Biographie de Valère Novarina
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Valère Novarina
- Pages : 273 à 282
- Collection : Écrivains francophones d’aujourd’hui, n° 2
Biographie
de Valère Novarina
Les premières années
Naissance le 4 mai 1942 de Valère Novarina, à Genève, fils aîné de l’actrice Manon Trolliet et de l’architecte Maurice Novarina. Famille d’origine piémontaise et savoyarde du côté paternel, suisse du côté maternel. Il est marqué par la figure de son arrière grand-père, Paolo Novarina, qui quitta la vallée de la Valsesia et traversa les Alpes à pied vers 1860 pour travailler en Suisse, puis dans le Jura.
Enfance et adolescence dans le Chablais savoyard essentiellement à Thonon et, l’été, dans un alpage. La montagne restera toute sa vie un lieu de travail et d’écriture, le lieu aussi des voyages à pied, liés à la lecture de Rousseau. Naissance de son frère Patrice, de deux ans son cadet, aujourd’hui architecte.
Vers cinq ou six ans, est saisi par l’apparition de sa mère en costume noir dans le rôle de la veuve Popova dans L’Ours de Tchekhov. Visites de Jean Vilar et de Gérard Philipe à la famille Novarina. Joue dans les pièces mises en scène par sa mère, puis dans la troupe de son collège. Assiste à des spectacles de Jean Dasté, La Vie est un songe, Le Cercle de craie caucasien. Son père, ami des Fratellini, fréquente le cirque avec des peintres et écrivains comme Fernand Léger, Picasso, Reverdy, Max Jacob.
Son intérêt pour la langue se développe au contact de ses « quatre langues étrangères-maternelles1 » : le hongrois que chante sa mère au piano, le latin appris à l’école, l’italien frontalier de son grand-père, le patois savoyard et ses variations d’un hameau à l’autre.
Une sonate de Beethoven entendue la nuit sur son poste à galène à la radio suisse déclenche le désir d’écrire. Adolescent, se passionne pour la musique de Bach.
Naissance de l’écriture : à partir de 8 ans, écrit en secret : Écrits scientifiques (perdus) dissimulés sous des pierres dans la montagne ; Hésitations sans ratures ; Le Cinquième jour du pendu ou le rêve du strangulé ; Carnet vert (une réfutation des Pensées de Pascal).
1960-1964
1960 : Déménage à Paris mais continue à passer les étés en Savoie. Veut être acteur mais y renonce rapidement.
1960-1963 : Étudie la philosophie, la philologie et l’histoire du théâtre à la Sorbonne où il aura notamment Bernard Dort comme professeur.
Été 1961 : Séjour à Ouatapan chez François Ducret, dit Fanfoué le piot, philologue et musicien.
1962 : Termine l’écriture de Liasse, 329 pages commencée en 1959.
1963 : Lit la Divine comédie pendant six mois.
1964 : Lit tout Artaud et rédige un mémoire de maîtrise intitulé « Antonin Artaud, théoricien du théâtre ».
Premières ascensions : Roc d’Enfer, Mont Buet, Etna, Stromboli.
1965-1975
1966 : Écrit Polok ou L’Enfant armé qu’il donne à lire à Bernard Dort.
1968 : Est l’assistant d’Antoine Bourseiller, de José Guinot et de Jean-Pierre Dougnac.
Hiver 1968 : Entreprend des recherches pour une thèse : L’Espace et la Musique, selon Adolphe Appia.
1968-1970 : Écrit L’Atelier volant (une première version s’intitulait Monsieur Budet montre ses employés sur le théâtre), qu’il fait lire à Roland Barthes.
1970-1972 : Écrit Le Babil des classes dangereuses. En donne une lecture intégrale en 1973, rue Lamartine, dans l’atelier de Jean-Marie Villégier, de 15 h 30 à 22 h.
1971 : Travaille sur Héraclius de Corneille avec Marcel Bozonnet, Jean-Marie Villégier et Roséliane Goldstein. Représentation au festival de Timgad.
1972 : Assiste à de nombreux spectacles (cirque, music-hall, opérettes, nô, bunraku) et s’intéresse à l’Art brut.
Janvier 1972 : Enregistrement à Radio France de L’Atelier volant par Marcel Maréchal et Tsilla Chelton. Diffusion interdite, pour raisons politiques, par Jacques Sallebert en janvier (elle aura finalement lieu en juin).
Automne 1972 : À Sainte-Anne, assiste aux présentations de malades des docteurs Lacan et Daumézon.
Novembre 1972 : Rencontre de Roger Blin à qui il rend visite régulièrement.
