Nouveau Testament
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Revue d’Histoire et de Philosophie Religieuses
2018 – 3, 98e année, n° 3. varia - Auteurs : Gerber (Daniel), Grappe (Christian)
- Pages : 346 à 371
- Réimpression de l’édition de : 2018
- Revue : Revue d'Histoire et de Philosophie religieuses
REVUE DES LIVRES
IL NOUVEAU TESTAMENT Éric Suire, Les Vies de Jésus avant Renan. Éditions, réécritures, cir¬ culations entre la France et l'Europe (fin xU - début XIJÉ siècle)., Genève, Droz, 2017, 318 pages (Cahiers d'Humanisme et Renais¬ sance 144), ISBN 978-2-600-05790-5, CHF 39 (34,90 €). Fondé sur l'établissement d'un catalogue des sources imprimées et manuscrites retraçant « l'existence entière de Jésus sous la forme d'un récit » (p. 27), sources incluant des vies de Jésus et des « harmonies » latines et françaises publiées dans la période considérée (la liste en est dressée p. 243-268), des vies de Jésus insérées dans une bible, une hagiographie, un recueil (p. 269-270), des cantiques et autres pièces ver¬ sifiées sur la vie de Jésus-Christ (p. 271-273), d'autres traités imprimés et méditations sur le même thème (p. 273-287), des vies de Jésus manus¬ crites (p. 287-288) et d'autres manuscrits relatifs à la vie de Jésus (p. 288-289), l'ouvrage n'a rien d'un catalogue ennuyeux, alors que tel aurait pu être le cas si les quelque 345 sources prises en compte avaient fait l'objet d'une présentation systématique. L'A. choisit au contraire d'adopter une vue d'ensemble, de saisir les évolutions et d'en présenter les grandes lignes en se situant successi¬ vement sur trois plans. 11 s'intéresse d'abord aux éditions elles-mêmes, dans la période qui va globalement de la naissance de l'imprimerie jusqu'à la fin de l'Ancien Régime. 11 constate que, loin de suivre une progression linéaire, la pro¬ duction connaît une première montée en puissance dans les années 1521- 1541 avant d'atteindre des sommets entre 1580 et 1720 puis de se tasser très nettement au XVIIÉ siècle. 11 relève une domination du latin sur toute la période considérée, mais aussi une percée du français. 11 observe la grande variété des sources utilisées, qu'elles soient citées ou non, en fonction du type de narration (poétique, exégétique, historique) auquel on a affaire, la documentation apocryphe étant de moins en moins sollicitée au profit de la littérature canonique, avant que n'apparaisse une prise en compte croissante des travaux historiques et philologiques contemporains. 11 étudie ensuite les réécritures effectuées et constate que, jusque dans les années 1530-1540, on a tendance à écrire sous l'autorité et l'inspiration des Anciens et à reproduire les textes antiques et médiévaux relatifs à Jésus. Suit, de 1550 à 1650, une période de confessionnalisation au cours de laquelle on assiste à un renouvellement des sources (prise en compte, du côté protestant surtout, d'harmonies évangéliques [synopses] ; mise en avant, chez les Jésuites, d'un Christ consolateur et rédempteur, mais aussi puissant thaumaturge, pour toucher plus directement les fidèles) et des méthodes (apparition d'un recul critique chez certains théologiens réformés ; engouement des jansénistes pour les textes anciens et leur tra¬ duction, engouement associé à un souci de mieux comprendre l'Écriture). À partir de 1650 et jusque vers 1710, les débats internes aux confessions prennent le dessus, en même temps qu'émergent des vies de Jésus
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critiques, informées par une meilleure connaissance du peuple juif et de ses traditions, œuvres malheureusement trop souvent méconnues par la critique et dont ΓΑ. cherche à souligner la pré-modernité. Les écrits publiés ensuite témoignent d'une forme de régression, leur principal propos étant le plus souvent d'ordre catéchétique ou apologétique. On passe enfin à la circulation, à la diffusion et à la réception des œuvres étudiées, cela à partir de la prise en compte de témoignages de lecteurs, du soutien apporté bien souvent par les autorités à leur diffusion (dans le cadre de la colonisation, de la catholicisation des protestants du royaume, et même des distributions de prix), du marché des rééditions, de leur présence dans les catalogues de bibliothèques et de leur accueil par la critique. Un ouvrage tout aussi utile qu'intéressant, qui donne à comprendre et à penser. Ch. Grappe r L'Evangile de Jésus-Christ par le P. Marie-Joseph Lagrange, o.p., avec la synopse évangélique traduite par le Père Ceslas Lavergne, o.p. Préface de Jean-Michel Poffet, o.p. Présentation de Manuel Rivero, o.p., Paris, Artége Lethielleux, 2017, 699 pages, ISBN 978-2-249-62407-0, 32 €. L'importance des ouvrages du Père Lagrange pour l'exégèse catho¬ lique francophone n'est plus à prouver. Fondateur, en 1890, de l'École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem, appelée à l'origine École pratique d'études bibliques, puis, en 1890, de la Revue biblique, il a appliqué la méthode historico-critique aux textes bibliques, ce qui lui a valu de s'attirer les foudres de Rome à partir de 1907, la condamnation du modernisme, dont il était devenu la figure emblématique, étant offi¬ cialisée par la publication de l'encyclique Spiritus Paraclitus en 1920. Demeurant à tout moment soumis à l'autorité romaine, il a poursuivi ses travaux et, parvenu à un âge déjà avancé, il a, alors qu'il était hospitalisé à Marseille suite à de graves problèmes de santé, résolu d'écrire un commentaire des évangiles qui serait aussi une forme de vie de Jésus, destinée au public le plus large, au cas où il devait retrouver des forces pour poursuivre son œuvre. Une fois rétabli, il s'est mis à l'ouvrage et a publié L'Évangile de Jésus-Christ, dédicacé au pape Léon XIII. Le livre a connu un succès très rapide auprès du large public qu'il visait, vingt-six mille exemplaires ayant été vendus en douze ans. Il connaît ici une nouvelle édition, qui reprend celle de 1954. Cette dernière avait pour originalité de faire précéder les commentaires de l'A. par la section correspondante de la synopse qu'il avait éditée en collaboration avec le Père Lavergne et qu'il entendait, de fait, commenter. Le Père Lagrange a été réhabilité après la crise moderniste, elle-même close par la promulgation, par Pie XII, de l'encyclique Divino afflante Spiritu en 1943, et un procès en béatification le concernant a même été ouvert en 1988.
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On comprendra néanmoins qu'il ne pouvait que marcher sur des œufs en rédigeant cet ouvrage de vulgarisation scientifique qui devait aussi lui permettre de partager sa foi ardente. Le commentaire reste dans l'ensemble très proche des données du texte, mais, comme le fait valoir J.-M. Poffet dans sa préface, il comporte aussi des pépites qui s'avèrent d'une éton¬ nante modernité. À cet égard, un passage du commentaire de l'épisode de l'Epreuve au désert pourrait, si l'on fait abstraction d'une formulation aujourd'hui datée, passer pour un modèle d'analyse narrative : « Il est à croire que ce prologue dialogué, joué dans une sphère mystérieuse, au désert, mais avec Satan comme protagoniste, et d'où découlera l'issue du drame terrestre entre les hommes, cette décision anticipée de ce qui sera l'œuvre du salut par la défaite de notre adversaire, est un événement symbolique qui renferme un secret important pour nous. C'est ainsi, pour employer une comparaison forcément inexacte, que certains prologues d'Euripide introduisent un personnage divin qui explique d'avance les péripéties de la tragédie et en fixe la moralité» (p. 99-100). Il n'en demeure pas moins que, malgré ce que fait valoir la jaquette, le lecteur qui prendra l'ouvrage en mains aujourd'hui devra s'engager dans une lecture plus contemplative qu'historique, dans la mesure où beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis sa publication, notamment dans le domaine de l'exégèse catholique romaine, et cela grâce à la témérité de ceux qui, comme l'A., ont œuvré pour la reconnaissance d'une approche qui puisse être réellement historique et critique sans porter préjudice à une lecture croyante. Ch. Grappe Jens Schrôter, Christine Jacobi (éd.), Jésus Handbuch. Unter Mitarbeit von Lena Nogossek, Tubingen, Mohr Siebeck, 2017, Xlll + 685 pages, ISBN 978-3-I6-I53853-7, 49 €. Comme l'indiquent d'emblée les deux Éd. dans la préface de l'ouvrage, ce dernier se situe dans la longue tradition des interprétations du chemi¬ nement, de l'activité et de la destinée de Jésus dans l'histoire du christia¬ nisme et dans la veine de la recherche historico-critique dont il s'agit ici, en quelque sorte, de fournir un état dans les divers aspects qu'elle revêt dés lors qu'il est question pour elle d'enquêter sur la figure de Jésus. Dans la mesure où il est précisément question des interprétations de la figure de Jésus, l'ouvrage s'emploie à prendre à bras le corps la question de la reconnaissance de Jésus en tant que Messie, Seigneur et Fils de Dieu à la lumière des événements de Pâques, et se divise en cinq parties. La première a trait à l'histoire de l'exégèse historico-critique et pré¬ sente la particularité d'articuler recherche historique et enjeux christolo- giques. Sont ainsi abordés le Jésus terrestre dans la piété et la théologie ^ S dans l'Antiquité, au Moyen Age et â la Réforme (M. Ohst), le XVIII siècle en tant que contexte d'émergence de la théologie critique - et cela sans se focaliser sur la seule figure de Reimarus - (A. Beutel), la recherche historique critique et son impact à la fin du XVIIÉ et au début du XIX^ siècle
