Aller au contenu

Classiques Garnier

Les différentes formes d’ancrage de l’agriculture Exemples en Auvergne-Rhône-Alpes

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Systèmes alimentaires / Food Systems
    2017, n° 2
    . varia
  • Auteur : Rieutort (Laurent)
  • Résumé : L’article analyse les divers modèles de développement agricole de la région Auvergne-Rhône-Alpes et les différentes formes d’ancrage territorial. Cet exercice permet d’identifier six logiques contrastées (valeur patrimoniale, agriculture conventionnelle, différenciation des produits, agriculture de proximité, agro-écologie et système agri-rural). Ces modèles sont complémentaires dans l’espace et sont confrontés à des défis communs. L’intérêt de la coexistence de modèles est enfin discuté.
  • Pages : 81 à 101
  • Revue : Systèmes alimentaires
  • Thème CLIL : 3306 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie de la mondialisation et du développement
  • EAN : 9782406071969
  • ISBN : 978-2-406-07196-9
  • ISSN : 2555-0411
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-07196-9.p.0081
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 17/11/2017
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Modèle de développement, système agricole, ancrage territorial, France
81

Les différentes formes dancrage
de lagriculture

Exemples en Auvergne-Rhône-Alpes

Laurent Rieutort

Université Clermont-Auvergne, UMR Territoires

Depuis une vingtaine dannées, un important courant de la littérature en sciences sociales sest développé autour de la notion de territorialisation ou dancrage des systèmes agricoles et agroalimentaires (Zimmermann, 2005). Ces processus qui recouvrent des initiatives et des organisations très variées sont souvent perçus comme pouvant offrir une alternative au modèle agroalimentaire dominant, concentré, financiarisé et globalisé (Rastoin et Ghersi, 2010). Ces démarches de reterritorialisation ont comme finalité commune le renforcement du lien entre les consommateurs et les lieux de production et/ou de transformation, les modes de production et les producteurs eux-mêmes. Pour autant, les formes de cet ancrage se révèlent extrêmement diverses dans lespace et plus ou moins abouties. Elles supposent la présence dacteurs clés ayant la capacité à engager une dynamique collective1 et doivent senvisager à la fois dans leur dimension verticale liant les entreprises (exploitations, firmes agroalimentaires) à leurs espaces et marchés (avec leurs modalités de création de valeur) et dans leur dimension horizontale, les insérant dans un méta-système 82territorial2 produit par les actions ou pratiques et jeux de pouvoir dacteurs multiples. Aussi, cet article sinscrit-il dans le traitement conjoint dune question opérationnelle et dune problématique de recherche : quelles sont les formes dancrage et de positionnements des « mondes agricoles » (Hervieu et Purseigle, 2015) ? Comment se combinent-elles dans les territoires et contribuent-elles au développement des territoires et à la capacité des exploitations à sadapter à des changements globaux ?

En partant de lexemple de la nouvelle région Auvergne-Rhône-Alpes, nous souhaitons prolonger la réflexion théorique et empirique sur ces nouvelles logiques de territorialisation de lagriculture française et interroger la coexistence et lhybridation de différents modèles de développement agricole (Gasselin et al., 2014).

Dans un premier temps, nous reviendrons sur ces notions de territorialisation et de modèles agricoles ainsi que sur notre méthodologie, puis nous tenterons de décrire et de cartographier la « coprésence » de ces différents modèles en Auvergne-Rhône-Alpes avant de revenir sur leur capacité inégale à sinscrire dans ces processus dancrage et donc sur la diversité des défis auxquels ils sont confrontés.

1. La question des liens agriculture-territoire

Les logiques de territorialisation sont multiples et peuvent sinscrire dans des filières dites « longues », mais aussi dans des circuits de proximité, ou reposer sur des produits « spécifiés » autour de « ressources territoriales » (Gumuchian et Pecqueur, 2007).

1.1. Territorialisation, déterritorialisation
et reterritorialisation de lagriculture

La territorialisation décrit un processus de renforcement des liens idéels, mais aussi concrets – notamment liés aux aménagements ou aux projets réalisés collectivement – des acteurs au territoire – cest-à-dire 83à un espace approprié au sens économique et/ou symbolique, marqué par des pratiques, des interactions entre acteurs et des représentations. Deleuze et Guattari (1980) ont introduit des aspects symboliques et insistent sur le caractère dynamique : tout territoire « est toujours en voie de déterritorialisation, au moins potentielle, en voie de passage à dautres agencements, quitte à ce que lautre agencement opère une reterritorialisation ». Cette territorialisation aboutit à un contrôle accru sur laccès aux ressources – au moins pour une partie des acteurs – et pour les théoriciens du développement, cest aussi une ressource propre, mobilisable dans une dynamique de changement social. En dautres termes, lancrage de lactivité au territoire crée des ressources spécifiques localisées. Le territoire est aussi un lieu de potentialités économiques en lien avec une histoire partagée qui fonde souvent la proximité des acteurs et leur capacité « à maîtriser les processus qui les concernent » (Deffontaines et al., 2001). On recouvre ainsi une dimension plus opérationnelle dans laquelle un groupe dacteurs – avec ses jeux de pouvoir – se constitue tout en produisant un territoire et en sengageant autour dun projet de « développement territorial ».

