Aller au contenu

Classiques Garnier

Influence du type de CEO et de l’environnement concurrentiel sur la relation entre l'orientation entrepreneuriale et la performance des entreprises familiales

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2020 – 1, n° 7
    . varia
  • Auteurs : Bauweraerts (Jonathan), Colot (Olivier)
  • Résumé : La présente recherche vise à améliorer la compréhension de la relation entre l’orientation entrepreneuriale et la performance financière des entreprises familiales non cotées. Fondée sur la théorie du patrimoine socio-émotionnel, cette étude propose une approche configurationnelle qui explore l’effet joint et simultané de l’orientation entrepreneuriale, du type de CEO (familial ou non familial) et des caractéristiques de l’environnement concurrentiel. Les résultats montrent que les CEO non familiaux sont plus susceptibles de tirer un avantage pécuniaire de de leurs efforts entrepreneuriaux dans un environnement hostile, tandis que l’inverse est observé pour les entreprises familiales gérées par un CEO familial.
  • Pages : 37 à 65
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406107873
  • ISBN : 978-2-406-10787-3
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10787-3.p.0037
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 26/10/2020
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Entreprises familiales, orientation entrepreneuriale, patrimoine socio-émotionnel, configuration, transmission
37

Influence du type de CEO
et de lenvironnement concurrentiel

sur la relation entre lorientation entrepreneuriale
et la performance des entreprises familiales

Jonathan Bauweraerts

Faculté Warocqué dÉconomie
et de Gestion

Université de Mons

Olivier Colot

Faculté Warocqué dÉconomie
et de Gestion

Université de Mons

Introduction

De nos jours, la majorité des entreprises sont confrontées à un environnement globalisé et en constante mutation. Pour faire face à ce contexte, de nombreux auteurs arguent que ladoption dune forte orientation entrepreneuriale (OE) constitue une solution universelle afin dassurer leur survie et générer des gains de performance (Rauch et al., 2009). Cependant, cette logique se veut relativement simpliste et omet de prendre en compte les caractéristiques intrinsèques de lenvironnement concurrentiel dans lequel évolue lentreprise mais aussi les spécificités de chaque organisation. Conscient de cette limite, lapproche contingente de la relation OE-performance a rapidement émergé (Dess et al., 2011 ; 38Wiklund & Shepherd, 2005), arguant que le sens et lintensité de ce lien évoluent en fonction de paramètres inhérents à la firme ou à son environnement.

Lentreprise familiale constitue une forme typique dorganisation dont limportance économique a été largement démontrée (Memili et al., 2015). Il nest dès lors guère surprenant que plusieurs travaux appréhendent la question de la relation entre lOE et la performance dans ce contexte particulier (Arzubiaga et al., 2018 ; Casillas & Moreno, 2010 ; Naldi et al., 2007). En effet, les entreprises familiales représentent une forme organisationnelle idéale pour investiguer les questions liées à lentrepreneuriat, celles-ci disposant de ressources et de capacités uniques susceptibles de faciliter ou entraver les comportements entrepreneuriaux (Huybrechts et al., 2013), ainsi que la conversion de lOE en gains financiers (Casillas et al., 2010). Afin de tenir compte de leurs nombreuses spécificités, plusieurs études ont pris en compte leur hétérogénéité en examinant comment certaines de leurs composantes distinctives viennent modérer la relation OE-performance. Par exemple, linfluence modératrice de limplication familiale (Casillas & Moreno, 2010), du patrimoine socio-émotionnel (Schepers et al., 2014) et de limplication générationnelle (Chirico et al., 2011) a été étudiée. Par ailleurs, Casillas et al. (2010) ont aussi exploré le rôle modérateur de variables liées à lenvironnement concurrentiel.

Bien que ces travaux contribuent à développer une meilleure compréhension de la relation OE-performance dans le contexte des entreprises familiales, une image plus précise et complète de cette problématique pourrait être obtenue en utilisant une approche configurationnelle. Celle-ci suggère quau sein dune organisation, plusieurs éléments relatifs à sa structure, sa stratégie, ses processus et son environnement interagissent et forment des configurations spécifiques susceptibles dinfluer sur son efficacité (Miller, 1983). Sinscrivant dans cette logique, certains auteurs ont proposé dexaminer leffet simultané de lOE, des facteurs organisationnels et des caractéristiques environnementales sur la performance de la firme (Moreno & Casillas, 2008). Ce constat ne sapplique cependant pas au contexte des entreprises familiales où lanalyse des interactions entre leurs idiosyncrasies organisationnelles, leur environnement et leur posture entrepreneuriale na reçu que peu dattention (Sciascia & Bettinelli, 2013). Cest pourquoi cette recherche 39propose dadopter une approche configurationnelle et dinvestiguer comment lOE, le type de Chief Executive Officer (CEO) (familial vs non familial) et le degré dhostilité de lenvironnement concurrentiel se combinent pour expliquer le niveau de performance des entreprises familiales.

Pour appréhender cette problématique, cette étude se réfère principalement à la théorie du patrimoine socio-émotionnel (Gomez-Mejia et al., 2007). Selon celle-ci, les objectifs non financiers joueraient un rôle prépondérant dans les choix stratégiques et lefficacité des entreprises familiales. En effet, les décisions prises par les membres familiaux seraient orientées vers la minimisation des pertes de patrimoine socio-émotionnel au détriment des enjeux financiers auxquels lorganisation est confrontée (Berrone et al., 2010 ; Gomez-Mejia et al., 2011). Lengagement dun CEO familial constitue une belle illustration de ce phénomène. Bien quune telle nomination népotique permette dassurer la perpétuation de la dynastie familiale (Berrone et al., 2012), elle est aussi susceptible daltérer la qualité du capital humain à la tête de la firme et dengendrer une utilisation inefficace des ressources en raison de lenracinement potentiel du dirigeant (Cruz et al., 2012). À linverse, un CEO non familial est souvent recruté sur la base de critères objectifs quant à ses compétences et son expertise. Considérant lentreprise familiale comme un tremplin professionnel (Mehrotra et al., 2013), il accorde également une importance prépondérante à limplémentation harmonieuse des initiatives entrepreneuriales afin de se valoriser sur le marché du travail via ses accomplissements et ses succès (Jaskiewicz & Luchak, 2013). Pour ces raisons, nous suggérons quun CEO non familial présentera de meilleures dispositions pour réaliser le potentiel financier de lOE. Ce constat sera dautant plus prégnant dans un environnement hostile caractérisé par une forte concurrence, très peu dopportunités et un accès compliqué aux ressources (Werner et al., 1996).

Notre méthodologie sappuie sur une analyse de régressions linéaires multiples réalisée sur un échantillon de 284 entreprises familiales non cotées interrogées dans le cadre dune enquête par questionnaire menée en Belgique. Les résultats obtenus offrent plusieurs contributions à la littérature sur lentrepreneuriat et les entreprises familiales. Tout dabord, en proposant et testant une approche configurationnelle, cet article étend notre compréhension de la relation OE-performance dans le contexte 40des entreprises familiales, un sujet en plein essor dans la littérature académique (Arzubiaga et al., 2018). En démontrant comment le caractère familial du CEO affecte la relation OE-performance en fonction de lhostilité de lenvironnement concurrentiel, cette étude contribue au débat sur limportance de contextualiser linfluence des caractéristiques des dirigeants sur la performance des entreprises familiales (Miller et al., 2013). Finalement, cet article fournit des éléments de réponses quant à limpact des mécanismes de préservation du patrimoine socio-émotionnel sur la relation OE-performance, une question négligée dans la littérature qui utilise principalement cette théorie pour expliquer les différences entre entreprises familiales et non familiales (Naldi et al., 2013).