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(E. D. Schmidt), rintroduction de la notion de mythe dans la recherche relative à Jésus et l'émergence de la théologie des deux sources (J. Kloppenborg), la compréhension du Royaume de Dieu en tant que concept eschatologique chez Johannes Weiss et Albert Schweitzer (J. Carleton Paget), le Jésus de l'histoire et le Christ du kérygme (R. von Bendemann), les intentions littéraires des évangiles et leur relation au Jésus de l'histoire (G. Breytenbach), la troisième quête du Jésus histo¬ rique (D. du Toit), le « Jésus remémoré » et la notion de mémoire conçue comme paradigme herméneutique historique dans la recherche relative à Jésus (J. Schroter). Pour ce qui est de la recherche strasbourgeoise, le rôle joué par les figures de H. J. Holtzmann et, bien sûr, d'A. Schweitzer est souligné en plusieurs endroits. La deuxième partie aborde le matériel historique sur lequel se fondent les recherches relatives au Jésus de l'histoire : sources littéraires, chrétiennes - évangiles synoptiques et source Q (J. Kloppenborg), qua¬ trième évangile (J. Frey), autres écrits néotestamentaires (Ch. Jacobi), textes non canoniques (S. Gathercole) - et non chrétiennes : païennes et juives (S. Mason) ; témoignages archéologiques, parmi lesquels une place est même faite aux reliques et au suaire de Turin et surtout aux monnaies, dont l'intérêt s'avère beaucoup plus direct (J. Zangenberg). La troisième partie, centrale à tous points de vue, aborde la vie et l'activité de Jésus. Sont étudiés successivement les autorités politiques (D. Schwartz) et le contexte religieux (L. Doering), des aspects biogra¬ phiques - les origines de Jésus, sa naissance, son enfance, sa famille, mais aussi sa formation et son langage (St. Hultgren) ; la façon dont on peut le situer dans le judaïsme de son temps (L. Doering) ; la Galilée et ses environs, puis Jérusalem et la Judée, en tant que cadre de son activité (J. Zangenberg) -, et enfin et surtout son activité publique, envisagée sous différents aspects. 11 est d'abord question du contexte social de son activité à travers ses relations avec Jean-Baptiste (K. Backhaus) et la façon dont on peut le situer dans l'environnement social et politique de son temps (J. Crossley). On passe ensuite à son activité proprement dite : sa situation de prédicateur itinérant et la fondation concomitante d'une communauté à travers l'appel à la suivance et la constitution du groupe des Douze (J. Verheyden) ; sa commensalité (H. Lôhr) ; ses guérisons (A. Weissenrieder) ; ses exorcismes, dont l'horizon eschatologique et l'importance sont soulignées (B. Kohlmann) - il est à cet égard sympto- matique que Le 11,20 soit, et de loin, le verset le plus souvent allégué dans l'ensemble de l'ouvrage - ; les résurrections de morts et les miracles affectant la nature (B. Kohlmann). L'horizon s'élargit pour inclure ses relations avec ceux qui viennent à lui ou qu'il est amené à côtoyer : les femmes (Ch. Zimmermann) ; le peuple (Ch. Zimmermann) ; Israël (D. Bock et J. Schroter) ; les collecteurs d'impôts et les pécheurs (Y. Furstenberg) ; les Samaritains (M. Bôhm). Viennent alors sa prédication et son enseigne¬ ment : l'image de Dieu qui est la sienne et la signification de la métaphore du Père (Ch. Gerber) ; le Régne de Dieu, appellation générique curieuse d'une excellente section dans laquelle il est essentiellement question du Royaume de Dieu conçu lui-même comme venant faire pièce au Royaume
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de Satan (C. Evans ; J. Johnson) ; les paraboles (R. Zimmermann) ; les représentations de Jésus relatives au Jugement (M. Wolter) ; la prière de Jésus (K-H. Ostmeyer) ; Jésus interprète de la Torah (Th. Kazen) ; Jésus sage (M. Ebner) ; la compréhension qu'il pouvait avoir de lui-même (M. Wolter). Suivent des contributions thématiques : Tethos de Jésus envisagé à travers l'amour du prochain et de l'ennemi (F. W. Horn) ; la propriété et la richesse (F. W. Horn) ; la suivance, le renoncement radical et l'ethos a-familial (M. Labahn) ; l'accusation portée contre Jésus d'être un glouton et un ivrogne (M. Labahn). Une dernière section est consacrée aux événements de la Passion : entrée à Jérusalem et purification du Temple (M. Tiwald) ; dernier repas de Jésus (H. Lôhr) ; les procès intentés à Jésus (S.-O. Back) ; la crucifixion et l'ensevelissement (S.-O. Back). Une dernière partie explore les traces anciennes de la réception de Jésus. Sont abordés successivement la résurrection, les apparitions et les recommandations du Ressuscité (Ch. Jacobi), les premières confessions de foi (S. Vollenweider), la christologie haute (D. du Toit), le dévelop- Φ 9 pement de structures communautaires (M. Ohler), Jésus dans les textes extra-canoniques des if et llf siècles (T. Nicklas), les représentations figurées de Jésus jusqu'en l'an 500 (K. Heyden et R. Schâr), les dévelop¬ pements de l'éthique du Sermon sur la montagne (U. Volp). Comme toujours dans ce genre d'ouvrages, on pourra relever une relative disparité des contributions, mais l'énumération des noms des auteurs qui se sont mis à la tâche aura montré que l'on a fait ici appel à d'éminents spécialistes et, qui plus est, à chaque fois, dans le champ même de leurs compétences. L'ensemble est donc de très haut vol, sans être trop technique, si bien qu'il correspond parfaitement à la vocation même d'une encyclopédie qui est de mettre une recherche de haut niveau à la portée d'un public intéressé et cultivé. Un constat s'impose toutefois pour le lecteur francophone. En dehors de l'ouvrage que C. Coulot a consacré à Jésus et le disciple (1987), la bibliographie générale (53 pages serrées) ne comporte, sauf omission de notre part, aucun ouvrage publié dans l'une des langues latines, si bien que la recherche francophone, et aussi ses homologues italophone et hispanophone, sont tout bonnement ignorées. 11 faut souhaiter néanmoins que cet ouvrage publié en allemand, ce qui constitue aussi un acte mili¬ tant de nos jours et signifie que des contributions écrites initialement en anglais ont été traduites, pénètre aussi dans le monde francophone, et remercier vivement les Ed. pour l'énergie qu'ils ont déployée en vue de constituer et de rassembler ainsi une matière de la plus haute qualité. Ch. Grappe Joseph Doré (éd.), Jésus. L'encyclopédie. Coordination : Christian Pedotti, Paris, Albin Michel, 2017, 843 pages, ISBN 978-2-226-32649-2, 59 €. L'ouvrage, qui présente la particularité d'être précédé par un som¬ maire et conclu par une table des matières, est fort bien présenté et
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remarquablement illustré, si bien qu'il s'adresse d'emblée à un large public à la fois cultivé et aisé auquel il entend proposer « une synthèse accessible des données établies (ou discutées) par la recherche » et « une lecture dans laquelle la critique historique rigoureuse et l'herméneutique [sont] complémentaires » (p. 8). C'est ainsi qu'alternent des contributions « d'historiens, d'exégètes, de psychanalystes, de spécialistes du ju¬ daïsme... » (p. 8), contributions plurielles ayant vocation à illustrer un « pluralisme assumé » (p. 8) dans un cadre qui reste néanmoins celui d'un catholicisme non moins ouvert que lui-même assumé. L'ensemble est introduit par J. Doré, qui donne une clé de lecture et d'organisation de l'ouvrage, clé qui peut néanmoins surprendre dès lors que l'on a affaire à une « encyclopédie » et que l'on pourrait s'attendre à davantage de distance : « c'est l'œuvre de Luc que nous prenons comme fil conducteur, non sans mettre à contribution le reste du Nouveau Testament », et cela parce que Luc « couvre l'ensemble du parcours de Jésus, depuis son engendrement [...] "jusqu'au moment où il nous fut enlevé", selon l'expression des Actes des Apôtres (1,2) » (p. 21). De fait, la raison invoquée pour ce choix apparaît dictée simplement par des questions liées à l'organisation de la matière et non par quelque démarche proprement scientifique et historique. L'ensemble se structure dès lors en trois livres : « Commencements » ; « La vie publique » ; « Passion et résurrection », qui se déclinent chacun en trois ou quatre parties entre lesquelles se répartissent les vingt-sept chapitres de l'ensemble. Chaque chapitre est introduit par un prologue narratif intitulé « On pourrait raconter les choses (ou l'histoire) ainsi », qui évoque le ou les récits ou discours évangéliques dont il va être question, prologue narratif dont il est précisé qu'il « ne se situe pas sur le registre scientifique (tout en en tenant compte évidemment) » (p. 21) - comprenne qui pourra ! -, le résultat étant que d'emblée les genres littéraire, scientifique et historique se trouvent brouillés. Suivent deux articles de fond, dus à des spécialistes, qui traitent de l'épisode ou de l'enseignement en cause et des éclairages jetés sur tel point qui requiert une explication, ces éléments relevant d'une exégèse critique, alors que les contrepoints qui les suivent dans certains cas livrent les points de vue d'auteurs qui ne sont pas exégètes (spécialistes du judaïsme, éthiciens, psychanalystes...), avant qu'une carte blanche soit donnée à une person¬ nalité qui exprime ce que lui suggère le récit ou le discours étudié. L'oscillation entre les genres est ainsi constante, ce qui, redisons-le, étonne dans une encyclopédie qui veut être de plus « L'encyclopédie ». Autre élément quelque peu étrange : alors que tout donne à penser que l'on va adopter l'ordre de Luc, le premier livre ne le suit pas vrai¬ ment puisque, avant d'évoquer « Naissance, enfance et "vie cachée" » puis « L'entrée en scène de Jésus », il est curieusement question d'« Une étrange rumeur », qui n'a rien à voir avec une naissance inattendue, comme pourrait le donner à penser le choix effectué, mais qui a trait au message de la résurrection. Certes, cela a le mérite de faire apparaître en filigrane que « Tout est parti d'une rumeur » et que la foi chrétienne est
