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Classiques Garnier

« Errare humanum est » ou la monstrueuse errance des Essais

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
    2016 – 1, n° 63
    . varia
  • Auteur : Dionne (Valérie M.)
  • Résumé : Penser le monstre comme erreur incite le sujet à questionner la normalité, repenser le moi, la norme, la nature et les superstitions. Pour Montaigne, ceci lui permet de réexaminer l’ordre naturel dans un contexte de crise épistémologique et de reconsidérer la nature selon une conception épicurienne pluraliste, juste et tolérante. C’est en optant pour l’ignorance socratique des phénomènes qu’il en conclut que le monstre est absent de la nature et n’existe qu’en l’homme.
  • Pages : 103 à 117
  • Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406060871
  • ISBN : 978-2-406-06087-1
  • ISSN : 2261-897X
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06087-1.p.0103
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 06/08/2016
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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« Errare humanum est »

ou la monstrueuse errance des Essais

Le monstre entendu comme erreur de la nature nous engage à interroger notre perception des phénomènes, telle une invitation dune mise à lessai pour mieux juger de notre altérité et celle dautrui. Ainsi leffet est double pour Montaigne : les Essais procèdent dune composition hybride à limage du moi que lauteur identifie comme dissonant, monstrueux et pétri de contradictions1 ; de plus, ils lui servent darme pour répondre à la tyrannie des superstitions que lherméneutique du monstre éveille, car ces corps difformes « suscitent une sémantique du déchiffrement de lintérieur par lextérieur » et, conséquemment, la « monstruosité dévoile alors la misère, malheur ou méchanceté2 ». Ils sont révélateurs de troubles dont les conséquences imprévisibles sont souvent fatales, du moins durant la deuxième moitié du seizième siècle.

En partant du principe que le monstre nexiste en grande partie que par le regard de lautre, Montaigne cherche à rationaliser son jugement à légard du différent et de la diversité. Il répond à ses contemporains pour lesquels, par exemple, un enfant monstrueux exprime un message envoyé de Dieu pour léradication des péchés de lhomme au nom du

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progrès de lhumanité. Cest rappeler ici les liens quavaient établis Theodor W. Adorno et Max Horkheimer dans Dialektik des Aufklärung entre « progrès et violence, culture et barbarie », en signalant que les juifs furent et demeurent encore aujourdhui les « boucs émissaires des contradictions du processus de civilisation3 ». Ce rapport, Montaigne lavait déjà souligné dans le registre de la cruauté des hommes en mettant en opposition la monstruosité européenne avec la coutume cannibale car, du chaos des guerres civiles, on cherche à construire une communauté qui ne tolère aucune altérité, et où la remise en question na pas sa place. Nous verrons donc quà travers le monstre et le monstrueux, Montaigne repense la responsabilité éthique, cest-à-dire individuelle plutôt que collective ou prescriptive car, dune certaine manière, le sujet monstrueux lui permet dinterroger toute relation de soi à la norme et à laltérité.

Aborder la question de lerreur chez Montaigne, demande de revenir à Aristote. Avec ce dernier, lerreur de la nature est associée à laccident et est dite monstrueuse quand la production naturelle dévie de son cours ordinaire4. Le point de départ de cette exclusion prend source dans son Traité de la génération des animaux (Περὶ ζώων γενέσεως) où lauteur qualifie derreur ce qui est déviation par rapport à lespèce ou au type générique. Il affirme, par exemple, que « celui qui ne ressemble pas à ses parents est déjà dune certaine façon un monstre ; car [] chez eux la nature sest déjà écartée du lignage5 ». Il ajoute plus loin : « Quant au monstre, il nest pas nécessaire par rapport à la cause en vue de quoi et à la cause finale, mais il est nécessaire par accident6 ». Non seulement le monstre est un accident, mais il est encore phénomène « contre nature7 ». Lerreur est entendue comme déviation accidentelle dun ordre naturel, car, selon la thèse aristotélicienne, le monstre surgit, au moment de la genèse, lorsque la matière ne parvient pas à achever la forme prévue.

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Parfois, constate Aristote, la nature, en agissant vers sa fin, procède dune matière qui ne peut atteindre la forme parce quelle est empêchée par une multiplicité de grossesses, ainsi la forme reste tout simplement inachevée chez les espèces multipares8. Pour cette raison, il confirme que « le monstre est un certain type de malformation9 ».

