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Classiques Garnier

Pour une approche « paradoxale » de l’entreprise familiale

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2020 – 1, n° 7
    . varia
  • Auteurs : Thelisson (Anne-Sophie), Meier (Olivier)
  • Résumé : Les entreprises familiales se définissent à la fois par une logique familiale, où les parties prenantes privilégient les liens familiaux, et une logique entrepreneuriale priorisant la recherche de profit. Ces logiques parfois contraires, sont activées lors de la transmission des entreprises. À l’aide de sept cas, l’article propose une lecture des enjeux rencontrés sous le prisme des paradoxes.
  • Pages : 67 à 88
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406107873
  • ISBN : 978-2-406-10787-3
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10787-3.p.0067
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 26/10/2020
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Entreprises familiales, transmission, lecture paradoxale, étude qualitative, multi-cas
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Pour une approche « paradoxale »
de lentreprise familiale

Anne-Sophie Thelisson

ESDES Business School – UCLY

Olivier Meier

Paris Est University

INTRODUCTION

Des études soulignent que les entreprises familiales sont intrinsèquement paradoxales (Moores et Barrett, 2010 ; Ingram et al., 2016). En ce sens, les entreprises familiales engendrent des tensions paradoxales dans la mesure où elles impliquent deux dimensions simultanées, voire contradictoires : (1), les liens familiaux (Eddleston et al., 2012) et (2), la recherche du profit (Irava et Moores, 2010). Des auteurs décrivent les entreprises familiales comme des organisations impliquant deux logiques distinctes mais interdépendantes : (1) une logique familiale – i.e. « les liens familiaux » (Eddleston et al., 2012) – et (2) une logique « entrepreneuriale » (Meier et Schier, 2016 ; Tabor et al., 2018) – i.e. la recherche du profit (Irava et Moores, 2010).

Ces logiques, parfois contraires, sont mises en exergue lors dun processus important dans le cycle des entreprises familiales : la succession intergénérationnelle (Gundolf et al., 2013 ; Meier et Schier, 2016). Dans la plupart des entreprises familiales, les fondateurs essaient de combiner loptimisation de performance, tout en maintenant le contrôle 68de la famille à travers la succession intergénérationnelle (Schulze et al., 2003 ; Tàpies et Ward, 2008). Néanmoins, ce processus est complexe car il comprend de possibles interdépendances entre les deux logiques (familiale et entrepreneuriale) liées à la répartition du capital et actionnariat entre successeurs (non)familiaux (création de valeur financière pour les actionnaires, politique de dividendes et de réduction du capital, politique dinvestissement, prise de risque et horizon temporel des investissements, etc.).

Aussi, seule une lecture intégrant ces éléments contraires est en mesure de questionner la transmission des entreprises familiales comme contexte porteur de dynamiques endogènes. Le prisme des paradoxes (Perret et Josserand, 2003 ; Smith et Lewis, 2011) permet de saisir les conflits dintérêts engendrés par des dynamiques distinctes. La théorie des paradoxes offre en effet un cadre pour décrypter les tensions inhérentes aux organisations, dont certaines sont activées ou mises en exergue lors de changements organisationnels (Schad et al., 2016). Par conséquent, mobiliser ce prisme de lecture permet de rendre intelligible les contradictions simultanées liés à la nature même des entreprises familiales. Cette grille peut savérer particulièrement utile, lors de situations complexes, à linstar des questions de transmission, quelle soit de nature intergénérationnelle ou externe à lentreprise familiale.

Dès lors, notre question de recherche peut être formulée de la manière suivante : En quoi lapproche paradoxale permet-elle déclairer les logiques familiale et entrepreneuriale liées à la transmission des entreprises familiales ?

Larticle prend appui sur les travaux de recherche en Family Business et sur une recherche menée auprès de sept entreprises familiales non cotées du secteur de lindustrie, du conseil et des services, de taille inférieure à 180 employés. Ces entreprises familiales disposent dun chiffre daffaires inférieur à 24 millions deuros en 2016, et comptent entre 15 et 150 personnes. 21 entretiens ont été conduits sur une durée dun an et demi. Chaque entretien a duré en moyenne deux heures en tête à tête, par un des deux auteurs de létude. Les récits analysés portent sur des situations de transmission volontaire, où lentreprise familiale a été reprise par un membre de la famille ou des tiers sans lien de parenté avec le cédant. Les travaux sur les paradoxes sont également été mobilisés à des fins danalyse et de compréhension des phénomènes observés.

