Les transhumanistes aux prises avec des imaginaires contradictoires
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Éthique, politique, religions
2015 – 1, n° 6. Le Transhumanisme - Auteurs : Dorthe (Gabriel), Maestrutti (Marina)
- Pages : 67 à 88
- Revue : Éthique, politique, religions
Les transhumanistes
aux prises avec des imaginaires contradictoires
Le transhumanisme agite de nombreux débats médiatiques, philosophiques, scientifiques ou encore religieux. En France, des grandes écoles invitent certains de ses représentants à discuter leur pensée, dans une ambiance de curiosité mêlée parfois d’une certaine crainte1. La réception du transhumanisme le présente souvent comme un étrange mélange d’espoirs un peu fantasques d’améliorations techniques de l’humain d’une part, et, d’autre part, de projets actuellement élaborés dans le secret de laboratoires ou start-ups. Tant les enthousiastes que les inquiets se plaisent parfois à présenter le transhumanisme comme une révolution inéluctable ; tout en alertant sur ses risques sociaux, politiques, métaphysiques ou symboliques2. Le chirurgien-urologue et entrepreneur français Laurent Alexandre s’est par exemple fait le champion de ce cri ambigu, attirant l’attention sur les révolutions technologiques de la condition humaine à venir, tout en restant très vague sur la possibilité de la délibération éthique et politique : « L’analogie entre le tsunami et la révolution génomique n’est pas exagérée. Les deux phénomènes ont en commun la violence, le caractère implacable et radical
du renversement de l’ordre établi »3. Mais en quoi consiste précisément ce futur qu’il faudrait nous préparer d’urgence à accueillir ? Qu’est-ce que ce transhumanisme, considéré tant comme une idéologie compacte, comme un délire de fanatiques de science-fiction, que comme une pratique concrète d’entrepreneurs obsédés par leur liberté et leur longévité ?
Il nous semble que nombre de débats actuels, au demeurant bien légitimes et passionnants, manquent souvent d’adresser la question même du transhumanisme, le laissant flotter dans une indétermination : s’agit-il d’une réalité, de projets techniques concrets ou à venir, ou s’agit-il, comme la terminaison -isme le laisse suggérer, d’un mouvement d’idées dont nous pouvons examiner la cohérence interne autant que les pratiques des acteurs qui le portent ? Nous aimerions suggérer que l’acceptation implicite de cette indétermination revient parfois à endosser les prémisses mêmes du transhumanisme, souvent présenté par ses militants comme un mélange de solutions pratiques et de réponses existentielles. Avant toute chose, le transhumanisme est présenté par ses acteurs comme un mouvement d’idées, ou, selon Natasha Vita-More, présidente de l’association mondiale transhumaniste Humanity+, comme « une vision du monde, un projet philosophique4 ». Le transhumanisme est avant tout porté par des militants réunis en associations ou en groupes plus informels. Si certains d’entre eux peuvent être liés à des institutions académiques, la plupart en sont indépendants. Principalement localisé et organisé dans des associations ou groupes de réflexion, aux États-Unis5, en Angleterre6, en Italie7, en France8 ou ailleurs9, le transhumanisme se caractérise par sa pluralité et une
élaboration constante, dont les hésitations peuvent aller jusqu’au choix de revendiquer ou non la bannière du transhumanisme. Il se consacre au débat sur les raisons et les conséquences des progressions technologiques majeures annoncées par les nanotechnologies, les biotechnologies, l’informatique et les sciences cognitives (NBIC)10 dans une spéculation variée sur le futur de l’humain. Si une certaine vision positive des progressions technologiques, le désir d’améliorer les performances physiques et cognitives de l’humain, d’allonger sa longévité et l’attention à certains risques inhérents à ces évolutions rassemble la plupart des transhumanistes, le contenu et le sens précis des projets font l’objet de débats constants. De telles déclarations sont ainsi courantes parmi les militants :
Qu’est-ce que c’est pour moi le transhumanisme ? C’est le fait d’envisager et d’essayer de comprendre les progressions technologiques en en ayant globalement une opinion favorable ; en estimant que, en général, les progressions technologiques sont quelque chose de positif, à condition d’être bien gérées11.
Prendre le transhumanisme au sérieux pour en proposer une critique ne peut donc faire l’économie de la manière dont les transhumanistes eux-mêmes débattent de cette bonne gestion des progressions technologiques et leurs implications sur l’humain, la société, voire la planète. En le décrivant souvent comme à la fois un mouvement très puissant et le délire infantile de quelques illuminés, la réception critique du transhumanisme oscille entre sentiment de danger et dénonciation de fantasmes futiles et irréalistes. Nous partageons ainsi ce constat :
Alors que [le transhumanisme] n’est pas pour l’instant un très large mouvement social dans le grand public, il compte un bon nombre de membres très influents et passe souvent pour extrêmement scientifique dans les débats publics. La préoccupation des gens à propos de ce mouvement est ainsi disproportionnée, comparativement au nombre de ses adeptes ou à sa capacité à atteindre effectivement ses objectifs12.
Nous prenons cette critique au pied de la lettre, sans décider trop vite de quelle manière ces deux pôles hétérogènes peuvent cohabiter si bien. Nous faisons le pari qu’il y a, au sein même des mouvements transhumanistes, des lieux de contradiction expliquant cette oscillation. Nous analyserons deux lignes de désaccords internes à ces mouvements, afin d’en faire voir la diversité des attentes d’une part, et d’autre part d’ouvrir une discussion sur le rôle et la performativité de ce mouvement. Nous montrerons par là que les transhumanistes élaborent et sont mobilisés par un imaginaire sociotechnique multiple, fait d’interactions constantes entre émancipation et contrainte, utopie et dystopie, fantaisie et rationalisation. Ces composantes a priori hétérogènes produisent une tension relative entre les parcours individuels et les organisations collectives, évoluant au fil du temps dans des formes fragiles de promotion de futurs désirables fondées sur des perceptions variables du potentiel des progressions scientifiques et techniques d’une part, et, d’autre part, sur les fondements éthiques et politiques des sociétés contemporaines13.
