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Classiques Garnier

Recensions d'ouvrages

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2019 – 1, n° 5
    . varia
  • Auteurs : Basso (Olivier), Malherbe (Denis), Levant (Yves), Brimm (Michael)
  • Pages : 203 à 221
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406101789
  • ISBN : 978-2-406-10178-9
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10178-9.p.0203
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/04/2020
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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Swann Bommier et Cécile Renouard, (2018), Lentreprise comme commun. Au-delà de la RSE, Paris, Éditions Charles Léopold Mayer, Collection : « Essai », 264 pages.

Recension par Olivier Basso1

Le titre de louvrage explicite lambition de ses auteurs, S. Bommier et C. Renouard : montrer non seulement que lentreprise a pour devoir de se soucier et de prendre soin des biens communs mais aussi quelle-même est lun de ces communs.

Le propos se déploie à travers la description en quatre temps des différentes facettes de la responsabilité de lentreprise :

1. économique et financière, elle porte sur les « enjeux de création et de partage de la valeur » ;

2. sociale, elle sexerce envers les employés et concerne les « droits sociaux des travailleurs impliqués dans la chaîne de valeur » ; 

3. sociétale et environnementale, elle concerne « la gestion des dommages collatéraux en prenant la perspective dimpact sur les populations et lenvironnement » ;

4. politique, elle questionne « la gouvernance des entreprises et la capacité de celles-ci à préserver les biens communs mondiaux ».

La première partie du livre est donc consacrée à lanalyse de la responsabilité économique et financière de lentreprise et son aptitude à « créer et partager équitablement » ; cette visée permet de passer au crible les stratégies dinvestissement, les normes comptables, la fiscalité et la politique salariale. Lexamen de ces quatre mécanismes qui permettent de créer, évaluer et redistribuer la valeur produite par lactivité de lentreprise, dessine en creux le périmètre élargie dune responsabilité de lentreprise, confrontée au choix dune économie durable, intégrant les dimensions extra-financières de son activité, et prenant soin de ses parties prenantes, en quantifiant notamment les dommages sociaux et 204environnementaux, en limitant la mise en concurrence fiscale des territoires et en rémunérant équitablement ses employés, cadres dirigeants et actionnaires.

Le deuxième temps de louvrage sintéresse à la responsabilité sociale de lentreprise et scrute la manière dont « des compromis se sont dessinés entre normes universelles, droits nationaux, et codes privés pour gérer les disparités territoriales » dans la définition des standards sociaux et la protection des droits fondamentaux des travailleurs. Lentreprise, forte de sa présence globale, met en effet en concurrence les droits sociaux nationaux et révèle labsence dun référentiel international qui permettrait de réguler efficacement les comportements minimalistes voire déviants en matière de protection des droits fondamentaux au sein des chaînes dapprovisionnement et de sous-traitances qui enserrent désormais la planète. Pour autant, des processus de normalisation émergent et des coalitions multipartites (ONG, organisations internationales, syndicats et entreprises) sefforcent diversement de combler le déficit actuel de droit social sur le plan global.

La troisième partie vise à expliciter la responsabilité sociétale et environnementale de lentreprise tenue a minima de « ne pas nuire à son écosystème ». Elle examine les modes dengagement des entreprises – entre philanthropie et clientélisme – envers les communautés qui vivent autour de leurs sites de production, leurs effets sur les politiques publiques de développement, et la nature des recours juridiques et extra-juridiques en cas de conflit. La gestion des impacts négatifs (droits de lhomme, environnement…), au-delà du respect de la législation locale, la quête dune instance de droit extraterritoriale appellent à la création de nouveaux espaces normatifs et à « la multiplication des arènes de redevabilité ».

Dans la quatrième partie de louvrage, les auteurs portent laccent sur la responsabilité politique de lentreprise. En effet, les dimensions précédemment analysées montrent la puissance de cet acteur dans les sphères économique, sociale, sociétale et environnementale. Lentreprise révèle ainsi « son rôle dans la construction de lécosystème au sein duquel elle agit ». En dautres termes, elle saffirme comme un acteur politique qui touche aux conditions mêmes du vivre ensemble sur la planète, et appelle ainsi une réflexion sur sa mission de « coopérer au bien commun ». Et plus particulièrement de prendre soin – en se limitant peut-être son appétit de croissance économique – des biens communs mondiaux, 205rivaux et non exclusifs, « auxquels toute personne devrait pouvoir accéder, aujourdhui et demain ». Les auteurs distinguent alors des biens communs immatériels (démocratie, souveraineté et lien social) et des biens communs mondiaux matériels (climat et ressources naturelles).

Limpact de lentreprise sur la chose publique (res publica) appelle à questionner sa gouvernance et les manières dont sorganise le travail collectif, entre coordination hiérarchique et autogestion coopérative. Elle conduit également à examiner avec soin son impact sur la démocratie avec les influences quelle cherche à exercer sur le public avec les pratiques de lobbying, sur la souveraineté avec les clauses de règlement des différends investisseurs-États (RDIE), et le lien social avec les pratiques de corruption. Sur le plan climatique et environnemental, lévocation des processus de dégradation en cours de notre éco-système conduit à plaider pour une sortie du modèle productiviste et appeler à la pratique dune ingénierie nouvelle, mue davantage par un désir de consommation raisonnable (sobriété) et soucieuse de préserver la vitalité de notre planète.