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Nos résultats soulignent les difficultés et enjeux majeurs rencontrés lors du processus crucial de transmission des entreprises familiales. Nous identifions deux catégories de paradoxe au cœur des dynamiques endogènes, caractérisant les phénomènes dappartenance, de performance et dorganisation impactés par ces paradoxes. De façon plus générale, notre étude illustre dans quelles mesures les entreprises familiales, de par leur interface entre différentes logiques, sont un cadre où sactivent différentes tensions paradoxales quil convient de bien identifier et de gérer pour atteindre ses objectifs de développement.

Dans la première section, nous développons notre cadre théorique sur le contexte des entreprises familiales comme interface des logiques familiale et entrepreneuriale, ainsi que sur les tensions paradoxales engendrées par la transmission intergénérationnelle, ou externe à lentreprise familiale. Dans la deuxième section, nous décrivons la méthodologie qualitative de cette recherche. Dans une troisième section, nous présentons et discutons nos résultats.

1. Les entreprises familiales,
une interface paradoxale
entre logiques familiale et entrepreneuriale

Les entreprises familiales sont définies par les liens familiaux qui unissent leurs parties prenantes (Meglio et King, 2019). La structure même de ces organisations affecte généralement le jugement des individus en matière de gestion, leurs motivations ainsi que leurs décisions concernant la mobilisation de ressources (Meglio et King, 2019). De nombreuses études soulignent le contexte des entreprises familiales comme combinant deux logiques : (1), une logique familiale, où lattention et lintérêt des parties prenantes privilégient « les liens familiaux » (Eddleston et al., 2012) ; (2), une logique « entrepreneuriale » (Meier et Schier, 2016 ; Tabor et al., 2018) où la recherche du profit est au cœur de lorganisation (Irava et Moores, 2010). Néanmoins, une des deux logiques peut dominer lautre en fonction de données 70internes aux structures : influence des actionnaires (non) familiaux, etc. Ces logiques, parfois contraires, sont mises en exergue lors dun processus important dans le cycle des entreprises familiales : le passage de lentreprise entre générations (Gundolf et al., 2013 ; Meier et Schier, 2016).

En effet, les entreprises familiales génèrent des tensions liées aux transitions générationnelles (Ingram et al., 2016), comme par exemple, celles relatives aux questions dautonomie et de contrôle entre le fondateur et le successeur (De Massis et al., 2008), ainsi que celles concernant la volonté des acteurs de changer ou au contraire de résister (Handler et Kram, 1988). Plus généralement, les entreprises familiales doivent faire face à des tensions liées aux changements (Ingram et al., 2016), car la nature même des entreprises familiales peut avoir une incidence sur le processus de prise de décision et le management des équipes (Ward et al., 1997).

Les entreprises familiales doivent aussi faire face à des paradoxes liés aux questions dinnovation, car la gouvernance de ces organisations influence leur volonté de favoriser les processus de changement et de création (Chrisman et al., 2015). De même, le modèle actionnarial composé dactionnaires familiaux et non familiaux peut engendrer des conflits dintérêts (Meier et Schier, 2016) et accentuer la délicate question des intérêts individuels et collectifs (Berent-Braun et Uhlaner, 2012), et de la gestion des projets à court et à long terme (Zahra et al., 2008). En effet, lorientation à long terme et la recherche de stabilité sont généralement attribuées aux caractéristiques des entreprises familiales (pérennité du système familial, relations de confiance), alors que lorientation à court terme et la recherche dadaptation externe sont liées à lentreprise en tant que telle (Zellweger et al., 2012).

De par leur nature et structure, les entreprises familiales impliquent des éléments contraires, des tensions et conflits que les dirigeants et managers de ces firmes doivent gérer (Ward et al., 1997). Ces logiques parfois contraires sont soulignées lors de transmissions familiales (Meier et Missonier, 2013). De plus, ces éléments sont interférents à différents niveaux (sur le plan individuel et collectif). Seule une lecture intégrant ces différentes dimensions est donc en mesure de questionner la transmission des entreprises familiales comme contexte porteur de dynamiques endogènes.

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Nous avons pu montrer que lentreprise familiale agit en tant quinterface entre logiques familiale et entrepreneuriale, dynamiques complémentaires et parfois concurrentes. La seconde partie de notre revue de la littérature nous montre que la lecture paradoxale nous permet déclairer la complexité identitaire des entreprises familiales répondant à la fois à des enjeux de développement, de croissance, de pérennité, de gestion patrimoniale, mais également de gérer des problématiques spécifiques et centrales à linstar de la transmission.

