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Classiques Garnier

Pensées vers Jean Spector Profession traducteur

  • Publication type: Book chapter
  • Book: Un shtetl suivi de Père et fils
  • Pages: 7 to 7
  • Collection: Literature, History, Politics, n° 55
  • CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN: 9782406148500
  • ISBN: 978-2-406-14850-0
  • ISSN: 2261-5903
  • DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-14850-0.p.0007
  • Publisher: Classiques Garnier
  • Online publication: 08-30-2023
  • Language: French
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Pensées vers Jean Spector

Profession traducteur

Un traducteur est toujours, avant tout, un amoureux. À qui en douterait, il suffirait de dire quelques mots au sujet de Jean Spector. Peut-être parce quil était de lespèce tardive, entré en traduction à un âge où dautres croient que la vie ne déviera plus de sa trajectoire, Jean fut un traducteur doublement passionné, capable de ce qui constitue, à nos yeux, la sève de ce travail : la pudeur et la générosité. Emblématique à cet égard, le premier livre quil traduisit du yiddish vers le français porte un titre parfait, parfait parce que révélateur du geste et du caractère de Jean : Juifs ordinaires. Ce roman de Yehoshue Perle vit le jour en France en 2015 aux éditions Classiques Garnier, que nous souhaitons remercier ici tout particulièrement. « Ordinaire », donc, tel est le qualificatif choisi par un jeune traducteur septuagénaire pour signer sa première œuvre de passeur, comme pour suggérer que ce qui compte, ce nest pas le réel en soi, mais lattention quon lui porte. Le regard porté par Jean à une langue (sa langue peut-être), le yiddish, témoigne de la façon discrète et prodigue quil avait de voir la grandeur, du moins la grande vie, dans les petites choses. Jean aimait le yiddish comme il aimait la traduction, il aimait la cause et la conséquence, le trait dunion qui les relie, la parenthèse qui digresse, la virgule que personne ne remarque, la note de bas de page que personne ne lit. Tel était Jean : un traducteur, cest-à-dire un amoureux attentif et attentionné. Il ne pourra pas tenir le Shtetl de Weissenberg dans ses mains, mais nous pouvons garder dans les nôtres, près du cœur, toute la délicatesse et la passion quil transmettait chaque jour.

Pierre Stapf