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née non à Noël mais à Pâques, mais cela n'est toutefois pas affirmé d'emblée de la manière la plus claire, même si R. Dupont-Roc précise plus loin, dans le chapitre intitulé «Autour d'une naissance», que les récits de l'enfance « n'ont aucune prétention "historienne" [...] et veulent faire comprendre à des communautés de culture différente que l'identité de Jésus était manifeste dès le début» (p. 115). De même, le chapitre intitulé « Trente ans de vie cachée » reste ambigu car il donne à entendre que ces trente années pourraient avoir toute leur importance, alors que c'est en général avec « Le baptême au Jourdain », titre du chapitre 6, que l'on peut commencer à suivre le Jésus de l'histoire. Ce Jésus de l'histoire est évoqué par les chapitres suivants : « Les miracles que Jésus ne voulut pas faire » (qui vient clore le livre 1) ; « Le cadre de vie » ; « Les appels » ; « Les rencontres » ; « Miracles et guérisons » (chapitre dans lequel la dimension eschatologique des exorcismes en tant que signes de l'irruption du Royaume est malheureusement occultée) ; « Le Royaume et ses paraboles » ; « La voie du Royaume : les Béatitudes » ; « Miséricorde et justice » ; « Jésus et les pouvoirs » ; « Les mots du scandale » ; « Réactions et oppositions » ; « Jésus et Dieu » (livre 11) ; « La montée des périls » ; « Le conflit avec le Temple » ; « Le dernier repas », « Jésus devant sa mort » ; « Le procès et la condamnation de Jésus » ; « La crucifixion » ; « La mise au tom¬ beau » ; « Les apparitions aux disciples » ; « Sur la terre comme au ciel » (livre III). Comme on le constate à la lecture d'une telle liste, les cha¬ pitres thématiques dominent dans le livre 11, alors que le livre 111 relève d'une approche séquentielle qui rend plus difficile un recul proprement historique et critique. Le chapitre consacré à la dernière cène est d'ailleurs assez caractéristique. R. Burnet y tient un propos dont on comprend qu'il suppose une prise de distance critique par rapport aux textes, mais des formules introduites en gras et mordant sur le texte vont plus loin que ce qu'il écrit. Tel est le cas, lorsque ces formules affirment que « Jésus donne un sens nouveau à la Pâque en s'identifiant à l'agneau sauveur et en s'assimilant au pain et au vin » (p. 586) ou encore que « en renou¬ velant l'Alliance scellée par le banquet mosaïque au Sinaï, Jésus promet à ses disciples qu'eux aussi pourront contempler Dieu» (p. 589). Là, la distance critique entre niveau du texte et niveau de l'événement qu'il narre est gommée, et la confusion peut s'installer. Une dernière remarque conclura la présente recension. 11 est précisé d'emblée que les soixante-dix auteurs du volume « n'ont été sollicités que sur la base de leurs compétences » et que « c'est la compétence seule qui a primé » (p. 9). On ne saurait que s'en réjouir. Cela étant, on aurait aimé qu'un peu de compétence soit reconnue aux exégètes strasbourgeois, catholiques du moins, qu'ils soient en activité ou retraités, car, au vu de la table des matières, il n'a été fait appel à aucun d'eux pour prendre part à cette encyclopédie, situation d'autant plus paradoxale que J. Doré est bien placé pour les connaître en tant qu'archevêque émérite de la ville. Ch. Grappe
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Andreas Dettwiler (éd.), Jésus de Nazareth. Etudes contemporaines, Genève, Labor et Fides, 2017, 300 pages (Le Monde de la Bible 72), ISBN 978-2-8309-1642-3, 24 €. C'est à l'occasion d'un cours public organisé par la Faculté de Théologie de l'Université de Genève qu'ont été présentées les dix enquêtes réunies dans cet ouvrage collectif exclusivement consacré au Jésus de l'histoire. Comme attendu, Andreas Dettwiler reprend en ouverture la question des sources susceptibles d'informer le dossier et revient sur les enjeux d'une telle recherche. Jûrgen K. Zangenberg fait ensuite le point sur ce qu'il appelle « la Galilée du terrain » (p. 48) au début de notre ère. Sa conviction est que « l'archéologie s'est établie comme un outil indispensable pour la recherche sur le Jésus historique, parallèlement aux études textuelles » (p. 63). Gerd Theissen évalue quant à lui le lien ayant existé entre Jean-Baptiste et Jésus, alors qu'Enrico Norelli fait d'utiles mises au point au sujet des relations que ce dernier a entretenues avec sa famille, ses disciples au sens large et les pharisiens. Christian Grappe invite pour sa part à considérer que, «dans l'action comme dans la prédication de Jésus, le Royaume de Dieu vient bel et bien se substituer au Temple et à ses rites» (p. 143). Daniel Marguerat observe «une rhétorique de l'excès » singulière chez celui qui a pourtant « enseigné à la manière des sages d'Israël » (p. 149), tant dans son discours en paraboles que dans son interprétation de la Torah ou dans son intransigeance au sujet du Règne de Dieu. La délicate question de l'historicité des miracles de Jésus est reprise par Annette Merz en deux temps : un survol de l'histoire de la recherche est suivi par quelques réflexions sur les aspects socioreligieux, sociopolitiques et individuels de ce type d'actes. Après avoir rappelé que l'image stylisée d'un Jésus « critique fervent de la Torah » est essentiellement l'œuvre de Matthieu, Martin Ebner se risque à « dessiner avec toute la prudence nécessaire quelques lignes directrices synthétiques» (p. 211) sur la manière dont le Nazaréen s'est effec¬ tivement situé par rapport à la Loi. Adriana Desto et Mauro Pesce revisitent la question des raisons historiques de la mort de Jésus en interrogeant : « Etait-il un révolutionnaire politique ? » Il revient enfin à Jean Zumstein d'aborder cette dernière question : « Comment peut-on poser le problème de l'historicité de la résurrection de Jésus aujourd'hui ? » Accessibles aux non-spécialistes, ces textes font le point sur quelques aspects saillants de la recherche consacrée aujourd'hui, à l'Université, à ce personnage singulier qui n'a pas attiré l'attention des chroniqueurs de son temps. Surtout, ils invitent à resituer Jésus de Nazareth dans le contexte géographique, religieux et politique qui était le sien et offrent ainsi d'utiles informations et pistes de réflexion à ceux qui, par exigence intellectuelle, souhaitent interroger l'histoire. D. Gerber
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Brian J. Tabb, Suffering in Ancient Worldview. Luke, Seneca and 4 Mac¬ cabees in Dialogue, London, Bloomsbury, 2017, XIX+ 274 pages (Library of New Testament Studies 569), ISBN 978-0-567-67241-4, £ 85. Fruit d'une thèse préparée à London School of Theology et à la Middlesex University sous la direction de Steve Walton, l'ouvrage cherche à analyser le rôle qui revient à la souffrance dans les représentations du monde respectives d'un auteur romain comme Sénéque, d'un auteur juif comme celui de 4 Maccabées et d'un auteur chrétien comme celui des Actes ; cela en partant du constat selon lequel Sénéque peut être tenu pour un auteur tout à fait représentatif du monde politique et social romain, alors que 4 Maccabées et Luc-Actes entrent pour leur part en dialogue avec la philosophie stoïcienne dont il est Tune des figures de proue. En fonction de ce constat, il apparaît tout à fait logique que TA. ait choisi d'étudier successivement Sénéque, 4 Maccabées et Luc-Actes. Il est également bienvenu qu'il ait résolu de se demander quels sont, aux yeux de chaque auteur, la nature de la souffrance, le problème qu'elle peut poser et, ultimement, la fonction ou le but qui lui est assigné. Pour ce qui est de Sénéque, il apparaît que la souffrance, sans être désirable, n'est pas non plus intrinsèquement mauvaise, mais plutôt sans importance au regard du véritable bonheur dont la clé réside dans la vertu qu'elle peut en fait stimuler. C'est que, ayant part avec le destin (fatum), elle n'en demeure pas moins soumise de quelque manière à la providence, surtout dés lors que Ton s'entraîne à la vertu qui permet de la surmonter. Dans un monde où le problème fondamental est l'immoralité, et non pas la souffrance, elle peut être vaincue par la philosophie qui enseigne pré¬ cisément la voie de la vertu qui permet de s'en affranchir et de préparer courageusement sa propre mort pour qu'elle soit bonne, indépendamment de toute spéculation sur un avenir ou un au-delà qui demeure incertain. En 4 Maccabées, la Loi est conçue comme le souverain bien, octroyé gracieusement par Dieu à son peuple pour qu'il lui obéisse, seuls ceux qui se rebellent pouvant être atteints par la souffrance qui n'a par ailleurs pas de prise sur eux en raison même de leur attachement à la Loi. Cette dernière leur permet de brider leurs passions et même, à travers les souffrances qu'ils endurent, de sauver leur peuple que des chefs rebelles ont conduit à la ruine et d'avoir l'assurance qu'ils sont au bénéfice d'une vie sans fin avec Dieu. En Luc-Actes aussi, la souffrance est le lot des principaux person¬ nages (Jésus, Etienne, les apôtres et Paul). Dés lors que Jésus, le Messie souffrant, est exalté auprès de Dieu et est Seigneur de toutes choses, ceux qui, à sa suite, éprouvent la persécution et la souffrance ont part à sa destinée glorieuse. Leur souffrance présente est nécessaire pour faire pièce aux adversaires de la Parole et faire triompher cette dernière, dés lors que le retour du Seigneur et la restauration ultime de toutes choses achèveront de réparer le monde et éradiqueront définitivement toute forme de souffrance.