2. Lentreprise familiale
comme lieu de tensions paradoxales

Les conflits dintérêts propres aux entreprises familiales peuvent amener à des situations complexes, parfois difficiles à résoudre. Une façon de rendre intelligible ces contradictions est de recourir au prisme des paradoxes (Smith et Lewis, 2011). Plus généralement, des approches sociologiques et philosophiques de la stratégie des organisations (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999) ont proposé la notion de paradoxe en associant des termes à la fois complémentaires et antagonistes. Les paradoxes sont en effet un cadre, pour décrypter les tensions inhérentes aux organisations (Schad et al., 2016 ; Cunha et Putnam, 2019). Ainsi, la lecture paradoxale peut permettre de proposer une analyse globale des éléments contradictoires et inter-reliés à lœuvre au sein des entreprises familiales. Le prisme des paradoxes est de ce point de vue, un outil particulièrement utile, pour capter ces dualités. Smith et Lewis (2011) définissent un paradoxe comme « des éléments contradictoires mais interdépendants (des dualités) qui existent simultanément et persistent dans le temps » (Smith et Lewis, 2011, p. 287)1.

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Il existe des différences dans lapproche dun paradoxe se retrouvent dans la conduite de la recherche et dans les résultats présentés dans les livres et articles académiques. Une partie des travaux tend à appréhender les tensions paradoxales dans une vision pragmatique (Lüscher et Lewis, 2008 ; Smith et Lewis, 2011), alors que dautres travaux tentent danalyser le paradoxe dans une vision holistique (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999). Le premier type de travaux cherche à matérialiser le paradoxe, ses antécédents et ses conséquences. Ils proposent des typologies qui aident à décrypter le paradoxe (Lüscher et Lewis, 2008). Les travaux appartenant à la seconde catégorie permettent de rendre compte de la complexité des organisations. Le cadre danalyse y est plus large. Le paradoxe nest plus dès lors un outil de gestion, mais un prisme de lecture dune situation complexe peu rationnalisée. Dans cette étude, nous considérons que ces approches sont complémentaires et non antinomiques, elles permettent de rendre compte dune manière exhaustive dun phénomène complexe et mouvant dans les organisations (i.e. les paradoxes).

Smith et Lewis (2011) derniers proposent une grille originale, visant à classer les paradoxes dans les organisations. Ils distinguent quatre grandes catégories : les paradoxes de lapprentissage (sur la base des tensions créées entre lancien et le nouveau) (i.e. catégorie nommée dans la grille Apprentissage), les paradoxes de lorganisation (sur la base des forces divergentes de contrôle et de flexibilité) (Exécution), les paradoxes dappartenance (découlant de la tension entre le moi et lautre dans un contexte organisationnel) (Appartenance), et enfin, les paradoxes de lexécution et de la performance (découlant de la pluralité des objectifs des parties prenantes internes et externes) (Performance). Les auteurs subdivisent cette typologie en six sous-groupes, certains paradoxes se trouvant à linterface de deux catégories.

Nous présentons dans le tableau 1 une première grille de synthèse de la littérature sur les différentes tensions paradoxales adaptée aux entreprises familiales. Pour cela, nous enrichissions la grille proposée par Smith et Lewis (2011) afin de comprendre et identifier les possibles dynamiques endogènes à lœuvre en contexte dentreprise familiales.

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Tab. 1 –Enrichissement de la grille didentification des tensions paradoxales proposée Smith et Lewis (2011) adaptée aux entreprises familiales.

Types de tensions

Les tensions identifiées en contexte d entreprise familiale à travers une relecture de la « Littérature » sur les Paradoxes

Apprentissage

- Détruire le passé et construire lavenir (March, 1991 ; Weick et Quinn, 1999)

Appartenance

- Intérêts individuels et intérêts collectifs (Smith et Berg, 1987 ; Apker, 2004)

- Confiance et contrôle/confiance et défiance (Lewicki et al., 1998 ; Schilke et Cook, 2013)

Exécution

- Coopération et compétition (Clarke-Hill et al., 2003)

- Délégation et direction (Denison et al., 1995 ; Beech et Huxham, 2003)

- Contrôle et flexibilité (Adler et al., 1999 ; Osono et al., 2008)

Performance

- Objectifs multiples et concurrents à long terme et à court terme des parties prenantes (Smith et Lewis, 2011)

- Exploitation et exploration (March, 1991 ; Raisch et al., 2009)

- Contrôle des coûts et de la qualité (Apker, 2004)

Apprentissage - Appartenance

- Nécessité de changement et besoin de stabilité (Leana et Barry, 2000 ; Klarner et Raisch, 2013)

- Nécessité de changer et désir de rester (Ibarra, 1999 ; OMahony et Bechky, 2006)