En partant de ce principe de difformité, Montaigne justifie la création de ses Essais au chapitre « De lamitié », tel un tableau représentant des « crotesques » qui na de « grace quen la varieté et estrangeté » : « Que sont-ce icy aussi, à la verité, que crotesques et corps monstrueux, rappiecez de divers membres, sans certaine figure, nayants ordre, suite ny proportion que fortuite ? » (I, 28, 183 A). Il oppose ses Essais à lœuvre travaillée de La Boétie, en concluant quil ne possédait pas en lui la capacité « doser entreprendre un tableau riche, poly et formé selon lart », et doffrir une œuvre selon un modèle unique suivant les règles de lart poétique (183 A)10. Lessai devient le genre approprié dune construction qui tient de lhybridité, dun mélange dit grotesque11, symbolisé par limage du corps dune belle femme qui se termine en queue de poisson (« Desinit in piscem mulier formosa superne », 183 A). Cette allégorie proposée par Horace, au début de son Art poétique, est choisie pour signifier un livre sans unité. La règle poétique horacienne proscrit le mélange de styles ou de genres. Par extension, le grotesque, comme être hybride, suggère limpossible union des règnes humain et animal. Montaigne fait ainsi converger le grotesque et le monstrueux, tout en sachant que lun a pour effet de provoquer le rire et lautre létonnement.

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À sa manière, il joue avec linterprétation chrétienne qui voit dans la difformité physique le signe potentiel dune corruption intérieure12. En ce sens, il montre, par labsence de forme réglée, que ses Essais sont le produit dune forme aléatoire provoquant létonnement chez celui qui sattend à une certaine norme poétique. Il produit un texte qui nest pas sans évoquer le modèle emblématique dun Socrate au « visage si vilain » (III, 12, 1057 B). Ladite laideur physique de Socrate fait écho à lhybridité du texte montaignien dont la monstruosité nous invite à renverser nos croyances, sorte dironie par laquelle lauteur dénonce la faiblesse de nos jugements. Montaigne rappelle ainsi, par ce lien, que ses Essais peuvent sallier aux discours de Socrate dont les « grâces » « ont une beauté delicate et cachée » et quil « faut la veue nette et bien purgée pour descouvrir cette secrette lumiere » (III, 12, 1037 B).

En recherchant leffet dune pensée socratique qui stimule le jugement pour éveiller lhomme à ses croyances superstitieuses, Montaigne va à contre-courant de la poétique horacienne en attirant lattention sur le manque dunité, dordre et dharmonie de son texte, car, pour lessayiste, son écriture tient avant tout du hasard, et pose, contrairement à Aristote, les jalons dune nature diverse en reprenant les mots qui concluent son chapitre sur « De la ressemblance des enfans aux pères » : « Comme cest la plus generale façon que nature aye suivy que la varieté [] Et ne fut jamais au monde deux opinions pareilles, non plus que deux poils ou deux grains. Leur plus universelle qualité, cest la diversité » (786 A). En cela, il est plutôt influencé par Pline, dans le contexte de nouvelles conceptions de la nature à la Renaissance, renouvelées particulièrement par la redécouverte de textes tel le De rerum natura de Lucrèce, selon lidée dune nature féconde, une Natura naturans, dont la transformation dynamique nourrit la monstrueuse diversité des cabinets de curiosité13 : « Combien y a-il de choses quon estime impossibles avant quon les voye faites », remarque Pline14. Les Essais répondent à cette conception de la copia comme écriture de labondance15 : une fécondité naturelle qui peut

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produire, pour certains, des erreurs en marge du principe régulateur de la nature. De ce fait, il est surprenant de le voir terminer un chapitre sur lhérédité parentale (II, 37) – où il traite dailleurs très peu de la question – par la variabilité des corps et des esprits, démontrant une infinie diversité des formes de la nature. Cela résulte, pour reprendre les propos de Tristan Dragon, dune « crise épistémologique qui vient problématiser la notion même de norme, fondée sur une doctrine de lordre naturel jusque-là dominante16 ». Montaigne répond à la taxinomie aristotélicienne en se demandant sil est possible, à partir de « cette longue cordée de fortunes » et de hasards, d« en conclurre une regle » : comment le jugement, se fondant sur quelques expériences et observations, peut-il en constituer une règle ou une norme imposée sur « tant de millions » de personnes, elle qui nest souvent que le résultat de « trois hommes qui se meslent denregistrer leurs experiences » ? Comment justifier la difficulté den tirer des conclusions, « si un autre et si cent autres ont faict des experiences contraires ? ». Il souligne labsurdité « que trois tesmoins et trois docteurs regentent lhumain genre ». Il aurait fallu que la nature choisisse elle-même ses observateurs pour que puissent être déduites des conclusions satisfaisantes sur la nature humaine en général (II, 37, 782-783 B-C).

Montaigne semble vouloir redonner à la nature toute sa puissance : une nature où le hasard est exclu de la genèse des existences puisque rien dans la nature ne saurait se produire sans raison, que rien nest généré par erreur et, par conséquent, rien nest monstrueux. En revanche, les êtres dits monstrueux sont nombreux dans les Essais : enfants difformes, hermaphrodites, cannibales et sorcières. Fait office de monstrueux non pas seulement ce qui tient de la difformité physique, mais aussi de la monstruosité morale. Ils sont dits « monstrueux » parce quils transgressent la loi naturelle ou morale imposée par une société, réduite selon Montaigne à trois hommes.