1973-1975 : Écrit La Lutte des morts et son « journal furieux » : Le Drame dans la langue française.
Eté 1973 : Leçons de patois à Vailly avec Aimé Stehlin et Louis à la Grêle.
1974 : Écrit une Lettre aux acteurs après avoir été écarté des répétitions de L’Atelier volant que Jean-Pierre Sarrazac met en scène. La distribue aux comédiens.
Sur les conseils de Jean-Louis Schefer, publie des extraits de ses œuvres dans des revues, TXT (Christian Prigent), L’Énergumène (Gérard-Julien Salvy), Ça cinéma (Joël Farges), alors qu’il continue d’être refusé par les éditeurs.
Voyages à pied dans les Alpes et en Corse. Ascension de la Haute Cime et du Mont Blanc.
1975-1977
1975 : Écrit Falstafe, d’après Henri IV de Shakespeare (commande de Marcel Maréchal pour l’ouverture du nouveau Théâtre de la Criée à Marseille).
1976 : Naissance de Virgile, fils de Roséliane Goldstein et Valère Novarina.
1977-1978 : Publication de Falstafe (1977) puis du Babil des classes dangereuses (1978) aux éditions Christian Bourgois.
1977 : Se fait voler une valise qui contient un manuscrit, Le Soleil, auquel il travaillait depuis deux ans.
1978-1984
1978 : Début d’une correspondance avec Jean Dubuffet qui durera jusqu’à la mort du peintre en 1985.
1980 : Enregistre Le Théâtre des oreilles pour l’Atelier de création radiophonique de France Culture : lit ses textes, chante et joue de vingt-deux instruments.
1980-1983 : Nombreuses « actions de dessins », performances et expositions. La plus remarquable est celle de La Rochelle en 1983 : dessine les 2587 personnages du Drame de la vie dans la Tour Saint-Nicolas les 5 et 6 juillet.
1981 : Naissance de David, fils de Roséliane Goldstein et Valère Novarina.
Mai 1982 : Première des onze visites à Jean Dubuffet.
Novembre 1982 : Pendant deux jours peint les murs et le plafond de La Chambre noire (galerie À la limite, Dijon).
1980-1984 : 288 slogans, réunis ensuite sous le titre Impératifs, s’assemblent pendant qu’il écrit Le Drame de la vie. Jean Dubuffet écrit en 1983 une préface au livre : « Une petite annonce avant que le rideau se lève ».
1984 : Publication du Drame de la vie par P.O.L qui restera son éditeur régulier.
1985-1986
1984-1986 : Écrit Le Discours aux animaux.
1985 : Lit La Vie de Jeanne Guyon, livre que Jean-Noël Vuarnet lui a prêté, et affiche l’une de ses phrases2 au mur de son atelier pendant six mois.
1984-1986 : Rencontre André Marcon qui joue Le Monologue d’Adramélech à La Rochelle (1984), qui lit Pour Louis de Funès au Festival d’Avignon
(1986) et crée Le Discours au animaux (première partie) au Théâtre des Bouffes du Nord (1986).
1986 : Met en scène et peint neuf grandes toiles pour le décor du Drame de la vie. Création au Théâtre municipal d’Avignon dans un climat houleux. Scénographie de Gauvin, première collaboration avec Joël Hourbeigt à la création lumières.
Hiver 1986 : Pendant deux mois, n’écoute plus que Scriabine.
1987-1989
Mai 1988 : Filme les yeux de Roséliane Goldstein et de Michel Baudinat et peint douze peintures mouvantes sur palette graphique pour son exposition Vue négative.
Juin 1988 : À Nuremberg, peint un ensemble de toiles inspirées du Livre de Daniel : Un temps, deux temps et la moitié d’un temps.
Août 1988 : Après un déjeuner avec Jean-Luc Godard, termine la lecture des Confessions de saint Augustin sur le lac de Genève.
1988-1989 : Écrit Vous qui habitez le temps et met en scène la pièce (création au festival d’Avignon). Début de la collaboration avec les acteurs Dominique Parent et Daniel Znyk.
1989 : P.O.L réédite en un seul volume, Théâtre, les pièces composées pendant les années 1970 et réunit dans Le Théâtre des paroles les journaux, pamphlets, slogans, fragments d’entretiens parus en revue.
1989-1991
1989-1991 : Écrit Je suis et les 616 notes de Pendant la matière.
5 mai 1990 : 7 rue de la Mouzaïa, croit avoir été déplacé par une main.
1991 : Création de Je suis au Théâtre de la Bastille. Première collaboration avec le scénographe Philippe Marioge qui l’accompagnera dans toutes ses futures mises en scène.