Ce papier est structuré de la manière suivante. Dans la première section, nous passons en revue la littérature existante et développons les hypothèses. Ensuite, nous expliquons léchantillonnage et la méthodologie. Enfin, nous discutons nos résultats avant de conclure avec les implications pour la littérature et la présentation de pistes de recherches futures.

1. La relation entre lorientation entrepreneuriale (OE) et la performance des entreprises familiales

Au cours des dernières décennies, le concept dOE est devenu un sujet majeur de la littérature sur lentrepreneuriat (Covin & Lumpkin, 2011). Historiquement, la première définition de lOE est issue des travaux de Miller (1983). En effet, Miller (1983, p. 771) définit les entreprises entrepreneuriales comme « celles qui sont orientées vers linnovation dans le couple produit – marché en prenant des initiatives risquées et qui sont les premières à développer des innovations de manière proactive pour devancer leurs concurrents ». LOE est donc considérée comme un construit unidimensionnel où linnovation, la proactivité et la prise de risques covarient (Covin & Slevin, 1989). Même si certaines recherches proposent des dimensions supplémentaires pour capter lessence de lOE (Lumpkin et Dess, 1996), ou soulignent sa multi-dimensionnalité (Casillas et al., 2010), la conceptualisation unidimensionnelle est la plus fréquemment 41utilisée dans la littérature académique (George, 2011). Pour cette raison, cet article adoptera cette conception de lOE.

Plusieurs études considèrent que les entreprises familiales représentent un cadre unique pour analyser lesprit dentreprendre et plus particulièrement la relation OE-performance (Schepers et al., 2014). En effet, celles-ci sont caractérisées par un ensemble dobjectifs et de ressources spécifiques qui sont susceptibles daffecter leur capacité à faire face aux défis imposés par lOE (Casillas et al., 2010). Les précédentes études sont unanimes et démontrent que lOE influence positivement la performance, et ce, indépendamment dautres facteurs pouvant modérer cette relation (Arzubiaga et al., 2018 ; Chirico et al., 2011 ; Schepers et al., 2014). Les entreprises familiales orientées vers des comportements entrepreneuriaux hautement innovants, risqués et proactifs présenteraient donc de meilleurs niveaux de performance. Par conséquent, lhypothèse suivante est proposée :

H1 : L OE exerce une influence positive sur la performance des entreprises familiales.

2. Le rôle modérateur du type de CEO
sur la relation OE-performance

LOE reflète le style de prise de décisions des dirigeants, et plus particulièrement du CEO, qui est lexécutif disposant de la plus grande influence sur la stratégie entrepreneuriale de lorganisation (Simsek et al., 2010). Ce constat est dautant plus dactualité au sein des entreprises non cotées, où le CEO exerce une influence significative sur la stratégie et donc sur lOE (Harris & Ogbonna, 2007). Sappuyant sur la théorie des échelons supérieurs (Hambrick & Mason, 1984), plusieurs études démontrent que les caractéristiques démographiques des dirigeants affectent les initiatives entrepreneuriales de lentreprise (Simsek et al., 2010). Dans le contexte des entreprises familiales, le lien de parenté du CEO est fréquemment utilisé pour expliquer leurs différences dans ladoption de de comportements entrepreneuriaux. Par exemple, Huybrechts et al. (2013) démontrent que les sociétés familiales dirigées par un CEO non familial sont plus enclines à prendre des risques entrepreneuriaux. Dans 42le même ordre didée, Block et al. (2013) apportent la preuve empirique que les exécutifs familiaux sont réticents à lidée de favoriser des innovations radicales et optent davantage pour des innovations incrémentales. Bien que ces recherches étendent notre connaissance de limpact du lien de parenté du CEO sur les comportements entrepreneuriaux, elles ne permettent pas de tirer de conclusion quant à la capacité dun CEO familial ou non familial à capitaliser sur son OE.

Cette problématique nest pas simple à appréhender dun point de vue théorique. Les travaux initiaux sur la théorie de lagence (Jensen et Meckling, 1976) suggèrent que limplication de la famille dans la propriété et la direction favoriserait un alignement des intérêts entre actionnaires et dirigeants, limitant ainsi les coûts dagence et les comportements opportunistes. De ce fait, le CEO familial disposerait de davantage de ressources pour implémenter ses choix entrepreneuriaux de manière optimale. Cependant, plusieurs auteurs soulignent lexistence de coûts dagence liés à la nature familiale de la firme (Chrisman et al., 2004). Par exemple, laltruisme résulte souvent en loctroi de privilèges aux membres familiaux au travers de nominations népotiques ou de rémunérations abusives. Un CEO familial incompétent et bénéficiant de larges émoluments peut donc être amené à faire face aux enjeux de projets entrepreneuriaux dont il/elle na pas la maîtrise. Cet exemple illustre bien le rôle considérable joué par la composante affective de lentreprise familiale. La rationalité économique des actionnaires-dirigeants présupposée par la théorie de lagence est dès lors remise en cause.

Cest dans ce contexte qua la théorie de lagence comportementale émerge afin de prendre en compte les préférences des propriétaires et leur influence sur les choix stratégiques de la firme (Wiseman & Gomez-Mejia, 1998). Sinspirant de ces avancées théoriques, Gómez-Mejia et al. (2007) développent la théorie du patrimoine socio-émotionnelle dans laquelle sinscrit la suite de cet article. Selon celle-ci, les actionnaires et dirigeants familiaux optent pour des actions stratégiques visant à protéger la valeur affective quils retirent de leur implication dans lorganisation (Gomez-Mejia et al., 2011). La préservation de ce patrimoine non financier implique la poursuite dobjectifs tels que le maintien du contrôle familial, la pérennisation de la dynastie familiale, la sauvegarde de la réputation et de limage de la famille et de lentreprise, le maintien de liens sociaux et le renforcement de lattachement émotionnel à 43lentreprise (Berrone et al., 2012). De nombreuses illustrations empiriques valident la prédominance des considérations socio-émotionnelles sur les prérogatives financières de la firme. Dans leurs travaux précurseurs, Gomez-Mejia et al. (2007) révèlent que les actionnaires familiaux des fabriques dhuile dolive espagnoles sont particulièrement réticents à lidée de rejoindre une coopérative en dépit des gains defficience quune telle opération pourrait engendrer. En effet, le risque de voir lidentité et lautonomie familiales sétioler atténuerait leur inclinaison à opter pour ce choix stratégique. Berrone et al. (2010) démontrent quant à eux que les entreprises familiales polluent moins que leurs homologues non familiales. Ils expliquent ce phénomène par laversion aux pertes socio-émotionnelles plus prononcée des actionnaires familiaux qui perçoivent un accroissement du niveau de pollution de lentreprise comme une menace potentielle sur la perpétuation dune bonne réputation vis-à-vis des parties prenantes.

La capacité de la famille à protéger la valeur affective découlant de sa participation dans lentreprise dépend de nombreux paramètres, y compris la composition de son équipe dirigeante. En ce sens, Naldi et al. (2013) soulignent que la présence dun CEO familial représente un mécanisme de préservation du patrimoine socio-émotionnel, permettant à la famille datteindre les objectifs non économiques mentionnés ci-dessus. En effet, la présence dun dirigeant familial est une manière de conserver le contrôle de lentreprise, dassurer la succession dynastique et de soutenir la réputation familiale (Gomez-Mejia et al., 2011). Dailleurs, cette capacité à assurer la protection du patrimoine socio-émotionnel est dautant plus marquée au sein des entreprises familiales non cotées où le CEO familial dispose dune plus grande latitude dans la prise de décision en raison dun contrôle moins prononcé de la part du marché (Lubatkin et al., 2005). Les considérations non financières jouent donc un rôle prépondérant dans le contexte analysé dans cette recherche.