L’amélioration morale :
un imaginaire contrasté de l’avenir de l’humanité
Les xxe et xxie siècles voient croître la tension entre les grandes promesses technoscientifiques et politico-économiques diffusées à grand renfort de médias, et un sentiment naissant de fragilité abordant ces promesses avec une réflexion sur la « fin du monde » qui n’est pas étrangère à la pensée transhumaniste. La fin du monde, ou plutôt le « risque existentiel », est le danger de mort qui surgit quand l’espoir de l’immortalité ou d’une longue vie est le plus fort ; elle représente la fin de la vie collective de l’humanité dans sa forme connue face aux utopies techniciennes d’une société d’abondance et de paix généralisées. Elle
signe la destruction de la planète causée par la démesure de l’espèce humaine, alors même que les nouvelles technologies promettent un impact de moins en moins important sur les écosystèmes. L’horizon est, encore et toujours, peuplé de menaces. En témoigne la persistance d’une littérature qu’on pourrait qualifier, probablement de manière trop générale, de catastrophiste, ou d’apocalyptique, rassemblant scientifiques, philosophes, historiens autour du thème de la fin probable du monde14.
La publication récente de l’essai d’Ingmar Persson et Julian Savulescu, Unfit for the Future, constitue un exemple significatif de l’imagination d’un futur en négatif ; un exercice de pensée aboutissant à des résultats exactement spéculaires à ceux résultant de l’optimisme proactif du transhumanisme des origines15. Persson et Savulescu, respectivement chercheur fellow et directeur du centre Uehiro à l’Université d’Oxford, défendent la nécessité d’une intervention sur la constitution psychologique de l’humain dans le sens d’une augmentation de la capacité morale (moral enhancement16) via l’utilisation de technologies encore à penser et de médicaments parfois déjà disponibles17 pour faire face aux défis « existentiels » qui attendent nos sociétés dans les années à venir. Cette argumentation marque une césure nette avec les prémisses du mouvement transhumaniste. Si ses militants ont généralement soutenu avec conviction la liberté et la nécessité de se modifier et de s’améliorer sans limites, sur les plans physiques et cognitifs (human enhancement), en tant qu’individus et en tant qu’espèce, la proposition du moral enhancement
semble fondée sur une vision pessimiste, allant jusqu’à envisager la possibilité de recourir à des formes de coercition politique. Selon James Hugues, sociologue américain et représentant du technoprogressisme, transhumanisme démocratique de gauche, une bonne partie des transhumanistes sont arrivés à la conclusion que le cyborg heureux des débuts du mouvement, libre et marqué par une morale utilitariste, doit faire place au cyborg vertueux18. Certaines propositions de la bioéthique transhumaniste européenne radicalisent cette nécessité, marquée d’une version négative de l’espérance.
Dès les origines des mouvements transhumanistes, et malgré l’hétérogénéité des influences et des courants, l’opposition – ou la conciliation – entre bien-être individuel et bien-être collectif (non seulement humain) est un problème central. Les inspirations libertariennes (libertaires) et anarcho-capitalistes ont eu une influence significative dans les moments initiaux du mouvement, en particulier dans le courant extropien animé par Max More et Natasha Vita-More. Au début des années 1990, les principes extropiens sont simples et clairement orientés : 1) expansion sans frontières ; 2) auto-transformation ; 3) optimisme dynamique ; 4) technologie intelligente et 5) ordre spontané19. La référence à l’ordre spontané renvoie à la pensée de Friedrich Von Hayek et d’Ayn Rand : un marché anarchique et autorégulé crée un ordre dynamique et libre, alors que l’État, avec son intervention autoritaire, conduit plutôt à une situation d’entropie. La détermination à dépasser les limites et les frontières des capacités humaines naturelles correspond aux espoirs de progrès sans limites de l’économie et s’accompagne d’un optimisme autorisant une attitude proactive confiante envers le progrès technoscientifique. Il s’agit donc de combattre l’entropie en activant à l’intérieur même de l’individu un processus vertueux autocentré. Dans cette posture d’intervention technologique active et autodéterminée, chaque extropien est responsable des conséquences de ses choix. L’expérimentation et l’auto-transformation comportent des risques, mais, la protection paternaliste de l’État étant inacceptable20, c’est aux
individus d’évaluer le rapport risques-bénéfices pour eux-mêmes et à décider en conséquences. À l’« impératif hédoniste21 » de pouvoir décider de la forme d’humanité et de perfectionnement par soi-même dans le but d’éliminer toute souffrance et d’atteindre le bonheur22, se substitue progressivement l’exigence d’un hédonisme plus « universel ». Comment prendre en compte les plaisirs et les souffrances de tous et de chacun sans sacrifier son propre bien pour le bien de tout le monde ? Comment élaborer une éthique du bien-être collectif dans le contexte utilitariste contemporain ? C’est aussi, depuis quelques années, une question fondamentale du transhumanisme.
