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Classiques Garnier

Revue Entreprise & Société Appel à contributions no 5 (printemps 2019)

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Entreprise & Société
    2018 – 1, n° 3
    . varia
  • Pages : 249 à 254
  • Revue : Entreprise & Société
  • Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
  • EAN : 9782406084273
  • ISBN : 978-2-406-08427-3
  • ISSN : 2554-9626
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-08427-3.p.0249
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/08/2018
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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REVUE ENTREPRISE & SOCIÉTÉ

Appel à contributions no 5 (printemps 2019)

LA RELATION ENTREPRISE
ET SOCIÉTÉ EN DÉBAT

Le débat autour de lentreprise, sa définition, son statut, son régime de gouvernance, est récurrent ; il ne se pose pas seulement au niveau académique, mais présente des dimensions praxéologiques évidentes. En conséquence, pour bien lanalyser, ce débat nécessite de croiser les regards de différentes disciplines du champ des SHS afin de pouvoir le contextualiser en fonction des caractéristiques spatio-temporelles, économiques, juridiques, politiques et culturelles des communautés humaines concernées.

La plupart des grands pays occidentaux ont connu à plusieurs reprises un tel débat, depuis le début des grandes aventures entrepreneuriales qui ont marqué léconomie et la société de ces pays jusquà nos jours (cf. Vérin, 2011 ; Carvais et al., 2017). Pour prendre le siècle écoulé, aux USA, les observations initiales sur le pouvoir managérial (Berle et Means, 1932) ont donné lieu, par réaction, à une revalorisation du rôle des actionnaires, codifiée via la théorie de lagence (Jensen et Meckling, 1976) ; primauté qui, à son tour, a été partiellement mise en cause au profit dune conception plus large des « parties prenantes » (Freeman R. E., 1984). En Europe, le débat sur lentreprise a été vif en Allemagne après 1945 et a abouti à un régime spécifique dit de « co-détermination » Mitbestimmung – (Gomez et Wirtz, 2008). En France, il a eu lieu de manière épisodique (Bloch-Lainé, 1963 ; Bloch-Lainé et Perroux, 1966 ; Sudreau, 1975).

Plus récemment, les réflexions autour de lentreprise, de sa définition conceptuelle, de sa finalité par rapport à la société et, en retour, de son statut institutionnel, se sont renouvelées à partir de diverses voies :

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Les juristes ont été amenés à intervenir dans ce débat en précisant les droits de ces différentes parties prenantes, voire la définition même dune société via les articles 1832-33 du Code Civil et sur la possibilité de modifier ces articles pour y introduire une conception plus large de lobjet social. (Segrestin et Hatchuel, 2012 ; Segrestin, Roger, Vernac, 2014 ; Favereau et Roger, 2015…).

Les économistes ont accompagné ces réflexions en mettant laccent sur les externalités, i.e. les effets hors marché (positifs ou négatifs) qui accompagnent les relations marchandes et les voies et moyens de faire prendre en compte les externalités négatives par les entreprises, soit par le respect de normes / principes / règles de comportement (constituant la « soft law »), soit par une réglementation plus contraignante (loi tout court ou « hard law »).

Les chercheurs et professionnels en comptabilité, audit et analyse financière se sont progressivement impliqués, sous des formes et avec des problématiques contrastées ;

* dans un premier temps, la mainmise de la finance de marché sur les outils de comptabilité-audit est apparue comme irréversible avec la déferlante des IFRS (International Financial Reporting Standards) et ses concepts de base comme la fair value.

* La critique des IFRS a amené à définir des outils complémentaires danalyse. Cest ainsi que de nouveaux opérateurs ont été mis au point ou pour apprécier les performances « extra financières » et pour permettre une évaluation plus globale : critères dits ESG, Triple Bottom Line (TBL), Integrated Reporting (IR), Guidelines du GRI, norme ISO 26000

* Certains chercheurs vont encore plus loin et proposent un nouveau cadre conceptuel comptable ; ainsi ave le modèle CARE (Richard, 2012).

Ces diverses voies délargissement/renouvellement des méthodes et outils dévaluation ont été mises en œuvre – ou a minima expérimentées – par un certain nombre dacteurs professionnels, via ladjonction de nouvelles missions à celles quils exerçaient, ou sy consacrant totalement. Ainsi, on notera les activités dorganismes dédiés à lISR comme Novethic, dagences de notation RSE comme VIGEO, de cabinets de 251consultants comme Utopies ou Prophil, de cabinets dexpertise comptable comme Compta-durable

À côté de ces différentes initiatives sintéressant à lensemble des partenaires de lentreprise – notamment externes – pour prendre en compte les nouvelles demandes en termes de protection de lenvironnement ou daspirations sociétales, se perpétue le projet de mieux associer les salariés à la vie des entreprises, y compris privées, entités dont ils constituent les partenaires internes.

Parfois, ces prise de positions ont été collectives, regroupant des personnes représentatives des différentes catégories référencées ci-dessus ; ainsi le « plaidoyer en faveur dune économie de marché responsable » (Le Monde, 16 novembre 2016) ou l« Appel pour la co-détermination » (Le Monde, 6 octobre 2017).

Compte tenu de lampleur du débat, les responsables politiques ont été amenés à intervenir ; ainsi, pour la France, la mission Notat-Senard sur « Entreprise et intérêt général » et la consultation publique préparatoire à un projet de loi dit « Plan daction pour la croissance et la transformation des entreprises » (PACTE).

La revue Entreprise & Société (ENSO) ne pouvait rester indifférente à la résurgence dun tel débat dont la thématique se situe au cœur même de son champ éditorial et en continuité avec les séries dÉconomies et Sociétés qui lavaient précédée1.