1991 : Au festival d’Avignon, création de L’Inquiétude (seconde partie du Discours animaux) par André Marcon.
1992-1995
1992-1995 : Affiche au mur une phrase de Rupert de Deutz3. Écrit La Chair de l’homme.
1992 : Commence sa collecte de noms, surnoms et sobriquets savoyards auprès d’amis des trois vallées de la Dranse (il arrêtera cette collecte en février 2009).
Juin 1992 : Enregistre Jean Liardet, dit Jean la Grêle, chantant Jean planta vigne.
Janvier 1993 : Accompagne André Marcon dans sa tournée de L’Inquiétude à Brême, Cracovie et Moscou.
Septembre 1993 : À la foire de Crête où il se rend tous les ans, enregistre Gugusse de La Loterie Pierrot.
1994 : Dessine 78 Figures pauvres pour une exposition à la Galerie France.
Mars 1994 : Enregistre avec Roséliane Goldstein la création radiophonique Les Cymbales de l’homme en bois du limonaire retentissent pour France Culture.
Janvier 1995 : Claude Buchvald, qu’il a rencontrée en 1993, met en scène Vous qui habitez le temps (Lavoir Moderne Parisien).
Été 1995 : Met en scène La Chair de l’homme et peint pendant une semaine, dans l’Église des Célestins d’Avignon, une grande toile de soie (7 x 14 mètres) pour la pièce. Création au Tinel de la Chartreuse pendant le festival d’Avignon.
1995 : Commence à écrire une première version pour la scène de Je suis qui sera publiée sous le titre L’Espace furieux en 1997.
Novembre 1995 : Jean-Noël Vuarnet visite l’atelier et s’effraye de la peinture Parturition du père.
1996-1998
1996-1997 : Écrit Le Jardin de reconnaissance.
1996 : Pendant un an, lit toute l’œuvre de Charles-Albert Cingria.
Septembre 1996 : À Thonon, dirige une lecture des Torrents et autres écrits de Jeanne Guyon par Roséliane Goldstein, Laurence Mayor et Agnès Sourdillon.
Novembre 1996 : Création du Repas, version pour la scène des premières pages de La Chair de l’homme, mis en scène par Claude Buchvald. Première rencontre avec le musicien Christian Paccoud.
1996-1997 : Réécrit pour Claude Merlin une adaptation de la scène xvii de La Chair de l’homme : L’Avant-dernier des hommes (mise en scène de Claude Buchvald en 1997).
1997 : Première du Jardin de reconnaissance au Théâtre de l’Athénée. Début de la collaboration avec Pascal Omhovère.
Décembre 1997 : Traduit Amos en collaboration avec Marc Sevin, pour la Bible des éditions Bayard.
1997-1998 : Écrit L’Opérette imaginaire pour Claude Buchvald et ses comédiens. Création à Brest au Théâtre du Quartz dans la musique de Christian Paccoud en 1998.
1998 : Lit L’Espace furieux à New York, San Francisco et Bâton-Rouge, puis à Florence.
Ascension des dents de Morcles avec Didier Cahen et Jean Chappuis.
1999-2005
1999 :
– Termine l’écriture de Devant la parole, commencée en 1991.
– Séjour à Istanbul, Konya, Nicée, Jérusalem, Ravenne, New York.
– Création de sa compagnie L’Union des contraires avec Laurence Mayor, Pascal Omhovère et Philippe Marioge.
– 24 mars : Commence (et abandonne) la rédaction d’un article intitulé L’Europe des pourceaux.
1999-2000 : Écrit L’Origine rouge qui, initialement, devait faire corps avec L’Opérette imaginaire.
Janvier 2000 : À Jérusalem, où sont tombés quarante centimètres de neige, Michel Baudinat joue L’Acteur fuyant autrui, texte réunissant tous les rôles écrits pour lui depuis Le Babil des classes dangereuses.
2000-2005 : Écrit Lumières du corps.
2000 : Sur la base aérienne 105, à Évreux, peint pendant une semaine le décor de L’Origine rouge. Création de la pièce au Festival d’Avignon. Première collaboration artistique avec Céline Schaeffer qui depuis travaille avec lui sur tous ses spectacles.
2001-2003 : Écrit puis met en scène La Scène qui devait être créée au festival d’Avignon le jour de son annulation, et qui le sera finalement au Théâtre de Vidy-Lausanne en 2003.
2005 : Découvre le Sacro Monte à Varallo (d’où sa famille paternelle est originaire) et y retourne depuis chaque année.
2006-2009
2006 : Sur l’invitation de Marcel Bozonnet, entre au répertoire de la Comédie-Française avec L’Espace furieux (seconde version) qu’il met lui-même en scène. Début de la collaboration avec le costumier Renato Bianchi.