Le débat sur le moral enhancement, animé sur des sites internet et dans des revues spécialisées en bioéthique et éthique appliquée, se fonde sur le constat exprimé par le titre de l’ouvrage de Persson et Savulescu : les sociétés actuelles sont inadaptées au futur. L’avancement rapide du progrès technoscientifique et l’augmentation exponentielle de la population ont radicalisé les situations de crise et permis la prolifération des risques23. Les systèmes politiques et économiques, en particulier les démocraties libérales occidentales, ne se sont pas révélés à la hauteur de la situation ; l’industrialisation et la mécanisation ont épuisé les ressources disponibles. Selon ces auteurs, la situation est d’autant plus critique que l’évolution biologique n’a pas encore fourni à l’humanité les capacités morales nécessaires pour assumer les responsabilités si lourdes d’un tel avenir menaçant. Preuve en est que la théorie du célèbre écologue américain Garrett Hardin, exposée en 1968 sous le nom de « tragédie des biens communs24 », n’a rien perdu de son actualité. Selon Hardin, repris par Persson et Savulescu, les ressources communes laissées à la libre initiative individuelle – sans intervention de l’État ou de la propriété privée – sont destinées à être dissipées. Cette « tragédie des commons » ne peut pas être résolue par des moyens techniques, mais nécessite un
changement de perspectives morales, et implique la coercition pour imposer un comportement responsable envers la planète (notamment par la politique démographique et le contrôle des naissances). Renoncer à la liberté, de manière volontaire ou imposée, est la seule garantie de pouvoir faire face à la situation. En 2012, Persson et Savulescu constatent que les démocraties occidentales n’ont rien pu changer à la tragédie des commons et qu’approche la fin de l’histoire dans le sens d’une catastrophe finale. À la crise environnementale s’ajoute la recrudescence des conflits généralisés, effets de l’échec du projet moderne d’une vie commune pacifique. L’épuisement des ressources et l’émergence des radicalismes religieux ne laissent pas espérer de formes de recomposition.
Pour les auteurs, les solutions sont à chercher dans l’augmentation de la motivation morale des humains à se préoccuper du futur et de ceux qui ne leur sont pas proches dans le temps, dans l’espace ou dans la forme (autres espèces). L’éducation a certes un rôle fondamental à jouer, mais les connaissances biomédicales permettent d’envisager un bioenhancement moral à travers des moyens biotechnologiques et pharmacologiques. Il ne suffit pas en effet d’augmenter la pensée rationnelle, si chère aux transhumanistes (voir seconde partie ci-dessous) : des motivations morales sont nécessaires pour faire ce qu’on sait être rationnel. Il n’est pas suffisant non plus d’augmenter et transmettre des nouvelles connaissances : le processus est trop lent par rapport au développement technologique. Il faut au contraire augmenter l’héritage biologique de l’évolution : le sens de la justice et de l’altruisme, comme le démontrent les études récentes sur l’empathie animale de l’éthologie contemporaine25. Même si le moral enhancement est l’objet de vives critiques, y compris de la part de ceux qui sont favorables à une amélioration humaine26, le monde contemporain est à tel point caractérisé par l’égoïsme individualiste et la radicalisation des inégalités sociales et économiques que Parsson et Savulescu concluent, reprenant Hardin, que la seule
solution est d’« inculquer » de manière généralisée les normes éthiques qui permettraient le bien collectif. En plus de la coercition, il faudra adopter des formes de surveillance et de contrôle des citoyens, au prix de remettre en question des droits acquis tels que la vie privée ou le droit à divulguer des découvertes scientifiques potentiellement dangereuses. Pour Persson et Savulescu l’instauration d’un règne de la morale fondé sur une « science-sophy », pourrait permettre de corriger les perversions du système actuel : permettre, par exemple, une recherche scientifique intensifiée au développement contrôlé. On pourrait donc intensifier les recherches sur l’amélioration de la nature, humaine en particulier, et soutenir la réalisation pratique d’innovations dans des domaines non dangereux ou non soutenables. Les recherches dans le domaine militaire ou sur l’immortalité seraient donc rayées de la carte des priorités. Cette « science-sophy », sagesse scientifique, préconise donc la renonciation à l’un des buts centraux du transhumanisme, l’immortalité, à la faveur d’un sens plus haut de l’altruisme et de la justice. Les conclusions des deux auteurs ne sont pas pour autant très optimistes. Si l’on peut prévoir les conséquences néfastes de nos comportements actuels, on ne peut pas être sûrs que l’amélioration morale garantira le salut.
Le célèbre astronome Martin Rees, souvent cité par Persson et Savulescu, considère que nous sommes « à notre dernière heure », ou à notre dernier siècle : le xxie siècle sera crucial à cause de notre agressivité et de notre manque de responsabilité envers nos semblables et notre planète27. Le tournant moralisant des transhumanistes serait-il un exemple de « panique morale » dont parle le philosophe Ruwen Ogien28 ? L’anticipation optimiste d’un humain amélioré car émancipé laisse la place à une ingénierie sociale concevant les anthropotechniques29 comme des outils essentiellement autoritaires. La revendication de la liberté et de l’autodétermination de l’individu, la critique de tout paternalisme moral dans l’application des technologies de enhancement, la tentative de concilier démocratie et techno-utopie sur la base d’un optimisme proactif, cèdent la place à une vision pessimiste faisant coïncider des nouvelles formes d’amélioration avec des nouvelles exigences de coercition. Ou s’agit-il d’une expérience de pensée, imaginant une société
et des technologies futures capables de résoudre des questions actuelles ? Dans ce sens, la bioéthique transhumaniste d’Oxford ouvre au moins autant d’incertitudes qu’elle ne prétend en éliminer. L’enhancement moral est une réponse technique à un problème qui n’est pas que technique et implique l’utilisation de technologies qui, encore une fois, posent un problème de responsabilité quant aux conséquences de leurs usages. L’utilisation des techniques d’amélioration morale non seulement ne peut pas assurer que certains ne puissent plus nuire à d’autres, mais ouvre la question fondamentale du rôle de la politique et de sa possibilité d’imaginer un futur. Dans la proposition oxfordienne, cette morale de la « dernière heure », semble vouloir imposer une vision conformiste, prétendument « naturelle », sans aucune tentative de penser des modèles alternatifs ; sans inventivité éthique ou sociale quant à l’articulation de l’être, du faire et du vivre ensemble dans la transhumanité ou le posthumain. Le cyborg vertueux semble adopter une éthique fonctionnelle aux exigences du système : abandonnant la possibilité de changer le monde (sinon vers le pire, en le détruisant), il s’agit de renoncer aux valeurs des démocraties libérales et d’en assumer des issues autoritaires, que des aides pharmacologiques ou la génétique rendront plus tolérables. Si les pionniers du mouvement transhumaniste valorisaient la liberté au détriment de l’égalité, la proposition de Parsson et Savulescu fait primer la sécurité sur la liberté. La politique cède le pas à la morale ; la recherche de techniques sociales adaptées à la gestion d’intérêts et de valeurs contradictoires (le droit dans son évolution, la gouvernance des décisions publiques, une bioéthique à la hauteur des questions actuelles) se résout au modèle unique offert par la volonté uniforme du moral enhancement30.