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Un chapitre final met en dialogue Sénèque et les auteurs respectifs de 4 Maccabées et de Luc-Actes. Il met en exergue le fait qu'ils conçoivent tous la souffrance comme une réalité présente à la fois régie par et soumise à la souveraineté divine, l'accent spécifique de Luc-Actes et des écrits chrétiens étant que, pour eux, loin de rester extérieur à la souf¬ france, comme c'est le cas dans les représentations stoïciennes, ou de se contenter de prendre parti pour ceux qui souffrent en son nom, comme c'est le cas en 4 Maccabées, Dieu agit de manière décisive à travers la souffrance pour sauver le monde. La démarche, fort intéressante en soi, n'en est pas moins teintée d'une dimension quelque peu apologétique. Il n'empêche que la comparaison conduite est originale et qu'elle donne effectivement à penser. Ch. Grappe r Jean Zumstein, La mémoire revisitée. Etudes johanniques, Genève, Labor et Fides, 2017, 550 pages (Le Monde de la Bible 71), ISBN 978-2- 8309-1608-9, 32 €. La publication, en deux temps (2007 et 2014), du commentaire que l'A. a donné du quatrième évangile (voir RHPR 88, 2008, p. 371-372 et 95, 2015, p. 388-389) a marqué une étape importante dans l'étude de cet écrit et a été largement saluée, dans le domaine francophone et bien au- delà, d'autant que le commentaire a été depuis traduit en allemand et publié dans la prestigieuse série du Kritisch-exegetischer Kommentar ûber das Neue Testament (voir RHPR 97, 2017, p. 583-584). C'est dire que la publication d'un recueil d'études de l'A. dévolues au quatrième évangile est en soi bienvenue. Elle fait d'ailleurs suite, chez le même éditeur, à un autre recueil d'études de l'A., Miettes exégétiques, paru en 1991, dans laquelle était déjà parue, sous une première forme, la contribution qui ouvre le présent volume. Les vingt-cinq contributions rassemblées, publiées une première fois entre 1992 et 2016, sont groupées en trois ensembles. Dans un premier temps, ce sont des questions fondamentales d'intro¬ duction qui sont abordées : « Histoire du christianisme johannique » ; « Le processus de relecture dans la littérature johannique » - thème cher à l'A. s'il en est - ; « Interpréter le quatrième évangile aujourd'hui » - contribution parue initialement dans la RHPR en 2012 «Et nous savons que son témoignage est vrai » - étude qui aborde notamment la question du genre littéraire, les aspects de la conception johannique de l'histoire, la signification de l'intrigue comme lien du « fictif » et la question johannique de la vérité - ; « La naissance de la notion d'Ecriture dans la littérature johannique » - réflexion fort aboutie sur la façon dont la littérature johannique a réfléchi, en quatre grandes étapes, au statut qu'elle entendait se donner. Suit un parcours de textes : « Le prologue, seuil du quatrième évan¬ gile », prologue dont l'A. propose une exégèse magistrale dans son
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commentaire et dont il montre ici la double fonction de relecture et d'anticipation de l'œuvre dont il fixe le cadre herméneutique ; « La réception de l'Ecriture en Jean 6 », contribution qui illustre, à l'échelle d'un chapitre, comment une approche bien comprise de l'intertextualité permet d'éclairer un texte ; « Crise du savoir et conflit des interprétations selon Jean 9 », autre illustration du travail de l'école johannique ; « Le problème herméneutique des métaphores johanniques à l'exemple du discours du bon berger (Jn 10) » ; « Le lavement des pieds (Jn 13,1-20) », lu en tant qu'exemple de la conception johannique du pouvoir ; « L'adieu de Jésus aux siens », nouvelle lecture intertextuelle, de Jn 13-17, cette fois ; « Le point de vue de l'école johannique sur les logia de Jésus dans le premier discours d'adieu», relecture postpascale qui permet à ces paroles de parvenir à leur plénitude de sens ; « Langage imagé et relec¬ ture à l'exemple de Jn 15,1-17 », étude qui montre comment langage imagé et argumentation se conjuguent en fait dans le quatrième évangile ; «L'interprétation de la mort de Jésus dans les discours d'adieu» et «L'interprétation de l'expérience pascale» dans ces mêmes discours, contributions soulignant la hardiesse de la relecture qui est effectuée de ces événements, lesquels sont mis en tension de sorte que tant l'eschatologie que la pneumatologie ou encore l'ecclésiologie s'arriment en fait dans le départ du Fils vers le Père ; « L'interprétation johannique de la mort du Christ », étude destinée à montrer la place du paradoxe de la croix au sein de l'œuvre ; «Jean 19,25-17 », conçu comme texte symbolique dont il convient, dans une perspective ricœurienne, d'avoir l'intelligence du double sens ; « Lecture narratologique du cycle pascal du quatrième évangile », ou comment l'exploration du monde du texte a vocation à conduire pour ouvrir à son intelligence profonde. La troisième partie offre des parcours thématiques : « Paul et Jean », qui sont présentés comme les deux premiers grands interprètes du Jésus de l'histoire ; « Le péché dans l'évangile selon Jean », un péché dont la dénonciation «n'est que l'envers de la manifestation de la grâce» (p. 435) ; « Qu'est-ce qui fait qu'un signe est un signe ? » et « Crise de la connaissance et naissance de la foi », études liées dés lors que le signe, dont le Jésus johannique est le véritable herméneute, a précisément voca¬ tion à provoquer cette crise de la connaissance et à faire naître la foi ; « La grammaire de la haine dans le quatrième évangile », étude qui montre comment la violence présente dans l'œuvre doit être comprise à l'aune de l'asymétrie johannique, en fonction de laquelle « l'être humain est prédestiné au salut, si bien que l'incrédulité n'est que l'envers de la grâce » (p. 482-483) ; « La dynamique du souvenir », exploration de la conception johannique du temps ; « Une rhétorique pour initier/é-e-s », titre â double entente, ultime illustration du fait que le quatrième évangile met en œuvre une stratégie du croire articulée â l'approfondissement de la connaissance. Le parcours, on l'aura compris, est d'une extrême richesse, et le langage ciselé de l'A. le rend passionnant à chaque page. On pourra simplement regretter l'absence d'un index, tout au moins des textes anciens ou des passages cités du quatrième évangile. 11 aurait constitué un
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complément bien utile à ceux qui feront leur miel de cette somme en goûtant le plaisir de la lecture et les trésors de la relecture. Ch. Grappe
Oda Wischmeyer, David C. Sim, Ian J. Elmer (éd.), Paul and Mark. Com¬ parative Essays. Part 1. Two Authors at the Beginnings of Christianity, Berlin - Boston, Walter de Gruyter, 2017, lx + 709 pages, ISBN 978- 3-11-055267-6, 34,95 €. L'ouvrage, paru initialement en 2014, est ici proposé en version brochée et non plus reliée, ce qui lui permet d'atteindre un prix tout à fait abordable, surtout pour un volume de cette ampleur. Il se donne pour but de reprendre à frais nouveaux la thèse de Ferdinand Christian Baur, selon laquelle Marc serait lui-mêrne paulinien. Rappelons ici que cette thèse a été relayée notamment par É. Trocmé dans son ouvrage La formation de l'Evangile selon Marc, ouvrage qui, bien qu'il ait été traduit en anglais, n'a droit qu'à trois citations, par l'un des deux Éd., dans le volume. L'ensemble est bien mis en perspective par une introduction cir¬ constanciée d'O. Wischmeyer. La première partie consiste en un historique de la recherche entre 1850 et 1910, dû à J. Wischmeyer. La deuxième partie aborde des questions historiques : M. Theophilos envisage une continuité entre les deux auteurs à travers une comparaison de l'èpître aux Romains et du deuxième évangile, cela en décelant toute une série de points communs entre les deux œuvres ; D. Sim fait valoir qu'il existe un accord significatif entre Paul et Marc pour ce qui est du portrait, respectivement critique et caustique, qu'ils dressent de la famille de Jésus et de ses disciples. La troisième partie, de loin la plus développée, se place sur le plan théologique. N. Irrgang s'intéresse à la façon dont chacun des deux auteurs parle du judaïsme, ou plutôt écrit à son sujet, et estime qu'ils se rejoignent fondamentalement dès lors qu'ils placent l'un et l'autre l'homme devant Dieu, en fonction du kairos, et donc d'une situation d'intervention maximale de Dieu dans l'histoire. J. Svartvik compare la conception de la Torah des deux auteurs et estime qu'ils s'accordent pour considérer que les païens sont invités à participer à la communauté de l'Alliance, mais à travers l'événement Jésus-Christ, et non pas en raison de l'abrogation de la Torah. F. Wilk met en parallèle la façon dont ils utilisent l'Écriture et pense pour sa part que c'est en terre syrienne qu'il faut chercher la tra¬ dition commune dont ils dépendraient. E. Dowling compare les traditions relatives au dernier repas qu'ils utilisent et conclut, elle aussi, qu'elles se recoupent largement, malgré leurs différences. M. Theobald étudie la place qu'ils accordent à la passion de Jésus et l'explique par l'existence de récits de la Passion qui auraient un Sitz im Leben cultuel et auraient circulé sous diverses formes. U. Schnelle compare les christologies paulinienne