- Innover rapidement et rester enstatu quo (Puranam et al., 2006)

Performance – Appartenance

- Buts lucratifs et non lucratifs (Collins et Porras, 1997)

- Négociation entre identités individuelles et exigences sociales ou professionnelles (Dukerich et al., 2002 ; Kreiner et al., 2006)

Appartenance – Organisation

- Actions individuelles et collectives (Smith et Berg, 1987 ; Andriopoulos et Lewis, 2009)

- Autonomie et dépendance (Graebner, 2004) et interdépendance (Smith et Lewis, 2011)

Performance – Organisation

- Interaction entre moyens et fins, niveau dengagement et niveau de performance (Kaplan et Norton, 2007 ; Eisenstat et al., 2008)

Apprentissage-Organisation

- Les routines et les capacités organisationnelles recherchent la stabilité, la clarté, la concentration et lefficacité tout en permettant la flexibilité et lévolution des résultats (Eisenhardt et Martin, 2000)

Apprentissage – Performance

- Construire lavenir et assurer le présent (Smith et Tushman, 2005)

- Se réinventer dans un environnement changeant en restant efficient (Junni et al., 2015)

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Cette typologie est une aide pour décrypter les paradoxes dans un cadre organisationnel car elle offre un cadre pour identifier les paradoxes dans un cas détude avec un contexte spécifique. Néanmoins, cet outil propose une identification et une description statique des éléments en contradiction. Cependant, les tensions peuvent être identifiées au niveau micro ou macro (Schad et al., 2016). Par exemple, la tension entre les liens familiaux et la recherche du profit est liée au niveau organisationnel, tandis que la tension entre le besoin dautonomie et le contrôle du fondateur au successeur sapplique au niveau individuel. Par conséquent, de nouvelles études sont demandées pour identifier les tensions présentes dans les études empiriques afin de comprendre quels paradoxes sont présents, ainsi que pour comprendre à quels niveaux danalyse ils interfèrent (Schad et al., 2016).

3. Méthodologie

Notre méthodologie est articulée en deux étapes :

(1) Nous proposons dans un premier temps une grille danalyse conceptuelle des tensions paradoxales appliquée au contexte de lentreprise familiale (tableau 1). En effet, nous avons enrichi la grille proposée par Smith et Lewis (2011) afin de comprendre les possibles dynamiques endogènes à lœuvre dans un tel contexte. Cette grille revisitée est devenue un « outil interne » nous permettant de nous approprier les tensions, leurs différences, et possibles interdépendances.

Dans cette première étape, nous avons détaillé les dix sous-catégories proposées pour mieux cerner les polarités identifiées. Par exemple, la catégorie de lapprentissage-appartenance comporte trois sous-parties dans notre tableau :

(1) Nécessité de changement et besoin de stabilité (Leana et Barry, 2000 ; Klarner et Raisch, 2013)

(2) Nécessité de changer et désir de rester (Ibarra, 1999 ; OMahony et Bechky, 2006)

(3) Innover rapidement et rester en statu quo (Puranam et al., 2006)

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Cette catégorie a été définie comme « créer des capacités pour lavenir tout en assurant le succès dans le présent » (Smith et Lewis, 2011, p. 383). Dans notre grille, nous distinguons trois tensions pour tenter de mieux cerner la dynamique ciblée.

(2) Cette grille a été une aide pour coder les paradoxes dans nos études de cas, et comprendre ensuite à quels niveaux danalyse ils se référaient. En effet, cet article sappuie sur sept mini-cas de PME (Petites et Moyennes Entreprises) et ETI (Entreprises à Taille Intermédiaire) familiales non cotées en bourse opérant dans les secteurs du conseil, de lindustrie et des services en France. Ces entreprises familiales disposent dun chiffre daffaires inférieur à 24 millions deuros en 2016, et comptent entre 15 et 180 personnes. Le tableau 2 synthétise les caractéristiques principales des sept entreprises.

Tab. 2 – Caractéristiques des entreprises.