Les militants transhumanistes
entre fantaisie et prudence
La dynamique des débats bioéthiques universitaires examinés ci-dessus, même clairement orientés transhumanistes, peut avant tout être rapportée à la dynamique des carrières universitaires. Des entretiens de
terrain nous ont plusieurs fois laissé entendre que les auteurs d’Oxford, à l’inverse des militants transhumanistes organisés en associations dont il sera question ci-dessous, ne font pas grand cas de leur réception. Sachant que leurs thèses seront amplement reprises et discutées, même et surtout pour les critiquer sévèrement, ils feignent souvent la surprise face aux réaction que suscitent ce qu’ils considèrent comme des provocations ou des expériences de pensée ; avançant un esprit de jeu intellectuel mâtiné d’un solide sens de l’ironie bien anglais. Largement financés par des dons privés, créant parfois leurs propres revues, ils n’inspirent que rarement la pensée des militants ; sauf peut-être à l’occasion de colloques tels que Transvision 2014 organisé à Paris en novembre 2014, où leur présence est parfois justifiée comme caution intellectuelle à des réflexions élaborées largement en dehors du contexte académique31.
La plupart des fondateurs et les figures centrales du mouvement transhumaniste ne sont ni scientifiques ni ingénieurs. Souvent issus de formations en sciences humaines, avec une mention particulière pour la philosophie (les fondateurs de la World Transhumanist Association Nick Bostrom et David Pearce), la sociologie ou le droit (le belge Didier Cœurnelle). Si certains d’entre eux ont poursuivi dans des voies académiques (James Hugues, Hartford Trinity College ou l’Italien Riccardo Campa, professeur de sociologie à l’université de Cracovie p. ex.), la plupart occupent des postes de fonctionnaires ou d’employés dans des secteurs très divers, parfois liés aux technologies d’information et de communication (l’anglais David Wood a été l’un des pionniers du secteur des smartphones) ; alors que d’autres sont artistes (le français Olivier Goulet) ou indépendants (le français Olivier Nérot). N’étant pas intégrés dans le monde universitaire, ils n’ont ainsi que peu d’accès aux revues internationales ou aux colloques scientifiques. Ces quelques exemples montrent la grande hétérogénéité des parcours des militants transhumanistes porteurs du mouvement. En vérité peu nombreux et dotés de moyens financiers limités, réunis en associations ou divers groupes plus informels, ils considèrent que l’humanité n’est pas parvenue au terme de son évolution et militent pour l’accès aux connaissances et l’usage libre et facilité des innovations scientifiques et techniques susceptibles de la
transformer en profondeur. Ils tentent de développer une pratique de lobbying auprès des décideurs politiques et économiques, encourageant les recherches et législations favorables à une évolution technologique de l’humain. Ce qui compte pour les militants transhumanistes, c’est donc le travail des idées et l’exercice du débat. Dans cette seconde partie, nous examinerons la manière dont ces militants configurent et promeuvent leur imaginaire d’amélioration technologique de l’humain ; et comment ils discutent de ses conséquences sociales et politiques. Nous verrons qu’ils accordent une importance croissante à la respectabilité de leurs positions, multipliant les efforts pour être considérés comme des interlocuteurs légitimes par les pouvoirs politiques ou les médias. Après avoir examiné une tension parcourant les imaginaires transhumanistes entre émancipation et contrainte, permise ou imposée par les progressions technologiques, nous examinons ici une autre tension, relative aux formes que prend le militantisme transhumaniste : la revendication variable d’imaginaires audacieux, provocateurs et radicaux quant au futur de l’humain.
En 2007, Giulio Prisco publie sur son blog un texte dont on nous pardonnera de ne pas traduire le titre, Transhumanism, young whores and old bigots32. Tant la personnalité de l’auteur que le parcours du texte sont significatifs pour les questions qui nous occupent ici. Republié à l’automne 2014 par le très actif blog transhumanity.net, dont les éditeurs précisent que, malgré son ancienneté, il est « encore valable aujourd’hui, peut-être plus encore33 », il émane de l’une des principales figures du transhumanisme européen. Prisco a entre autres été membre de la direction de Humanity+ de 2002 à 2008. Il est donc particulièrement bien positionné pour observer l’évolution des mouvements transhumanistes. Son texte se présente comme un cri d’alarme face à un processus de transformation touchant certaines parties de la constellation transhumaniste, passées d’une fraîche impertinence adolescente au pâle ennui de l’âge avancé ; les épreuves successives les ayant amenées à se montrer bien trop raisonnables au regard de leurs vigoureux espoirs fondateurs. Il pointe ainsi une tension traversant tout le mouvement transhumaniste, entre
les inspirations radicales issues d’un imaginaire des possibles débridés de la science-fiction, et la volonté du mouvement de s’établir en interlocuteur respectable, influençant les décisions scientifiques, politiques et sociétales. Selon sa métaphore, l’adolescent tumultueux a besoin de passer un costume s’il souhaite être pris au sérieux.