Lessayiste récuse toute interprétation axiologique du monstre. Pour lui, le monstre ne lest pas selon la genèse du monde voulu par Dieu, mais le devient sous lobservation restreinte du jugement de lhomme. Alors que pour certains observateurs, médecins contemporains de Montaigne, comme Boaistuau, il est moins question derreur de la nature qui mène

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à la génération de monstres que de volonté divine de répondre à la nature pécheresse de lhomme. Le monstre est signe. Il nest jamais produit par hasard mais selon une volonté divine : le monstre, comme le prodige, est présage, sorte de tératomancie qui insiste sur lidée de « pronostications » néfastes ou non. Cette pensée rejoint celle de saint Augustin : « Comme il na pas été impossible à Dieu de créer les natures quil lui a plu, il ne lui est pas impossible de les changer comme il lui plaît [] Lexpression de “monstres”, dérivée de “montrer”, indique quils “montrent”, parce quils signifient ; celle de “prodiges” indique quils “prédisent” lavenir17 ». Il faut redonner à ce passage tout son sens car face à cette infinie possibilité des corps produits par Dieu, largument de saint Augustin est que, si la chair de lhomme brûle, il nest pas impossible quelle puisse, selon la volonté divine, brûler éternellement en enfer : « Pour nous, tout ce qui paraît et tout ce que lon dit arriver contre nature, [] ces monstres, en un mot, ces prodiges doivent montrer et prédire que Dieu fera des corps humains ce quil a prédit quil en ferait ; et quel obstacle pourrait le retenir ? Quelle loi de la nature lui opposer une défense18 ? » Le monstre ou le prodige devient donc signe dune volonté divine. Dans ce cas, ils ne sont pas pensés en termes derreur, car si les monstres existent intentionnellement de la main de Dieu, cest une volonté transcendante qui persiste à vouloir avertir lhomme de son avenir. En ces temps de guerres de religion, les enfants difformes correspondaient dautant plus au plan divin de punir lhomme pour sa nature pécheresse, ou les hommes dune faute collective, quand ils nétaient pas vus comme des actes surnaturels issus de la main de Satan.

Au chapitre « Dun enfant monstrueux », les propos de Montaigne sapparentent à ceux de saint Augustin quand il mentionne que Dieu a créé une nature composée dune infinité de formes dont les assortiments et les relations entre certains de ces êtres restent inconnus à lhomme :

Ce que nous appellons monstres, ne le sont pas à Dieu, qui voit en limmensité de son ouvrage linfinité des formes quil y a comprinses ; et est à croire que cette figure qui nous estonne, se rapporte et tient à quelque autre figure de mesme genre inconnu à lhomme. De sa toute sagesse il ne part rien que bon et commun et reglé ; mais nous nen voyons pas lassortiment et la relation. [] Nous apelons contre nature ce qui advient contre la coustume [] Que

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cette raison universelle et naturelle chasse de nous lerreur et lestonnement que la nouvelleté nous apporte. (II, 30, 713 C)

Ici, lerreur se présente comme étant avant tout humaine. Cest aussi de cette manière que saint Augustin lentend dans ce même chapitre quand il écrit : « Nous disons tout prodige contre nature ; mais cela nest pas. Comment serait contre nature ce qui arrive par la volonté de Dieu ; la volonté du Créateur étant la nature même de chaque créature ? Le prodige nest donc pas contre la nature, mais contre la nature telle quelle nous est connue19 ». La conception dun Dieu comme Natura naturans élaborée par les Anciens paraît donc tout à fait concevable, comme nous lavons vu plus haut20. Dinfluence épicurienne, cette perception envisagée par Montaigne, comme par saint Augustin, révèle lintention de concevoir une Nature productrice dune infinité de formes. Et puisque lhomme ne peut adéquatement concevoir lordre généré par la sagesse de Dieu, pour Montaigne, « ces monstres » ne sont pas le résultat dune volonté divine ou diabolique, mais bien la perception altérée de lêtre humain formé par lenvironnement dans lequel il évolue : cest-à-dire une manière de voir déformée par les coutumes et selon une conception normative du monde. Ainsi invite-t-il lhomme à sortir de sa fascination pour éveiller son jugement qui est avant tout daccepter sa propre ignorance.

La puissance divine ne saurait errer, à linverse de lhomme dans sa volonté de vouloir maîtriser lordre apparent de la nature. Comme saint Augustin, Montaigne montre que lerreur ne se trouve pas dans la nature, mais bien dans notre réaction face au différent, à lincompréhensible : « Combien y a il de choses en nostre cognoissance, qui combatent ces belles regles que nous avons taillées et prescrites à nature ? et nous entreprendrons dy attacher Dieu mesme ? [] Combien de choses appellons nous miraculeuses et contre nature ? [] aller selon nature, pour nous, ce nest qualler selon nostre intelligence, autant quelle peut suyvre et autant que nous y voyons : ce qui est audelà, est monstrueux et desordonné » (II, 12, 526 A). Selon la limite de notre capacité interprétative du monde naturel, lesprit organise la nature en « belles règles », et ce qui sort de notre compréhension produit létonnement, source derreur de la nature, synonyme de « monstrueux et désordonné ».