La présence dun CEO familial est susceptible daltérer la conversion de lOE en gains financiers pour plusieurs raisons. Premièrement, les CEO familiaux obtiennent souvent leur poste suite à des nominations népotiques afin de maintenir le contrôle familial et ainsi préserver le patrimoine socio-émotionnel de la famille (Mehrotra et al., 2013). Bien quils puissent profiter dune transmission efficace de connaissances sur le processus entrepreneurial de lorganisation par les générations précédentes, 44le choix du dirigeant parmi les membres de la famille est établi sur la base dun pôle restreint de candidats potentiels (Salvato et al., 2012), ce qui peut priver lentreprise dun dirigeant non familial disposant dune plus grande expertise (Mehrotra et al., 2013). De plus, la nomination dun membre de la famille au poste de CEO va souvent de pair avec un haut degré denracinement managérial (Gomez-Mejia et al., 2001), favorisant la consommation des ressources de lentreprise par les membres familiaux (Bertrand & Schoar, 2006). Enfin, les CEO familiaux sont moins disposés à utiliser des fonds extérieurs pour financer leurs projets entrepreneuriaux car louverture du capital ou le recours à lendettement sont perçus comme une menace sur le contrôle familial (Lardon et al., 2017). Compte-tenu du caractère particulièrement contraignant de lOE en termes de ressources humaines et financières, la présence dun CEO familial serait dès lors un frein au succès entrepreneurial.

Certaines entreprises familiales engagent un CEO non familial détenant souvent des connaissances et une expertise spécifique dont ne disposent pas les membres familiaux (Bennedsen et al., 2007). En effet, de précédents travaux démontrent que les dirigeants non familiaux possèdent des compétences techniques et managériales plus adaptées à la gestion des projets hautement innovants et risqués (Perez-Gonzalez, 2006). De surcroît, les CEO non familiaux sont généralement moins concernés par la préservation du patrimoine socio-émotionnel car ceux-ci souhaitent avant tout assurer la sécurité de leur emploi (Shleifer & Vishny, 1989) et maximiser leur valeur sur le marché du travail en contribuant à la performance de lentreprise (Jaskiewicz & Luchak, 2013). Par conséquent, ils éviteront de détourner les ressources de lorganisation et nhésiteront pas à passer par le marché des capitaux pour assurer la viabilité dun projet entrepreneurial. Pris dans leur ensemble, ces arguments suggèrent que la présence dun CEO non familial devrait améliorer la capacité de lentreprise à capitaliser sur son OE. Sur la base de ce raisonnement, lhypothèse suivante est posée :

H2 : La présence d un CEO non familial modère de manière positive la relation entre l OE et la performance des entreprises familiales non cotées, de telle sorte que la relation entre l OE et la performance est plus positive en présence d un CEO non familial.

45

3. La configuration de lOE, du type de CEO
et de lhostilité de lenvironnement

Bien que lanalyse du rôle modérateur du lien de parenté du CEO fournisse une vision plus fine de la relation OE-performance, davantage de précision peut être apportée en optant pour une approche configurationnelle (Ketchen et al., 1993). Une telle perspective suggère que la performance de la firme est tributaire dun alignement entre son OE, sa structure organisationnelle et son environnement (Wiklund & Shepherd, 2005). Les entreprises ne parvenant pas à atteindre un tel alignement présenteraient donc de plus faibles performances (Casillas et al., 2010). Sinscrivant dans ce mode de raisonnement, la suite de cette étude propose danalyser comment lhostilité environnementale affecte la capacité des entreprises familiales dirigées par un CEO familial ou non familial à gérer leur OE.

Un environnement hostile implique la présence de facteurs externes défavorables pour lentreprise, résultant de changements radicaux dans le secteur dactivité, de nouvelles réglementations contraignantes, de fortes rivalités concurrentielles, ou de la faible fidélité des clients (Covin & Slevin, 1989). Dans ce type denvironnement, le taux déchec est important à cause des menaces constantes pour la survie de lentreprise (Slevin & Covin, 1997). Pour y faire face, il est largement accepté que les entreprises doivent adopter une posture entrepreneuriale forte (Moreno & Casillas, 2008). En effet, les entreprises avec un haut potentiel entrepreneurial identifient et exploitent plus aisément les rares opportunités (Lumpkin & Dess, 2001), leur permettant de prendre lavantage sur des concurrents conservateurs (Moreno & Casillas, 2008).

Dans un environnement hostile, la présence dun CEO familial peut savérer particulièrement néfaste à la conversion pécuniaire de lOE. Tout dabord, un CEO familial sera généralement moins novateur puisque de telles actions entrepreneuriales impliquent souvent une perte de patrimoine socio-émotionnel résultant de lutilisation dexpertise et/ou de capitaux externes (Gomez-Mejia et al., 2011). En effet, le CEO familial est plus enclin à favoriser des innovations incrémentales quil est à même de gérer en toute indépendance (Block et al., 2013), ce qui ne 46répond pas aux exigences des environnements hostiles. De plus, comme mentionné précédemment, un CEO familial possède souvent moins de compétences managériales et techniques pour gérer des innovations radicales (Perez-Gonzales, 2006). Dans un environnement hostile, ce manque de qualité du capital humain renforce les conséquences négatives de lOE sur la performance de lentreprise.

A contrario, les dirigeants non familiaux sont plus enclins à prendre des risques entrepreneuriaux et à poursuivre des projets innovants répondant aux contraintes imposées par les environnements hostiles (Block et al., 2013). Comme précisé antérieurement, les CEO non familiaux se concentrent moins sur les prérogatives socio-émotionnelles et attribuent une plus grande importance à la réalisation des objectifs maximisant la performance afin daméliorer leur position sur le marché du travail (Jaskiewicz & Luchak, 2013). Ainsi, les entreprises familiales dirigées par un CEO non familial présenteront une plus grande inclinaison à adopter une posture entrepreneuriale agressive et en phase avec les exigences dun environnement hostile (Lumpkin & Dess, 2001). De plus, la meilleure connaissance du marché concurrentiel par les exécutifs non familiaux (Perez-Gonzales, 2006) savère particulièrement utiles pour identifier et exploiter les rares opportunités émergeant dans ce contexte. Enfin, la plus grande facilité des CEO non familiaux à accéder à des canaux de financement externe constitue un avantage non négligeable pour faire face aux enjeux entrepreneuriaux et à la limite de ressources imposées par les environnements hostiles (Lardon et al., 2017). Sur la base de cet argumentaire, lhypothèse suivante est proposée :

H3 : Dans un environnement très hostile, la performance des entreprises familiales sera la plus élevée si elles présentent un haut niveau d OE et sont gérées par un CEO non familial.

47

4. Méthodologie

4.1. Données et échantillonnage

Les données empiriques utilisées dans cette étude proviennent à la fois dune enquête par questionnaire réalisée sur le territoire belge et de la base de données financières Belfirst fournies par la Bureau Van Dijk. Les questionnaires visaient à collecter des informations sur les caractéristiques des entreprises familiales non cotées telles que leur structure actionnariale, la composition de leur équipe dirigeante et de leur conseil dadministration, leur stratégie entrepreneuriale et leur perception de lenvironnement économique dans lequel elles évoluent. La base de données Belfirst collectant et structurant linformation des comptes annuels publiés par les entreprises belges a été utilisée afin dobtenir des informations concernant les indicateurs financiers utilisés et daffiner la population ciblée dans le cadre de ladministration des questionnaires. Lutilisation de ces deux sources dinformation dans la constitution de la base de données permet de minimiser les biais communs de méthode fréquemment identifiés dans la littérature (Podsakoff et al., 2003).