Secteur

Taille (nombre employés)

Implantation

E1

Industrie

180

Rhône-Alpes

E2

Industrie

55

Lorraine

E3

Services

35

Ile de France

E4

Services

110

Ile de France

E5

Conseil

35

Ile de France

E6

Services

22

Ile de France

E7

Services

15

Normandie

Vingt et un entretiens ont été conduits sur une durée dun an et demi. Chaque entretien a duré en moyenne deux heures en tête à tête, par un des deux auteurs de létude. Le guide dentretien administré était semi-directif : le début dentretien était consacré au contexte de lentreprise, le sujet du processus de transmission familiale a été abordé en accordant une attention particulière aux difficultés intervenues au cours de lopération. Certains acteurs ont été mobilisés plusieurs fois (plus de la moitié des acteurs de léchantillon) dans un souci de compréhension et de validation faciale des propos recueillis. Les cas comprennent exclusivement des situations de transmission volontaire, où 76lentreprise familiale a été reprise par un membre de la famille ou des tiers sans lien de parenté avec le cédant. Aussi, létude ne prend pas en compte les reprises dactivités liées au décès de lancien dirigeant ou à un changement volontaire dactivités. Les reprises étudiées ne concernent pas lachat dentreprises en difficulté. Elles portent sur des cas de transmissions ayant donné lieu à des résistances et des freins de la part de lancien dirigeant, sans que des facteurs objectifs majeurs, dordre financier ou économique, puissent expliquer cette situation (valorisation trop élevée, difficultés de trésorerie, perte de clients majeurs durant le processus, etc.).

Dans une seconde étape, nous avons rapproché nos codes de premiers ordre issus de la première grille danalyse (tableau 1) avec les codes de second ordre issus de nos données (retranscription des entretiens). Cette deuxième étape nous permet didentifier quels paradoxes sont présents dans le cadre spécifique de la transmission des entreprises familiales (analyse des sept entreprises sélectionnées).

4. Résultats

Nous répondons à la problématique soulignée : En quoi lapproche paradoxale permet-elle déclairer les logiques familiale et entrepreneuriale liées à la transmission des entreprises familiales ?

À lappui des travaux de recherche étudiés et de lanalyse terrain effectuée auprès des entreprises familiales concernées, nous pouvons relever deux grandes catégories de tensions paradoxales auxquelles ont à faire ces organisations lors de transmission.

Il est proposé ci-après une mise en perspective des conflits identifiés dans les sept études de cas sous langle des tensions paradoxales.

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Tab. 3 – Conflits en jeu dans le processus de succession
des entreprises familiales et identification de tensions paradoxales.

Nature du conflit ( entre qui ? )

Objet du conflit (à propos de quoi ?)

Comment les conflits interfèrent dans le processus de succession et/ou façonnent la marge de manœuvre du gestionnaire en place

Tensions paradoxales assimilées :

(1) Exécution-appartenance :

Conflit entre identification et objectifs alors que les acteurs négocient des identités individuelles avec des exigences sociales et professionnelles (iDukerich et al., 2002 ; Kreiner et al., 2006)

Tensions paradoxales assimilées :

(2) Organisation-appartenance :

Interaction entre moyens et fins, demandes des employés par rapport aux clients, engagement fort par rapport aux performances élevées (Eisenstat et al., 2008 ; Kaplan and Norton, 2007)

Actionnaires familiaux et non familiaux

Création de valeur financière pour les actionnaires

Divulguer la valeur « réelle » des actions (intérêt des actionnaires non familiaux) et réduire le risque que les actionnaires familiaux minoritaires choisissent de vendre leurs actions au moment de la succession (intérêt des actionnaires majoritaires de la famille) par rapport à la réduction des coûts fiscaux de la succession (intérêt des actionnaires familiaux)

Négociation entre identité individuelle (intérêt familial actionnaire) et exigences contextuelles (intérêt non familial) pour créer de la valeur pour les actionnaires

Rentabilité commerciale à court terme vs rente à long terme

Adopter une politique de transparence en indiquant la valeur réelle des actions et en diminuant le risque que les actionnaires familiaux minoritaires choisissent de vendre leurs actions au moment de la succession, sans afficher la valeur réelle des actions (politique de la terre brûlée) et de réduire limpôt sur les successions

Conflit entre les objectifs multiples et concurrents des actionnaires

Augmentation du contrôle à long terme des actionnaires familiaux par rapport au déclin à court terme des actionnaires familiaux sur la gouvernance

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Politique de dividendes et de réduction du capital

Rachat dactions (intérêt familial actionnaire) par rapport au versement de dividendes (intérêt actionnaire autre que familial et intérêt actionnaire familial minoritaire au moment de la succession)

Différences dans la nature et les objectifs de la politique en matière de dividendes (rachat dactions par rapport au paiement de dividendes) et incidence de ces choix sur lentreprise

Privilégie la politique dinvestissement à long terme de la société en raison du rachat dactions (capacité dinnovation accrue, capacité dendettement supérieure, etc.) par rapport aux gains privilégiés à court terme liés au paiement de dividendes

