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Classiques Garnier

Revue Entreprise & Société (ENSO) Appel à ­contributions

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2019 – 1, n° 5
    . varia
  • Pages : 223 à 228
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406101789
  • ISBN : 978-2-406-10178-9
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10178-9.p.0223
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/04/2020
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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Revue Entreprise & société (ENSO)

Appel à contributions

Les entreprises familiales

Les entreprises familiales représentent entre 65 % et 90 % des entreprises dans le monde, dont 70 % des entreprises en Europe et 83 % des entreprises françaises. Les entreprises familiales ne se trouvent pas forcement dans le terreau des micro-entreprises, des PME ou des ETI, mais on peut également retrouver cette notion parmi les plus grandes firmes, quelles soient cotées ou non. Selon les définitions, elles pourraient représenter jusquà un tiers des firmes composant lindice S&P5001.

Mais comment les définir ? La notion même dentreprise familiale est difficile à cerner. On peut considérer comme entreprises familiales les firmes dont une partie significative du capital est détenue de manière pérenne par un ou plusieurs membres dune même famille, que cette famille a une influence sur la gestion de la firme, que la famille soit investie ou non dans la direction effective de lentreprise.

Les différences de comportement de lentreprise familiale par rapport à lentreprise purement actionnariale viennent de la superposition de deux cercles dans les structures de décision de la société, le cercle actionnarial et le cercle familial. Le cercle familial pèse dans les décisions stratégiques de lorganisation, a minima de manière informelle. La superposition de ces deux cercles amène une gouvernance particulière et nécessite souvent, sur le plan juridique et financier, lutilisation doutils spécifiques comme le recours aux pactes dactionnaires ou à la structure de sociétés en commandite.

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Actionnaires et membres dune famille nont pas toujours les mêmes fonctions dutilité. Si les premiers cherchent classiquement à maximiser leur espérance de rentabilité à court et moyen terme sous contrainte de risque, les seconds ont souvent à cœur de faire durer et daméliorer un patrimoine à long terme, patrimoine à propos duquel la notion de rentabilité à court terme est seconde. Aux enjeux managériaux et financiers se superposent les enjeux socio-émotionnels que lon trouve typiquement dans les liens familiaux2.

Laltruisme est une des valeurs qui se retrouvent le plus souvent dans les entreprises familiales, avec une notion forte du bien-être de la communauté que la firme constitue avec ses parties prenantes3. Dès lors, dans les entreprises familiales, les liens entre les parties prenantes, notamment entre la famille, les salariés, les fournisseurs et les clients sont des liens plus forts, tissés sur le long terme. Laltruisme des entreprises familiales et les relations particulières quelle entretient avec ses clients poussent-ils les entreprises familiales à sengager plus que dautres dans la RSE ? Cest un lien à explorer plus en détail, mais si les firmes familiales se concentrent sur les qualités des produits ou les rapports avec ses salariés, lhypothèse dune relation forte entre entreprises familiales et entreprises socialement responsables nest pas à exclure4.

Ceci a-t-il un lien avec cela ? Daprès la majorité des études sur le sujet, les entreprises familiales dégagent une performance supérieure à celles des entreprises non-familiales5, que ces indices soient dorigine interne (création de valeur) ou externe (supériorité des indices boursiers des entreprises familiales sur les indices boursiers traditionnels)6, tandis que dun autre côté lexistence de pactes dactionnaires ou de structures juridiques complexes et protectrice des intérêts de la famille amène, en cas dintroduction en bourse, de faibles valorisations des entreprises familiales.

Compte tenu de la volonté des membres de la famille de conserver leur influence et une partie au moins de la propriété de la firme, se pose souvent le problème de sa transmission. Lors de ces transmissions, il est fréquent que les membres de la famille soient contraints de se 225dessaisir dune partie du capital pour régler les droits de succession. Pactes dactionnaires ou chartes de famille peuvent voler en éclat à ces occasions et le partage du pouvoir dans les entreprises familiales se redéployer. Durant ces moments, très spécifiques, on peut voir arriver dans lactionnariat des investisseurs non désirés via une perte de contrôle. Des outils dingénierie financière sont alors parfois prévus pour optimiser la transmission ou pour permettre au clan familial de conserver son influence malgré la diminution de leur présence au capital.

La description sommaire que nous venons de faire de lentreprise familiale conserve cependant un aspect sinon français du moins latin. Quen est-il de lentreprise familiale en Allemagne, dans les pays anglo-saxons, plutôt enclins à avoir une vision très actionnariale de la firme ou, beaucoup plus loin dans les civilisations asiatiques, en Chine ou au Japon7 par exemple ? En Chine, compte tenu du contexte politique et du retour récent de léconomie de marché, le problème est émergent : les entreprises familiales de grande taille sont en cours de création, quelle est leur gouvernance, comment se prépare leur transmission ? la mobilisation de la littérature du management interculturel est intéressante sur ce point.