La lecture de louvrage est extrêmement intéressante avec le parti pris constant dune réflexion rigoureuse et dense, illustrée dexemples institutionnels précis. Les auteurs ont effectué un travail de recension et de synthèse considérable en mobilisant et en articulant avec clarté de multiples travaux de recherche, provenant de champs disciplinaires variés. Les convictions qui animent les auteurs donnent également à louvrage un souffle et un pouvoir de résonance puissants.

Ceci posé, nous souhaiterions formuler in fine trois remarques :

la première porte sur linsularité de louvrage : il serait intéressant, peut-être dans une deuxième édition, de débattre, dans cette réflexion noble et ambitieuse, avec les travaux des autres penseurs français qui travaillent depuis plusieurs années sur ce même objet, lentreprise. Pensons, sans prétendre à lexhaustivité, aux contributions inspirantes de Jean-Philippe Robé2, Pierre-Yves Gomez3, Armand Hatchuel4, 206Blanche Segrestin5, Baudoin Roger6, Olivier Favereau7… Au-delà du jeu des affinités électives, il y aurait peut-être là matière à consolider une réflexion collective et un désir partagé dinfléchir le cours des évènements et de peser sur le réel : cest souvent de lunion dinitiatives isolées puis coordonnées que naît la vague du changement, et les avancées françaises (loi Pacte, mission Notat-Senard sur la raison dêtre…) montrent que la France peut être le lieu dexpérimentation de nouveaux montages organisationnels.

Par ailleurs, et en lien avec le point précédent, les auteurs interrogent au final assez peu la nature même de lentreprise, et ses différences constitutives : quoi de commun par exemple entre une PME de vingt personnes au rayonnement régional et lentreprise transnationale dont le chiffre daffaire rivalise avec le PIB de certains pays ? Partagent-elles le même type de responsabilité ? La réflexion promise sur lentreprise comme commun gagnerait probablement à se confronter aux différentes perspectives développées par les penseurs précités et notamment celles qui revisitent de manière radicale les fondements de lentreprise entendue comme projet collectif de production.

Enfin, il serait passionnant de pouvoir compléter cette vision panoramique des responsabilités des entreprises par une présentation des avancées déjà réalisées par telle ou telle et qui pourraient servir de modèle actionnable pour les autres. Pensons par exemple au programme « Share and Care » de LOréal qui sest engagé depuis 2015 à accorder à ses 77 400 employés les bénéfices sociaux dont jouissaient jusque-là les seuls 12 000 salariés français. Bien entendu, ceci nexonère pas cette entreprise de ses autres points de vigilance (qualité de vie au travail, protection de lenvironnement pour en nommer deux) mais laccent mis sur le bien réalisé fait exemple et nourrit lespérance dune visée partagée du bien commun pour, comme nous le rappellent les deux auteurs en fin de propos, « repenser notre façon dhabiter la terre ».

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Anthony F. Buono, Henri Savall et Laurent Cappelletti, (2018), La recherche-intervention dans les entreprises et les organisations. De la conception à la publication, Charlotte (NC), Information Age Publishing, 312 pages.

Recension par Denis Malherbe8

Au temps pas si éloigné – voilà quelques décennies – où sinstitutionnalisait en France une recherche universitaire en sciences de gestion, lintervention dans les organisations était surtout envisagée comme une affaire de praticiens, ne concernant pas vraiment les chercheurs académiques. Puis les décennies 1980-1990 virent des débats méthodologiques et épistémologiques dans le champ dune recherche gestionnaire en plein développement. Les tenants du mainstream institutionnel postulaient quil nétait de recherche que positiviste, hypothético-déductive et statisticienne. Face à eux, divers groupes de chercheurs ont émergé et se sont affirmés, ancrant leurs postures et approches dans le terreau de la phénoménologie et du constructivisme. De ces évolutions, il résulte aujourdhui un appréciable élargissement des modes de production de connaissances au sein de la les perspectives de la recherche en management.

La recherche-intervention figure au nombre de ces courants qui ont valorisé la compréhension in situ de la dynamique complexe des organisations. En faisant du chercheur un intervenant, elle place la recherche en prise directe avec laction, ses acteurs et ses enjeux. Lidée darticuler action et réflexivité nest certes nouvelle. On lui doit – faut-il le rappeler ? – de multiples éclairages fondateurs de la science des organisations, de Taylor et Fayol à Schein ou Argyris en passant Mary Parker Follet, Melville Dalton, Kurt Lewin et bien dautres. Mais si ces approches avaient trouvé place bien avant la Seconde guerre mondiale dans les business schools anglo-saxonnes, il aura fallu attendre quelques décennies pour quelles trouvent place dans le paysage académique français. Il y a 208là le paradoxe historique dune discipline, les sciences de gestion, dont lobjet est la performance des organisations mais qui dont les structures ont tardé à reconnaître lintérêt dune circularité réfléchie entre activités de consultation auprès des organisations, démarches méthodiques danalyse et de conceptualisation et missions denseignement ou de formation continue. À cet égard, en constituant depuis 1975 une communauté de chercheurs et/ou intervenants dans le cadre de lInstitut de Socio-Économie des Entreprises et des Organisations (ISEOR), Henri Savall a œuvré à la reconnaissance institutionnelle de la recherche-intervention, tant dans son opérationnalisation méthodologique, sa légitimation épistémologique que dans sa vocation formatrice.