2006-2007 : Écrit L’Acte inconnu.
2006-2009 : Écrit L’Envers de l’esprit, qui réunit le journal de travail de L’Acte inconnu et le portrait de « grands désagisseurs » : Daniel Znyk, Lucerné, Madame Guyon.
2007 : Création de L’Acte inconnu dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes à Avignon, dans sa mise en scène.
2009 : Met en scène Le Monologue d’Adramélech, joué par Jean-Yves Michaux au Théâtre de Vidy-Lausanne.
2009-2012
2009 : Séjour en Hongrie où il met en scène avec Adélaïde Pralon L’Opérette imaginaire en hongrois (traduction de Zsofia Rideg). Création au Théâtre Csokonai de Debrecen.
2009-2011 : Écrit Le Vrai sang et en prépare une version pour la scène.
2010 : Prépare une exposition Théâtre de dessins : 2587 personnages, 311 définitions de Dieu pour la galerie Arts Santa Mònica à Barcelone.
2011 : Création du Vrai sang à l’Odéon-Théâtre. Organisation par Jacques Le Ny, Marco Baschera, Constantin Bobas et David Arar d’un atelier public de traduction où tous ses traducteurs sont réunis : La République des traducteurs. Reçoit le prix de la meilleure création d’une pièce en langue française du Syndicat de la critique.
2010-2011 : Réalise une série d’entretiens avec Olivier Dubouclez pour le livre Paysage parlé.
2010-2011 : Écrit, pour Michaël Levinas, Je, Tu, Il qui constituera le prologue de l’opéra La Métamorphose. Création à L’Opéra de Lille en 2011.
2011 : Reçoit le prix Jean Arp de littérature francophone pour l’ensemble de son œuvre.
2009-2012 : Écrit La Quatrième personne du singulier en contrepoint de L’Opérette imaginaire hongroise, de Je, Tu, Il et du Vrai sang.
2012-2014
2012 : Met en scène L’Atelier volant qui est créé au Théâtre du Rond-Point.
2013-2014 : Écrit Observez les logaèdres !
2013-2014 : Travaille au livre Personne n’est à l’intérieur de rien qui réunit toute sa correspondance avec Jean Dubuffet, des documents et des photographies.
Février 2013 : Expose 13 peintures à la galerie Le Consortium de Dijon.
Été 2013 : Entretiens à la montagne avec Marion Chénetier-Alev qui seront publiés chez Argol sous le titre L’Organe du langage, c’est la main.
Novembre 2013 : Invité par Guy Régis, séjourne en Haïti où il travaille avec huit acteurs de l’Enarts. Rencontre chaleureuse avec Frankétienne.
Février 2014 : André Marcon reprend Le Discours aux animaux à la Maison de la poésie.
Mai 2014 : À l’occasion de la traduction en japonais par Thierry Maré de L’Origine rouge, séjour au Japon ; visite de Kyoto avec Yuriko Inoué.
Juillet 2014 : passe au festival d’Avignon, et choisit le cloître des Carmes pour y créer Le Vivier des noms en juillet 2015.
Septembre 2014 : pense à nouveau à son projet de film : Entrée d’un homme en gare de La Ciotat.
Isabelle Babin et Laure Née
1 Valère Novarina, L’Envers de l’esprit, Paris, P.O.L, 2009, p. 190-192.
2 « Je ne saurais plus rien écrire de ce qui regarde mon état intérieur : je ne le ferai plus n’ayant point de paroles pour exprimer une chose qui est parfaitement dégagée de tout ce qui peut tomber sous le sentiment, l’expression, ou la conception humaine » [orth. modernisée], (Madame Guyon, La Vie de Madame J. M. B. de La Mothe-Guyon, écrite par elle-même, Paris, Les Libraires associés, 1791, t. III, ch. x, p. 103).
3 « Quod omnis qui sacrae Scripturae studiis accintus incumbit, sensum Verbi Dei tenere contendens, instar Jacob cum Deo luctetur », (Rupert de Deutz, In Genesim, dans De Trinitate et operibus ejus, I. 8, cité par Henri de Lubac, Histoire et Esprit, L’intelligence de l’Écriture d’après Origène, [1950], Paris, Aubier, 1981, p. 395) ; « Tout homme qui étudie la Bible, et s’efforce de comprendre le sens du Verbe de Dieu, est, comme Jacob, un homme qui lutte avec Dieu. » (trad. de V. Novarina).
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-8124-3842-4
- EAN : 9782812438424
- ISSN : 2430-8080
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3842-4.p.0273
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 30/07/2015
- Langue : Français