Cette définition permet de comprendre, en entrant par les jeux dacteurs, les dynamiques de recomposition de lagriculture et des espaces ruraux. De fait, pour analyser ces processus de reterritorialisation, la notion dancrage, issue de la sociologie économique, est souvent utilisée (Bowen, 2011). Elle croise des dimensions sociale, spatiale et écologique :

lancrage social montre comment les liens sociaux peuvent influencer et façonner les relations économiques dans les systèmes agroalimentaires ;

lancrage spatial renvoie aux dynamiques qui tendent à créer ou recréer une proximité spatiale dans ces mêmes systèmes en sinscrivant notamment dans des espaces locaux spécifiques de production et en réduisant les distances entre producteurs et consommateurs ;

enfin, lancrage écologique permet de regarder dans quelle mesure lécologie (au sens large du terme) influence et façonne le système alimentaire, depuis les pratiques des producteurs, jusquaux stratégies des distributeurs.

84

Intégrant ces trois précédentes notions, lancrage territorial a fait lobjet de nombreux travaux mobilisant un large champ de disciplines de sciences sociales : économie (Torre, 2000), gestion (Saleilles 2007), géographie (Frayssignes, 2005), sociologie (Deverre et al., 2010). Pour ces auteurs, le lien entre les systèmes productifs, leurs acteurs et leur territoire se construit via la mobilisation et la création de ressources de natures diverses, matérielles ou immatérielles, marchandes ou non. Pour Zimmermann (2005), « ce qui peut fonder lancrage territorial de la firme, cest-à-dire une communauté de destin dune firme avec un territoire, cest lidée dune construction commune, lidée dun apprentissage collectif fondé sur la co-production de ressources ». Torre (2000) ajoute que ce processus de construction dun lien firme-territoire « renvoie à larticulation entre proximité géographique et proximité organisationnelle et peut permettre lémergence dune dynamique conjointe de lexploitation et du territoire ». Aujourdhui, léconomie régionale (Gumuchian et al., 2007) souligne que ces ressources territoriales sont des construits sociaux plus ou moins partagés et sont le résultat du jeu et de la coordination des acteurs.

En géographie, le terme « dancrage » a longtemps été utilisé pour étudier les stratégies des entreprises et des filières ou pour renseigner la notion de terroir. Frayssignes (2005) élargit ces approches en proposant une modélisation de lancrage territorial des activités économiques comme un processus. Il rejoint le point de vue économique, en considérant que lancrage se mesure par la mobilisation et la construction de ressources territoriales, matérielles et immatérielles et sur le plan organisationnel et politique, par lanalyse de la mobilisation des acteurs locaux et leur mise en relation autour de dynamiques de projets locaux. Dans le domaine agricole, Esposito-Fava (2010) relève que « la territorialisation de laction agricole résulte de lhybridation de laction agricole et de laction territoriale. Cette hybridation est caractérisée par une mise en ressource conjointe de lagriculture pour le territoire et du territoire pour lagriculture, linvention dune gouvernance territoriale de lagriculture, le rôle essentiel dacteurs, capables darticuler laction agricole et laction territoriale ». Dans tous les cas, la diversité des processus, du fait notamment de la diversité des ressources construites et mobilisées ainsi que de la diversité des modes de mobilisation de ces ressources, implique alors une diversité des formes et des degrés de lancrage territorial. Si lon en reste à lagriculture française, plusieurs phases caractérisent les rapports au territoire. Avant les années 851960, des processus denracinement des sociétés paysannes avaient abouti à une territorialisation des systèmes agricoles. Au contraire, la diffusion du modèle productiviste et mondialisé défait largement les liens au territoire tout en mobilisant des réactions de re-territorialisation de la part des acteurs qui sinscrivent en réaction à ce mouvement, comme le montre la tendance actuelle visant à réintroduire des sentiments dappartenance, dappropriation et didentité collective. Elle passe par la « relocalisation », les circuits courts, la traçabilité, la valorisation de la qualité et de lorigine des biens dits de « terroir », la « mise en patrimoine » des campagnes et de leurs paysages, une gestion plus durable de lenvironnement, mais aussi par de nouvelles « politiques de projet » de territoires institutionnels recomposés. Ainsi, on peut analyser lancrage par son rôle dans la création de richesses, par lanalyse des dispositifs liant le produit à son aire de production et à des usages à lintérieur dun terroir, par lidentification de relations tissées entre producteurs et consommateurs (circuits courts périurbains), par le biais de la filière ou des services rendus. Cette mutation saccompagne également du développement de formes dorganisation collective différentes (groupement de producteurs, coopératives, etc.) et renvoie à des capacités/modalités de réponse différenciées des groupes professionnels et des collectivités.

Fig. 1 – Essai de définition du système de territorialisation de lagriculture.

86

La figure 1 tente de synthétiser ces grands processus en combinant les dimensions sociales, spatiales et écologiques, à travers trois sous-systèmes inter-reliés :

renforcement des liens concrets et symboliques aux lieux et territoires, via la mobilisation et la création de ressources qui peuvent être de natures diverses, matérielles ou immatérielles, marchandes ou non ;

élaboration de projets de développement créateurs de territorialités ;

recomposition des jeux dacteurs et nouvelles formes de gouvernance.

Ainsi conçue, cette dynamique dancrage et de développement territorial conduit à des phénomènes dinterdépendance entre les acteurs, les ressources et le territoire, de proximité (organisationnelle et géographique) avec la société locale, mais aussi de flexibilité/résilience des systèmes agricoles face aux changements globaux.