Le vêtement formel revêtu par les organisations transhumanistes se décline en deux aspects. D’abord leur nom. Trois exemples significatifs peuvent être signalés à cet égard. En premier lieu celui cité par Prisco lui-même. L’Institute for Ethics and Emerging Technologies (IEET) qu’il a contribué à fonder en 2004, dirigé par James Hugues, est une tentative assumée d’établir un think tank évitant d’utiliser le « T label ». En recherche de respectabilité, le transhumanisme s’ouvre à la pensée d’autres horizons, notamment de la gauche traditionnelle sous la bannière du technoprogressisme, dans le but de « devenir de plus en plus accepté dans la politique mainstream34 ». Aujourd’hui l’un des lieux principaux de l’élaboration du transhumanisme sur le plan mondial, l’IEET semble même plus actif que l’historique World Transhumanist Association, association américaine fondée en 1998 et aujourd’hui dirigée par Natasha Vita-More, qui a elle aussi fait le choix d’un nom moins polémique en 2008 pour devenir Humanity+. Le troisième exemple à mentionner est celui de l’Association Française Transhumaniste : Technoprog (AFT). Nos entretiens de terrain montrent que la question de l’usage et de la réception du « T label », ou, comme ils le disent plus souvent, du « T word », les préoccupe beaucoup. Avec son nom en deux parties, les dirigeants de l’association ont la possibilité de varier la dénomination en fonction de leurs préférences personnelles, des contextes ou des personnes à qui ils s’adressent, utilisant alternativement le nom complet, AFT ou Technoprog. Ils semblent s’accorder sur la nécessité de conserver les deux dénominations, même si elles ne recouvrent pas le même sens et ne signalent pas les mêmes objectifs : en tant que transhumanistes, ils prennent part à un mouvement bénéficiant d’une visibilité médiatique croissante, alors que c’est plus en tant que technoprogressistes qu’ils tentent de se bâtir un rôle dans les débats politiques et sociétaux français relatifs aux conséquences des progressions technologiques. Une telle pratique profondément ambiguë montre bien l’hésitation des militants et
l’oscillation de leur imaginaire sociotechnique. Giulio Prisco lui-même admet être travaillé par cette contradiction, mais cherche à la maintenir en tant que telle. Il appelle à une cohabitation entre transhumanisme et technoprogressisme plutôt qu’à une réduction du premier au second :
Je vois le technoprogressisme et le transhumanisme comme deux sphères de pensée complémentaires, qui se chevauchent peu, et les deux sont des éléments essentiels de ma vision du monde. Le technoprogressisme porte sur la façon dont les progrès techniques peuvent et devraient améliorer la vie du plus grand nombre de personnes possible, ici et maintenant. Le transhumanisme, c’est laisser libre cours à son imagination et être impatient [looking forward] de progrès techniques qui peuvent, et devraient, améliorer la vie du plus grand nombre possible de personnes de manières beaucoup plus radicales, demain et peut-être ailleurs [que sur Terre]35.
L’imaginaire transhumaniste est généralement nourri par des lectures de science-fiction dès l’adolescence. Giulio Prisco n’en fait pas mystère : « Nous, ou au moins la plupart d’entre nous, sommes passionnés de science-fiction [sci-fi nerds]36. » Ou cet autre militant rencontré : « Comme beaucoup de gens qui sont intéressés par les progressions technologiques, je m’intéresse à ce qui est science-fiction, et particulièrement à tout ce qui est utopies, dystopies37. » Mais cet imaginaire riche, débridé et rarement soucieux d’acceptabilité sociale, n’est que rarement mobilisé dans l’argumentation transhumaniste. Tout se passe comme si la science-fiction, qui a directement conduit certains à s’intéresser au transhumanisme dont ils n’auraient pas entendu parler autrement, n’avait pas sa place dans l’argumentaire transhumaniste. À l’inverse, le dépassement de la science-fiction est régulièrement mobilisé pour souligner l’urgence d’un débat rationnel ; comme en témoigne la multiplication d’annonces du type « ce n’est plus de la science-fiction, mais cela est devenu bien réel ». Les images de prothèses ou les démonstrations d’interfaces homme-machine sont souvent enveloppées dans de tels arguments, soutenant la volonté des militants de se positionner en éclaireurs des mutations de la condition humaine. « Nous faisons partie des gens qui sont très tôt informés de tout ce qui a l’air de ressembler à une nouveauté technologique. On fait
partie des acteurs de la vigilance par rapport à tout ça38. » La science-fiction, traitée ainsi comme un tout homogène, réservoir de visions et de désirs, se fait intéressante pour les militants à partir du moment où des accélérations technologiques viennent percer la réalité et soutenir leur réflexion sur le futur de l’humain. Si ces réalisations ou promesses scientifiques et techniques « relevant du transhumanisme39 » peuvent stimuler le désir et l’imagination des transhumanistes, c’est sous la forme d’un débat qu’ils souhaitent le plus rationnel possible qu’ils se proposent d’en examiner les impacts.
Au regard de la projection dans un futur fait de transformations radicales de l’humain et de la société qu’est le transhumanisme, cette volonté de rationalisation peut sembler étrange. Elle n’est pour ainsi dire jamais relayée par les médias, pourtant engagés dans une couverture massive du sujet depuis plusieurs années. Les militants transhumanistes craignent les médias autant qu’ils multiplient leurs efforts pour attirer leur attention. L’AFT, par exemple, est très souvent sollicitée. Si les dirigeants de l’association se rendent généralement disponibles pour des interviews, cela ne va pas sans des débats parfois nourris sur la pertinence et les risques d’apparaître dans tel ou tel média ; ainsi que sur la possibilité d’y exposer leur positionnement et d’y critiquer certains espoirs qu’ils ne partagent pas. En témoigne cette réaction à une demande d’interview :
Connaissant la chaîne [de télévision] – à mon avis très commerciale –, je ne serais pas étonné que ce qui les intéresse est à la fois le côté racoleur du sujet et à la fois les perspectives commerciales qui sont derrière. En venant vers nous, je ne serais pas étonné non plus qu’ils espèrent que nous allions à fond dans un sens favorable au développement de ces produits. Il se peut qu’ils soient déçus de notre critique et que, du coup, ils ne retiennent pas nos propos, voire qu’ils cherchent à les déformer. Qu’à cela ne tienne. Je pense qu’il faut essayer de faire passer notre message, lequel – je pense – doit être bâti sur une analyse critique rationnelle40.