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Or si seule la « raison universelle et naturelle » pouvait nous aider à comprendre les intentions divines, rien ne nous surprendrait. Le Socrate de Montaigne se rapproche peut-être le plus de cette position intellectuelle envisagée ici, qui est de prendre conscience de la vanité de nos connaissances et davoir le courage davouer notre propre ignorance : « Ce que je ne croy pas, ny ce que dautres ont dict, que la science est mere de toute vertu, et que tout vice est produit par lignorance » (II, 12, 438 A). On se rapproche du projet essentiel de Montaigne pour qui le mal provient non de lignorance, mais dune incapacité de juger raisonnablement quand notre vue est obscurcie par la présomption : « Je dis pompeusement et opulemment lignorance, et dys la science megrement et piteusement ; accessoirement cette-cy et accidentalement, celle là expressément et principalement. Et ne traicte à point nommé de rien que du rien, ny daucune science que de celle de linscience » (III, 12, 1057 B-C). Il savère que cette « raison universelle » nest pas tant une confirmation des erreurs de perception que de fâcheuses conséquences associées au dogmatisme. En cela, elle coïncide avec la pensée atomistique de Lucrèce où lunique source des phénomènes naturels concorde avec cette sagesse divine de laquelle « il ne part rien que bon et commun et reglé » (II, 30, 713 C). Il est possible, à partir de ce passage tiré du chapitre « Dun enfant monstrueux », de rapprocher la pensée de Montaigne de lidée épicurienne dune Natura désignant « labsence de toute cause » évoquée par Lucrèce, pour lequel « tout ce qui existe est une production hasardeuse, indépendante, non de tout précédent, mais de toute origine et de toute raison21 ». Cest ce qui lamène à justifier que « la “nature” de lhomme cest de navoir point de nature22 » en soulignant linfinie diversité comme le voudrait Montaigne. Comme nous lavons cité plus haut, il aurait fallu que « lhumaine nature » eusse pu choisir ses propres représentants « par expresse procuration » pour en déterminer ses lois naturelles (II, 37, 783 B-C). Cette perspective naturaliste entraîne plusieurs conséquences, et nous en examinerons deux dentre elles : dabord une neutralité axiologique des cas monstrueux qui mène à un mode de pensée rationaliste dénuée de préjugés dordre moral, et conséquemment une remise en question des superstitions.

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Lenquête étiologique de certains penseurs de la Renaissance peut nous aider à mieux comprendre la position de Montaigne à légard de la tradition augustinienne. Le chirurgien et anatomiste Ambroise Paré, dans son livre Monstres et prodiges, et Boaistuau, dans ses Histoires prodigieuses23, explorent les causes des phénomènes tératologiques. Paré cherche à poser un regard scientifique sur certaines difformités physiques pour tenter dy apporter un jugement dénué de valeur. Ainsi, pour lui, la malformation des enfants ayant un membre en plus ou en moins peut sexpliquer par une trop grande ou une trop petite quantité de semence. Il énumère ensuite les différentes causes qui vont de la gloire de Dieu, en passant par sa colère, limagination de la femme, ou la taille de la matrice, et ajoute treize différentes hypothèses qui justifient les difformités, pour terminer avec celle de linfluence de Dieu ou des démons24. Si les raisons quil offre sont plus souvent le fait dune cause extérieure, elles peuvent aussi être liées à la femme, à sa façon de se tenir durant sa grossesse, ou bien à sa constitution physique.

De son côté, Boaistuau est beaucoup plus moralisateur que Paré. Pour lui, la progéniture altérée est la cause dune nature humaine pécheresse ayant commis lirréparable pendant la conception, ou durant la grossesse. La progéniture difforme sexplique alors par des attouchements illicites, ou une source de plaisir qui aurait été contraire à la loi naturelle de « la perpetuelle conservation et permanence de lespece25 ». Lerreur simpose durant la conception de lenfant par une déviation morale. Il attribue la malformation génétique au comportement immoral, affirmant : « Lire de Dieu, par lobject des choses qui se presentent, [] nous faict sentir la violence de sa justice si aspre, que nous sommes contrains dentrer en nous mesmes, frapper au marteau de nostre conscience, espluchez noz vices, et avoir en horreur noz meffaictz26. »

En suivant le principe augustinien de causalité selon le plan dune volonté divine dans la constitution des malformations congénitales, les contemporains de Montaigne projettent sur ces monstres-signes des actes surnaturels provenant de la main de Dieu ou de Satan, et argumentent

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en faveur dune condamnation morale qui est suspecte à notre auteur. À lépoque des guerres civiles, nombreux sont ceux qui mettent sur le même plan les monstres de nature, les maux de Dieu, la peste, la famine et les guerres, comme Jean Burel, qui y voyait des signes monstrueux et diaboliques annonçant le mal. Ce dernier écrit en 1558 : « [] fust veue au ciel une estoile traynant une longue queue comme une espée. Le peuple murmuroit signifier guerre, peste, comme environ troys moys après seroit survenu, avec naissance denfans difformes ayant deux visaiges, & plusieurs aulres signes27. » En temps de crise, le « monstre » est lannonce dun monde altéré à venir, de la corruption dun ordre préétabli, ou encore il est présenté comme une production naturelle du hasard que les hommes nont pas su maîtriser.