1.2. Lhypothèse dune coexistence
de différents modèles de développement agricole

Létude des formes dancrage de lagriculture peut conduire à lélaboration de modèles. Rappelons que le terme recouvre différentes acceptions. Daprès J.-M. Legay (1986), cest à la fois un objet à imiter ou un produit de limitation, un exemple proposé à limitation et enfin, une catégorie, un prototype, un « modèle déposé ». Pour P. Haggett (1965), dans le domaine scientifique, cest « une représentation schématique de la réalité élaborée en vue dune démonstration ». Cette interprétation insiste sur le fait quun modèle est toujours une abstraction, une représentation mentale qui simplifie la réalité étudiée, mais qui peut sincarner dans le réel : dans labsolu, il existe différentes interprétations possibles de la même réalité et donc plusieurs modèles pour un système complexe. Cest aussi une représentation « élaborée », soit une convention à laquelle les acteurs se réfèrent, un projet, le ferment dune action collective, des normes pour laction (exemple de lagroécologie), soit une construction scientifique qui dépend de cadres danalyse, implicites ou explicites (système dactions ou dacteurs, idéaux-types, etc.).

87

En ce qui concerne lanalyse des modèles de développement agricoles, nous chercherons donc à dégager la logique de leur fonctionnement, les dimensions du projet visé et de laction collective, ainsi que les rapports au territoire et les mécanismes de leur diffusion spatiale. Pour J. Renard (1992), il sagit « dun système dorganisation socio-spatial reconnu et décrit dans toutes ses composantes et qui se reproduit, est imité, et qui va se retrouver par diffusion en dautres lieux, en conservant ses structures essentielles ». Ces modèles sont donc le reflet dorientations socio-économiques qui fonctionnent et sétendent à un moment donné à laune denjeux multiples (démographiques, environnementaux, commerciaux, etc.) ; ils associent à la fois des structures de production (taille de latelier, main-dœuvre utilisée et rapport à lactivité, choix technico-économiques, relations au sein de la filière) et des structures socio-spatiales ou dencadrement avec des rapports complexes à la société, aux marchés, à la consommation alimentaire, à la nature, à la technique ou à la connaissance.

Or, les dynamiques à lœuvre dans les territoires apparaissent de plus en plus variées, complexes, pas toujours complémentaires, parfois concurrentes. Lobservation montre aussi que lon séloigne de plus en plus des grands « modèles uniques », souvent imposés par le « haut » et a priori reproductibles en tous lieux, pour tendre vers une complexité des situations, marquée par une forme de coexistence des modèles au sein dun (même) territoire. Lanalyse de cette hybridation de modèles repose sur la prise en compte :

de la diversité des exploitations agricoles et des modèles de développement agricoles au sein des territoires (Lémery, 2003) ;

des interactions entre systèmes de production, acteurs agricoles et autres acteurs dans les territoires, ainsi que des interactions avec les ressources et lenvironnement (Van der Ploeg, 2009) ;

des dynamiques dadaptation des acteurs – individus et collectifs – dun territoire à des changements globaux et locaux.

Les questions de recherche concernent les formes, les conditions et les implications de la coexistence de ces modèles au sein des territoires (Gasselin et al., 2014). Il sagit danalyser comment ils sont ancrés et de comprendre comment les acteurs adoptent, adaptent, combinent ou inventent des modèles.

88

1.3. Une méthode associant cartographie
et entretiens qualitatifs

Sur le plan méthodologique, nous avons étudié les formes de territorialisation et de coexistence de différents modèles agricoles à léchelle de la nouvelle région Auvergne-Rhône-Alpes et de plusieurs « territoires de projets » (pays, parcs naturels régionaux, etc.). Pour ce faire, nous avons croisé une revue bibliographique, une approche statistique et cartographique à léchelle communale ou cantonale3 et des enquêtes qualitatives auprès des acteurs concernés (exploitants agricoles, élus et techniciens des collectivités, industriels agroalimentaires) en privilégiant léchelle des bassins de vie ou pays. À ce titre, nous avons examiné parallèlement différents projets de développement à cette échelle : programmes LEADER, contrats de pays – dits « Auvergne + » et « Contrat de développement durable Rhône-Alpes ». Cette étude a permis de mesurer le degré dassociation de lagriculture à un certain nombre de politiques territoriales en complétant la lecture des documents par lobservation des jeux dacteurs sur plusieurs territoires4. Un ensemble dune trentaine dentretiens compréhensifs complémentaires a été réalisé au cours de ce travail auprès dacteurs intervenant dans le secteur agricole et agroalimentaire, notamment pour faire le lien entre les pratiques et les représentations sous-jacentes (principales filières ou démarches collectives recensées). Ces interviews, majoritairement individuelles, ont pu parfois, dans une logique dappui sur des exemples concrets, concerner des territoires à enjeux spécifiques (zones périurbaines, bassins touristiques, espaces pastoraux de montagne). En effet, la nouvelle région Auvergne-Rhône-Alpes offre un terrain dobservation privilégié du fait de sa diversité à toutes les échelles (entre lOuest – plus rural et fragile – et lEst davantage urbanisé et attractif, entre les campagnes isolées et celles proches des puissantes métropoles – Lyon et Grenoble voire Genève – ou des grands pôles urbains – Clermont-Ferrand, Saint-Étienne, Chambéry, etc.).

89

2. La coexistence de différents modèles agricoles : illustration en Auvergne-Rhône-Alpes

Les résultats de cette recherche confirment quun processus hybride de développement rural et agricole se met en place ; certains modèles sont souvent présentés comme « alternatifs » à un système dominant « agroindustriel » ou « agrotertiaire » même si cette opposition est, depuis le début des années 2000, largement discutée. Il sensuit des évolutions différenciées, à la fois entre territoires, mais également au sein dun même espace, entre des modèles agricoles sans lien ou avec des liens très faibles avec le territoire et des formes reposant au contraire sur de fortes attaches géographiques.