Avec la parution de La recherche-intervention dans les entreprises et les organisations en 2018, une nouvelle pierre est apportée à cet édifice. Le livre est co-dirigé par Anthony F. Buono (Bentley University, Boston) qui en a rédigé lintroduction, Henri Savall (ISEOR, Lyon) et Laurent Cappeletti (CNAM, Paris). À eux trois auteurs se sont joints cinq autres spécialistes – Jean-Michel Plane, Florence Noguera, Isabelle Barth, Thierry Nobre – qui, comme Laurent Cappelletti, ont en commun davoir préparé leur thèse sous la direction dHenti Savall. La perspective donnée par cet ouvrage est large, pragmatique et processuelle comme le suggère son sous-titre : De la conceptualisation à la publication. Le livre est organisé en trois parties de taille inégale, répondant chacune à une fonction différente. La première partie traite des fondements, des enjeux et du cadrage des projets de recherche-intervention. Représentant plus de la moitié de louvrage, elle reste dune facture académique classique dans ce type douvrage collectif. Les huit auteurs y livrent chacun une première contribution assez étoffée, avant de donner un second texte plus court dans une deuxième partie consacrée à la démarche de publication. Vient ensuite en troisième partie, un dernier chapitre rédigé par Henri Savall et Laurent Cappelletti sur la base déchanges avec les participants au séminaire FNEGE « De la recherche-intervention à la publication » dont Laurent Cappelletti est la cheville ouvrière. Son contenu est proche dune foire aux questions, structurée en 6 thèmes très concrets. Enfin, un lexique termine le corpus en donnant la définition de concepts généraux ou doutils plus spécifiques à la méthodologie développée par lISEOR.

Ouvrant la première partie, Henri Savall développe et actualise sa vision des fondations épistémologiques de la recherche-intervention à 209caractère socio-économique. Il discute notamment ses analogies avec la recherche clinique dans le champ médical. Dans les chapitres suivants, Véronique Zardet, Jean-Michel Plane et Florence Noguera proposent dintéressantes réflexions méthodologiques sur leurs pratiques de démarches et dispositifs de recherche. De même, Isabelle Barth et Marc Bonnet présentent des retours sur leur pratiques de recherche-intervention dans des projets particuliers : en tant que praticien réflexif au sein de sa propre organisation académique pour la première, en qualité dintervenant sur une demande relative à la relation de lillettrisme à lemploi pour le second. Diverses, complémentaires mais convergentes, toutes ces contributions annoncent les présentations de la deuxième partie centrées cette fois sur des exemples de démarches de publication. On peut sinterroger ici sur le tracé de frontière qui semble un peu forcé entre ces deux parties car, par leur contenu, un ou deux chapitres de la première partie pourraient être placées en deuxième partie.

Loriginalité de cette première partie tient surtout à ce quelle aborde un point crucial pour qui sengage dans une recherche-intervention : négocier son projet avec la ou les organisation(s) où se joue lintervention. Laurent Cappelletti éclaire ainsi limportance de la convention qui permet aux partenaires un pilotage structuré et rigoureux du projet commun. Lentreprise en demande dintervention acceptera dautant mieux les conditions de travail et de rétribution du chercheur ou de léquipe de recherche que cette convention spécifie « une méthode structurée et rigoureuse ». Il y va de la conduite de lintervention in situ comme de lexploitation académique qui en résultera. Revenant sur une expérience menée en PME, Thierry Nobre met en avant le caractère processuel et construit de cette négociation tout au long dun projet de recherche-intervention.

Ces réflexions sont fondamentales pour la préparation, la mise en œuvre et lexploitation des projets de recherche-intervention. En effet, la question de la négociation a, par le passé, été trop peu évoquée dans les publications françaises traitant de recherche-intervention. Ses promoteurs académiques ne peuvent se contenter de vanter indéfiniment ses charmes épistémologiques et méthodologiques tout en jetant un voile pudique sur les conditions qui orientent sa mise en œuvre. Sans doute faut-il voir là autant la marque de lexpérience développée par les contributeurs issus de lISEOR que celle de la perspective nord-américaine dAnthony F. Buono. Par ses travaux et enseignements, ce dernier 210a contribué à faire le lien entre consultance et recherche en management dans un contexte académique sans doute moins empreint de scolastique mais aussi plus utilitariste : cest du monde anglo-saxon que nous vient lineffable maxime « Publish or perish ».