Émettre des réserves (risque de gestion du risque plus élevé)ou accroitre les réserves (politique de gestion du risque faible ou modérée)

Interactions entre actions collectives et individuelles résultant dun accord et dune confrontation entre demande de dividendes et augmentation du capital des actionnaires familiaux

Augmenter le capital pour les actionnaires familiaux ou non familiaux et consolider le pouvoir et linfluence des actionnaires familiaux ou non familiaux par rapport au maintien du capital et de la gouvernance existants en versant des dividendes (contrôle daccès élevé au capital)

Politique dinvestissement, prise de risque et horizon temporel des investissements

- Investir dans des projets à faible risque avec une période de récupération à court terme et encourager une politique dinvestissement attentiste (intérêt des actionnaires familiaux) par rapport à linvestissement dans des options de croissance dentreprise (notamment externe) et gérer le risque de dévaluation de lactif de lentreprise (intérêt des actionnaires non familiaux)

Impact de la gestion des risques et de la temporalité sur la stratégie globale de lentreprise

Focus sur une stratégie de croissance risquée à court terme avec des bénéfices plus importants plus rapidement pour lentreprise, par opposition à une stratégie à long terme comportant des risques plus modérés et moins rentable à court terme

Envisager des solutions de croissance externe défavorables pour les actionnaires familiaux (fusion-acquisition, alliance) et abandonner ces options de croissance externe pour une croissance interne

Interaction entre différents points de vue sur la gestion des risques et la temporalité des projets

Gestion des risques impactée par la baisse potentielle de linfluence des actionnaires familiaux (croissance externe) par rapport au maintien de la gouvernance actuelle (croissance interne)

Politique des actionnaires agressive et risquée axée sur les rendements immédiats des actions (augmentation de la pression sur les actionnaires, augmentation possible du verrouillage de certains actionnaires) par opposition à

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- Investir dans des projets ayant un horizon temporel correspondant à lhorizon de la succession familiale (intérêt familial des actionnaires) par rapport à des projets ayant un horizon à plus long terme (intérêt des actionnaires non familiaux)

- Prise en compte des successions entre principaux actionnaires minoritaires non familiaux (intérêt des actionnaires non familiaux) par rapport à la réorganisation des actifs de lentreprise par successions familiales (intérêt des actionnaires familiaux)

?Préférer une politique de rationalisation avec une gestion du risque faible (stabilité) plutôt que de saisir les opportunités, y compris un niveau dincertitude élevé (gestion du risque plus élevée)

une politique modérée axée sur le long terme (probabilité de mouvements au sein de la gouvernance moins importante)

Améliorer les projets à court terme pour favoriser les intérêts des actionnaires familiaux (ou la succession familiale) au lieu dinvestir dans des projets à plus long terme que la succession familiale

Politique demploi axée familiale (bénéfice privé familial)

Concentration des postes de direction et du contrôle au sein de la famille (intérêt familial actionnaire) par rapport au renforcement de la gestion externe et du contrôle indépendant (intérêt non familial)

Interaction possible entre lengagement familial et non familial et la performance de lorganisation

Risque dappauvrissement interne

Équilibre entre contrôle et autonomie de gestion du personnel

Dilution du pouvoir des actionnaires familiaux (recrutement externe) vs contrôle renforcé au sein de la gouvernance (peu ou pas de recrutement externe)

Politique douverture de capital et de dette (financement externe)

Refuser douvrir des capitaux ou démettre de nouvelles dettes pour des raisons de contrôle (intérêt des actionnaires familiaux) par rapport au financement dopportunités de croissance (intérêt des actionnaires non familiaux)

Interaction possible entre les moyens datteindre la croissance financière de lentreprise (croissance externe ou interne)

Contributions externes au financement du capital accepté (incertitude et opportunités privilégiées) vs politique dendettement stricte (contrôle et stabilité privilégiés)

Équilibre entre contrôle et autonomie en matière financière

Dilution du pouvoir des actionnaires familiaux (capital douverture) vs rétention du pouvoir (refus douvrir du capital)

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Actionnaires familiaux majoritaires et actionnaires minoritaires familiaux

Besoins de liquidité des actionnaires familiaux minoritaires (dividendes requis)

Augmentation des dividendes (intérêt des actionnaires familiaux minoritaires) par rapport à laffectation de fonds supplémentaires pour renforcer le contrôle familial (intérêt des actionnaires familiaux majoritaires) ou pour la croissance à long terme de lentreprise (intérêt des actionnaires non familiaux et intérêt des actionnaires majoritaires de la famille une fois le contrôle familial renforcé)