2.1. Les six familles de modèles
en Auvergne-Rhône-Alpes

Dans un premier temps, nous avons formalisé différentes logiques territoriales de lagriculture en combinant les pratiques en exploitation des agriculteurs, les éléments majeurs de leur modèle économique (proposition de valeur, modèle de revenus, schéma de production et structure de coûts), mais aussi leurs représentations sociales et domaines de justifications5 ainsi que leurs inscriptions dans des réseaux (fig. 3). Ces « modèles » peuvent coexister voire se superposer parfois pour un même agriculteur (par exemple agriculture biologique et vente directe, petites exploitations patrimoniales et pluriactivité, etc.). Mais cette coprésence nenlève rien à la « dominante » qui souvent motive les actions collectives des agriculteurs.

Le modèle patrimonial repose sur des exploitations de petite taille (en surface utilisée comme en revenus), qui cherchent souvent à valoriser un bien familial (y compris pour transmettre un héritage) ou à pratiquer une « agriculture de loisirs », mêlant généralement autoconsommation et revenus complémentaires dans le cadre dune double-activité assumée. Ces exploitations patrimoniales ne rassemblent donc pas uniquement des agriculteurs âgés et ne sont pas faciles à approcher 90statistiquement. On sait que la région Auvergne-Rhône-Alpes est bien dotée dexploitations de petite taille et avec une dimension économique modeste (43 % dexploitations avec un potentiel de production inférieur à 25 000 PBS6 contre 34 % en France). Elles sont surtout représentées en haute montagne alpine (souvent en zones laitières), mais aussi en moyenne montagne (Forez, montagne ardéchoise, sud et est de la Drôme) ou dans les zones périurbaines.

Le modèle conventionnel de lentreprise agricole est associé à des exploitations professionnelles, modernisées (efficacité technique), davantage spécialisées et productives, mais plus ou moins intensives. Elles dégagent des revenus plus importants et la double activité est rare ou rejetée. Cette logique est dominante en nombre dagriculteurs concernés, en surfaces exploitées et en résultats économiques. Elle est associée aux filières longues et grands bassins de production polarisés par de nombreuses entreprises (PME, mais aussi groupes tels Limagrain pour les céréales, Aoste, Socopa ou Bigard dans la viande, Sodiaal, Entremont ou Lactalis pour la transformation des produits laitiers) :

grande culture (céréales, oléagineux) dans environ 6 500 exploitations spécialisées en Limagne, dans la plaine de lAin et une partie de la Dombes ou, dans une moindre mesure, dans la vallée du Rhône ;

viticulture du Beaujolais et des Côtes-du-Rhône, du sud de lArdèche et de la Drôme (5 300 exploitations spécialisées) ;

arboriculture dans la plaine de Valence, le Bas-Dauphiné (noyers), la vallée du Rhône, le Lyonnais-Jarez ou les Baronnies ;

systèmes laitiers avec 9 800 exploitations spécialisées dans les monts dAuvergne volcaniques avec leurs prolongements vers la châtaigneraie cantalienne, le Velay et les plaines de la Loire, les monts du Lyonnais, la Bresse, la Haute-Savoie et le Bas-Dauphiné auxquels on peut ajouter les foyers caprins du Vivarais, Pilat ou Drôme des collines ;

systèmes allaitants (bovins et ovins) dans 13 000 fermes spécialisées du bocage et de la Sologne bourbonnaise, de la plaine roannaise, des Combrailles, des monts du Cantal et de 91lAubrac, du Velay et du centre-Ardèche (ovins), avec les pôles dabattage de La Talaudière et Roanne dans la Loire, Lapalisse dans lAllier ou Bourg dans lAin.

Un autre modèle sinscrit dans une logique de différenciation avec des exploitations, généralement professionnelles7, dont au moins une partie de la production bénéficie de signes didentification de la qualité et de lorigine (SIQO). À partir de démarches nécessairement collectives, il sagit de valoriser la qualité (sanitaire et gustative, mais aussi éthique et symbolique) et surtout la typicité de productions ancrées dans les terroirs clairement délimités à partir de facteurs naturels et humains (savoir-faire hérité et transmis). Lestimation de la part de cette forme dagriculture dans le paysage régional nest pas simple : non seulement ladhésion à un signe officiel ne permet pas, en soi, dévaluer la part de la production concernée, mais, dautre part, une exploitation peut être engagée dans plusieurs démarches de qualité. On estime quune exploitation sur quatre est concernée par un SIQO en Auvergne-Rhône-Alpes avec une dominante dAOP/IGP pour les vins et fromages (la région produit 40 % des fromages AOP de France), de labels rouges pour les viandes. Les principaux foyers de cette agriculture différenciée sont le bocage bourbonnais, les monts dAuvergne (Sancy, Cantal), le Devès (lentille du Puy), le Forez, le Beaujolais, la vallée du Rhône, le Dauphiné, la Savoie (zones du reblochon, beaufort, abondance, etc.), le sud de lArdèche et de la Drôme (oliveraies de Nyons).