Alors qu’ils sont régulièrement accusés par la critique et les médias de sectarisme ou de nourrir des espoirs démesurés quant aux bienfaits du
progrès technique, les militants transhumanistes sont très attentifs à donner tous les signes de sérieux de leur activité et de leurs idées. Le débat qu’ils souhaitent le plus large possible est aussi nourri en interne que face à leurs critiques même les plus virulents :
Dans le contexte de l’engouement actuel pour le thème du cyborg – que ce dernier soit considéré positivement ou négativement d’ailleurs, je pense que les transhumanistes doivent éviter de tomber dans le sensationnalisme ou l’enthousiasme béat et au contraire aider à la réflexion sur les conséquences de ce qui est réellement faisable41.
Mais le débat souhaité par les transhumanistes semble également placé sous la crainte constante des peurs que leurs adversaires comme eux-mêmes pourraient encourager ; au risque de disqualifier d’emblée toute opposition en la considérant comme une peur irrationnelle. Alors que pour certains l’exemple et le sens de l’histoire suffiront à montrer la voie, de nombreux transhumanistes cherchent à convaincre, patiemment, progressivement, du bien-fondé de leurs espoirs et de leurs valeurs. Se considérant comme des avant-gardes explorant l’éthique et les représentations du futur, les transhumanistes sont particulièrement inquiets d’éventuelles résistances trop farouches qu’un transhumanisme impatient et décomplexé pourrait provoquer. Le danger d’opposants radicaux violents est régulièrement cité, à l’image de Theodore Kaczynski, connu sous le nom d’Unabomber, ancien professeur de mathématiques américain, plus célèbre pour être l’auteur de plusieurs attentats à la bombe ciblant des symboles de la société technologique que d’un manifeste régulièrement réédité42. Structurant le débat sur les enjeux et les conséquences des transformations technologiques de l’humain en examen rationnel confiant d’une part, et, d’autre part, en peurs irrationnelles potentiellement dangereuses, les militants transhumanistes opèrent un travail constant de tri des arguments légitimes et illégitimes. Au risque de disqualifier d’emblée toute tentative – en leur faveur ou en leur défaveur – de débrider un imaginaire dont la prudence semble devenue la règle.
Appelant à l’examen des conséquences éthiques, sociales et politiques des progressions technologiques annonçant des bouleversements profonds de la condition humaine, désirant une délibération la plus large possible, les transhumanistes placent en même temps cette discussion sous le signe d’une urgence : celle de la préparation à un futur largement prédéterminé, qu’il soit catastrophique ou marqué par une émancipation pacifique et équilibrée. L’activité des mouvements transhumanistes et les positionnements et convictions de leurs militants oscillent ainsi entre des imaginaires visionnaires sur le futur de l’humanité teintés de science-fiction et animés d’un désir de dépassement de toute limite humaine d’un côté, et de l’autre un processus de réflexivité à la recherche constante d’argumentations rationnelles justifiant l’optimisme proactif envers un progrès technologique raisonné. La manière dont les transhumanistes cherchent à se positionner sur l’échiquier du débat et du lobbying contemporains est tributaire de leur réception sociale et donc médiatique. Jouant sur des effets d’annonces fracassants, partagés entre dénonciation, crainte et sensationnalisme, les médias contribuent largement à diffuser la pensée transhumaniste. De leur côté, certains acteurs aux profils multiples jouent un rôle ambigu de promotion et en même temps de critique des espoirs liés aux technologies émergentes43. Selon les contextes, il faut stimuler l’audace de l’investissement dans l’innovation, mettre en garde contre les espoirs démesurés et infondés, valoriser la démarche scientifique progressive tout en gardant la possibilité de rêver à des lendemains radicalement nouveaux.
Conclusion
Les réponses apportées par les transhumanistes ne sont pas uniques, et leurs visions sont plurielles. Le congrès international Transvision 2014 : Le transhumanisme face à la question sociale, co-organisé par l’AFT à Paris en novembre 2014, a donné l’occasion d’observer un transhumanisme « en
train de se faire » ; tant dans l’élaboration de ses questionnements que dans la construction d’une image à donner et à se donner44. Revendiquant l’esprit des Lumières comme importante source d’inspiration, les intervenants issus des organisations transhumanistes ont constamment fait appel à l’aspect rationnel des espoirs d’émancipation morale et physique de l’humain via les technologies à venir. Ceci implique de s’interroger sur les « questions sociales » : l’inégalité, la responsabilité individuelle et collective, ou le rôle du politique dans la gouvernance de l’innovation technologique. La posture libertarienne des débuts du transhumanisme étant désormais distanciée, la question du quoi faire se conjugue avec celle du comment l’imaginer et le rendre acceptable et opérant. Une Déclaration technoprogressiste a été rédigée et publiée à l’occasion de cette conférence. Elle débute de la manière suivante :
Le monde est de manière inacceptable inégalitaire et dangereux. Les technologies émergentes pourraient le rendre largement meilleur, ou bien pire. Malheureusement, trop peu de gens comprennent aujourd’hui la dimension des menaces ou des bienfaits auxquels l’humanité doit faire face. Il est temps pour les technoprogressistes, les transhumanistes et les prospectivistes de renforcer leur engagement politique afin de tenter d’influer sur le cours des événements45.