Explicitement dédiée à la démarche de publication, la deuxième partie de louvrage consacre à cette préoccupation quasi obsessionnelle dans le monde actuel de la recherche en management. Comment les acteurs de la recherche-intervention peuvent-ils/elles légitimer dans la communauté académique leurs contributions à la connaissance des organisations et du management ? En dautres termes, comment rendre visibles ces contributions dans des revues dument habilitées par les autorités régulatrices de la Profession ? Au fil des 85 pages de cette partie, cinq auteurs restituent chacun une expérience directe de publication scientifique. Les revues concernées sont aussi variées quOrganizational Research Method (Henri Savall), Gérer et comprendre (Véronique Zardet), Journal of Business Ethics (Jean-Michel Plane), Gestion des Ressources Humaines (Florence Noguera), Management Accounting Quaterly (Laurent Cappelletti). Quant aux trois autres contributeurs, ils exposent leurs réflexions sur dautres aspects du processus de publication. Thierry Nobre resitue la publication dun article dans Comptabilité Contrôle Audit dans le déroulement densemble dune recherche-intervention en PME. Marc Bonnet discute la délicate question du passage de la thèse à la publication, à partir dune recherche-intervention conduite par une équipe de doctorants dans un hôpital du Moyen-Orient et ayant débouché sur un article dans la revue anglophone Society and Business Review. Isabelle Barth, enfin, ouvre la perspective de la valorisation des travaux de recherche-intervention en mettant en regard la publication académique et le rayonnement sur les réseaux sociaux.

Lintérêt conjoint de ces différents textes est que tous sinscrivent dans lordre dune restitution réflexive de la part de chercheurs ayant une solide expérience du sujet. Parmi les points soulevés et discutés, on trouve, entre autres, le préalable de la lisibilité de la question de recherche, la nécessité de faire le lien entre les critères dévaluation dune recherche-intervention et les attentes éditoriales de différentes revues ou encore limportance du dialogue entre auteurs et réviseurs. Daucuns objecteront que ces points sont génériques, quà cet égard, ils ne différencient en rien es écrits tirés de la recherche-intervention de 211tout autre texte soumis à un journal ou une revue académique. Si cette réserve est recevable en remontant à un niveau élevé de généralité, elle mérite toutefois dêtre relativisée dès lors quon regarde les choses de plus près. Par leur caractère construit, contextualisé et intersubjectif, les pratiques de recherche-intervention ne peuvent être absolument formatées. Les expériences dans lesquelles elles senracinent éclairent souvent plusieurs problématiques significatives. Ces pratiques donnent fréquemment lieu à des mouvements significatifs de reformulation, délargissement ou de recadrage, voire à lémergence tardive dune nouvelle perspective de recherche stabilisée, insoupçonnée en amont du projet. De même, la diversité, lintersubjectivité et lévolutivité des dispositifs mis en œuvre engagent autant le sens de la fonction dintervenant celui de la fonction académique du chercheur dans la problématisation, lanalyse et la conceptualisation. Suivant les cas, lintervenant, acteur opérationnel recueillant de linformation, peut être plus ou moins dissocié fonctionnellement du chercheur qui exploite et met en perspective ces matériaux.

Par ailleurs, suivant les revues visées, la connaissance des critères dévaluation propres à la recherche-intervention peut échapper aux comités de rédaction et réviseurs peu ou pas familiers avec ce courant de recherche. Une attention particulière mérite dêtre donc portée au choix du support académique comme à la qualité des échanges avec les relecteurs… En effet, la contextualité, lévolutivité et lintersubjectivité peuvent poser problème à des relecteurs coutumiers dapproches apparemment plus banalisées. On pense bien sûr aux démarches positivistes et déductives où le volet empirique ne peut être engagé en dehors des deux préalables que sont dune part la séparation du chercheur et de son objet de recherche, dautre part la formalisation préalable dun triptyque « question/hypothèses/modèle conceptuel » parfaitement calibré sur la base dun corpus théorique. Mais la difficulté peut aussi apparaître, avec plus de nuances certes, pour des évaluateurs familiers des approches phénoménologiques et qualitatives. Dans ce cas, si, comme dans la recherche-intervention, le sujet-chercheur construit fréquemment son modèle de recherche en interaction avec son terrain détude, il ou elle ne sengage toutefois pas dans laction au point dêtre acteur parmi les autres acteurs et, plus encore, de participer à lélaboration dune réponse collective à une problématique organisationnelle ou managériale.

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Les chapitres de cette deuxième partie servent tous une intention originale de louvrage : décrypter les codes du passage à lacte de publication mais ils la servent de manière différenciée, voire parfois inégale. Tous les auteurs nont visiblement pas investi le même niveau de réflexivité dans leurs contributions écrites à cet ouvrage. Les moins intéressantes relèvent plus dune description factuelle dexpérience. Dautres, plus ambitieuses, vont proposer des éléments de réflexion stimulants permettant de structurer, voire de conceptualiser larticulation du processus de publication aux autres processus constitutifs dun projet de recherche-intervention. Et entre les deux, certains autres textes trouvent un équilibre assez heureux entre ces deux polarités. Sans doute faut-il accepter là, au-delà des écarts de forme et de présentation, la marque de la subjectivité des auteurs, celle de leur retour sur leurs différentes expériences de recherche, mais peut-être aussi celle de leur posture de chercheur-intervenant quant à la diffusion dans un ouvrage collectif de ces retours.