Or Montaigne se plaint de cette recherche des causes naturelles, divines ou humaines qui ne justifie rien de bon : « Je vois ordinairement que les hommes, aux faicts quon leur propose, samusent plus volontiers à en cercher la raison quà en cercher la verité : ils laissent là les choses, et samusent à traiter les causes. Plaisants causeurs. La cognoissance des causes appartient seulement à celuy qui a la conduite des choses, non à nous qui nen avons que la souffrance [] Ils passent par dessus les effects, mais ils en examinent curieusement les consequences » (III, 11, 1026 B-C). Et les conséquences de ces « plaisants causeurs » peuvent être désastreuses.

Contrairement aux multiples interprétations de lenfant difforme, Montaigne constate dans son essai « Dun enfant monstrueux » quil est « en tout le reste de forme commune » : il babille et marche comme tous les enfants de son âge. Lauteur choisit « de réduire lanomalie au lieu de lexagérer » pour évacuer « lhorreur ou la pitié, lémoi ou létonnement » de sa forme étrange28. Il ny apporte aucun jugement de valeur, et décrit lenfant avec une « froideur dun compte rendu clinique29 ». Lenfant monstrueux, relate-t-il, est formé de deux corps attachés et dune seule tête. Au premier enfant est ajouté un « enfant imparfait », sans tête, qui réussit à survivre en étant joint à lautre enfant « face à face »,

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« comme si un petit enfant vouloit accoler un plus grandelet ». Le corps de lenfant plus petit est attaché au premier par une « cousture » allant des « tetins » au « nombril », et lauteur de conclure que les membres sont bien « nourris et vivans » (II, 30, 713 A). À travers cette description, se dessine, pour le lecteur contemporain de Montaigne, témoin du conflit religieux en cours, le protestant sous les traits de « lenfant imparfait » attaché à son frère catholique, plus grand, et dont la tête rappelle le roi de cette même confession. « Lenfant imparfait » doit compter sur le roi catholique pour le nourrir. Montaigne rapporte en tant quobservateur les propos de la nourrice affirmant que lenfant est en bonne santé. Il ne sintéresse point à la cause de ses difformités, car il « laisse aux medecins den discourir ». Il préfère recourir à lambivalence de limage : questionner le monstre-signe et le présenter sous la forme dun présage de son temps. Montaigne joue avec lidée dun message prophétique, et il choisit plutôt de répondre à la nécessité politique de trouver une solution religieuse au conflit, et suggère une conciliation : « Ce double corps et ces membres divers, se rapportans à une seule teste, pourroient bien fournir de favorable prognostique au Roy de maintenir sous lunion de ses loix ces pars et pieces diverses de nostre estat » (II, 30, 713 A). Bien évidemment, il finit par sen moquer en citant Cicéron : « Ut quum facta sunt, tum ad conjecturam aliqua interpretatione revocantur30 » : « il nest que de deviner en choses faictes » (II, 30, 713 A). Il est intéressant de remarquer quil attire lattention sur une potentielle solution politico-religieuse, alors que certains hommes de la Renaissance aspirent plutôt à la création dune communauté monolithique repliée sur elle-même31. Et pour répondre à cette société qui ne tolère aucune forme daltérité, Montaigne fait des Essais un livre de curiosités où il traite de la diversité la plus remarquable. Il rend létrangeté normale et étranger ce qui est le plus accessible à la connaissance : ce que nous avons lhabitude de voir, mais que nous perdons lhabitude de voir réellement. Cest ainsi que Montaigne montre du doigt lerrance humaine dont les effets dun manque de jugement peuvent être réellement monstrueux. Or de toutes les causes rapportées par Paré et autres penseurs de son temps, Montaigne

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en retient toutefois une : limagination, qui, pour lui, se manifeste dans toute sa puissance. Voyons quelques-uns des exemples quil choisit de rapporter dans son essai « De la force de limagination » (I, 21).