La population soumise à lenquête a été identifiée en appliquant plusieurs critères dans la base de données Belfirst. Tout dabord, seules les entreprises wallonnes ont été sélectionnées afin de limiter les potentiels biais de traduction inhérents à ladministration des questionnaires hors de cette région. Les entreprises des secteurs financiers, sociaux et éducatifs ainsi que les entreprises cotées ont été exclues. Les microentreprises de moins de 10 travailleurs ont également été éliminée de la population car elles disposent rarement dune structure managériale formalisée et dune stratégie entrepreneuriale élaborée (Cruz et al., 2012). Ensuite, les potentielles entreprises familiales ont été ciblées en appliquant des critères de sélection additionnels. Lors de cette étape, seules les entreprises dont la dénomination correspondait au nom de lun de ses directeurs ainsi que celles où deux ou trois directeurs portaient le même nom de famille ont été sélectionnées afin de détecter une possible implication familiale dans lentreprise. Un groupe de 4.467 entreprises familiales potentielles a ainsi été identifié, permettant de procéder à un échantillonnage aléatoire de 2.500 entreprises. Les questionnaires ont été envoyés au CEO de chaque 48entreprise car il sagit souvent du membre de léquipe dirigeante le plus légitime dans lélaboration de la stratégie entrepreneuriale. Après deux vagues denvois, 301 réponses ont été collectées, ce qui correspond à un taux de réponse de 12,04 %. Afin de confirmer le caractère familial des entreprises répondantes, une définition opérationnelle prenant en compte lessence familiale de lorganisation et limplication de la famille dans lactionnariat a été appliquée (Rutherford et al., 2008). Dès lors, une entreprise devait répondre aux deux critères suivants pour être considérées comme familiale : le CEO perçoit lentreprise comme étant familiale et au moins 50 % des actions sont détenues par les membres dune même famille (Huybrechts et al., 2013). Finalement, 284 entreprises ont été retenues suite à la suppression de 5 entreprises non familiales et 12 pour lesquels les questionnaires étaient incomplets ou mal complétés.

Afin de contrôler pour des potentiels biais de non réponse, les caractéristiques démographiques des entreprises répondantes (taille, âge, secteur dactivité) ont été comparées à celles des 2.500 entreprises auxquelles les questionnaires avaient été initialement administrés. Les tests de Student et de Chi-Carré nont révélé aucune différence significative. De surcroît, cette procédure a été répliquée en comparant les caractéristiques démographiques des 100 premiers répondants à lenquête au 100 derniers, sans quaucune différence significative ne soit observée. Ces résultats confirment donc que les biais de non réponse ne constituent pas un problème majeur dans cette étude. Enfin, la représentativité de léchantillon a également été testée en comparant les caractéristiques démographiques des 284 entreprises familiales non cotées aux 4.467 potentielles entreprises familiales constituant lentièreté de la population considérée. À nouveau, aucune différence significative na été observée, confirmant la représentativité de léchantillon.

4.2. Variables sélectionnées

Variable dépendante. La performance de lentreprise est mesurée par le pourcentage de croissance des ventes au cours de la période 2012-2015. Cette mesure objective est la plus fréquemment utilisée dans les études analysant la relation entre lOE et la performance (Casillas et al., 2010). De plus, utiliser la croissance des ventes est particulièrement pertinent car cet indicateur permet de capter laugmentation réelle des outputs de lentreprise, dautres indicateurs tels que la croissance des actifs ou 49du personnel reflétant davantage une augmentation dans les inputs de lorganisation (Davidsson & Wiklund, 1999).

Variable indépendante. Lorientation entrepreneuriale (OE) est mesurée à laide de léchelle développée par Covin et Slevin (1989). Cette mesure permet dapprécier le degré dinnovation, de proactivité et de prise de risque de lorganisation en proposant au CEO dévaluer chacune de ses dimensions sur la base de 9 items auxquels est appliqué une échelle de Likert fluctuant entre 1 et 5. Le choix de cette échelle repose sur le fait quelle est la plus communément admise dans la littérature académique et que sa validité ainsi que sa fiabilité ont été démontrées dans de nombreuses études (George, 2011). De plus, la perception du CEO concernant lOE a été mesurée en 2011 afin de disposer dune mesure retardée par rapport à la variable dépendante et dainsi palier de potentiels problèmes de simultanéité dans la relation étudiée (Schepers et al., 2014). Dans cette recherche, les 3 dimensions de lOE étaient fortement corrélées et lalpha de Cronbach pour lensemble du construit de lOE présentait une valeur élevée (α = 0,87), confirmant le caractère unidimensionnel et la validité psychométrique de cette variable.

Variables modératrices. La variable CEO non familiale est une variable binaire codée avec une valeur de 1 si le CEO nest pas un membre de la famille et une valeur de 0 dans le cas contraire. Lhostilité de lenvironnement est mesurée à laide dune échelle développée et testée par Slevin et Covin (1997). Concrètement, six affirmations relatives à lhostilité de lenvironnement concurrentiel ont été proposées aux CEO qui devaient nous faire part de leur ressenti pour chaque affirmation sur la base dune échelle allant de 1 « Absolument pas daccord » à 7 « Tout à fait daccord ». La valeur relativement élevée de lalpha de Cronbach (α = 0,83) permet de confirmer la validité psychométrique de la mesure.

Variables de contrôle. Plusieurs facteurs susceptibles daffecter la performance des entreprises familiales sont également inclus sous la forme de variables de contrôle. Lâge de lentreprise est mesuré comme le logarithme du nombre dannées écoulées depuis le lancement de lactivité de la firme (Leonard-Barton, 1992). La taille de lentreprise correspond au logarithme du nombre de salariés à temps plein (Miller et al., 2013). Trois caractéristiques individuelles du CEO sont également incluses dans le modèle : son niveau déducation, son âge ainsi que la durée de son mandat dexécutif. Le niveau déducation du CEO est une variable 50binaire prenant la valeur de 1 si le CEO a obtenu un diplôme universitaire et de 0 dans le cas contraire (Bahgat et al., 2010). Lâge du CEO est une variable continue calculée comme le logarithme de lâge du CEO (Hambrick & Mason, 1984). La durée du mandat du CEO est obtenue en prenant le logarithme du nombre dannées écoulées depuis son entrée en fonction à ce poste (Henderson et al., 2006). Deux composantes essentielles afférents à la gouvernance de lentreprise sont également intégrées dans le modèle : la taille du conseil dadministration et la dualité CEO-président du conseil dadministration. La taille du conseil dadministration correspond au logarithme du nombre de membres composant cet organe de gouvernance (Krause et al., 2014). La dualité CEO-président du conseil dadministration est une variable binaire prenant la valeur de 1 si le CEO de lentreprise est également le président du conseil dadministration et de 0 dans le cas contraire (Elsayed, 2011). Enfin, des variables de contrôle afférentes au secteur dactivité sont également intégrées dans le modèle afin de déterminer linfluence potentielle que pourrait exercer laffiliation sectorielle sur la performance des entreprises familiales (Miller et al., 2013). Cinq variables binaires ont été générées en prenant en compte cinq méta-secteurs prédominants dans léconomie belge : la manufacture (16,21 %), les services (32,04 %), le commerce (23,94 %), la construction (15,14 %) et lagriculture (12,67 %). La variable binaire relative au secteur agricole constituait la variable sectorielle de référence et na dès lors pas été incluse dans le modèle car il sagissait de laffiliation sectorielle la moins fréquemment représentée dans léchantillon.