En effet, différentes perspectives dévolution peuvent se lire en filigrane au fil des chapitres. Mais dans leur variété, ces apports sinscrivent tous dans le lignage épistémologique et méthodologique qui est la marque de lISEOR. Les concepts et dispositifs méthodologiques fondamentaux sont évoqués dans les sept pages dun lexique en fin douvrage. Ces éléments sinscrivent dans une perspective solide, structurée et structurante, où lingénierique le dispute parfois au clinique. Leur orientation a été élaborée et éprouvée au fil de plusieurs décennies de projets de recherche-consultance conduits à lISEOR. Au-delà de leur capacité dopérationnalisation, ces dispositifs, même reconstruits sont-ils pour autant universels ? Si, pragmatiquement, le livre semploie déjà à faire la part des principes et celle des formes instrumentales au travers du cadrage, du déroulement et de la valorisation des projets de recherche-intervention, il appelle aussi à poursuivre expériences et réflexivité plus avant…

Ce faisant, en se fondant sur la posture définie par Henri Savall et Véronique Zardet, à mi-chemin entre positivisme et constructivisme, la tonalité épistémologique de louvrage reste très congruente avec des problématiques dintervention à caractère socio-économique. Mais toutes les problématiques managériales sont-elles réductibles au croisement de ces deux seules dimensions ? Et en tenant compte de la subjectivité des chercheurs, ne peuvent-elles pas faire aussi lobjet dautres postures dans 213lintervention comme dans la recherche ? Marquant une nouvelle étape dans la diffusion et la reconnaissance institutionnelle de la recherche-intervention, le livre de Buono, Savall et Cappelleti appelle sans aucun doute de nouveaux et féconds prolongements. Camino, caminando

En conclusion, La recherche-intervention dans les entreprises et les organisations : de la conception à la publication constitue un ouvrage enrichissant, bienvenu dans le paysage de la française et francophone des sciences de gestion. Son contenu éclairera à bien des égards un public de doctorants en quête dun projet de thèse à conduire selon un des modes de la recherche-intervention. Louvrage intéressera aussi des chercheurs confirmés mais non-spécialistes de cette ensemble dapproches et qui souhaitent diversifier leurs propres travaux, directions de thèses ou projets de recherche. Dune manière plus générale encore, ce livre témoigne de la vitalité du projet initié par Henri Savall voilà plus de quarante ans et aujourdhui relayé par ses élèves dans plusieurs autres institutions universitaires françaises.

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Alain Desreumaux et Jean-Pierre Brechet, (2018), Repenser lentreprise. Une théorie de lentreprise fondée sur le projet, Lille, Presses du Septentrion, 205 pages.

Recension par Yves Levant9

Quest-ce quune entreprise ou ce quelle devrait être, pourquoi existe-elle, quelles sont ses frontières, comment expliquer son agencement interne, telles sont les questions qui peuvent faire lobjet dun débat essentiel compte tenu de limportance de lentreprise dans la société. En réaction à de nombreux débats et contributions remettant en cause les théories dominantes sur la grande entreprise, louvrage dAlain Desreumaux et de Jean-Pierre Bréchet a pour objectif déclairer 214le débat sur la théorie de la firme, en proposant une refondation reposant sur le concept de Projet avec un grand P. Les auteurs rappellent que les quatre grandes conceptions désormais classiques de lentreprise, comme : nœud de contrats (théorie de lagence et des droits de propriété), organisation hiérarchique (théorie des coûts de transaction), lieu dapprentissage (théorie évolutionniste, courant cognitif) ou institution encastrée dans environnement politique et social (économie des conventions, école de la régulation) narrivent pas à répondre à nos interrogations. Les sciences de gestion tendent, soit à prendre lentreprise comme donnée, soit à emprunter des théories produites par dautres disciplines. Par ailleurs, la nature de lentreprise se transformant continuellement, elle est un objet multiforme et protéiforme, disqualifiant a priori, tout essai de théorie de la firme. Face à cela, elle reste un objet, un élément fondamental dabord initiée par lhomme, donc reposant sur le projet, vision permettant une théorie à la fois générale et autorisant le singulier.

Dans un premier chapitre, les auteurs reprennent lhistoire de la pensée de la théorie de la firme, considérée comme une succession de métaphores remettant en cause les postulats de lentreprise classique. Ils rappellent par ailleurs, que la théorie de la firme sappuie sur les trois champs disciplinaires que sont léconomie, la théorie des organisations et le management stratégique, eux-mêmes parfois divisés en sous-champs. Ils proposent pour cela un schéma évolutionniste de cette théorie résultant dune tension entre des perspectives « production » et « échange », aboutissant à des conceptions univoques les distinguant dautres institutions de la vie économique. Il en résulte un dialogue laborieux entre ces trois champs accentuant la fragilité de cet édifice théorique. Le caractère multiforme de lentreprise (TPE, PME, entreprises familiales…) et protéiforme, car évoluant en fonction des circonstances, des stratégies… rend difficile toute théorisation. Des nombreux débats récurrents apparaissent par ailleurs, car ces disciplines reposent sur des prémisses ou présupposés épistémologiques différents rendant fragiles leurs emprunts réciproques. Aucune théorie existante ne permet donc, en létat, de répondre à lensemble des questions liées à la firme. Les auteurs proposent alors de rechercher une théorie « englobante » sous légide dune même structure théorique considérant lentreprise comme une action collective prenant sens par rapport à un projet, dans un univers concurrentiel, recherchant les compétences et les relations à 215nouer entre les acteurs pour mener ce projet à bien, avec au cœur les modalités de construction, de gouvernance et le substrat institutionnel qui lintègrent dans la société.