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et marcienne et les trouve en très grande continuité. A. Lindemann considère que, par-delà l'emploi quelque peu diffèrent qu'ils font du mot « évangile », ils s'accordent sur le fait qu'il s'agit du message porteur et créateur de salut qui doit être accueilli par les auditeurs. O. Wischmeyer compare leur conception respective du temps et nuance très largement les conclusions de Lindemann en faisant observer que, pour Marc, le temps du ministère de Jésus est déjà partie intégrante de l'Evangile qu'il annonce. E.-M. Becker met en regard la manière dont les deux auteurs reconstruisent l'histoire en écrivant respectivement de façon auto-référentielle (Paul) et hétéro-référentielle (Marc), et voit en eux les précurseurs de Luc à l'échelle de son évangile (Marc) et des Actes (Paul). W. Loader aborde la conception de la foi des deux auteurs et relève entre eux des différences très sensibles, notamment en matière de sotériologie, de pneumatologie et de fondements de l'éthique, ce qui l'amène à récuser la thèse d'un Marc paulinien. Th. Soding s'intéresse à la place et à l'importance qui reviennent au commandement d'amour chez les deux auteurs et relève des différences très sensibles. L. Scornaienchi se penche sur la façon dont la relativi- sation de l'impureté par Paul a pu influencer Marc et situe ce dernier sur une trajectoire allant de Paul à Tt 1,15. J. Painter s'emploie à montrer comment Marc est marqué par la mission paulinienne aux nations et a pu aussi lui apporter une forme de fondement. La quatrième partie s'intéresse enfin à la réception. A. Cadwallader considère la manière dont les deux auteurs se situent face aux codes domestiques en vigueur dans l'Empire romain et fait valoir que Marc, fidèle en cela à la théologie de la Croix de Paul, a maintenu une distance très nette avec l'ordre impérial, que d'autres héritiers de Paul (Colossiens) n'ont pas observée. D. Sim s'intéresse à la réception de Paul et de Marc chez Matthieu et fait valoir que Matthieu a, à juste titre, compris Marc comme un récit du ministère de Jésus influencé par Paul et s'est dés lors attelé à le corriger. L. Bormann se penche sur les rapports de Luc avec les deux auteurs et estime que, s'il les a tous deux utilisés, il n'a été convaincu ni par la théologie de l'un ni par celle de l'autre. W. Pratscher aborde, quant à lui, la réception de Paul et de Marc par Jean et conclut à l'existence de parallèles étroits tant entre Paul et Marc qu'entre Paul et Jean ; cela étant, il explique ces parallèles non par une dépendance lit¬ téraire mais par un phénomène d'oralité secondaire. Enfin, L Elmer traite de la réception de Paul et de Marc par Papias et estime que ce dernier pourrait avoir été lui-même hostile à Paul et avoir, de ce fait, indûment enrôlé Marc pour promouvoir la figure de Pierre. L'ensemble, d'une grande richesse, est complété par un index des auteurs modernes cités et deux modestes index thématiques. 11 est, là aussi, dommage qu'un index des textes anciens cités n'ait pas été inclus, mais cela ne saurait en rien diminuer l'intérêt et la qualité de cet excellent volume. Ch. Grappe
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Paula Fredriksen, Paul, the Pagans' Apostle, New Haven - London, Yale University Press, 2017, Xll + 319 pages, ISBN 978-0-300-22588-4, $ 35 (£ 30). L'ouvrage, concis - 174 pages de texte, suivies, hors index et biblio¬ graphie, de 73 pages de notes - est d'emblée placé sous un double éclai¬ rage fondamental : Paul était et est resté convaincu que l'établissement plénier du Royaume de Dieu était imminent, baigné qu'il était dans un judaïsme au sein duquel les espérances apocalyptiques étaient brûlantes ; il a vécu toute sa vie en tant que juif et non pas en tant que converti, en ex-juif ou en anti-juif, comme les générations ultérieures ont pu le dépeindre après la ruine du Temple de Jérusalem, et doit être étudié et compris comme tel. L'A. le présente ainsi en tant que « messager prophétique de Dieu conçu pour porter la bonne nouvelle du salut imminent aux nations [et] menant sa course à Torée de la fin des temps » (p. Xll). C'est d'abord le message et le messager qui sont brièvement pré¬ sentés, à l'aune de Rm 1,1-6. Un premier chapitre est consacré ensuite à Israël et aux nations, cela à partir du constat selon lequel l'espérance apocalyptique, qui était déjà le ressort de la mission de Jésus envers Israël, est aussi la matrice à partir de laquelle il faut comprendre la mission aux païens de Paul, le tout dans un drame à trois acteurs (Dieu, les nations et Israël) conçu sur l'arrière-plan de représentations diverses centrées sur la rédemption d'Israël mais pou¬ vant inclure la participation des nations à cette rédemption. Pour éclairer ce dernier aspect, TA. se penche ensuite sur les rela¬ tions nouées depuis l'exil, et la tension qu'il a créée entre diaspora, patrie et ville-mère, entre Israël et les nations, les juifs étant amenés à fré¬ quenter des lieux et des institutions païennes et à accueillir des païens intéressés au sein de leurs propres synagogues et dans le parvis des nations au Temple de Jérusalem. Le chapitre suivant, intitulé « Paul, mission et persécution », fait valoir que c'est la tradition apocalyptique associant les nations à la rédemption d'Israël qui est à la fois le ressort et la clé de compréhension de l'attitude de Paul à l'endroit des païens, leur présence au sein des communautés attestant à sa manière que la plénitude du Royaume est imminente. Ce serait par ailleurs le fait de leur annoncer l'Évangile sans requérir la circoncision de leur part qui aurait engendré les persécutions endurées par Paul, cela parce qu'une telle pratique brisait les lignes claires tracées entre païens et juifs (incluant les prosélytes) et pouvait menacer la pax deorum. L'étude qui est proposée ensuite du rapport entre Paul et la Loi fait valoir que tout ce qui est dit par le Tarsiote sur le sujet Test en fonction des païens, si bien que, quand il parle contre l'observance de la Loi, il parle contre l'obligation faite aux païens, par ceux qu'il désigne comme des adversaires, de judaïser, et non pas contre l'observance de la Loi juive en tant que telle.
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Le dernier chapitre, « Christ et le Royaume », revient sur l'attente eschatologique de Paul et la conviction qui était la sienne que le Royaume de Dieu, qui se trouvait à portée de main, inclurait à la fois Israël et les nations, non pas confondus mais rassemblés, si bien que les païens devaient, en quelque sorte, demeurer païens. C'est ainsi que Γ A. conçoit que, pour Paul, les païens, au bénéfice de l'Esprit Saint par le baptême, se trouvent dés lors sanctifiés, associés à ce qu'elle nomme le sacrifice eucharistique du Christ et au nouveau Temple que constituent les croyants et la communauté, sans que ce Temple soit censé surpasser pour autant le Temple de Jérusalem, mais coexister avec lui en tant que lieu de la résidence divine. L'A., qui a introduit son propos en indiquant que « Paul a vécu sa vie - comme nous devons tous vivre la nôtre - en étant innocent du futur » (p. Xll), le conclut dans un court épilogue en insistant à nouveau sur l'importance qu'il y a à prendre en compte l'intense espérance apocalyp¬ tique pour comprendre Paul à la fois en tant que juif et apôtre des païens. Complété par une bibliographie essentiellement en langue anglaise, même si quelques titres en français ou en allemand sont mentionnés, l'ouvrage est pourvu de plusieurs index (auteurs anciens et modernes cités, thématique) et se recommande par la clarté de ses thèses. Cela étant, on pourra regretter certains manques et certains silences : un monument comme la monographie de Michael Wolter, Paulus. Ein Grundnis seiner Théologie, est tout bonnement ignoré, tout comme le Paulus Handbuch édité par F. Horn ; le petit Paul de Martin Dibelius, pourtant traduit en anglais en 1953, qui comprenait déjà la mission paulinienne comme une entreprise déterminée par la conviction de l'imminence eschatologique, n'est pas mentionné ; l'interprétation possible de la collecte à la lumière du pèlerinage eschatologique des nations à Jérusalem n'est pas évoquée. 11 n'en demeure pas moins que l'on a affaire à une synthèse aussi brillante que claire. Ch. Grappe Soeng Yu Li, Paul's Teaching on the Pneumatika in 1 Corinthians 12-14. Prophecy as the Paradigm of ta Charismata ta Meizona for the Future-Oriented Ekklësia, Tubingen, Mohr Siebeck, 2017, XX + 543 pages (Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament. 2. Reihe 455), ISBN 978-3-16-155146-8, 139 €. Version légèrement révisée d'une thèse préparée sous la direction de Reimund Bieringer et soutenue à la Faculté de Théologie et de Sciences religieuses de l'Université catholique de Leuven, l'ouvrage se présente en quatre grandes parties. La première a pour but d'établir si, en 1 Co 12-14, Paul utilise le substantif charisma au sens général ou bien comme un terme technique. Pour ce faire, l'A. étudie l'usage du terme d'abord en dehors du Nou¬ veau Testament puis en son sein, en abordant les diverses occurrences