5. Résultats

5.1. Statistiques descriptives et corrélations

51

Tab . 1 – Moyennes, écart-types et corrélations
de léchantillon dentreprises familiales.

Variables

Moyenne

Écart-type

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

1. Performance

5.314

3.124

1.00

2. OE

26.341

6.351

.18**

1.00

3. CEO non familial

.217

.041

.17**

.16**

1.00

4. Hostilité environnementale

18.846

6.894

.03

.03

.03

1.00

5. Âge de lentreprise (Ln)

3.388

0.841

.09

-09

.08

.04

1.00

6. Taille de lentreprise (Ln)

3.850

2.319

-08

.08

.09

.07

.14**

1.00

7. Âge du CEO (Ln)

3.988

1.873

-.07

-10*

-.13*

.05

.10*

.14**

1.00

8. Niveau déducation du CEO

.665

.312

.11*

.11*

.18**

.05

.15**

.11*

.10*

1.00

9. Durée de mandat du CEO (Ln)

2.542

1.131

-.09

-06

-.14**

.06

.09

.07

.08

-.06

1.00

10. Taille du CA (Ln)

.788

.319

.03

.04

.11*

.01

.08

.11*

-.07

-.02

-.04

1.00

11. Dualité CEO-Président du CA

.789

.321

-.10*

.07

-.11*

.02

.10*

-.03

.09

-.10*

.06

.15**

1.00

* p ≤.10. ** p ≤.05. *** p ≤.01.

52

Les statistiques descriptives et les corrélations sont présentées dans le tableau 1. La valeur moyenne du score obtenu pour lOE est de 26,3 points sur 45, ce qui correspond aux niveaux modérés fréquemment observés pour cette variable dans la littérature sur les entreprises familiales (Schepers et al., 2014). La valeur moyenne de lhostilité environnementale est également modérée avec un score de 18,8 sur 42 points. Aucune différence dans la perception de lhostilité de lenvironnement nest observée entre les CEO familiaux et non familiaux puisque la corrélation entre le statut non familial du CEO et lhostilité environnementale est non significative. Il apparaît également que lOE est positivement et significativement corrélée à la performance (p <.05) alors quune corrélation non significative est rapportée entre lhostilité de lenvironnement et la performance.

5.2. Analyse des régressions

Tab. 2 – Régressions sur la relation OE-performance.

Model 1

Model 2

Model 3

Constante

4.10**

(1.07)

4.13**

(1.09)

4.13**

(1.02)

Âge de lentreprise

0.97

(0.68)

.84

(.71)

.93

(.71)

Taille de lentreprise

-1.21

(1.01)

-1.27

(.99)

-1.24

(1.06)

Âge de CEO

-.67

(.59)

-.64

(.51)

-.63

(.54)

Niveau déducation du CEO

.47*

(.19)

.43*

(.16)

.32**

(.11)

Durée de mandat du CEO

-.98

(.74)

-.99

(.69)

-.93

(.80)

Taille du CA

1.23

(.98)

1.10

(.93)

1.21

(.97)

Dualité CEO-Président du CA

-.31

(.21)

-.29

(.19)

-.31

(.22)

Manufacture

.12

(.08)

.11

(.09)

.14

(.11)

53

Service

.14

(.10)

.11

(.08)

.13

(.09)

Commerce

-.21

(.17)

-.23

(.19)

-.27

(.23)

Construction

-.04

(.03)

-.05

(.04)

-.06

(.05)

OE

.19**

(.04)

.21**

(.06)

.22**

(.05)

CEO non familial

.11*

(.04)

.10*

(.03)

.13*

(.07)

Hostilité environnementale

.14

(.11)

.16

(.13)

.12

(.09)

EO*CEO non familial

.12**

(.05)

.17**

(.06)

EO* hostilité environnementale

.07

(.04)

.13

(.04)

CEO non familial* hostilité environnementale

0.12

(.09)

.14

(.11)

OE*CEO non familial* hostilité environnementale

.38**

(.12)

R 2

.21

.29

.38

Δ R 2

.21***

.08***

.09***

F-test

8.03***

9.34***

9.87***

N

284

284

284

* p ≤.10. ** p ≤.05. *** p ≤.01. Le secteur agricole constitue laffiliation sectorielle de référence exclue du modèle.

Les résultats des régressions linéaires multiples par la méthode des moindres carrés ordinaires sont présentées dans le tableau 2. Pour chaque spécification économétrique, les variables indépendantes ont été standardisées pour limiter les problèmes potentiels de multicolinéarité (Chirico et al., 2011). Le modèle 1 propose de tester limpact direct des variables indépendantes sur la variable dépendante. Conformément à lhypothèse 1, lOE exerce une influence positive et significative sur la performance (β =.19, p <.05). Le modèle 2 inclut des termes dinteraction double afin dexaminer le rôle modérateur du statut non familial du CEO 54sur la relation entre lOE et la performance. Le terme dinteraction OE* CEO non familial est positif et significatif (β =.12, p <.05), confirmant linfluence modératrice de la présence dun CEO non familial suggérée par lhypothèse 2. Finalement, le modèle 3 inclut le terme dinteraction triple OE*CEO non familial*Environnement hostile afin de déterminer si une approche configurationnelle offre une vision plus complète de la relation OE-performance. Il apparaît que ce terme dinteraction exerce une influence positive et significative sur la performance (β =.38, p <.01), ce qui permet de valider lhypothèse 3 selon laquelle la relation entre lOE et la performance est plus fortement positive dans les entreprises familiales dirigées par un CEO non familial opérant dans un environnement concurrentiel hautement hostile.

Par ailleurs, il est aussi pertinent de souligner que la qualité de la spécification économétrique de chaque modèle sest significativement améliorée à chaque étape de la procédure des régressions linéaires multiples. En effet, le changement dans le R2 lors du passage du modèle 1 prenant en compte leffet direct de lOE sur la performance au modèle 2 proposant une approche contingente de cette relation est positif et significatif (p <.05). Un constat similaire est observé lors de la transition de lapproche contingente (modèle 2) à lapproche configurationnelle (modèle 3). Dans leur ensemble, ces résultats confirment que lébauche de configurations prenant en compte des facteurs de contingence internes et externes à lentreprise permet doffrir une vision plus précise et pertinente de la relation entre lOE et la performance.

Afin de mieux interpréter ces résultats, linfluence du terme dinteraction triple est représentée graphiquement dans la figure 1. Conformément aux recommandations dAiken et West (1991), les différents niveaux (hauts et bas) dhostilité environnementale ont été déterminés respectivement en ajoutant ou en soustrayant lécart-type de la moyenne de cette variable. Les graphes obtenus permettent de confirmer que lOE engendre un effet positif sur la performance des entreprises familiales dirigées par un CEO non familial, et plus particulièrement lorsquelles sont confrontées à des environnements hostiles. A contrario, la présence dun CEO familial savère particulièrement néfaste pour la conversion de lOE en gains de performance lorsque lentreprise familiale doit faire face à de hauts niveaux dhostilité environnementale.

55

Fig. 1 – La relation OE-performance dans les entreprises familiales.

