.
Éditions
Mémoires et Relations sur ce qui s ’ est passé à Port-Royal des Champs depuis le commencement de la Réforme de cette abbaye, s.l., 1714 ; 1716, p. 7-102.
Mémoires pour servir à la Vie de la Révérende Mère Marie-Angélique de Sainte-Magdeleine Arnauld, Réformatrice de Port-Royal, s. l., 1737, p. 1-92.
Mémoires pour servir à l ’ histoire de Port-Royal et à la vie de la révérende mère Marie-Angélique de Sainte-Magdeleine Arnauld, réformatrice de ce monastère, Utrecht, 1742, t. 1, p. 262-370.
Relation écrite par la Mère Angélique Arnauld, éd. L. Cognet, Paris, Grasset, “Les cahiers verts, 2”, 1949.
Jean Lesaulnier
1 Mémoires pour servir à l ’ Histoire de Port-Royal et à la Vie de la Révérende Mère Angélique de Sainte-Magdeleine Arnauld, Réformatrice de ce Monastère, Utrecht, aux dépens de la Compagnie, 1742, t. 1, p. 262-370.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-15009-1
- EAN : 9782406150091
- ISSN : 2491-2530
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-15009-1.p.0021
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 15/11/2023
- Langue : Français