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néotestamentaires, hormis celles que l'on trouve en 1 Co 12, dans l'ordre chronologique et en accordant une attention plus particulière à 1 Co 1,7 et 7,7. Il montre que, dans tous les cas, c'est Dieu qui est le dispensateur du charisma et que, selon les passages, ce charisma peut être personnel ou communautaire et, ainsi, au bénéfice soit de l'individu soit du groupe lui-même. La deuxième partie s'interroge d'abord sur le genre de l'adjectif pneumatikôn en 1 Co 12,1 et conclut qu'il s'agit non pas d'un masculin, qui désignerait les pneumatiques, mais d'un neutre, qui s'applique aux dons spirituels. Elle se penche ensuite sur la relation sémantique entre les pneumatika et les charismata et, réfutant l'opinion selon laquelle il pour¬ rait s'agir d'une synonymie ou d'une hyponymie, conclut qu'il s'agit en fait d'une méronymie, les pneumatika englobant les charismata qui en sont une déclinaison, si bien que 1 Co 12-14 peut être conçu comme une véritable unité dans laquelle chaque élément est partie du tout. La troisième partie propose ensuite une exégèse de chacun des trois chapitres, étudiés l'un par rapport à l'autre de manière « méronique », en fonction des résultats atteints dans la deuxième partie. 1 Co 12 est compris comme un chapitre traitant de la façon dont Paul conçoit les pneumatika, et non pas les Corinthiens. Quant aux v. 4, 5 et 6, ils sont lus comme annonçant respectivement les développements que l'on trouve dans les V. 7-11, 12-27 et 28-30, les charismata désignant en fait des dons commu¬ nautaires dévolus au bon fonctionnement et à l'harmonie du groupe. Le V. 31 est compris, quant à lui, comme un verset de transition, les dons les meilleurs dont il est question étant ceux-là même dont il va être question en 1 Co 13, des dons que caractérise Vagapè, réalité eschatologique pré¬ sente en ce monde comme dans le monde à venir, et qui peuvent donc être partiellement réalisés dés maintenant dans un présent orienté vers le futur. L'étude de 1 Co 13 proprement dit fait apparaître que Vagapè est à la fois l'essence, le cœur et le mode de l'existence des pneumatiques, le terme pneumatika s'avérant finalement l'holonyme des trois vertus cardinales que sont la foi, l'espérance et l'amour. 1 Co 13,13 est conçu à son tour comme un verset de transition qui vient manifester que la compréhension du chap. 14 est indissociable de celle des deux chapitres précédents. L'analyse de ce chap. 14 fait apparaître qu'il traite de Vekklèsia en cours d'édification dans une dynamique eschatologique et au sein d'un présent tout orienté vers le futur. Paul y illustre les pneumatika à travers deux exemples, la prophétie et la glossolalie, la première étant préférée à la seconde parce qu'elle possède, quant à elle, les caractéristiques des dons les meilleurs. Le chapitre lui-même est découpé en fonction d'une partie discursive (v. 1-25), destinée à montrer pourquoi la prophétie doit être préférée à la glossolalie, d'une section normative (v. 26-35), ayant vocation à réguler le fonctionnement de Vekklèsia pour qu'il soit optimal - inter¬ prétation de la glossolalie (v. 26-28) ; prophétie délivrée dans l'ordre pour que prévale la paix et non le désordre (v. 29-33a) ; avertissement adressé aux femmes en fonction d'un problême conjoncturel impossible à préciser mais qui devait, pour Paul, menacer gravement l'édification communautaire (v. 33b-35) -, et d'une conclusion générale (v. 36-40) qui
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se décline sous la forme d'une double exhortation, la première destinée à valider tout ce qui a été dit depuis 12,1 (v. 36-38), la seconde revenant sur le contenu même du chap. 14. Un dernier chapitre revient notamment sur la structure générale des trois chapitres et sur la nature des pneumatika, holonyme désignant « tous les aspects et toutes les caractéristiques (méro- nymes) des pneumatiques qui leur permet d'assumer les tâches (ou services) qui leur sont assignés au sein du corps du Christ afin de contri¬ buer à l'édification de la communauté dans le présent orienté vers le futur » (p. 398). Une dernière partie est consacrée à la prophétie en tant que para¬ digme des dons les meilleurs en 1 Go 12-14, les chap. 12-13 et 14 étant étudiés successivement d'une manière qui rassemble les fruits des parties antérieures. L'ensemble s'avère d'une remarquable cohérence ; la progression est claire et convaincante à la fois. On se réjouit que l'A. ait travaillé indif¬ féremment sur des ouvrages en anglais, en allemand et en français et qu'elle ait fait notamment une large place aux travaux de Max-Alain Chevallier sur la question. Ch. Grappe Christoph Heilig, Pauls Triumph. Reassessing 2 Corinthians 2:14 in Its Literary and Historical Context, Leuven - Paris - Bristol, Peeters, 2017, XV + 338 pages (Biblical Tools and Studies 27), ISBN 978-90- 429-3392-7, 86 €. L'ouvrage se propose d'étudier à frais nouveau 2 Co 2,14, passage dans lequel l'imagerie à laquelle recourt Paul en affirmant que Dieu, « par le Christ, nous emmène en tout temps dans son triomphe et [...], par nous, répand en tout lieu le parfum de la connaissance » (traduction TOB), fait l'objet depuis longtemps de rapprochements avec la cérémonie du triomphe romain, à l'occasion de laquelle un général vainqueur para¬ dait dans Rome à la tète de ses troupes. L'introduction précise l'objet de la recherche et montre tout l'enjeu qui est le sien pour ce qui est de l'étude des rapports entre Paul et l'Empire. Elle présente encore des questions méthodologiques en lien avec la sémantique et la linguistique et fait état des différentes options relatives à l'interprétation du verbe thriambeuein, qui a précisément trait à la cérémonie du triomphe et qui, s'il est a priori intransitif, peut aussi faire l'objet d'emplois transitifs, comme c'est le cas ici. L'A. rappelle ensuite que certains, à la suite de Hafemann, considèrent qu'emmener dans le triomphe signifie en fait emmener à la mort, si bien que Paul ferait allusion aux souffrances qu'il encourt, par fidélité au Christ et à Dieu, dans son propre ministère, alors que d'autres, suivant en cela une proposition de Breytenbach, pensent qu'en fait le triomphe ferait allusion au ministère de Paul sans qu'il soit nécessairement question de lui en tant que captif ou objet de rejet.
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Ces différentes options sont ensuite évaluées à l'aune même de 2 Co 2,14 à partir de critères externes - la connaissance que pouvait avoir Paul du triomphe romain ou de processions païennes - et de critères internes - le contexte large du passage ; la transition qui s'opère entre 2,12-13 et 2,14a ; la relation entre 2,14b et 2,14c-15. Suit une évaluation des possibilités d'interprétation, du verbe d'abord, puis des éléments qui viennent le compléter (pronom, adverbe, complément). L'A. conclut que le passage n'est pas d'abord dirigé contre l'impé¬ rialisme romain mais que Paul emprunte à l'imagerie du triomphe romain pour évoquer son propre apostolat en relation avec Dieu et avec le Christ. La façon dont il s'exprime présuppose en fait le caractère glorieux du triomphe romain et le transpose en vue de l'évocation de son propre ministère. Cette évocation pourrait elle-même être duelle et refléter, d'une part et au premier degré, les souffrances endurées par Paul et ses collaborateurs dans leur ministère et, d'autre part, dans une perspective transformatrice, le fait que les captifs sont en fait associés par Dieu à sa procession triomphale et appelés à lui rendre gloire. Une étude minutieuse et fine, complétée par six planches et d'utiles index, mais qui aurait pu gagner à accompagner davantage le lecteur pour qu'il puisse plus facilement se repérer. Ch. Grappe Philip Church, Hebrews and the Temple. Attitudes to the Temple in Second Temple Judaism and in Hebrews., Leiden - Boston, Brill, 2017, XVIII+ 615 pages (Supplements to Novum Testamentum 171), ISBN 978-90-04-33950-7, 140 €. Version revue et abrégée d'une thèse préparée sous la double direction de James Harding et de Chris Marshall, respectivement à l'Université d'Otago et à l'Université Victoria de Wellington, l'ouvrage défend la thèse problématique, affichée d'emblée (p. 1) et reprise en conclusion, selon laquelle « en Hébreux le Temple céleste n'est pas un archétype céleste éternel dont le tabernacle du désert est une copie ». 11 veut en fait que ce soit l'inverse puisque, pour lui, « le tabernacle du désert, le Temple de Salomon et le Second Temple encore debout à Jérusalem - il situe en fait la rédaction d'He avant la ruine du Temple (p. 14-16) - préfiguraient le Temple céleste qui doit être conçu comme l'habitation eschatologique de Dieu avec son peuple » (p. 433). Cette thèse, qui fait fi de la réception d'Ex 25,40 au sein du judaïsme telle qu'elle est attestée notamment par Sg 9,8, passage dont TA. tord le sens obvie (p. 55-59), imprègne tout l'ouvrage et en réduit, de notre point de vue, la portée. Elle l'amène à considérer en fait que, dans nombre de textes, il n'y a pas de distinction entre Temple terrestre et Temple céleste mais que, dans les uns, le Temple terrestre est le ciel sur terre et que, dans les autres, le véritable sanctuaire est céleste mais que ses frontières sont élargies au point qu'il englobe le peuple de Dieu sur terre (p. 186).