La logique de proximité est celle dexploitations spécialisées ou multifonctionnelles, commercialisant une partie plus ou moins importante de leur production en vente directe ou en circuits courts8, à la recherche dune plus-value. Comme dans les filières sous SIQO, les démarches collectives ne sont pas absentes, loin sen faut, à limage des points de vente collectifs qui se multiplient dans les villes. En Auvergne-Rhône-Alpes, 19 % des exploitations pratiquent la vente directe et 23 % utilisent des 92circuits courts (moyenne nationale : 18 %), en priorité la vente à la ferme (40 % des formes de vente). Les systèmes les plus représentés en nombre de fermes sont les viandes (dont charcuterie), puis les produits laitiers et ensuite les fruits, légumes et vins, cultures spéciales pour lesquelles plus de 40 % des exploitations spécialisées pratiquent un circuit court. Géographiquement, ce modèle se retrouve autour des principales agglomérations (Lyon, Grenoble, Annecy, Chambéry, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand, etc.), mais aussi sur un axe Nord-Sud qui se déploie du Beaujolais à la vallée du Rhône avec ses périphéries montagneuses de la Drôme ou de lArdèche. Certaines zones (Monts du Forez dans la Loire, Beaujolais vert dans le Rhône) témoignent également de dynamiques locales portées par les agriculteurs conjointement avec des collectivités ou des habitants.

Le modèle agroécologique correspond à des exploitations modifiant plus ou moins leurs pratiques pour des motivations environnementales. Les formes en sont extraordinairement diverses depuis les agricultures qui ne sont quen rupture partielle par rapport à lagriculture « conventionnelle » comme lagriculture de précision ou lagriculture raisonnée ou « écologiquement intensive », et qui ont pour objectif de limiter les apports dintrants et donc éviter que des « excédents » de ces produits ne se retrouvent dans lenvironnement, jusquà des modèles qui sinscrivent dans des logiques de rupture beaucoup plus marquées : agriculture sous contrats agri-environnementaux (par exemple, en zone Natura 2000), agriculture biologique (AB). De même, on pourrait opposer, à la suite dE. Guiseppelli (2014), les systèmes « dont lune des finalités est explicitement territoriale sans obligatoirement avoir des pratiques écologiques et [ceux] dont la finalité est le respect de lenvironnement par la mise en œuvre dun cahier des charges – formel ou informel – sur les modes de production, indépendamment du territoire dans lequel elle se situe ». Cette complexité tient autant à la diversité des modes de production, aux représentations des exploitants que des produits ou territoires eux-mêmes. Lagriculture biologique, qui est la plus documentée, est bien présente en Auvergne-Rhône-Alpes avec 3 900 exploitations et 146 000 ha certifiés, ce qui place la région respectivement aux 3e et 2e rang français. On sait également que la Drôme est le 1er département métropolitain en nombre dexploitations, lArdèche occupant le 9e rang. La géographie dessine des taches autour des agglomérations ou des zones pionnières, que ce soit dans ces deux 93départements (Moyen-Vivarais, Diois, Baronnies et Nyonsais) ou bien dans le bocage bourbonnais, le Livradois, le Velay, les monts du Lyonnais, le Pilat, lest de lAin (Bugey) ou le sud Isère.

Le modèle agri-rural recouvre pour partie le cas des exploitations pluriactives à base agricole (ouvrier paysan, agritourisme), mais sélargit à des exploitations dites parfois « atypiques » et combinant diverses activités de production (agriculture, artisanat) et de services ou daccueil, en lien avec les nouvelles fonctions quassurent les exploitations agricoles, professionnelles ou non, en milieu rural. Rappelons que dès 1996, des acteurs du développement local semparent du terme dagri-ruralité dans le cadre dun dispositif daides aux entreprises rurales innovantes mis en œuvre en Rhône-Alpes. Ainsi, cest bien dans lidée dune reprise en main de lactivité par les acteurs et de la maîtrise du système par celui qui en a la gestion principale quest mobilisée la notion dagri-ruralité, système qui tire sa viabilité de la mise en parallèle et en relation de plusieurs activités de nature différente – agricole et autre – et qui est, de ce fait, particulièrement adapté aux conditions spécifiques des territoires et à la valorisation de leurs ressources spécifiques. Rappelons que la région est classée au deuxième rang national pour la part des exploitations avec une activité de diversification (14 % dentre-elles avec 9 % en Auvergne et 17 % en Rhône-Alpes). Les principaux secteurs concernés sont les aires périurbaines des agglomérations (Lyon, Saint-Étienne, Grenoble, Clermont-Ferrand et le Val dAllier), le sillon et la montagne alpine (Maurienne, Beaufortin et Tarentaise, Oisans, Préalpes) voire les Combrailles et les monts dAuvergne.

2.2. Une géographie hybride

Une tentative de représentation cartographique de ces différents modèles (fig. 2) a été établie par lauteur à partir de données statistiques issues du recensement agricole (part des exploitations concernées ; revenus dégagés) en retenant des seuils attestant dune forte représentation de la population concernée (premier quartile) et en ajustant ponctuellement linformation grâce aux données qualitatives recueillies sur le terrain (thème de lagriruralité, par exemple). Cette carte montre la superposition des modèles à une échelle moyenne, en particulier à lest de la région et dans laxe rhodanien avec des prolongements vers le sillon alpin et les massifs méridionaux (Drôme-Ardèche). Ces modèles de développement agricole 94ne sont donc pas segmentés et disjoints, mais on observe, au contraire, des hybridations à toutes les échelles, de multiples formes dinteractions, des mécanismes de coévolution, des complémentarités, des arrangements locaux, mais aussi des concurrences, voire des confrontations, ce qui pose la question des formes de régulation publique ou collective.

Cette coexistence de modèles semble conforter la dimension économique des exploitations, permettant une meilleure valorisation des ressources locales et favorisant la création de richesses et dactivités diversifiées, notamment dans les aires métropolitaines. Ces logiques peuvent paraître divergentes, mais elle recouvrent des défis communs (territorialisation, organisation de filières, recherche de durabilité, enjeux fonciers, accès à la ressource en eau), parfois générateurs de conflits dusage comme de synergies bénéficiant à tous (consommateurs, entretien du paysage et des zones tampons, etc.).