5.3. Robustesse des résultats

Afin de sassurer de la robustesse des résultats, des tests additionnels ont été menés. Tout dabord, la problématique de lhétéroscédasticité a été prise en compte en utilisant les tests de Breusch-Pagan/Cook-Weisberg et de White. Alors que le premier détermine si la variance estimée des résidus dune régression est liée à la variance des variables indépendantes, le second indique si la variance résiduelle de chaque variable indépendante reste constante dans le modèle (Hamilton, 2009). Lapplication de cette procédure de tests à chaque modèle a permis de mettre en avant labsence de problèmes dhétéroscédasticité. De plus, les facteurs dinflation de variance (VIF) ont été calculés pour chaque variable afin de sassurer de labsence de multicolinéarité dans les différents modèles proposés. Le plus haut VIF (4,74) se trouve largement sous le seuil de 10 qui constitue la norme la plus fréquemment appliquée pour détecter la présence de multicolinéarité (Hamilton, 2009).

Par ailleurs, les régressions ont également été répliquées en utilisant un second indicateur de performance qui prend en compte le cycle de vie des secteurs dactivité dans lesquels évoluent les entreprises de léchantillon. Ainsi, la différence entre le taux de croissance des ventes à 563 ans expérimenté par chaque firme et la moyenne du taux de croissance à 3 ans observé dans le secteur où elle opère a été calculé et utilisé comme mesure de la performance (Casillas et al., 2010). Enfin, les régressions ont été une nouvelle fois répliquées avec un troisième indicateur de performance mesurant la capacité des actifs de lentreprise à générer du résultat à plus court terme (Lumpkin et al., 2010), à savoir le return on assets (ROA). Celui-ci correspond au résultat net divisé par le total actif au cours de lannée 2012 afin de prendre en compte leffet retard de lOE, mesurée en 2011, sur la performance. Les résultats obtenus avec ces deux indicateurs ne diffèrent pas de ceux révélés dans le tableau 2, confirmant ainsi la robustesse des résultats.

5.4. Discussion et conclusion

Sur la base dun échantillon de 284 entreprises familiales belges, cette étude visait à analyser la relation entre lOE et la performance. Les résultats obtenus ont permis de mettre en évidence limportance de considérer des facteurs de contingence internes et externes à lorganisation afin dobtenir une vision plus fine et complète de cette relation dans un contexte mois fréquemment exploré, à savoir celui des entreprises familiales (Arzubiaga et al., 2018). Au travers dune approche configurationnelle, il a ainsi été démontré que lengagement dun membre familial au poste de CEO altère la faculté de lentreprise à capitaliser sur son OE, cet effet se renforçant lorsque lhostilité de lenvironnement augmente. À linverse, la présence dun CEO non familial permet de renforcer la relation positive entre lOE et la performance, et plus spécifiquement dans des environnements concurrentiels hautement hostiles. Considérés dans leur ensemble, ces résultats permettent de confirmer la nécessité daller au-delà dune argumentation simpliste selon laquelle lOE constituerait une condition suffisante au succès de lorganisation (Wiklund & Shepherd, 2005).

Daprès la théorie du patrimoine socio-émotionnel, cette étude suggère également que la présence dun CEO familial peut être considérée comme un mécanisme de préservation des aspirations socio-émotionnelles de la famille engendrant des inefficiences en termes de gestion des initiatives entrepreneuriales (Schepers et al., 2014). En effet, les CEO familiaux sont plus enclins à prendre des décisions visant à limiter les pertes socio-émotionnelles telles que le maintien du contrôle familial ou la perpétuation de lhéritage de la famille en sentourant 57de membres familiaux dans léquipe dirigeante ou en évitant de recourir au marché des capitaux (Gomez-Mejia et al., 2011). De tels choix résulteraient en une moindre qualité du capital humain ainsi quen un manque de ressources financières pour faire face à la gestion de lOE (Schepers et al., 2014). Cet effet néfaste serait dès lors accentué dans des environnements concurrentiels hostiles où les ressources financières et intellectuelles savèrent cruciales pour assurer la conversion des initiatives entrepreneuriales en gains de performance (Casillas et al., 2010). Ce résultat est par ailleurs en adéquation avec ceux de létude réalisées par Naldi et al. (2013) qui démontrent que la priorisation des objectifs socio-émotionnels via la nomination dun membre familial au poste de CEO affecte négativement la performance des entreprises familiales dans des contextes particulièrement contraignant en termes de ressources humaines et financières.

En revanche, cette recherche démontre que la nomination dun CEO non familial pourrait constituer une solution adaptée dans ce type denvironnement car ce dernier serait moins disposé à céder aux revendications socio-émotionnelles de la famille. Davantage orienté vers la maximisation de la performance financière de lentreprise, il est susceptible dimpliquer un plus grand nombre de membres non familiaux dans la gestion des projets entrepreneuriaux et de sorienter vers le marché des capitaux lorsque les défis entrepreneuriaux limposent (Jaskiewicz & Luchak, 2013). De plus, de précédents travaux suggèrent que ce type dexécutif dispose dun éventail plus large de compétences et dexpertise dans la gestion des projets hautement innovants et risqués (Bennedsen et al., 2007), mais aussi de meilleures capacités de leadership pour orchestrer efficacement les ressources humaines et financières susmentionnées et ainsi faciliter le succès des initiatives entrepreneuriales dans des environnements hostiles.

Cette étude contribue à la littérature sur lentrepreneuriat et les entreprises familiales de plusieurs manières. Tout dabord, bien que de nombreux travaux se soient intéressés à la relation entre lOE et la performance (Rauch et al., 2009), ce sujet crucial pour la survie et la pérennité des entreprises familiales ne reçoit une attention accrue que depuis ses dernières années (Arzubiaga et al., 2018). En proposant une approche configurationnelle investiguant leffet simultané de lOE, du statut familial ou non familial du CEO et de lhostilité de lenvironnement 58sur la performance des entreprises familiales, cette recherche permet dalimenter le débat sur lintensité de la relation entre lOE et la performance et proposer une vision plus fine et complète de cette problématique. De surcroît, cette étude apporte aussi de nouveaux éclaircissements sur linfluence exercée par les caractéristiques démographiques du CEO sur la performance des entreprises familiales. En accord avec de récents travaux insistant sur la nécessité de contextualiser linfluence exercée par les CEO familiaux et non familiaux sur la performance (Miller al., 2013), cette recherche étend notre connaissance du « comment » et du « quand » le statut familial ou non familial du CEO affecte le succès entrepreneurial des entreprises familiales. Enfin, cet article sinscrit dans la lignée des récents appels à communication sur lhétérogénéité des entreprises familiales (Chua et al., 2012). Plus spécifiquement, alors que la théorie du patrimoine socio-émotionnel est fréquemment utilisée afin dexpliquer les différences stratégiques entre entreprises familiales et non familiales (Gomez-Mejia et al., 2011), cette étude suggère quelle peut aussi expliquer la variabilité de la performance observée au sein dun groupe hétérogène dentreprises familiales (Naldi et al., 2013). En considérant la présence dun CEO familial comme un moyen daccentuer la capacité de la famille à préserver son patrimoine socio-émotionnel au détriment de la performance, cette recherche corrobore la proposition de Berrone et al. (2012) selon laquelle la prédominance des aspirations socio-émotionnelles, et donc son impact sur les résultats, fluctue en fonction de la structure de management de lentreprise.

Cet article offre également dimportantes implications pratiques. Pour les familles entrepreneuriales, il est nécessaire denvisager prudemment le choix de nommer un CEO familial à la tête de leur entreprise. Ainsi, plutôt que de procéder à des nominations népotiques, il serait judicieux dévaluer objectivement les candidats familiaux et non familiaux afin daugmenter la probabilité dengager lexécutif le plus compétent en fonction de lenvironnement concurrentiel et de la stratégie entrepreneuriale de lorganisation. De surcroît, cette étude devrait sensibiliser les dirigeants familiaux sur le cadre de référence utilisé lors de la prise de décision. En effet, se focaliser uniquement sur la préservation du patrimoine socio-émotionnel peut savérer particulièrement périlleux pour faire face aux défis entrepreneuriaux des environnements hostiles. Il est donc nécessaire pour les entreprises familiales de concilier aspirations 59financières et non financières afin dassurer la pérennité de lorganisation. Sans ladoption dune telle démarche, léchec entrepreneurial pourrait émerger, avec des conséquences désastreuses à la fois sur le patrimoine socio-émotionnel de la famille et ses avoirs financiers.