Dans un second chapitre les auteurs sinterrogent sur les figures de lentrepreneur en parcourant la littérature économique. Si limportance de son rôle est reconnue, il a été peu pris en compte, ignoré par la plupart des grands auteurs de léconomie classique et néoclassique. De ce qui a été écrit, les auteurs retiennent quatre grandes fonctions entrepreneuriales mises en évidence : combinaison facteurs de production (Say), innovateur (Schumpeter), celui qui assume le risque inhérent à lactivité économique (Cantillon) et arbitre (Kizner). Dans la microéconomie classique il ny a pas de place pour lentrepreneur dans le paradigme de léquilibre où lentreprise est réduite à une fonction de production. Les critiques de la microéconomie standard ont conduit à de nouvelles théories de lentreprise où lentreprise est vue comme une organisation au sein de laquelle les relations entre agents sont complexes. Il faut citer les théories de lagence, des droits de propriété, des coûts de transaction et la théorie évolutionniste. Cependant, le rôle de lentrepreneur y reste discret et inachevé car il faudrait prendre en compte lidée daction de lentrepreneur à créer, concevoir, imaginer ainsi que les valeurs engagées dans laction. En management il y a eu maints débats dont deux ont été retenus par les auteurs : la typologie des créateurs porteurs de projets et le processus de création et de rationalité qui le sous-tend. Des études ont porté sur les traits caractéristiques des entrepreneurs avec trois catégories de figures. Tout dabord, lentrepreneur porteur de projet et celui de de savoirs. Cependant comment construire des relations par lesquelles ces savoirs vont être compris et diffusés avec lentrepreneur visionnaire avec ses savoirs danticipation et par lentrepreneur expert avec ses savoirs techniques et spécialisés. Ensuite, lentrepreneur porteur de relationnel, mais comment sélabore et se partage les savoirs requis pour concevoir et piloter laction collective. Enfin lentrepreneur institutionnel initié par DiMaggio. Cest un acteur collectif à la fois conscient et calculateur, considérant les nouvelles institutions comme des moyens de faire progresser ses intérêts. Toutefois cette approche danalyse méso/macro na pas conduit à développer létude du travail institutionnel sur sa propre organisation. Il reste que se pose la question de la constitution des savoirs, comment donner vie au collectif, quelles sont les frontières 216de lorganisation et les relations avec les acteurs extérieurs. Au-delà de la diversité des figures de lentrepreneur le phénomène entrepreneurial ne peut se comprendre sans tenir compte des savoirs et des relations dans une action collective qui ne va jamais de soi. Traiter de cette question ne se conçoit pas sans sinterroger sur la rationalité des acteurs et la compréhension de lémergence organisationnelle sur la base de projets daction collective. La rationalité des acteurs dans lactivité entrepreneuriale est une réalité projective, créative, anticipative et située. La capacité à imaginer, à créer, à concevoir et à mener des projets, la prise en compte des valeurs engagées dans et par laction sont les attributs dun modèle susceptible de rendre compte de lentrepreneuriat et qui doivent donc être intégrés dans le modèle de la firme.

Dans le troisième chapitre les auteurs proposent de ne pas chercher à faire table rase de lexistant mais dexplorer les théories en présence et de tenter à les réconcilier dans un méta-concept forçant à repenser lépistémologie de la logique de laction collective. Il faudrait pour cela dépasser les réductionnistes économique et sociologique où ni lHomo œconomicus, ni homo sociologicus napportent de solutions. Il faudrait, au contraire, dépasser ces approches et prendre en compte linteraction des acteurs dans laction collective. Les sciences de gestion apportent sur cette voie leur contribution où lépistémologie de laction collective est même envisagée par certains chercheurs comme point de départ de toute lecture de laction. Les auteurs prennent appui sur la théorie de laction du sociologue et philosophe H. Joas qui sappuie sur lagir rationnel, invitant à une réinterprétation de lintentionnalité et donne une place centrale à lacteur (individuel ou collectif) dans laction. Par ailleurs, la notion de projet est au cœur de laction collective même si elle est employée pour une large variété dintentions. La constitution de ce concept sest faite depuis lantiquité grecque. Limité à larchitecture à lorigine et après avoir traduit une vision sociétale, depuis les années 1970 il sest replié vers des projets restreints porteurs de micro réalisations locales et la volonté de lindividu de se réaliser. Même sil se présente sous de multiple facettes, oscillant entre une figure technique et une figure existentielle, cest cette dernière qui mobilisera le plus les auteurs. Le projet se présentera alors comme une anticipation opératoire et comme un outil de régulation, de rationalisation, dans la construction des collectifs. Cest ce qui aidera à progresser en matière de théorisation 217de lentreprise avec les questions de lémergence et de la construction de laction collective dans le temps, dont le paradigme est lartificialiste (science de la conception). Les auteurs établissent ensuite un lien entre la Théorie de la Régulation Sociale (TRS) de J. D Reynaud et lAnalyse Stratégique des Organisations (ASO) de M. Crozier et E. Friedberg ainsi que lintérêt du concept de « jeu », de capacité daction commune reposant sur lapprentissage. Les valeurs liées à un projet ne se manifestent et se précisent que dans laction et non préalablement. Aussi, il faut mener les observations dans des situations daccompagnement et une avec méthode expérimentale régulationniste.