Cette imagination est contagieuse au point que lui-même se demande sil ne se fait pas prendre au jeu. Ainsi lexplique-t-il au début du chapitre (I, 21), lorsquil relate sa rencontre avec un grand médecin, Simon Thomas, au moment de leur visite « chez un riche vieillard pulmonique » pour traiter « avec luy des moyens de sa guarison » (I, 21, 98 C). Lauteur passe dune remarque qui peut paraître tout à fait innocente pour la changer en une constatation quelque peu étrange sur la question de la force de limagination. Il dit que le vieillard avait posé ses yeux sur son visage, et que par « sa pensée sur cette allegresse et vigueur qui regorgeoit de mon adolescence, et remplissant tous ses sens de cet estat florissant en quoy jestoy, son habitude sen pourroit amender » (98 C). En parlant de lhomme âgé dont la condition pouvait gagner en vitalité, Montaigne ajoute : « Mais il oublioit à dire que la mienne sen pourroit empirer aussi » (98 C). Une métamorphose par la seule force de limagination : le malade se nourissant de la vigueur du pauvre Montaigne qui de son côté simagine subir une dégénérescence. Cette métamorphose relationnelle des corps devient surprenante en ce « que limagination agisse quelque fois, non contre son corps seulement, mais contre le corps dautruy » (104 A), à lexemple dune maladie contagieuse dont les effets proviennent essentiellement de notre volonté dy croire ou tout simplement de limaginer. Montaigne poursuit en suggérant que la nature a ses raisons que la raison ne connaît point, surtout quand lexpérience des extravagances de la nature se constate par le miracle de lenfantement : « Tant y a que nous voyons par experience les femmes envoyer aux corps des enfans quelles portent au ventre des marques de leurs fantasies, tesmoing celle qui engendra le more » (105 A). Cette histoire rapportée de saint Jérôme est reprise par Montaigne des Histoires prodigieuses de Boaistuau, où ce dernier rapporte quune femme blanche aurait été accusée dadultère pour avoir accouché dun enfant « noir comme un Ethiopien32 » et que, par la suite, elle aurait été innocentée par la défense dHippocrate constatant que son imagination et le fœtus auraient été imprégnés du portrait dun Maure accroché au mur de sa chambre.

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Montaigne raconte que la difformité de lenfant est attribuée à une double influence, à limagination de la mère et à la contemplation des images, notamment dans le passage qui suit33 : « Et il fut presenté à Charles Roy de Boheme et Empereur une fille daupres de Pise, toute velue et herissée, que sa mere disoit avoir esté ainsi conceue, à cause dunimage de Sainct Jean Baptiste pendue en son lit » (105 A). Montaigne ne commente aucunement ces passages : « Si je ne comme bien, quun autre comme pour moy » (105 C). Il laisse en suspens sa propre interprétation de lévénement, pour inviter le lecteur à le faire. On peut dailleurs supposer que lhistoire de lenfant maure est du goût de Montaigne, montrant sans le dire que la progéniture ressemble au père biologique dont le portrait est accroché au mur. Cet exemple est le témoignage de lerrance de lhomme comme de la femme. Cest la prise de conscience que nous avons, en chacun de nous, le pouvoir de transformer la vie dautrui, et, de ce fait, que nous en sommes responsables.

Lessayiste persiste sur cette voie et donne un exemple où le fait de nier sa responsabilité dans laboutissement de certains événements a de bien médiocres conséquences. Il décrit lun de ces faux miracles dont il dit avoir entendu parler près de chez lui (III, 11, 1030 B). Cest lhistoire de jeunes qui ont voulu se moquer de la superstition des gens de leur village en simulant la voix dun esprit auprès de leur famille et à léglise, et dont la plaisanterie a pris mauvaise tournure : « Un jeune homme du lieu sestoit joué à contrefaire une nuict en sa maison la voix dun esprit, sans penser à autre finesse quà jouyr dun badinage present » (1029 B). Au jeune garçon, se sont associés deux autres complices « de mesme aage et pareille suffisance » ; et le tout est passé de « presches domestiques » en « presches publics » : les trois « se cachans soubs lautel de lEglise, ne parlans que de nuict, et deffendans dy apporter aucune lumiere ». Emballés par les effets de la supercherie, ils ont persisté dans leurs prédictions qui portaient sur « la conversion du monde et menace du jour du jugement (car ce sont subjects soubs lauthorité et reverence desquels limposture se tapit plus aiséement) », pour en venir « à quelques visions et mouvements si niais et si ridicules quà peine y a-il rien si grossier au jeu des petits enfans » (1029 B). Là où Montaigne ne manque pas de montrer son étonnement, cest face à la punition que ces enfants ont reçue une fois

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la supercherie découverte, car tous les trois ont été emprisonnés. Lauteur déplore leur sort : « Ces pauvres diables sont à cette heure en prison, et porteront volontiers la peine de la sottise commune ; et ne sçay si quelque juge se vengera sur eux de la sienne34 » (1030 B). Il laisse entendre quon aurait plutôt dû accuser ceux qui ont cru à ces balivernes. Il est consterné par cette folie collective. La condamnation des enfants constitue pour lui un bien plus grand crime que celui dont ils sont accusés, car cest vouloir avant tout perpétuer la crédulité des hommes. Lhomme devrait admettre ses erreurs, accepter son errance, et être de « ladvis de sainct Augustin, quil vaut mieux pancher vers le doute que vers lasseurance és choses de difficile preuve et dangereuse creance » (1032 B).