Impact financier sur le (non) transfert de dividendes au sein de lentreprise

Améliorer lhorizon à court terme des actionnaires familiaux et amortir le pouvoir dinvestissement de lentreprise (verser des dividendes) par rapport à une croissance privilégiée à long terme de lentreprise et allouer davantage de fonds pour renforcer le contrôle familial

Interactions entre actionnaires familiaux et non familiaux concernant la vente ou le transfert de dividendes

Améliorer le contrôle de la gouvernance pour les actionnaires familiaux par rapport aux positions ouvertes et accroître la diversité dans la structure de propriété

Avantages familiales privées

Incidence financière sur la relocalisation davantages privés au sein de lentreprise

Prendre de largent pour les avantages privés familiaux vs réinvestir de largent dans lorganisation

Tensions entre les objectifs multiples et concurrents des actionnaires

Augmenter les prestations familiales par rapport aux augmentations globales

Accroître le contrôle et la surveillance des gestionnaires de famille par rapport à lextension du pouvoir et de linfluence des actionnaires familiaux

Financement de la politique de réduction de capital (financement externe)

Accumulation de liquidités au sein de lentreprise pour le rachat dactions (intérêt majoritaire de la famille) par rapport à la vente dactions pour encaisser au détriment du pouvoir de vote familial (intérêt minoritaire de lactionnaire familial)

Impact de la gestion de la réduction de capital sur la viabilité de lentreprise

Augmenter le pouvoir dendettement de lorganisation pour racheter des actions et restreindre dautres projets de croissance par rapport à la sortie de largent de lorganisation et à la vente dactions (liberté de lancer dautres projets de croissance)

Interactions entre différentes stratégies : rachat dactions ou vente dactions pour encaissement

Augmenter le contrôle et linfluence de la gouvernance actuelle (achat dactions) par rapport à louverture du capital (actions vendues)

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De manière générale, il ressort de lanalyse que les paradoxes liés à lappartenance sont au cœur de toutes les problématiques car ils concernent les actionnaires familiaux et non familiaux (la catégorie appartenance est présente dans les deux paradoxes identifiés). Selon cette logique, lidentité des actionnaires favorise les tensions entre les objectifs individuels et collectifs, et met en lumière les tensions de valeurs, des rôles et des différences dintérêt entre les parties.

Dune part, les tensions performance-appartenance ont une incidence sur la performance et souligne les oppositions potentielles entre les intérêts de lactionnaire familial et les exigences ceux des actionnaires non familiaux. Ces tensions sont également liées à linteraction entre moyens et fins. En conséquence, ces tensions sont liées à des problèmes de développement et de croissance, et à la façon dappréhender et de créer de la richesse selon la nature des parties en présence (performance économique versus gestion patrimoniale ; court terme versus long terme, rentabilité versus stabilité ; adaptation versus continuité).

Dautre part, les tensions exécution-appartenance sont liées aux interactions entre les actions collectives et les actions individuelles / de groupe, ainsi quaux tensions entre lindividu et lensemble des autres acteurs. Ils sont généralement associés à des problèmes de gouvernance. Cette seconde catégorie reflète lopposition entre le fait de créer et structurer une organisation avec des ressources techniques, technologiques au service du développement de lactivité (standardisation, coordination, où lon retrouve les critères defficience et defficacité) par opposition aux notions de confiance, dentraide, de solidarité, de liens directs avec la famille fondés sur des relations informelles ou affectives.

5. Discussion

La lecture paradoxale met en lumière les difficultés, enjeux et questionnements rencontrés par un dirigeant de PME – ETI. Les entreprises familiales sont au cœur de différents jeux dinfluence et dintérêt à la fois sous différents angles : politique, stratégique, financière, émotionnel et affective (Tabor et al., 2018). De par leur interface entre différentes logiques 82(familiale et entrepreneuriale), elles sont un cadre où sactivent différents paradoxes issus de logiques interdépendantes et parfois contradictoires de nature familiale et entrepreneuriale (Gundolf et al., 2013).

Les deux catégories de paradoxes soulignés dans nos résultats reflètent les phénomènes dappartenance, de performance et dorganisation impactés par ces dynamiques endogènes.

Nous étude apporte ainsi une illustration sur la façon dont peut sopérer la transmission dentreprises familiales (cf. tableau 3). Cette approche ne prétend pas à une analyse exhaustive. Elle constitue une première étape visant à interpeler la communauté scientifique sur lintérêt de la lecture paradoxale pour la transmission des entreprises familiales. En cela, ce prisme de lecture permet de comprendre et danalyser la nature profonde de la structure familiale, en impliquant les notions de culture et dorganisations au service de la performance des entreprises familiales

La lecture paradoxale contribue aussi à aller au-delà dune dimension purement descriptive et compréhensive, en laissant entrevoir une capacité à proposer une grille de nature plus explicative, voire proactive, en vue de résoudre des problèmes majeurs de lentreprise familiale, à linstar des questions de reprise et de transmission familiale.