Dans le dossier thématique quelle souhaite consacrer à ces sujets, une grande diversité de propositions seront éligibles, dans le respect des orientations éditoriales de la revue (pluridisciplinarité effective, diversité assumée, science en conscience, francophonie ouverte au dialogue international).

Les propositions pourront ainsi concerner :

lanalyse de mesures générales concernant lensemble des entreprises (par exemple la modification des articles 1832-33 du Code Civil français définissant une société) ou de mesures particulières concernant, ici les entreprises publiques ou semi-publiques, là les 252entreprises relevant de lESS (Économie sociale et solidaire), voire relevant de statut mixte (comme les B-Corp aux USA ou le projet SOSE en France).

Lanalyse des différentes formes que peut pendre lassociation des salariés à la vie des entreprises : simple participation aux résultats via des formules dintéressement, participation au débat pré-décisionnel via des instances consultatives, participation à la gouvernance via des représentants de salariés dans les instances dédiées, participation directe à la gestion pouvant aller jusquà la self governance – self organisation recommandée par E. Ostrom pour la gestion des « common-goods resources ».

Lanalyse des « parties prenantes » (stakeholders), au-delà des seuls actionnaires (shareholders), en distinguant entre les partenaires internes que sont les salariés et les partenaires externes qui sont de divers types et dont les intérêts sont distincts, voire contradictoires entre eux et avec ceux des partenaires internes.

Lanalyse des outils de mesure et dévaluation. Cela concerne notamment la comptabilité et les IFRS, les critères de lanalyse extra-financière, voire de nouveaux cadres conceptuels comptables intégrant différentes dimensions

Sur ces différents sujets, des comparaisons entre époques et entre pays seront appréciées.

Modalités de présentation

Ce dossier thématique concerne le numéro 5 dENSO, prévu au printemps 2019, les propositions darticles devront être envoyées à la rédaction avant le 31 juillet 2018.

Ces propositions darticles doivent être adressées à la rédaction de la revue directement enso.asso@gmail.com ou via la plate-forme de soumission (mise en œuvre par Classiques Garnier https://www.classiques-garnier.com/ojs/) avec copie aux responsable de ce dossier thématique : Elisabeth WALLISER walliser.iae.nice@free.f

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Références

Berle A. et Means G. (1932), The modern corporation and private property, New York, Transaction Publishers.

Bloch-Lainé F. (1963), Pour une réforme de lentreprise, Paris, Seuil.

Bloch-Lainé F. et Perroux F. (éd.) (1966), Lentreprise et léconomie du xxe siècle, Paris, PUF.

Capron M. et Quairel-Lanoizelée F. (2015), Lentreprise dans la société, Paris, La Découverte.

Carvais R., Garçon A.-F. et Grelon A. (dir.) (2017), Penser la technique autrement xvie-xxie siècle, Paris, Classiques Garnier.

Chanteau J.-P., Martin-Chenut K. et Capron M. (éd.), (2017), Entreprise et responsabilité sociale en questions – Savoirs et controverses, Paris, Classiques Garnier.

Coriat B. (éd.) (2015), Le retour des communs. La crise de lidéologie propriétaire, Paris, LLL-Les Liens qui Libèrent.

Favereau O. et Roger B. (2015), Penser lentreprise – Nouvel horizon du politique, Paris, Parole et silence (Collège des Bernardins).

Freeman R. E. (1984), Stategic Manangement : a stakeholder approach, Marshall, Pitman.

Giraud G. et Renouard C. (éd.) (2012), 20 Propositions pour réformer le capitalisme, Paris, Flammarion.

Gomez P.-Y. et Wirtz P. (2008), « Institutionnalisation des régimes de gouvernance et rôle des institutions-socles : le cas de la cogestion allemande », Économies et sociétés, no 19, octobre, p. 1869-1900.

Hurstel D. (2013), Homme, entreprises, sociétés – Restaurer la confiance, Paris, Eyrolles.

Jensen M. C. (2001), « Value maximizaton, stakeholder theory and the corporate objective function », Journal of Applied Corporate Finance, vol. 14, no 3, p. 8-21.

Jensen M. C. et Meckling W. H. (1976), « Theory of the firm : management behavior, agency costs and ownership structure », Journal of Financial Economics, vol. 3, no 4, p. 305-360.

Lyon-Caen A. et Urban Q. (éd.) (2012), La crise de lentreprise et de sa représentation, Paris, Dalloz.

Ostrom E. (1990), Governing the Commons – The evolution of institutions for collective action, New York, Cambridge University Press (traduction française : gouvernance des biens communs, Bruxelles, De Boeck).

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Pérez R. (2009), La gouvernance des entreprises, Paris, La Découvertes, collection : « Repères ».

Perroux F. (1960), Économie et société – contrainte, échange, don, Paris, PUF.

Pesqueux Y. (2007), Gouvernance et privatisation, Paris, PUF.

Richard J. (2012), Comptabilité et développement durable, Paris, Économica.

Robé J.-Ph. (2015), Le Temps du monde de lentreprise : globalisation et mutation du système juridique, Paris, Dalloz.

Segrestin B. et Hatchuel A. (2012), Refonder lentreprise, Paris, Seuil.

Segrestin B., Roger B. et Vernac S. (éd.) (2014), Lentreprise, point aveugle du savoir, Auxerre, Sciences Humaines Éditions.

Sudreau P. (éd.) (1975), La réforme de lentreprise, Paris, La Documentation française et Éditions 10/18.

Vérin H. (2011), Entrepreneurs, entreprises. Histoire dune idée, Paris, Classiques Garnier.

1 Cf. les travaux cités supra de F. Perroux et les numéros de la série K consacrée à léconomie de lentreprise.