L’hésitation constante quant à la forme et au contenu du message élaboré et diffusé par les transhumanistes montre que leur imaginaire sociotechnique n’est jamais stabilisé. Si les débats sur les conséquences sont nourris, les effets sociaux et politiques des technologies émergentes largement discutés, l’imminence de révolutions scientifiques et technologiques n’est elle-même que rarement mise en question. Si l’innovation technoscientifique pose constamment aussi la question de l’innovation politique, sociale et morale, ces dernières sont maintenues sous pression par la première. En appelant à la discussion des conséquences futures, le débat sur le transhumanisme comprime le présent de la délibération, le réduisant trop souvent à un affrontement entre deux composantes :
espoirs rationnels et craintes irrationnelles. Les imaginaires sociotechniques transhumanistes mériteraient ainsi d’être « compliqués » sur le plan de la deuxième composante, comme ils le sont abondamment en ce qui concerne la première.
Gabriel Dorthe
Université de Lausanne,
Institut de géographie et durabilité,
Université Paris I – Panthéon-Sorbonne, Cetcopra ;
Harvard STS Program
Marina Maestrutti
Université Paris I – Panthéon-Sorbonne, Cetcopra
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1 Par exemple en France : « Les enjeux de l’innovation-responsable face au transhumanisme », Matins de l’innovation, ESSEC ISIS, 18-02-2014, avec notamment Didier Cœurnelle de l’Association Française Transhumaniste : www.isis.essec.edu/about-us/Matins-de-lInnovation/18-fevrier-2014 (consulté le 19-03-2015). Ou la conférence sur le transhumanisme organisée à l’École polytechnique (Paris) par le groupe X-Recherche, 31-01-2013, avec Laurent Alexandre, Rémi Sussan et Olivier Nérot représentant l’Association Française Transhumaniste : https://x-recherche.polytechnique.org/post/Conférence-sur-le-transhumanisme-jeudi-31-janvier-2013-à-18h30-en-amphithéâtre-Becquerel (consulté le 19-03-2015).
2 Voir par exemple J.-M. Besnier, Demain les posthumains. Le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Paris, Hachette, 2009 ; J.-P. Dupuy, « Quand les technologies convergeront », Revue du MAUSS, no 23, 2004, p. 408-417 ; D. Bourg, A. Papaux, « Des limites du principe de précaution : OGM, transhumanisme et détermination collective des fins », Économie publique, Revue de l’Institut d’Économie Publique, no 21, 2007, p. 95-123.
3 L. Alexandre, La mort de la mort, Comment la technomédecine va bouleverser l’humanité, Paris, Lattès, 2011, p. 15.
4 N. Vita-More, « En France, on est effrayé par le transhumanisme », interview par F. Benoit, Usbek & Rica, 05-12-2014, en ligne.
5 Par exemple la principale association, Humanity+ : www.humanityplus.org (consultation 19-03-2015) ; ou The Future Society at the Harvard Kennedy School : www.thefuturesociety.org
(consultation 19-03-2015) ; ou encore Stanford Transhumanist Association :
www.facebook.com/groups/stanfordtranshumanists (consultation 19-03-2015).
6 Par exemple London Futurists : www.londonfuturists.com (consultation 19-03-2015) ou Transhumanist Party UK : www.transhumanistparty.org.uk (consultation 19-03-2015).
7 Associazione Italiana Transumanisti : www.transumanisti.it (consultation 19-03-2015) et Network dei Transumanisti Italiani : www.transumanisti.org (consultation 19-03-2015).
8 Association Française Transhumaniste : Technoprog : www.transhumanistes.com (consultation 19-03-2015).
9 Voir la liste des chapters de Humanity+ : www.humanityplus.org/get-involved-2/chapters-of-humanity (consultation 19-03-2015).
10 M. C. Roco, W.-S. Bainbridge (dir.), Converging Technologies for Improving Human Performance. Nanotechnology, Biotechnology, Information Technology and Cognitive Science, Arlington, National Science Foundation, 2002.
11 Didier Cœurnelle, dans R. Sussan, À quoi peut servir le transhumanisme ? Conférence en ligne organisée par l’Association française transhumaniste : Technoprog, 11-11-2013, 00:57:00, en ligne.
12 J. H. Evans, « Faith in science in global perspective : Implications for transhumanism », Public Understanding of Science, vol. 23, no 7, 2014, p. 815. Nous traduisons : « Moreover, while [transhumanism] is not a very large social movement in the general public as of yet, it has a good number of highly influential members and often stands in for scientific extremism in public debates. Thus, people are disproportionately concerned about the movement compared to its actual following or its ability to actually meet its goals. »
13 S. Jasanoff, S.-H. Kim, Dreamscapes of Modernity. Sociotechnical Imaginaries and the Fabrication of Power, University of Chicago Press, 2015 (à paraître).
14 Voir à ce propos, parmi d’autres : A. Weisman, Homo disparitus, Paris, Flammarion, 2007 ; N. Bostrom, « Existential Risks. Analyzing Human Extinction Scenarios and Related Hazards », Journal of Evolution and Technology, vol. 9, no 1, 2002, en ligne. ; J. Leslie, The End of the World: The Science and Ethics of Human Extinction, Londres, Routledge, 1996 ; M. Rees, Notre dernier siècle ?, Paris, Lattès, 2004 ;J. Diamond, Effondrement : comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, Paris, Gallimard, 2006.
15 I. Persson, J. Savulescu, Unfit for the Future. The Need for Moral Enhancement, Oxford, Oxford University Press, 2012.
16 Nous choisissons de conserver dans sa version originale le concept d’enhancement, difficile à traduire en français sans induire des biais interprétatifs. Son sens est en effet à la fois qualitatif et quantitatif, désignant l’amélioration comme l’augmentation selon les contextes d’application.