La lecture paradoxale est proposée dans cette étude comme une lecture compréhensive dun phénomène en mettant en relief la richesse des dimensions de lentreprise familiale. Aussi, la lecture des entreprises familiales via le prisme des paradoxes permet une lecture intégrative des dynamiques à lœuvre, donnant aux managers la possibilité davoir une lecture différente des contradictions en présence. La grille 2 propose daller plus loin en donnant une lecture explicative dans laide à la résolution denjeux majeurs tels que la transmission intergénérationnelle.

La capacité dun dirigeant (ou plus largement dun acteur) de formuler, de verbaliser des paradoxes inhérents aux situations de changement organisationnel peut améliorer la prise de conscience individuelle voire collective de ces dualités. Cette prise de conscience est une première étape dans la recherche de solutions. La prise de conscience de lexistence de paradoxes peut permettre aux parties prenantes dadopter des décisions stratégiques plus « équilibrées » (Smith et Tushman, 2005), cest-à-dire combinant les deux pôles de la dynamique.

Enfin et comme énoncé en revue de la littérature, il existe des différences dans lapproche dun paradoxe entre deux écoles : (1), dune 83part, une partie des études mobilisent les tensions paradoxales dans une vision pragmatique en proposant une lecture paradoxale comme outil de décryptage des pôles opposés en tension (Smith et Lewis, 2011) ; (2), dautre part, dautres travaux conservent le paradoxe comme un prisme de lecture dont lobjectif est de garder en son essence la complexité et laspect « multifacettes » des phénomènes observés (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999).

Cet article vise à instaurer un dialogue entre ces deux écoles, en conservant (1) une lecture holistique dune situation paradoxale dans la lignée des travaux de Morin, (1990), Morin et Le Moigne (1999) (lecture des différents paradoxes à lœuvre), (2), en « utilisant » le paradoxe tel un outil de gestion (et de pilotage du changement) – dans la lignée des travaux de Smith et Lewis (2011) (compréhension des dynamiques activées dans le cadre dentreprises familiales). Nos résultats mettent en évidence que la compréhension du contexte des entreprises familiales et la prise de décision associée à ce contexte doit englober des cadres paradoxaux : il existe une nécessité de garder dans une perspective holistique le paradoxe pour y faire face et lutiliser.

Conclusion

Notre article visait à intégrer les travaux de Smith et Lewis (2011) en étendant leur grille de lecture des paradoxes au contexte spécifique des entreprises familiales et à la question de la transmission/succession. À notre connaissance, peu détudes ont transposé les travaux de Smith et Lewis (2011) dans un tel contexte organisationnel. Or cette grille danalyse peut se révéler particulièrement utile, pour comprendre et cerner les différents niveaux de tensions dans ce type de situations. Cette grille pourra être communiquée aux cédants et repreneurs dans ce type de structure afin davoir une vision holistique des possibles conflits au cours du processus. Notre étude souligne notamment limbrication de différentes logiques de nature à la fois économique et familiale, ainsi que le caractère dominant des paradoxes performance-appartenance et organisation-appartenance dans le contexte de transmission des entreprises familiales.

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Lidentification de ces paradoxes et leur maîtrise constituent en soi de nouvelles clés pour parvenir à une gestion réussie dune transmission dentreprise familiales. Nos résultats empiriques reflètent le contexte de létude en soulignant la nature dominante des paradoxes liés à lappartenance dans le contexte de transmission des entreprises familiales. En ce sens, notre article complète les travaux de Meier et Missonnier (2013) en caractérisant les dynamiques endogènes à lœuvre dans un tel contexte.

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1 Nous résumons les principaux apports de la littérature définissant un paradoxe en trois dimensions : (1) la notion de temps : les deux éléments doivent être en contradiction simultanément (Poole et Van de Ven, 1989 ; Smith et Lewis, 2011) ; (2) la notion de spatialité : les deux éléments doivent être reliés dans leur opposition, c est-à-dire dans leur cadre d analyse (Smith et Lewis, 2011) ; (3) les deux éléments doivent être complémentaires et doivent se renforcer mutuellement. En ce sens, les éléments se définissent les uns les autres et ne pourraient pas exister indépendamment (Smith et Lewis, 2011).