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Cela étant dit, ΓΑ. procède en deux parties. Il passe d'abord en revue les attitudes à l'endroit du Temple de Jérusalem dans le judaïsme du Second Temple en distinguant des textes dans lesquels le Temple est reconnu et perçu positivement, des textes dans lesquels il est rejeté (manuscrits de la mer Morte), d'autres dans lesquels il est contesté et d'autres enfin dans lequel il est détruit. Dans les deux derniers cas, il estime que la réaction à la contestation ou à la destruction s'exprime dans le développement d'un symbolisme du Temple, que ce dernier reflète l'insatisfaction vis-à-vis de l'institution ou la réaction à sa perte. Au passage, certains textes sont interprétés d'une manière que Ton pourra trouver contestable. C'est ainsi, pour prendre quelques exemples, que Testament de Lévi 3,1-8 est lu comme présentant un sanctuaire céleste qui rejoint la terre, alors même que Lévi est censé accéder audit sanctuaire par une ascension à travers les sept cieux, que le Livre des Antiquités bibliques 26,13 est compris comme s'il y était question de la construction par Dieu d'un sanctuaire eschatologique, ce qui est pour le moins impro¬ bable, qu'Apocalypse d'Abraham 29,15 est interprété sans tenir compte du lien avec 19,15 et que d'autres passages, qui traitent de la Jérusalem eschatologique, sont annexés au profit du sanctuaire eschatologique (2 Baruch 6,9 ; 32,3). La deuxième partie a trait au symbolisme du Temple en Hébreux et défend la thèse selon laquelle « le dualisme en Hébreux est plus eschato¬ logique que spatial, les premiers sanctuaires et le culte qui leur est associé préfigurant le Temple eschatologique, venu maintenant avec l'exaltation du Christ à la droite de Dieu. Ce temple eschatologique n'est pas une structure, que ce soit au ciel ou sur la terre. C'est plutôt une métaphore de l'habitation eschatologique de Dieu avec son peuple » (p. 435). L'A. précise qu'il conçoit en fait que l'advenue du Temple eschatologique au moment de l'exaltation du Christ signifie que Veschaton est arrivé à ce moment-là et doit encourager les lecteurs à persévérer. Outre que les notions de symboles et de métaphores sont employées de façon interchangeable et sans que Ton sache vraiment à quoi elles peuvent correspondre, nous avons du mal à percevoir comment pareille lecture peut rendre compte des données incluses en Hébreux, à commencer d'ailleurs par He 9,23 qui suppose clairement un raisonnement à deux niveaux, terrestre et céleste, qui se superposent. Cela étant, l'ouvrage est très soigneusement édité, pourvu d'une impressionnante bibliographie (75 pages, ce qui n'empêche cependant pas que Knut Backhaus soit ignoré) et d'abondants index (thématique et des auteurs modernes et anciens cités). Ch. Grappe
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Benjamin J. Ribbens, Levitical Sacrifice and Heavenly Cult in Hebrews, Berlin - Boston, Walter de Gruyter, 2016, XVII+ 297 pages (Beihefte zur Zeitschrift fur die neutestamentliche Wissenschaft 222), ISBN 978- 3-11-047581-4, 99,95 €. Version actualisée d'une thèse préparée sous la direction de Douglas Moo et soutenue au Wheaton College (Massachusetts) en 2013, l'ouvrage se propose d'étudier la relation unissant, en Hébreux, sacrifices de l'ancienne alliance et sacrifice du Christ scellant la nouvelle alliance, avec une accentuation plus particulière sur leur efficacité respective et sur fond de la place assignée au culte céleste dans le judaïsme du Second Temple et en Hébreux. Il est construit sous la forme d'une grande inclusion puisque le chapitre conclusif revient sur toutes les tensions et les différents enjeux qu'avait mis en évidence l'introduction. Entretemps, l'étude se concentre d'abord sur le judaïsme du Second Temple et sur les théologies du sacrifice et la place croissante faite au culte céleste en son sein. Pour ce qui est des théologies du sacrifice, l'A. fait valoir que tous les textes en notre possession s'accordent sur l'importance et la nécessité d'accomplir les sacrifices lévitiques selon la volonté de Dieu, même quand une distance est prise, comme à Qumrân, par rapport à l'institution du Temple parce qu'elle est disqualifiée. Il estime que les sacrifices ont vocation à procurer expiation, pardon et purification et, finalement, à restaurer la relation avec Dieu, et que l'auteur et les destinataires d'Hébreux devaient partager cette appréciation et cette compréhension globale du système sacrificiel. Pour ce qui est du Temple et du culte céleste, il observe fort juste¬ ment qu'il en est question dans différents textes, qu'il qualifie de mystiques, en tant que modèle de leurs homologues terrestres dont ils viennent valider l'existence et le fonctionnement, sous l'influence d'Ex 25,9.40. E'A. passe ensuite à l'étude d'Hébreux. Il étudie d'abord la place qui y est dévolue au Temple et au culte célestes. Partant du fait que le Christ, être céleste lui-même, officie dans le sanctuaire céleste et que la fonction du culte céleste était précisément de valider le culte terrestre, il fait valoir que le culte terrestre ne saurait être conçu comme disqualifié ou rejeté en tant que tel en Hébreux. Pour lui, les choses peuvent être comprises ainsi. E'auteur d'Hébreux ne parle pas d'un culte céleste éternel, mais envisage en fait un culte céleste qui n'a lieu qu'une fois pour toutes. Tant que ce sacrifice céleste du Christ n'a pas eu lieu, le culte terrestre a une valeur anticipatrice, à la fois pro¬ phétique et pédagogique - c'est en ce sens qu'il comprend He 8,5 où est cité Ex 25,40 - ; dés lors que le sacrifice du Christ a eu lieu, il n'a plus de raison d'être. E'A. se penche ensuite sur la façon dont Hébreux considère les sacri¬ fices de l'ancienne alliance. Il estime que ces sacrifices sont évalués en
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fait de manière ambivalente. D'une part, Hébreux reconnaît leur bien-fondé (8,4 ; 10,8) et qu'ils ont pu avoir des effets positifs, mais, d'autre part, et dès lors qu'ils ne pouvaient être efficaces en eux-mêmes, l'écrit fait valoir que cette efficacité ne pouvait être que proleptique, l'expiation, la purification de la conscience et, plus encore, l'accès à Dieu, à la per¬ fection et à la rédemption n'advenant qu'avec le sacrifice céleste, unique et définitif du Christ. Le dernier chapitre, qui est en fait le corollaire du précédent, pro¬ pose, de manière positive, que le sacrifice de la nouvelle alliance procure expiation, pardon, purification, sanctification, rédemption, élimination du péché et purification de la conscience. Dans sa conclusion, l'A. revient, comme nous l'avons indiqué déjà, sur les tensions et les enjeux présentés dans l'introduction. 11 estime qu'Hébreux ne saurait réinterpréter la Septante de manière malicieuse et que sa théologie du sacrifice n'est en rien contradictoire, mais pleinement cohérente, dès lors que les sacrifices de l'ancienne alliance sont conçus, dans une tension féconde entre culte terrestre et culte céleste, comme des types sacramentels et christologiques. L'ensemble s'avère plutôt convaincant et présente le mérite de bien rendre compte du fait que le jeu entre ancienne et nouvelle alliance et culte ancien et culte nouveau en Hébreux ne saurait être conçu en termes d'opposition, mais de continuité et de tension féconde, ce que laisse déjà apparaître le motif du Dieu qui parle dans l'entame de l'écrit. Ch. Grappe Bryan R. Dyer, Suffering in the Face of Death. The Epistle to the Hebrews and Its Context of Situation, London, Bloomsbury, 2017, Xlll + 209 pages (Library of New Testament Studies 568), ISBN 978-0-567-67235-3, £ 85. Version révisée d'une thèse préparée sous la direction de Cynthia Long Westfall et de Stanley Porter au McMaster Divinity College (Canada), l'ouvrage se propose d'étudier deux motifs présents en Hébreux et qui n'avaient pas jusque-là fait l'objet d'une monographie : la souffrance et la mort. Le premier chapitre dresse un état de la recherche car des articles ont tout de même été consacrés au thème, parmi lesquels celui de Jean Costé, paru en 1955 et qui fait l'objet d'une attention particulière. Le deuxième chapitre s'emploie à démêler la question complexe de la situation à laquelle Hébreux tente de répondre. L'A. reste très prudente. Elle n'exclut aucune des principales hypothèses avancées jusque-là dans la recherche, estimant que chacune peut contenir une part de vérité et qu'aucune ne la détient tout entière. Elle tient cependant pour avéré le fait que les destinataires sont éprouvés par la souffrance et peuvent craindre la mort, et que les passages qui traitent de ces thèmes visent donc une réalité qui les concerne.