Un autre exemple où Montaigne montre labsence de manifestation du surnaturel est celui de la sorcellerie, qui tient sans aucun doute de la force de limagination et de la volonté des hommes de vouloir déterminer les causes. Selon lui, les phénomènes naturels devraient être jugés avec moins de crédulité. Ainsi déplace-t-il la cause des phénomènes interprétés par une force extérieure (Nature, Dieu, le diable) à lexplication dune force intérieure à lhomme (limagination). Il rationalise ce qui se passe en matière de foi grâce aux leçons utiles du scepticisme qui cherchent à limiter la connaissance des choses à une simple impression sensorielle et cognitive. Pour cette raison, il nhésite pas à condamner la chasse aux sorcières, remarquant que ce qui tient de la sorcellerie chez certaines est plutôt folie, ou force imaginative. Il a constaté, lorsquon lui avait présenté, dans un effort pour « rabatre [s]on incredulité », de pauvres vieilles femmes accusées de sorcellerie, que lune était « vrayment bien sorcière en laideur et deformité ». Et il leur aurait « plustost ordonné de lellebore que de la cicue » (1032 B) dans le but de guérir la folle plutôt que de faire mourir la sorcière.

Il serait facile, affirme-t-il, de laccuser de ces mêmes extravagances : « Qui mettroit mes resveries en compte au prejudice de la plus chetive loy de son village, ou opinion, ou coustume, il se feroit grand tort, et encores autant à moy » (1033 B). Car de la stigmatisation distanciée de lautre au fil des pages des Essais, ce monstre dans le corps du texte devient lexpression du moi, du « je » qui se constitue en une série dessais, de tentatives, comme symbole de lerrance, déviant du droit chemin pour embrasser la multiplicité curieuse de la nature humaine. Montaigne dit à ce sujet : « Je

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nay veu monstre et miracle au monde plus expres que moy-mesme. On sapprivoise à toute estrangeté par lusage et le temps ; mais plus je me hante et me connois, plus ma difformité mestonne, moins je mentens en moy » (1029 B). Montaigne sécrit, et le moi, désormais, se fragmente, au point dembrasser les paradoxes, dont le but, selon André Tournon, « a pour loi de heurter le destinataire, en sinscrivant comme en faux contre son expérience, ses préjugés ou ses convictions35 ». Lindividu doit sortir de ses habitudes de penser, car cest lhabitude qui lui fait perdre la vision du monstrueux qui se trouve en lui. Dans les Essais se manifeste une pensée qui embrasse la pluralité, et où le monstrueux de lécriture errante pose les jalons dune acceptation des différences et dune impossibilité de se croire maître de la nature, ou entièrement maître de soi. Lerreur est montaignienne, elle est donc humaine. Or celle-ci devient effrayante si elle na conscience delle-même. Dans le cas le plus étonnant, celui « Dun enfant monstrueux » (II, 30), Montaigne cherche à démystifier linsolite afin que le lecteur comprenne que lapparence monstrueuse existe par manque dhabitude. Pour réapprendre à voir, Montaigne joint lerreur au peu recommandable, révélant un monstre grotesque ou hybride à limage du monstrueux qui se trouve en chacun de nous.

Conséquemment, dans les Essais, prennent naissance contradictions et paradoxes qui défient le bon sens et nourrissent la monstruosité du texte, constituant un corps double qui annonce le baroque, un « enfant monstrueux », comme signe cette fois dune conciliation potentielle des hommes, et non de la punition de Dieu. Montaigne présente ses Essais comme un monstre de la nature humaine, où lon peut reconnaître la place du hasard (fortuna) comme force vitale non maîtrisée. Ainsi la transgression de la loi poétique, morale ou civique nest pas elle-même monstrueuse, ce qui est monstrueux, cest de responsabiliser lautre pour les maux, les guerres, les problèmes, alors que Montaigne cherche à justifier la fin dun chaos en apaisant le plus grand monstre quest la guerre civile, non pas par lordre, mais par lacceptation de la diversité et par la responsabilité civique individuelle.

Valérie M. Dionne

Colby College, USA

1 « Cette variation et contradiction qui se void en nous, si souple, a faict quaucuns nous songent deux ames, dautres deux puissances qui nous accompaignent et agitent, chacune à sa mode, vers le bien lune, lautre vers le mal, une si brusque diversité ne se pouvant bien assortir à un subjet simple. Non seulement le vent des accidens me remue selon son inclination, mais en outre je me remue et trouble moy mesme par linstabilité de ma posture ; et qui y regarde primement, ne se trouve guere deux fois en mesme estat. Je donne à mon ame tantost un visage, tantost un autre, selon le costé où je la couche. Si je parle diversement de moy, cest que je me regarde diversement. Toutes les contrarietez sy trouvent selon quelque tour et en quelque façon [] ; et quiconque sestudie bien attentifvement trouve en soy, voire et en son jugement mesme, cette volubilité et discordance. Je nay rien à dire de moy, entierement, simplement, et solidement, sans confusion et sans meslange, ny en un mot » (II, 1, 335 B). Toutes les références aux Essais renvoient à lédition de Pierre Villey, revue par Victor-Louis Saulnier, Paris, PUF, « Quadrige », 1988.