17 Les exemples cités concernent surtout l’utilisation de l’ocytocine, connue comme l’« hormone de l’amour » dont l’administration régulière pourrait apporter des bénéfices dans un certain nombre d’indications cliniques (autisme, phobies sociales), mais aussi intervenir dans des comportements divers comme renforcer la monogamie, le bien-être et la confiance en soi, le lien social, baisser le stress et l’utilisation d’antidépresseurs afin de diminuer l’expression des comportements agressifs.
18 J. Hugues, « After Happiness, Cyborg Virtue », Free inquiry, vol. 32, no 1, 2011.
19 M. More, The Extropian Principles 2.5, 1991, en ligne.
20 Une version ultérieure des principes extropiens montre des apports théoriques différents. On y trouve en particulier le principe de l’open society (société ouverte) proposé par Karl Popper, qui introduit les notions de décentralisation du pouvoir et des responsabilités, ainsi que du pluralisme des positions au sein d’une société démocratique. M. More, The Principles of Extropy: Version 3.11, 2003.
21 D. Pearce, The Hedonistic Imperative, 1995, en ligne.
22 J. Hugues, « After Happiness, Cyborg Virtue », op. cit.
23 Position également défendue par de nombreux penseurs écologistes opposés aux progressions technologiques débridées. Voir par exemple, pour une discussion de la pertinence du concept de risque pour penser l’époque actuelle, D. Bourg, « Dommages transcendantaux », in D. Bourg, P.-B. Joly, A. Kaufmann (dir.), Du risque à la menace. Penser la catastrophe, Paris, PUF (Colloque de Cerisy), 2013, p. 109-126.
24 G. J. Hardin, « The tragedy of the commons », Science, vol. 162, no 3859, 1968, p. 1243-1248.
25 F. De Waal, L’âge de l’empathie : Leçons de nature pour une société plus apaisée, Paris, Les Liens qui Libèrent, 2010. Sur la morale naturelle voir aussi : P. Singer, The Expanding Circle. Ethics and Sociobiology, Oxford, Clarendon Press, 1981 ; et Une gauche darwinienne. Évolution, coopération et politique, Paris, Cassini, 2002.
26 De dures critiques ont été formulées par la bioéthique proche des principes transhumanistes, en particulier par John Harris et Élisabeth Fenton, pourtant favorables au human enhancement. Voir sur le débat en cours : J. Harris, « Moral Enhancement and Freedom », Bioethics, vol. 25, no 2, 2011, p. 102-111 ; E. Fenton, « The Perils of Failing to Enhance : a Response to Persson and Savulescu », Journal of Medical Ethics, no 3, 2010, p. 148-151.
27 M. Rees, Notre dernier siècle ?, op. cit.
28 R. Ogien, La panique morale, Paris, Grasset, 2004.
29 Les technologies d’intervention sur l’humain. Voir notamment J. Goffette, Naissance de l’anthropotechnie. De la médecine au modelage de l’humain, Paris, Vrin, 2006.
30 Voir également G. Dorthe, J. A. R. Roduit, « Modifier l’espèce humaine ou l’environnement ? Les transhumanistes face à la crise écologique », Bioethica Forum, vol. 7, no 3, 2014, p. 79-86.
31 Transvision 2014 : Le transhumanisme face à la question sociale, colloque organisé par L’Association Française Transhumaniste : Technoprog, le Groupe Traces et l’association fiXience, Paris, 20 au 22-11-2014 : www.transvision2014.org (consultation 19-03-2015).
32 G. Prisco, « Transhumanism, young whores and old bigots », Giulio Prisco, 24-02-2007, en ligne.
33 G. Prisco, « Transhumanism, Young W#$%@ and Old Bigots », transhumanity.net, 20-10-2014, en ligne. Nous traduisons.
34 G. Prisco, « Transhumanism, young whores and old bigots », op. cit. Nous traduisons.
35 G. Prisco, « Transhumanism, young whores and old bigots », op. cit. Nous traduisons. Étonnamment, ce passage a été supprimé de la réédition du texte sur le site transhumanity.net.
36 Idem. L’auteur souligne.
37 Entretien de terrain, membre dirigeant de l’AFT, homme, fonctionnaire, Skype, 21-04-2014.
38 Entretien de terrain, membre dirigeant de l’AFT, homme, enseignant, Skype, 19-03-2014.
39 Idem.
40 Email interne au Conseil d’Administration de l’AFT, 11-09-2014, cité avec l’accord de son auteur.
41 Email de Marc Roux, Président de l’AFT, à la mailing list publique de l’AFT, 9.12.2014, https://fr.groups.yahoo.com/neo/groups/transhumanistes/conversations/messages/2958 (consultation 19-03-2015).
42 T. Kaczynski, L’effondrement du système technologique, Vevey, Xenia éditions, 2011.
43 Laurent Alexandre est un exemple français significatif de ce type d’acteurs. Voir notamment son livre La mort de la mort, op. cit. Ou sa conférence Le recul de la mort – l’immortalité à brève échéance ? TEDx Paris, 2012, en ligne.
44 Dès le début de son organisation à l’initiative de l’AFT, ce colloque prévoyait de donner la parole aux critiques du transhumanisme comme à ses promoteurs. Nous avons tous les deux été invités à y présenter une communication.
45 La Déclaration Technoprogressiste, version française, novembre 2014 : www.transhumanistes.com
/archives/2210. Liste des signataires internationaux : www.ieet.org/index.php/IEET/more/tpdec2014 (consultation 20-03-2015).
- Thème CLIL : 3133 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie contemporaine
- ISBN : 978-2-8124-4840-9
- EAN : 9782812448409
- ISSN : 2271-7234
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4840-9.p.0067
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 18/09/2015
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : transhumanisme, méliorisme moral, imaginaires sociotechniques, science-fiction, technologies émergentes.