Dans le détail, la carte évoque des corrélations entre les petites exploitations et lagri-ruralité, les démarches de différenciation et le modèle conventionnel (en particulier dans les vignobles, les systèmes laitiers, voire allaitants), les circuits courts et les filières de qualité (notamment en viticulture et arboriculture), le modèle agroécologique et les circuits de proximité.

Fig. 2 – Essai de cartographie des modèles agricoles en Auvergne-Rhône-Alpes.
Source : L. Rieutort daprès données Recensement agricole 2010 et enquêtes diverses. Réalisation : F. Van Celst (UMR Territoires).

95

3. Des modèles aux capacités
de territorialisation inégales

Si ces modèles possèdent des lignes directrices communes, en revanche leurs dynamiques de territorialisation sont inégales comme le montre lapplication de notre système interprétatif croisant renforcement des liens aux territoires, projets de développement et coordination des acteurs (fig. 3).

Logiques
territoriales
de lexploitation

Renforcement
de lancrage territorial

Projet territorialisé

Coordination
des acteurs

Modèle patrimonial

+

(échelle micro-locale / exploitation)

(pas de continuité spatiale, côtoiement dautres logiques)

Modèle conventionnel

–/+

(échelle moyenne : exploitation + bassin de production/collecte de la filière)

(sauf exception, faible intérêt pour les collectivités)

–/+

(entre action collective et individualisme)

Modèle de différenciation/terroir

+

(échelle terroirs + aire géographique/ZAOC)

+

(surtout si rente de qualité territoriale)

+

(importance des dynamiques collectives)

Modèle de la proximité

–/+

(échelle moyenne : exploitation + bassin de vie /bassin de consommation

+

(soutien des collectivités et acteurs locaux)

–/+

(organisation collective, liaison avec les collectivités, notamment urbaines, réseaux multiples)

Modèle agroécologique

+

(échelle moyenne : exploitation-terroirs + bassin de production/ collecte + bassin de consommation)

–/+

(en fonction du type de projet : intérêt du territoire pour entretien paysage, énergies renouvelables…)

–/+

(pratiques individuelles, mais émergence de collectifs, coordination avec collectivités)

Modèle agri-rural

+

(échelle moyenne : « Pays », bassin de vie, massif)

+

(soutien des collectivités ou réseaux collectifs, projets de territoire)

– /+

(entre action collective et individualisme)

Fig. 3 – Les degrés de territorialisation des modèles agricoles.
Source : L. Rieutort et E. Guisepelli, 2014.

96

Le modèle patrimonial présente de forts liens au territoire (même si ces derniers sexpriment à léchelle du périmètre exploité), mais ces petites exploitations sont rarement soutenues par les politiques publiques et associées à des projets locaux de développement (discrétion, absence de continuité spatiale, côtoiement dautres logiques) et rarement impliquées dans des dynamiques collectives : ce processus de territorialisation « en archipel » est donc inégal et les exploitants sont confrontés au défi de la préservation de leur foncier et à leur reconnaissance institutionnelle.

Le modèle conventionnel des entreprises agricoles est également ambivalent ; les liens aux territoires peuvent sexprimer à léchelle moyenne (celle de lexploitation et de son bassin de production ou de collecte organisés par les industries agroalimentaires) avec des formes de reterritorialisation (ou, au moins, daffirmation du rôle de lagriculture dans son espace). Mais, sauf exception, ces systèmes et producteurs bien insérés dans des filières agro-industrielles structurées rencontrent toutefois un intérêt limité pour les collectivités, souvent par méconnaissance, craintes ou absence de relations réciproques9, ce qui amoindrit les possibilités de coordination et de gouvernance collective. Le développement agricole, à part pour certains aspects agronomiques ou organisationnels, est largement dissocié du territoire local. Dans ces conditions, les objectifs du modèle visent la co-construction de projets territoriaux parallèlement à la recherche dune meilleure efficience des systèmes de production (plus autonome et économe) et des chaînes agroalimentaires (innovation-produit, contractualisation).

Le modèle de différenciation est celui qui offre le plus fort potentiel de territorialisation, car il croise un renforcement des liens de lagriculture aux lieux géographiques (terroirs ou combinaisons de terroirs, aires géographiques délimitées associées aux AOP/IGP), une capacité dintégration à des projets de développement local et des dynamiques collectives renforcées par les organisations de défense du produit, le respect du cahier des charges du signe de qualité ou par la spécificité de chaque zone de production. Limage positive de lenvironnement rural et de son patrimoine constitue un support déterminant pour lémergence dune « rente de qualité territoriale », dautant que les ventes sur les 97marchés locaux, la proximité du consommateur ou du touriste par rapport au produit consommé permettent darrimer davantage les biens et services, parfois organisés et vendus conjointement en « paniers ». Dans lautre sens, les impacts sur le développement local (création de valeur ajoutée, changement dimage, valorisation de lenvironnement et entretien des paysages…) sont bien connus et des cercles vertueux fonctionnent alors pour le meilleur profit de lensemble des acteurs de la filière, mais également des territoires considérés. Les enjeux sont alors de construire ces paniers de biens et services, y compris à distance auprès des consommateurs urbains, et de rester dans des démarches rigoureuses (cahier des charges) sans alourdir les normes.