Dans le quatrième chapitre les auteurs cherchent à préciser la nature de lentreprise ainsi que ses problématiques de fonctionnement et/ou de contrôle. Ils nous proposent tout dabord ce que de devrait être les contours, lossature de la Théorie de lEntreprise Fondée sur le Projet (TEFP). Son essence est la conception et la conduite dun projet productif. Laction dorganiser et la forme organisationnelle qui en résulte supposent la résolution du problème de la coopération et de la coordination entre acteurs du Projet ainsi que la mobilisation/coordination des ressources et compétences nécessaires au Projet. Cest essentiellement un travail de régulation. La notion dentreprise désigne dans un univers dynamique lui-même déjà constitué, laction dorganiser qui est un défi permanent. Pour justifier lexistence de lentreprise, les auteurs reviennent sur létymologie de ce mot, rappelant la confusion fréquente entre la notion dentreprise utilisée pour désigner un ensemble dactivités productives et commerciales par rapport à lentité juridique qui constitue le cadre formel et réglementé de ces activités. La TEFP tout en distinguant ces deux acceptions, considère que le Projet dentreprise les recouvre. Il faut, plutôt que de se contenter dune approche descriptive, mettre en évidence ce que les différents types de projets productifs ont en commun : leur positionnement dans un certain univers, de situations stratégiques, le fait quun projet productif soit source de régulation et quil possède une triple dimension : technico-économique, organisationnelle et éthico-politique. Quant à la forme juridique, même si elle peut être accessoire pour le porteur du projet, elle est un élément fondamental, car cest là que se joue la question de la dévolution du pouvoir, mais aussi, les responsabilités financières. De la triple dimension du Projet découle la triple réalité de lentreprise : agent de production, organisation sociale 218et entité politique. Le projet productif et sa forme juridique instaurent une triple relation de lentreprise avec les marchés, la Cité et une forme organisationnelle, ce à quoi il faut ajouter que la dynamique de toute organisation est imprévisible compte-tenu de lhétérogénéité des acteurs. La TEFP sest développée dans la logique de celle de la théorie de la firme, se nourrissant de cet héritage tout en lapprofondissant. Elle saffirme comme une théorie entrepreneuriale et subjectiviste à même de fonder une lecture développementale de lentreprise développant une vision multidimensionnelle en termes renouvelés.

Dans le cinquième chapitre les auteurs abordent les questions déthique, de responsabilité sociale et de gouvernance de lentreprise, questions qui même si elles sont dactualité ne sont pas neuves. Même si ces deux champs ont des connexions, léthique des affaires, empruntant à la philosophie, sest développée indépendamment du thème de la Responsabilité Sociale de lEntreprise (RSE) qui fait plutôt appel au management, à la sociologie et aux sciences politiques. Ils ont comme point commun de renvoyer à la question des relations avec la société et quils fassent lobjet dun flou conceptuel. Sil faut réintégrer léthique dans la théorie de lentreprise, il faut étudier le processus même de formation des valeurs, car léthique est un phénomène qui se joue au jour le jour. Lentreprise est un acteur social capable de prendre des décisions et dagir de sa propre volonté, cest la régulation qui produit la normativité en faisant vivre laction et dans laction les comportements souhaités. On ne peut donc aborder léthique sans sappuyer sur un cadre permettant de comprendre comment se construit laction collective. Une analyse de lentreprise à partir de la TEFP qui associe léthico-politique et le technico-économique, permet déclairer comment les entreprises co-construisent lordre sociétal. Quant à la gouvernance de lentreprise, si elle fait également lobjet de nombreux débats, devrait être associée à une théorie de lentreprise, ce quapporte la TEFP par une relecture régulationniste de ce qui se joue dans lentreprise. Lanalyse de la TEFP au regard des projets de réforme de lentreprise montre encore selon les auteurs la nécessité dune théorie générale de lentreprise exprimant les fondements et exigences de laction collective.

Après sêtre interrogés sur les frontières de la validité de la TEFP et comment interpréter la question des frontières de lentreprise, les auteurs concluent que lentreprise est bien une action collective, finalisée 219et organisée engageant la coordination formelle des activités dun ensemble darteurs au sein dune entité collective et que cette vision de lentreprise fondée sur le Projet permettra de nourrir la réflexion et éclairer les débats sur la théorie de lentreprise.

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Martin Parker, (2018), Shut Down the Business School: Whats Wrong With Management Education, Londres, Pluto Press, 224 pages.

Recension par Michael Brimm10

Drawing on his extensive experience serving on the faculty of The University of Bristols Department of Management together with his ideas related in an extensive record of publication over the past 20 years, Professor Martin Parker pulls together a strong critique of business schools as well as the content of business education and research. This work identifies business schools with a managerial orientation to profit maximization; their programs necessarily devoted to the development of skills and frameworks in support of these values. In addition, or because of these elements, the business schools accumulate wealth and influence that serves to undermine the universities in which they operate. As an antidote to this situation, Professor Parker advocates the replacement of business schools with “Schools for Organizing,” developing an idea published in earlier papers.