Par ailleurs, cette étude souffre de plusieurs limites qui permettent de fournir des pistes de réflexion pour de futures recherches. Tout dabord, léchantillon utilisé couvre le territoire belge. Il serait dès lors utile de répliquer cette recherche dans dautres pays caractérisés par des traits culturels spécifiques afin de généraliser les résultats obtenus. En outre, linformation collectée présente la particularité de fournir des données en coupe instantanée. Répliquer cette étude à laide de données en coupe longitudinale savèrerait dès lors pertinent pour sassurer de la robustesse des résultats au cours du temps. De plus, cette étude utilise léchelle développée par Covin et Slevin (1989) pour capter lOE. Bien quelle soit la plus fréquemment utilisée dans la littérature (Georges, 2011), dautres mesures existent et il pourrait être intéressant de développer une échelle spécifique prenant en compte le caractère unique de lOE au sein des entreprises familiales (Zellweger & Sieger, 2012). Une autre limite réside dans le fait que cette étude fait référence au patrimoine socio-émotionnel sans en proposer une mesure concrète. Bien que de récents travaux tentent dopérationnaliser ce concept (Debicki et al., 2016), de futures recherches sont indispensables pour capter toute la complexité et la multi-dimensionnalité du patrimoine socio-émotionnel au travers dindicateurs à la validité psychométrique irréprochable. Sur cette base, il serait alors possible dinvestiguer comment certains aspects socio-affectifs exercent une influence sur le succès entrepreneurial des entreprises familiales.

Une autre piste de recherche pertinente consisterait à répliquer et étendre lanalyse proposée dans cette étude au sein des grandes entreprises familiales cotées. Une telle démarche permettrait de mieux comprendre comment les dirigeants familiaux et non familiaux font face aux enjeux entrepreneuriaux en intégrant les contraintes imposées par la cotation en bourse. Souvent guidée par des impératifs de rentabilité immédiate, la logique des marchés financiers risque en effet dêtre en contradiction avec la dynamique entrepreneuriale de la firme qui requiert des délais plus longs pour assurer un retour sur investissement. Il serait donc pertinent dexplorer plus finement la manière avec laquelle les 60dirigeants des entreprises familiales cotées parviennent à faire preuve dune certaine ambidextrie en conciliant les objectifs financiers de plus court terme avec ceux de moyen voire de long terme, sans négliger les considérations socio-émotionnelles. Enfin, la question du rôle de la gouvernance dans le développement entrepreneuriale mériterait également dêtre posée. En ce sens, lidentification darchétypes combinant les caractéristiques liées à la structure actionnariale, à léquipe dirigeante, au conseil dadministration, à lOE et à la performance contribuerait à dresser un panel des meilleures configurations possibles pour assurer le succès entrepreneurial des entreprises familiales cotées.

61

BIBLIOGRAPHIE

Arzubiaga U., Iturralde T., Maseda A., & Kotlar J. (2018), « Entrepreneurial orientation and firm performance in family SMEs : the moderating effects of family, women, and strategic involvement in the board of directors », International Entrepreneurship and Management Journal, 14(1), p. 217–244.

Bhagat S., Bolton B., & Subramanian A. (2010), « CEO education, CEO turnover, and firm performance », University of Colorado-Boulder working paper.

Bennedsen M., Nielsen K., Pérez-Gonzalez F., & Olfenzon D. (2007), « Inside the Family Firm : The Role of Families in Succession Decisions and Performance », Quarterly Journal of Economics, 122(2), p. 647–691.

Berrone P., Cruz C., & Gomez-Mejia L. R. (2012), « Socioemotional wealth in family firms theoretical dimensions, assessment approaches, and agenda for future research », Family Business Review, 25(3), p. 258–279.

Berrone P., Cruz C., Gomez-Mejia L. R., & Larraza-Kintana M. (2010), « Socioemotional wealth and corporate responses to institutional pressures : do family-controlled firms pollute less ? », Administrative Science Quarterly, 55(1), p. 82–113.

Bertrand M., & Schoar A. (2006), « The role of family in family firms », The Journal of Economic Perspectives, 20(2), p. 73–96.

Block J., Miller D., Jaskiewicz P., & Spiegel F. (2013), « Economic and Technological Importance of Innovations in Large Family and Founder Firms An Analysis of Patent Data », Family Business Review, 26(2), p. 180–199.

Casillas J. C., & Moreno A. M. (2010), « The relationship between entrepreneurial orientation and growth : The moderating role of family involvement », Entrepreneurship and Regional Development, 22(3-4), p. 265–291.

Casillas J. C., Moreno A. M., & Barbero J. L. (2010), « A configurational approach of the relationship between entrepreneurial orientation and growth of family firms », Family Business Review, 23(1), p. 27–44.

Chirico F., Sirmon D. G., Sciascia S., & Mazzola P. (2011), « Resource orchestration in family firms : investigating how entrepreneurial orientation, generational involvement, and participative strategy affect performance », Strategic Entrepreneurship Journal, 5(4), p. 307–326.

Chrisman J. J., Chua J. H., & Litz R. A. (2004), « Comparing the agency costs of family and non-family firms : Conceptual issues and exploratory evidence », Entrepreneurship Theory and Practice, 28(4), p. 335–354.

Chua J. H., Chrisman J. J., Steier L. P., & Rau, S. B. (2012), « Sources of 62heterogeneity in family firms : An introduction », Entrepreneurship Theory and Practice, 36(6), p. 1103–1113.

Covin J. G., & Lumpkin G. T. (2011), « Entrepreneurial orientation theory and research : Reflections on a needed construct », Entrepreneurship Theory and Practice, 35(5), p. 855–872.

Covin J. G. & Slevin D.P. (1989), « Strategic management of small firms in hostile and benign environments », Strategic Management Journal, 10(1), p. 75–87.

Cruz C., & Nordqvist M. (2012), « Entrepreneurial orientation in family firms : a generational perspective », Small Business Economics, 38(1), p. 33–49.

Davidsson P., & Wiklund J. (1999), « Theoretical and methodological issues in the study of firm growth », Jönköping International Business School, Working Paper Series, 6.

Debicki B. J., Kellermanns F. W., Chrisman J. J., Pearson A. W., & Spencer B. A. (2016), « Development of a socioemotional wealth importance (SEWi) scale for family firm research », Journal of Family Business Strategy, 7(1), p. 47–57.

Dess G. G., Pinkham B. C., & Yang H. (2011), « Entrepreneurial orientation : Assessing the constructs validity and addressing some of its implications for research in the areas of family business and organizational learning », Entrepreneurship Theory and Practice, 35(5), p. 1077–1090.

Elsayed K. (2011), « Board size and corporate performance : The missing role of board leadership structure », Journal of Management & Governance, 15(3), p. 415–446.

George B. A. (2011), « Entrepreneurial orientation : An examination of the consequences of differing construct representations », Journal of Management Studies, 48(6), p. 1291–1313.

Gomez-Mejia L. R., Cruz C., Berrone P., & De Castro J. (2011), « The bind that ties : Socioemotional wealth preservation in family firms », The Academy of Management Annals, 5(1), p. 653–707.