2 Annie Ibrahim, Quest-ce quun monstre ?, Paris, PUF, 2005, p. 22-23.

3 Enzo Traverso, « Préface : Dialectique de la Renaissance » au texte dEsther Cohen, Le Corps du diable : Philosophes et sorcières à la Renaissance, trad. Fabienne Bradu, Clamecy, éd. Léo Scheer, 2004, p. 11.

4 Aristote, De la génération des animaux, trad. David Lefebvre, Œuvres complètes, éd. P. Pellegrin, Paris, Flammarion, 2014, IV, 4, 770b.

5 Ibid., IV, 3, 767b5.

6 Ibid., IV, 3, 767b10.

7 Ibid., IV, 4, 770b10. Et Aristote ajoute : « Le monstre, en effet, appartient à ce qui est contre nature, cependant pas contre toute nature, mais contre celle qui se produit le plus souvent ».

8 Ibid., IV, 4, 770b1-25.

9 Ibid., IV, 4, 769b.

10 Un passage de François Jacob, dans son livre La Logique du vivant : une histoire de lhérédité, peut nous éclaire sur le lien entre la création artistique et la génération des animaux : « Le mot et le concept de reproduction napparaissent que vers la fin du xviiie siècle pour signifier la formation des corps vivants. Auparavant les êtres ne se reproduisent pas. Ils sont engendrés. La génération est toujours le résultat dune création qui, à une étape ou une autre, exige lintervention directe des forces divines. [] Jusquau xviie siècle, la formation dun être reste immédiatement soumise à la volonté du Créateur. [] La génération de chaque plante, de chaque bête, constitue en quelque sorte un événement unique, isolé, indépendant de toute autre création, un peu comme une production dun objet ou dune œuvre dart par lhomme », Paris, Gallimard, 1970, p. 28.

11 Une fascination pour le grotesque se développe au xve lors de la redécouverte des sites anciens. Rappelons que le terme de « grotesque » provient des fresques qui ornaient lesdites « grottes », comme la Domus Aurea de Néron qui fut découverte lors des fouilles à lépoque de la Renaissance italienne.

12 Justin D. Edwards et Rune Graulund, Grotesque, New York, Routledge, 2013, p. 36-37.

13 François Rigolot, LErreur à la Renaissance : perspectives littéraires, Paris, Honoré Champion, 2002, p. 133-136.

14 Pline, Histoire naturelle, VII, 1, trad. dAntoine Du Pinet, cité par Céard, La Nature et les prodiges : Linsolite au xvie siècle, en France, Genève, Droz, 1977, p. 16.

15 Terence Cave, The Cornucopian Text : Problems of Writing in the French Renaissance, Oxford, Clarendon Press, 1979.

16 Tristan Dragon, « Les êtres contrefaits dun monde malade. La nature et ses monstres à la Renaissance : Montaigne et Vanini », Seizième Siècle, no 1, 2005, p. 289-311 ; p. 289.

17 Saint Augustin, La Cité de Dieu 3, XXI, 8, trad. Louis Moreau, Paris, Seuil, 1994, p. 243.

18 Ibid.

19 Saint Augustin, La Cité de Dieu 3, XXI, 8, op. cit., p. 240. Nous soulignons.

20 Bernard Sève, Montaigne : des règles pour lesprit, Paris, PUF, 2009, p. 306.

21 Clément Rosset, LAnti-nature, Paris, PUF, « Quadrige », 1973, p. 42-43.

22 Ibid., p. 42.

23 Pierre Boaistuau, Histoires prodigieuses, éd. Jean Céard, Genève, Droz, 2010.

24 Ambroise Paré, Monstres et Prodiges, éd. Jean Céard, « Travaux dhumanisme et Renaissance », Genève, Droz, 1971.

25 Pierre Boaistuau, op. cit., chap. xxii, p. 537.

26 Ibid., p. 334-335.

27 Mémoires de Jean Burel, bourgeois du Puy, Le Puy-en-Velay, Impr. de M.-P. Marchessou, 1875, p. 10-11 ; Michel de Waele, Réconcilier les Français : Henri IV et la fin des troubles de religion (1589-1598), Montréal, Presses universitaires de Laval, « Les collections de la République des Lettres », 2010, p. 55.

28 Gisèle Mathieu-Castellani, Montaigne : lécriture de lessai, Paris, PUF, 1988, p. 226-227.

29 Ibid., p. 226.

30 II, 30, 713 C. Cicéron, De divinatione, II, xxxi, trad. Pierre Villey in Montaigne, op. cit. : « Ainsi, après lévénement, on leur donne quelque interprétation qui en fait des présages. »

31 Voir, à ce sujet, Valérie M. Dionne, Montaigne, écrivain de la conciliation, Paris, Classiques Garnier, 2014.

32 Pierre Boaistuau, Histoires prodigieuses, op. cit., p. 388.

33 Telle est linterprétation de Marie-Hélène Huet dans son livre Monstruous Imagination, Cambridge, Harvard University Press, 1993.

34 Nous soulignons.

35 A. Tournon, Montaigne : La Glose et lEssai, éd. rev. et corr., Paris, Champion, 2000, p. 204.