Lentreprise familiale constitue donc un objet de recherche pouvant être appréhendé de multiples manières et à partir de nombreuses portes dentrées : Sociologique ou anthropologique si lon considère dabord la comparaison des attitudes des uns et des autres et des uns vis-à-vis des uns et autres dans lentreprise familiale : membres de la famille entre eux, actionnaires entre eux, et membres de la famille par rapport aux actionnaires, notamment lorsque des fonds activistes peuvent entrer au capital ou lorsquune prise de contrôle rampante est tentée : on pense ainsi par exemple à létude des comportements des membres de la famille Dumas lors de la tentative de prise de contrôle de la firme Hermès par le holding de Vincent Bolloré. La porte dentrée peut évidemment être de nature juridique, à travers létude des outils permettant aux familles de continuer à exercer le pouvoir dans des entreprises dont elles détiennent une faible part du capital. La finance est aussi une autre porte dentrée : létude des performances financières des entreprises familiales ou de leur valorisation constitue un aspect de recherche permanent. Le management, au pur sens du terme, cest-à-dire létude de la stratégie, des relations 226humaines ou de la communication des firmes familiales est également un moyen de cerner cet objet détude. Lhistoire enfin éclaire le présent : celle des entreprises familiales a fait lobjet de nombreuses études – on pense aux études historiques sur la famille Wendel par exemple – et ces études peuvent être poursuivies.

La revue Entreprise & Société (E&S) a donc décidé de consacrer un dossier thématique aux entreprises familiales. Divers types de propositions seront éligibles, sous réserve quelles soient conformes aux orientations éditoriales de la revue (pluridisciplinarité effective, diversité, science en conscience, francophonie).

Philippe Gillet, pour la rédaction.

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BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

Allouche J, Aman B. et Garaudel P. (2006), « Performances et caractéristiques financières comparées des entreprises familiales et non familiales : le rôle modérateur de la cotation en bourse et du degré de contrôle actionnarial », Cahier de recherche, no 2006-02, GRECO, Université Paris-I

Allouche J., Amann B., Jaussaud J. et Karushina T. (2008), « The Impact of the Family Control on the Performance and Financial Characteristics of Family versus Non-Family Business in Japan : a matched-pair Investigation », Family business review, vol. 21 no 4, p. 315-330.

Amit R. et Villalonga (2014), « Financial Performance of the Family Firms », in : L. Melin, M. Nordviq et P. Sharma (eds), The Sage Handbook of Family Business ; London, Sage, p. 157-178

Barredy C. (2008), « Gouvernance de la société familiale cotée, les raisons de ladoption dune SA à directoire et conseil de surveillance », Revue Française de Gestion, vol. 2008/5 no 185, p. 1-19.

Barredy C. et Batac J. (2013), « Le rôle des dynamiques familiales dans la stratégie et la gouvernance des entreprises : soixante ans dhistoire dune entreprise familiale », Annales des Mines - Gérer et comprendre, vol. 2013/1, no 111, p. 47-59.

dIribarne Ph., (1989), La Logique de lhonneur, Paris, Le Seuil.

Durkheim E. (1975), « Introduction à la sociologie de la famille », in : É. Durkheim, Textes. 3. Fonctions sociales et institutions, Paris, Les Éditions de Minuit, Collection : « Le sens commun », p. 9-34.

Handler W. (1990), « Succession of Family firms ; A Mutual Role Adjustment between the Entrepreneur and Next Generation Family Membres », Entrepreneurship Theorvol y and Practice, vol. 15, no 1, p. 37-51.

Hirigoyen G. (2014), Entreprises familiales défis et performance, Paris, Economica.

Hirigoyen G. (2014), « Valeur et évaluation des entreprises familiales », Revue Française de Gestion, vol. 2014/5, no 242, p. 119-134.

Hirigoyen, G. (2017), « Altruisme du dirigeant et biais comportementaux dans lentreprise, familiale », Finance Bulletin, no 1 :1, mars, p. 53-62.

Van Auken, H. et Werbel J. (2006), « Family Dynamic and the Family Financial Performance Spousal Commitment », Family Business Review, vol. 19, no 1, p. 49-63.

Zachary R. K. (2011), « The Importance of the Family System in Family Business », Journal of Family Business Management, vol. 1, no 1, p. 26-36.

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MODALITÉS DE PRÉSENTATION

Ce dossier thématique concerne le numéro 7 dE&S, prévu à lautomne 2020, les propositions darticles devront être envoyées à la rédaction avant le 30 mars 2020.

Ces propositions sont à envoyer sur le mail dédié : enso.asso@gmail.com avec copie au coordinateur de ce dossier thématique : Christian Le Bas : clebas@univ-catholyon.fr

1 Hirigoyen (2014).

2 Durkheim (1975).

3 Hirigoyen (2017).

4 Ref. dans la bibliographie.

5 Allouche et al., (2006).

6 Amit et Villalonga, (2014).

7 Allouche et al., (2008).