Gomez-Mejia L. R., Haynes K. T., Nunez-Nickel M., Jacobson K. J. L., & Moyano-Fuentes J. (2007), « Socioemotional wealth and business risks in family-controlled firms : Evidence from Spanish olive oil mills », Administrative Science Quarterly, 52(1), p. 106–137.

Gomez-Mejia L. R., Nunez-Nickel M., & Gutierrez I. (2001), « The role of family ties in agency contracts », Academy of Management Journal, 44(1), p. 81–95.

Hambrick D. C., & Mason P. A. (1984), « Upper echelons : The organization as a reflection of its top managers », Academy of Management Review, 9(2), p. 193–206.

63

Hamilton L. C. (2009), « Statistics with Stata : updated for version 10 », Cengage Learning.

Harris L. C., & Ogbonna E. (2007), « Ownership and control in closely-held family-owned firms : An exploration of strategic and operational control », British Journal of Management, 18(1), p. 5–26.

Henderson A. D., Miller D., & Hambrick D. C. (2006), « How quickly do CEOs become obsolete ? Industry dynamism, CEO tenure, and company performance », Strategic Management Journal, 27(5), p. 447–460.

Huybrechts J., Voordeckers W., & Lybaert N. (2013), « Entrepreneurial Risk Taking of Private Family Firms : The Influence of a Nonfamily CEO and the Moderating Effect of CEO Tenure », Family Business Review, 26(2), p. 161–179.

Jaskiewicz P., & Luchak A. A. (2013), « Explaining Performance Differences Between Family Firms With Family and Nonfamily CEOs : Its the Nature of the Tie to the Family That Counts ! », Entrepreneurship Theory and Practice, 37(6), p. 1361–1367.

Jensen M. C., & Meckling W. H. (1976), « Theory of the firm : Managerial behavior, agency costs and ownership structure », Journal of Financial Economics, 3(4), p. 305–360.

Ketchen D. J., Thomas J. B., & Snow C. C. (1993), « Organizational configurations and performance : A comparison of theoretical approaches », Academy of Management Journal, 36(6), p. 1278–1313.

Krause R., Semadeni M., & Cannella A. A. (2014), « CEO Duality A Review and Research Agenda », Journal of Management, 40(1), p. 256–286.

Lardon A., Deloof M., & Jorissen A. (2017), « Outside CEOs, board control and the financing policy of small privately held family firms », Journal of Family Business Strategy, 8(1), p. 29–41.

Leonard-Barton D. (1992), « Core capabilities and core rigidities : a paradox in managing new product development », Strategic Management Journal, Summer Special Issue 13, p. 111–125.

Lubatkin M., Schulze W., Ling Y., & Dino R., (2005), « The effects of parental altruism on the governance of family-managed firms », Journal of Organizational Behavior, 26(3), p. 313–330.

Lumpkin G.T., Brigham K., & Moss K. (2010), « Long-term orientation : implications for the entrepreneurial orientation and performance of family businesses », Entrepreneurship & Regional Development, 22(3), p. 355–378.

Lumpkin G. T., & Dess G. G. (2001), « Linking two dimensions of entrepreneurial orientation to firm performance : The moderating role of environment and industry life cycle », Journal of Business Venturing, 16(5), p. 429–451.

64

Lumpkin G.T. & Dess G.G. (1996), « Clarifying the entrepreneurial orientation construct and linking it to performance », Academy of Management Review, 21(1), p. 135–172.

Mehrotra V., Morck R., Shim J., & Wiwattanakantang Y. (2013), « Adoptive expectations : Rising sons in Japanese family firms », Journal of Financial Economics, 108(3), p. 840–854.

Memili E., Fang H., Chrisman J. J., & De Massis A. (2015), « The impact of small-and medium-sized family firms on economic growth », Small Business Economics, 45(4), p. 771–785.

Miller D. (1983), « The correlates of entrepreneurship in three types of firms », Management Science, 29(7), p. 770–791.

Miller D., Le Breton-Miller I., Minichilli A., Corbetta G., & Pittino D. (2013), « When do Non-Family CEOs Outperform in Family Firms ? Agency and Behavioral Agency Perspectives » Journal of Management Studies, 51(4), p. 547–572.

Miller D., Minichilli A., & Corbetta G. (2013), « Is family leadership always beneficial ? », Strategic Management Journal, 34(5), p. 553–571.

Moreno A.M., & Casillas J.C. (2008), « Entrepreneurial orientation and growth of SMEs : A causal model », Entrepreneurship Theory and Practice, 32(3), p. 507–528.

Naldi L., Cennamo C., Corbetta G., & Gomez-Mejia L. (2013), « Preserving socioemotional wealth in family firms : Asset or liability ? The moderating role of business context », Entrepreneurship Theory and Practice, 37(6), p. 1341–1360.

Naldi L., Nordqvist M., Sjoberg K., & Wiklund J. (2007), « Entrepreneurial orientation, risk taking, and performance in family firms », Family Business Review, 20(1), p. 33–58.

Perez-Gonzalez F. (2006), « Inherited control and firm performance », American Economic Review, 96(5), p. 1559–1588.

Podsakoff P. M., MacKenzie S. B., Jeong-Yeon L., & Podsakoff N. P. (2003), « Common method biases in behavioral research : A critical review of the literature and recommended remedies », Journal of Applied Psychology, 88(5), p. 879–903.

Rauch A., Wiklund J., Lumpkin G. T., & Frese M. (2009), « Entrepreneurial orientation and business performance : An assessment of past research and suggestions for the future », Entrepreneurship Theory and Practice, 33(3), p. 761–787.

Rutherford M. W., Kuratko D. F., & Holt D. T. (2008), « Examining the Link between “Familiness” and Performance : Can the F-PEC Untangle the Family Business Theory Jungle ? », Entrepreneurship Theory and Practice, 32(6), p. 1089–1109.

65

Salvato C., Minichilli A., & Piccarreta R. (2012), « Faster Route to the CEO Suite Nepotism or Managerial Proficiency ? », Family Business Review, 25(2), p. 206–224.

Schepers J., Voordeckers W, Steijver T., & Laveren E. (2014), « The entrepreneurial orientation–performance relationship in private family firms : the moderating role of socioemotional wealth », Small Business Economics, 43(1), p. 39–55.

Sciascia S., & Bettinelli C. (2013), « Corporate Entrepreneurship in Family Businesses : past, present and future research », M@n@gement, 16(4), p. 422–432.

Shleifer A., & Vishny R. W. (1989), « Management entrenchment : The case of manager-specific investments », Journal of Financial Economics, 25(1), p. 123–139.

Simsek Z., Heavey C., & Veiga J. J. F. (2010), « The impact of CEO core self-evaluation on the firms entrepreneurial orientation », Strategic Management Journal, 31(1), p. 110–119.

Slevin D.P. & Covin J.G. (1997), « Strategy formation patterns, performance, and the significance of context », Journal of Management, 23(2), p. 189–209.

Werner S., Brouthers L. E., & Brouthers K. D. (1996), « International risk and perceived environmental uncertainty : the dimensionality and internal consistency of Millers measure », Journal of International Business Studies, 27(3), p. 571–587.

Wiklund J., & Shepherd D. (2005), « Entrepreneurial orientation and small business performance : a configurational approach », Journal of Business Venturing, 20(1), p. 71–91.

Wiseman R. M., & Gomez-Mejia L. R. (1998), « A behavioral agency model of managerial risk taking », Academy of Management Review, 23(1), p. 133–153.

Zellweger T., & Sieger P. (2012), « Entrepreneurial orientation in long-lived family firms », Small Business Economics, 38(1), p. 67–84.