Professor Parker signals his approach early in noting “I will be proceeding without much care, preferring polemic to detailed analysis.” (p. xiii). He has defined his target readership as largely those who neither know nor have visited a business school, noting “[] otherwise I am really just preaching to the choir.” (p. xiii). Actually, he appears to be preaching to a slightly different choir composed of those who are already leaning toward a critique of capitalist ideology. For his chosen 220audience audience, he provides a highly readable caricature of business schools and their functioning in a literary style that varies between the light-hearted critique of University education by David Lodge and the ideological fervor of Ivan Illich. These combine into a call for radical action to replace the existing structure rather than any effort to improve or repair the existing structures.

The generic Business School is caricatured by Parker as the newer, more recent physical premises on university campuses reflecting the economic orientation of the courses, the recency of the topic area and the wealth of alumni whose successful careers finance the on-going orientation of the business education. He identifies the major thrust of these units as “teaching capitalism.” The course structure is built upon an assumption of “rational egoists” who, making the naturalistic fallacy, exist as the self-oriented decision-makers that the underlying structure of the schools train them to be. Case examples and business research move easily from “what is” to what “ought to be” Thus, courses focused on human involvement in business aspire to be consistent with the more purely rational studies of economy and operational efficiency to yield a requisite pedagogy and research agenda. The uneasy presence in the university context is facilitated by a shift in inquiry from the “scientific” study of management to a research designed for a managerial audience (p. 36). For Parker, these elements combine to yield an assumption of organizational hierarchy and subsequent bureaucracy that underlie a focus on managerial and leadership roles in the service of owners within a market economy. Parker provides a historical review of the criticism addressed at such an orientation.

Parkers alternative to this situation is the creation of “the school for organizing” (Chapter 7) that provides an open basis for exploring forms of organization other than hierarchy with goals different from or more complex than the singular achievement of profit goals at the expense of organizational participants. Ironically, this solution mirrors in many respects the approach of the McKinsey consulting group, a significant facilitator of capitalist development In their early work around the theme, “Structure is not organization,” Peters and Waterman posit the “Seven Ss” as an effort to explore organizational forms other than pure hierarchy to yield greater organizational performance. They remain wedded to a more capitalist set of outcomes by considering Style 221(culture,) Strategy, Staff (organizational participants,) and Superordinate goals. The example of Suma Foods provided by Parker is based upon a different set of “superordinate goals but explores many of the same variable in organization.

In writing this review, I should reveal that I have worked as a Professor of Organizational Behavior at INSEAD in Fontainebleau France since 1978. As I too have a number of concerns arising from my own experience and involvement in Leadership and Management education, I can recognize some of the activities, biases and dysfunctions of my own institution as well as others with which I am in contact. However, Parker uses the abstraction of elements across the population of business schools to create a “straw man” argument. General statements without support of data yield assertions that can be readily contradicted with singular examples from other contexts. A number of “business schools” are exploring alternative forms of organization. An emerging focus on non-profit organizations draws increased interest from researchers and students alike. While not uniform across the universe of business and managerial education, Parkers ideal type of a “school for organizing” already exists in some form in various institutional settings.

A recent example of a more systematic analysis of educational institutions that could address Parkers concern would be In Search of Academic Quality by Paradeise and Thoenig. That study employs data and interview insights to identify shared themes and elements of differentiation among major educational institutions. Here, rather than creating a “polemic,” the authors have collected both quantitative and clinical data to develop and inform a framework with specific and grounded inferences. Parker presents a set of conclusions without reference to any single institution but rather to a constructed image of an iconic business school. Much as he offers a brief description of Suma Foods as an alternative organization, it would be useful to have a more concrete representation of a “school for organizing” and how this differs from a specific, existing business or management school (or schools.) Otherwise, we are left with an interesting, well-written critique of management thought and its historical development as an instrument for research and education in the interest of capitalist ideology.

1 Professeur associé au CNAM-Laboratoire du Lirsa.

2 Robé J.-P. (2015), Le temps du monde de lentreprise : globalisation et mutation du système juridique, Paris, Éditions Dalloz.

3 Gomez P.-Y. (2013), Le travail invisible. Enquête sur une disparition, Paris, François Bourin Éditeur.

4 Segrestin B. et Hatchuel A. (2012), Refonder lentreprise, Paris, Éditions du seuil, Coll. ; « La République des idées ».

5 Segrestin B., Baudoin R. et Vernac S. (2014), Lentreprise, point aveugle du savoir, Auxerre, Éditions Sciences Humaines.

6 Favereau O. et Roger B. (2015), Penser lentreprise, Nouvel Horizon du politique, Les Plans sur Bex, Éditions Parole et Silence, Coll. : « Humanités ».

7 Favereau O. (2016), Penser Le travail pour penser lentreprise, Paris, Presses Des Mines.

8 Maître de conférences HDR en sciences de gestion, Université de Tours.

9 Université Lille 2.

10 Professeur émérite à lInsead.