Le modèle de proximité possède quelques points communs avec les logiques de différenciation : il est nettement, et de plus en plus, inscrit dans les projets des collectivités territoriales (des agglomérations aux départements et régions). Il repose sur des formes dorganisation collective (petits groupes de producteurs et consommateurs, réseaux élargis) construites pour la mise en place de chartes, doutils de transformation ou de commercialisation, le plus souvent accompagnées par ces mêmes collectivités, notamment urbaines. Cependant, les liens au territoire sont plus ténus : si on retrouve de fortes relations avec le périmètre des exploitations concernées (et les micro-terroirs bien valorisés), les agriculteurs, largement animés par des motivations individuelles, naffichent pas toujours en priorité, dans leur acte de production, de forts sentiments dappartenance territoriale ; il faut aussi compter sur une absence de continuité spatiale même si les exploitants peuvent sappuyer sur une relative proximité géographique (on retrouve un dispositif en archipel) et sur des « territoires-réseaux » à moyenne échelle, jouant sur les interfaces, les « charnières » entre le rural et lurbain… Au final, les bassins de vie et de consommation sont aussi la référence « territoriale » de bon nombre de producteurs et les défis sont bien ceux de lorganisation logistique des circuits, la mise en place doutils de transformation (voir par exemple lépineuse question de la présence dabattoirs de proximité) ou laccès au foncier.

Le modèle agroécologique prend aussi en compte le territoire, non seulement dans lacte de production à léchelle de lexploitation et de ses terroirs (avec leurs spécificités agronomiques), mais aussi à léchelle du bassin de production/de collecte voire du bassin de consommation 98même si le produit est bien plus souvent valorisé par rapport à un mode de production quà un type de territoire. Certains projets de développement local intègrent également fortement ce modèle, notamment pour lentretien, la protection et la valorisation de lespace et des paysages (classement du lieu en zone protégée avec, y compris, linstallation volontaire de lagriculteur en zone Natura 2000) ou pour le déploiement de systèmes plus autonomes, notamment en matière énergétique avec le soutien des collectivités. Si les pratiques sont individuelles, de nombreux collectifs peuvent émerger, y compris à léchelle dun territoire de proximité (communauté de communes, par exemple). Les enjeux sont bien alors dorganiser collectivement des « filières » (autour dun cahier des charges), de coordonner les acteurs en proximité géographique.

Le modèle agri-rural est fortement territorialisé du fait de sa conception même. Ce type dexploitant valorise son insertion dans un bassin de vie, un « pays », une vallée ou un massif auquel il est attaché et dans lequel il puise une grande partie de ses ressources. Le lien fort avec le territoire est ainsi obtenu grâce :

à une démarche ascendante promue par des porteurs de projets ancrés dans leur espace ;

à une combinaison variable dactivités agricoles diversifiées et « rurales » (accueil, services, artisanat, etc.) envisagée dès la conception de lentreprise ;

à une valorisation des ressources territoriales via notamment la transformation des produits, la commercialisation (souvent directe) ou les services fondés sur les aménités de lespace ;

à un mode de fonctionnement élargi (réseaux territoriaux, entraide, liens avec les consommateurs, etc.) ;

à une dynamique liée aux « nouvelles ruralités » (liens ville/campagne, diversification des fonctions rurales – résidentielles, de loisirs, de nature… –, rapports renouvelés à lenvironnement ou au patrimoine, nouvelles formes de gouvernance).

De fait, le projet agri-rural peut rencontrer fréquemment lintérêt des collectivités locales ou de réseaux professionnels qui linscriront dans le projet de territoire ; le défi étant bien dassocier les choix individuels (projet de vie et dentrepreneur) et une dynamique collective, ce qui 99suppose de conforter les politiques daccueil et de création dactivités, daméliorer la qualité des prestations et produits ainsi que leur promotion et commercialisation. Les acteurs des territoires ont une place légitime à occuper au sein ou aux côtés des structures dappui spécialisées, pour faciliter lémergence de potentiels, mettre en réseau les innovateurs, construire un dispositif daccueil et animer des politiques centrées sur la création dactivités.

Conclusion

Cet essai visant à définir les divers modèles agricoles et les processus de territorialisation qui les touchent très inégalement nous a permis de dégager six grandes logiques (patrimoniale, « conventionnelle », de différenciation, de proximité, agroécologique et agri-rurale) qui ne sont pas obligatoirement opposées, mais sont souvent complémentaires dans lespace. Chaque modèle contribue au développement des territoires et cette coexistence de modèles permet dune part une meilleure valorisation des ressources locales, renforce dautre part la capacité des exploitations à résister et à sadapter à des changements globaux (aléas des marchés et climats) ou locaux (suppression/création de services ou dactivités) (Touzard et Fournier, 2014). Enfin, elle fournit, comparativement à des territoires spécialisés, davantage de services diversifiés en favorisant la création de richesses et dactivités, en liaison notamment avec les interactions qui peuvent se réaliser entre les multiples acteurs de lespace rural. Pour autant, dautres recherches seraient nécessaires pour tester lhypothèse que la coexistence confère, à certaines conditions, notamment de gouvernance, des capacités dinnovation. Si le propos concerne un espace régional français, la discussion des similitudes et des différences dans dautres contextes, au Nord comme au Sud, serait pleine dintérêt.

100

Références bibliographiques

Bowen S., 2011, “The Importance of Place: Re-territorialising Embeddedness”, Sociologia Ruralis, n o51, p. 325-348.

Deffontaines J.-P., Marcelpoil E., Moquay P., 2001, « Le développement territorial : une diversité dinterprétations », in Représentations spatiales et développement territorial /Lardon S., Maurel P., Piveteau V. (eds), Paris, Hermès Science Publications, chap. 2, p. 39-56.

