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Classiques Garnier

Présentation du numéro

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2021 – 2, n° 10
    . varia
  • Auteur : Jardat (Rémi)
  • Pages : 15 à 17
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406126980
  • ISBN : 978-2-406-12698-0
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12698-0.p.0015
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 19/01/2022
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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PRéSENTATION DU NUMéRO

Rémi Jardat

LITEM –
Université dÉvry-Paris-Saclay

La philosophie de notre revue, devons-nous le rappeler, est de favoriser un dialogue entre les générations de chercheurs dont les travaux interrogent les relations entre le monde économique et la société. Ce numéro est construit autour dun hommage à un auteur disparu il y a fort longtemps. En 1972 séteignait Frank Knight, dont lœuvre majeure, Risk, Uncertainty and Profit, devait entrer dans la postérité, certes pour de bonnes raisons (la distinction entre incertitude et risque), mais aussi sous la forme dun héritage tronqué et déformé. La focalisation sur la première partie de son ouvrage, vouée à la décision en contexte certain, est le lot de la plupart des utilisations mainstream de la pensée de Knight.

À quel projet un tel hommage répond-il ? Il y a exactement un siècle paraissait donc Risk, Uncertainty and Profit de Frank H. Knight, publié par les presses universitaires de Chicago. Cet ouvrage, par sa construction et la réflexion qui y préside, devait placer lincertitude au centre de lanalyse économique. Est-il besoin de dire que cette notion – lincertitude – na en rien perdu de son actualité. Le développement des risques majeurs dont les pandémies, le réchauffement climatique, les crises économiques remet en cause, quand il ne linterrompe pas, le fonctionnement des économies et des sociétés.

La distinction entre risque et incertitude est larbre qui cache la forêt. Larbre dune reconnaissance pour une distinction, certes essentielle, mais rabâchée entre risque et incertitude. Surtout une forêt doubli de ce que 16Knight nous apprend, esquisse, prophétise, lorsquil analyse léconomie et la société en contexte incertain. Loin de limage que lhistoire des traités et batailles voudrait donner de lui – un des fondateurs de lécole de Chicago – Knight adopte un regard prospectif sur ce que lentreprise, le management, le marketing notamment doivent prendre dans le courant du siècle. Il annonce le développement des théories comportementales de la décision et de lorganisation, il interroge la notion de responsabilité du dirigeant. En inscrivant la pensée économique dans une histoire (une approche remise au goût du jour notamment par les travaux actuels de Thomas Piketty), il montre comment lidéal qui prévalait au xixe siècle est mis à mal par lavènement de la grande entreprise, lequel induit une incertitude qui devient, quon le veuille ou pas, la seule pensée possible du moment. Ce faisant, loin de fermer sa pensée à un constat par trop pessimiste, il ouvre la voie dune pensée et dune science humaine nouvelles.

Romain Laufer et Jérôme Méric sattachent à cet hommage, à rendre compte des propos de Risk, Uncertainty and Profit sous un angle qui na pas toujours été abordé, et surtout à résoudre lénigme knightienne que pose une postérité justement fondée sur des raisons partielle et partiales, quand elles ne sont pas mauvaises. Le dossier thématique sinscrit dans la même logique. Emmanuelle Dubocage perçoit dans Risk, Uncertainty and Profit les prémisses du capital risque. Jean-Luc Gaffard montre comment lincertitude knightienne constitue une, sinon la raison pour laquelle lentreprise, la figure managériale et le contrôle sont nécessaires. Stéphane Mottet rappelle que Knight esquisse une théorie comportementale de léconomie, très loin des schèmes scientifiques auxquels on la traditionnellement rattaché.

Knight, dans la troisième partie de son ouvrage, insiste sur le caractère partiel des connaissances et remet en cause, en grande partie, la généralisation de ce quil qualifie dinférences. Le mimétisme y est vu comme une réponse à linconnue, réponse quelque peu dérisoire comme le laisse entendre Risk-Uncertainty and Profit. À ce titre, le varia de ce numéro, sous la plume de Sigismond Hervey Mvele, interroge la transposition de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) au contexte africain des Très Petites Entreprises (TPE), dont la mise en œuvre se révèle très éloignée des schèmes et des inférences dominantes.

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Au terme de ce numéro, deux recensions sont proposées. Dans la première, Roland Pérez rend compte de Société, Économies et Civilisation – Vers une seconde modernité écologique et solidaire ? proposé par Bernard Billaudot. Dans la seconde, Elisabeth Walliser nous livre son regard sur le monumental ouvrage quAlain Burlaud et Franck Bournois ont dirigé sur Lenseignement de la gestion en France : identité, défis et enjeux.