Deleuze G., Guattari F., 1980, Mille plateaux, capitalisme et schizophrénie, Paris, Éditions de Minuit.

Deverre C., Lamine C., 2010, « Les systèmes agroalimentaires alternatifs : une revue de travaux anglophones en sciences sociales », Économie rurale, p. 57-73.

Esposito-Fava A., 2010, Territorialisations et action agricole : quelles ressources et dispositifs pour quelles gouvernances ? Une analyse à partir des cas du Parc Naturel Régional du Marais du Cotentin et du Bessin, de Métropole Savoie et de Rovaltain, Thèse de doctorat de géographie, Université Joseph-Fourier-Grenoble I, 410 p.

Frayssignes J., 2005, Les AOC dans le développement territorial. Une analyse en termes dancrage appliquée aux cas français des filières fromagères. Thèse de doctorat de géographie, INP Toulouse, 469 p.

Gasselin P., Choisis J.-P., Petit S., Purseigle F., 2014, « Lagriculture est-elle toujours une affaire de famille ? », in Lagriculture en famille : travailler, réinventer, transmettre, EDP Sciences, p. 363-382 (Profil).

Guisepelli E., 2014, Le paysage au croisement des développements agricole et territorial : cohérences, contradictions et perspectives, Dossier dhabilitation à diriger les recherches en géographie, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand, tome 1, 288 p.

Gumuchian H., Pecqueur B., 2007, La ressource territoriale, Paris, Economica, Anthropos.

Haggett P., 1965, Locational analysis in human geography, Arnold, Londres, 339 p.

Hervieu B., Purseigle F., 2015, “The sociology of agricultural worlds: from a sociology of change to a sociology of coexistence”, Revue dÉtudes en Agriculture et Environnement, no 96, p. 59-90.

Legay J.-M., 1986, Lexpérience et le modèle. Un discours sur la méthode. INRA Éditions, Sciences en questions.

Lémery B., 2003, « Les agriculteurs dans la fabrique dune nouvelle agriculture », Sociologie du travail, no 45, p. 9-25.

Rastoin J.-L., Ghersi G., 2010, Le système alimentaire mondial, Concepts et méthodes, analyses et dynamiques, Paris, Quae.

101

Renard J., 1992, « Pour mieux comprendre la diversité des campagnes », Géographies et campagnes, Mélanges J. Bonnamour, ENS de Fontenay-Saint-Cloud, p. 133-138.

Saleilles S., 2007, Lentrepreneur néo-rural et son réseau personnel : une étude exploratoire, Thèse de doctorat de sciences de gestion, Université Montpellier I, 359 p.

Torre A., 2000, « Économie de la proximité et activités agricoles et agro-alimentaires », Revue déconomie Régionale et Urbaine, no 3, p. 407-426.

Touzard J.-M., Fournier S., 2014, « La complexité des systèmes alimentaires : un atout pour la sécurité alimentaire ? », VertigO, La revue électronique en sciences de lenvironnement, vol. 14, no 1 [en ligne].

Van der Ploeg J.D., Laurent C., Blondeau F., Bonnafous P., 2009, “Farm diversity, classification schemes and multifunctionality”, Journal of Environmental management, vol. 90, suppl. 2, p. 124-131.

Zimmerman J.-B., 2005, « Entreprises et territoires : entre nomadisme et ancrage territorial », La revue de lIRES, 1 (47), p. 21-36.

1 Sur le sujet de laction collective, la bibliographie récente est très abondante. Une synthèse est proposée par Lucas V., Gasselin P., Thomas F., Vaquié P.F., 2014 : « Coopération agricole de production : quand lactivité agricole se distribue entre exploitation et action collective de proximité », in Lagriculture en famille : travailler, réinventer, transmettre, EDP Sciences, p. 201-222 (Profil).

2 Au sens de Moine A., 2006, « Le territoire comme un système complexe : un concept opératoire pour laménagement et la géographie », LEspace géographique, tome 35, p. 115-132.

3 Outre les bases statistiques disponibles, rappelons quà loccasion de la fusion des deux régions, la DRAAF a publié un utile « Agriculture, agroalimentaire et forêt dAuvergne-Rhône-Alpes – Panorama en chiffres et en cartes », Agreste, janvier 2016, no 1, 86 p.

4 En profitant de 25 ans dactivités denseignement qui permettent de constituer un véritable observatoire des exploitations agricoles de la région à partir des stages de terrain, projets tuteurés, comptes rendus de visites et rapports de stage distribués sur de très nombreuses petites régions agricoles.

5 Au sens de Boltanski L., Thévenot L., 1991, De la justification : les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 390 p.

6 La production brute standard (PBS) est calculée à partir des valeurs moyennes des productions (cultures et cheptels).

7 43 % des exploitations dAuvergne-Rhône-Alpes qui ont une grande dimension économique ont un produit sous SIQO.

8 Les circuits courts sont des modes de commercialisation des produits agricoles pour lesquels il existe au maximum un intermédiaire entre producteurs et consommateurs. La notion recouvre la vente directe (à la ferme, sur les marchés, par correspondance ou internet), la vente indirecte via un seul intermédiaire (restauration, commerçant détaillant, voire grande distribution). Un grand nombre dexploitations en circuits courts mobilisent également des filières plus longues.

9 Pour autant, les agriculteurs conventionnels sont souvent insérés dans de forts réseaux professionnels (syndicaux et consulaires), mais ces derniers sont peu reliés aux acteurs du développement local.