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Pour mieux appréhender cette réalité à travers les passages qui en parlent, ΓΑ. s'emploie ensuite à construire, sur le plan méthodologique, un modèle pouvant permettre de passer du texte à son contexte. Ce modèle articule la théorie des domaines sémantiques (Louw - Nida), les travaux du linguiste M. A. K. Halliday et la linguistique systémique fonc¬ tionnelle. 11 consiste à procéder en trois étapes : identifier le vocabulaire et les passages topiques, cela en recourant à la théorie des domaines sémantiques qui doit permettre de repérer les passages où des réseaux sémantiques afférant à la souffrance et à la mort apparaissent ; examiner chaque occurrence du vocabulaire relatif à la souffrance et à la mort en vue de comprendre la manière dont il est utilisé par l'auteur ; passer par tous les modes de détermination d'un contexte social pour échafauder et tester une hypothèse relative au langage afférant à la souffrance et à la mort. Le chapitre 4 est dévolu aux deux premières étapes, soit au repérage et à l'examen des passages topiques. Au terme de cet examen, l'A. relève notamment que l'auteur d'Hébreux offre une espérance en une vie eseha- tologique par-delà la mort physique et une récompense pour le croyant à la lumière de l'œuvre du Christ alors qu'il fait valoir que, à l'inverse, la désobéissance, qui consiste à se détourner du Dieu vivant (3,12), vaut la punition eschatologique. Plus original apparaît le fait que les motifs de la souffrance et de la mort sont fréquemment associés au thème de la filiation. Le chapitre 5 est consacré à la détection d'indices en vue de la détermination d'un contexte social à partir de la prise en compte du vocabulaire associé à la souffrance et à la mort. Pour l'A., les données recueillies permettent de montrer que l'auteur d'Hébreux accorde une grande importance (prominence) à ces deux motifs particulièrement pré¬ sents en 2,5-18, 10,32-39 et 12,1-14, et que la place prise par ailleurs par l'eschatologie, la persévérance dans la foi et la christologie du grand prêtre dans son discours se trouve en cohérence (coherence) avec l'hypothèse selon laquelle les destinataires étaient exposés à la souffrance et pouvaient craindre pour leur vie. Le sixième chapitre s'attelle à détecter, au fil d'Hébreux, des exempla qui peuvent se comprendre en réponse à un contexte de souffrance et de menaces de mort. L'A. en trouve de trois types, corrélés respectivement à l'histoire d'Israël (de manière récurrente au chapitre 11), au vécu de la communauté (6,9-12 ; 10,32-39 ; 13,7) et à la destinée du Christ (2,9 ; 5,7-10 ; 12,2-3 ; 13,12-13). 11 aboutit au constat selon lequel, à travers ces exemples, l'auteur offre une espérance par-delà la mort, un honneur au milieu de l'opprobre et un modèle de conduite en temps de conflit. Dans sa conclusion, l'A. revient notamment sur la manière dont s'articulent les motifs de la filiation et de la souffrance, incitant les fils à s'en tenir au Fils, lui-même assujetti à la souffrance, pour avoir part à sa destinée glorieuse. Sans parvenir à des résultats renversants, cette belle étude se recom¬ mande par sa rigueur et par la méthode mise en œuvre pour explorer deux motifs majeurs d'Hébreux avec autant de sérieux que de finesse. Ch. Grappe
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David Hellolm, Dieter Sanger (éd.), The Eucharist, Its Origins and Contexts. Sacred Meal, Communal Meal, Table Fellowship in Late Antiquity, Early Judaism, and Early Christianity. Volume I. Old Testament, Early Judaism, New Testament. Volume 11. Patristic Traditions, Iconography. Volume 111. Near Eastern and Graeco-Roman Traditions, Archeology, Tubingen, Mohr Siebeck, 2017, XXXV + 769 pages + pages 771-1374 + pages 1375-2199 (Wissenschafliche Untersuchungen zum Neuen Testa¬ ment 376), ISBN 978-3-16-153918-3, 289 €. Fruit d'une collaboration internationale ayant donné lieu à deux col¬ loques qui se sont tenus respectivement à Kiel en 2012 et Metochi, sur Tîle de Lesbos, en 2013, le présent volume rassemble pas moins de 76 contri¬ butions qui couvrent des champs très divers (histoire des religions, égypto- logie. Antiquité classique, histoire ancienne, Ancien et Nouveau Testament, judaïsme, patristique, archéologie, histoire de Tart) et qui émanent de spécialistes de tous horizons, mais surtout d'Allemagne (26) et de pays nordiques (25), avec pour objectif d'éclairer au mieux les contextes cultu¬ rels et religieux dans lesquels a émergé l'eucharistie et de comprendre les évolutions qu'elle a pu connaître à l'époque des Pérès de l'Église. 11 est bien entendu impossible de rendre en compte en détail d'un projet et d'une réalisation si vaste, mais énumérer les titres ou la thématique des diverses contributions et en présenter très brièvement quelques-unes pourra, nous l'espérons, donner un aperçu de la richesse de l'ensemble. Commençons par le premier volume. Fort de son point de vue de systématicien familier de l'exégèse du Nouveau Testament, U. Kortner offre une introduction à l'ensemble inti¬ tulée « Le repas du Seigneur, les repas communautaires et la commensalité au sein du christianisme. Origines, contextes, signification et pratique au cours de l'histoire et aujourd'hui d'un point de vue systématique et théo¬ logique ». Cette introduction remarquable jette un regard synthétique sur le volume en évoquant les diverses contributions en fonction de grandes thématiques, sans tenir compte de leur ordre séquentiel dans la publi¬ cation, que nous suivrons pour notre part ici. Le parcours commence avec l'Ancien Testament, illustré par P. Altmannn (« Repas sacrés et fêtes dans la Bible hébraïque et son environnement : un coffre aux trésors pour la pratique et la réflexion chrétienne primitive ») et par G. Eidevall (« De la communauté de table à la terreur : transformations du zebah dans la Bible hébraïque »). On passe ensuite au judaïsme ancien avec des contributions de H. Lichtenberger (« L'alimentation juive : regards d'étrangers et auto¬ définition »), C. Wassén (« Repas communautaires qumrâniens, avec une attention particulière pour les règles de pureté »), J. Frey (« Les témoi¬ gnages relatifs aux repas communautaires en provenance de Qumrân »), J. Magness (« Des sacrifices étaient-ils offerts à Qumrân ? Les dépôts d'ossements animaux reconsidérés»), N. Jacobs («Avoir les yeux plus gros que le ventre : nourriture, alimentation et intégration culturelle dans le livre de Tobit et dans la Lettre d'Aristée »), D. Sanger (« Pain de vie,
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coupe d'immortalité : de l'usage de la nourriture en Joseph et Aséneth »), K. M. Hartvigsen (« La formule de repas, le rayon de miel et la transformation d'Aséneth »), J. Leonhardt-Balzer (« La fonction du repas pour la communauté chez Philon et Josèphe »). Vient le tour du Nouveau Testament, très largement représenté : C. Leonhard (« Pâque et eucharistie ») ; J. Kelhoffer (« Jean le Baptiste en tant que personne s'abstenant de la communauté de table et Jésus en tant que glouton : la (non-) participation aux repas comme moyen de gagner un capital social qui peut confirmer ou compromettre le standing d'une personne au sein de la société ») ; J. Âdna (« Les repas et les compagnons de table de Jésus »), qui conçoit la commensalité de Jésus comme anti¬ cipation de la plénitude du Royaume ; J. Holmstrand (« Les fonctions des récits dans lesquels Jésus nourrit les foules dans la littérature chrétienne primitive », en fait dans les quatre évangiles) ; J. et K. Blomqvist (« La terminologie de l'eucharistie dans la littérature chrétienne primitive : aspects philologiques et sémantiques ») ; S. Byrskog (« Le repas et le Temple : examen des implications du dernier repas en matière de critique du culte ») ; K. O. Sandnes (« Le dernier repas selon Marc et Matthieu : comparaison et interprétation ») ; Th. Kazen (« Interprétation sacrificielle au sein des récits du dernier repas de Jésus ») ; E. E. Popkes (« La pré¬ sence cachée de Jésus : allusions aux traditions eucharistiques en Le 24 et dans les écrits johanniques ») ; D. Marguerat (« Repas et ethos commu¬ nautaire dans les Actes des Apôtres ») ; R Mûller (« "Ne discutez pas des opinions" : Romains 14,1-15,7 ») ; R Duff (« Seuls ensemble : célébrer le repas du Seigneur à Corinthe [1 Co 11,17-34] ») ; M. Winninge (« Le repas du Seigneur en 1 Co 11 et en Le 22 : traditions et développe¬ ment ») ; E. John (« Galates 2,11-21 : une crise mettant en jeu le rite et l'identité ») ; H. Lôhr (« Des repas communautaires au repas-communauté : réflexions sur le caractère sacramentel du repas du Seigneur chez Paul ») ; T. Vegge (« Les repas dans le contexte des lettres pauliniennes et de la lettre de Jude »), H. Ulfgard («Avoir part au divin dans l'Apocalypse : les repas en tant que métaphore - Concepts et contextes ») ; L. Bormann (« La cène : perspectives en lien avec l'anthropologie culturelle, les sciences cognitives et l'étude des rites ») ; H.-U. Weidemann (« De l'eau au pain : le lien du baptême et du repas dans les textes du Nouveau Testament », contribution consacrée à l'émergence des eucharisties baptismales). Le deuxième volume est tout entier consacré aux traditions patristiques, en dehors de la dernière contribution, très développée (78 pages) et enrichie par pas moins de 100 illustrations qui sont placées à la fin du troisième volume et dont près de la moitié sont en couleur, qui traite le dossier iconographique (U. Kuder, « L'eucharistie dans l'art figuré du début du llf siècle au vif siècle »). Les études rassemblées sont les suivantes : G. Rouwhorst (« Célébrations eucharistiques chrétiennes pri¬ mitives : le développement des lignes de tradition orientales et occiden¬ tales ») ; R. Staats (« L'interdit du sang dans le décret apostolique et l'histoire de ses effets ») ; C. Moss (« Les banquets funéraires chrétiens et les cultes de martyrs ») ; A. McGowan (« La fête en tant que jeûne : ascétisme et pratique chrétienne ancienne ») ; D.-A. Koch (« Déroulement
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et compréhension de l'eucharistie dans \3.Didachè ») ; L. Wehr (« L'eucha¬ ristie dans les lettres d'Ignace d'Antioche ») ; A. Lindemann (« La célé¬ bration du repas eucharistique chez Justin et Irénée ») ; 0. Norderval (« L'eucharistie chez Tertullien et Cyprien ») ; A. Ekenberg (« L'eucha¬ ristie dans les anciens règlements ecclésiastiques ») ; G. af Hâllstrom (« Un repas spirituel pour un peuple spirituel : l'eucharistie dans la théo¬ logie de Clément et d'Origéne d'Alexandrie ») ; J. Verheyden (« Manger avec les apôtres : eucharistie et communauté de table dans les Actes apocryphes des Apôtres - Le témoignage des Actes de Jean et des Actes de Thomas ») ; J. Wehnert (« Repas et communauté de table dans les Pseudoclémentines ») ; M. Lattke (« Institution et déroulement de la fête de la Pâque chrétienne chez Aphraate »), étude pourvue de tableaux comparatifs très intéressants avec les textes juifs et néotestamentaires ; K. den Biesen (« Une goutte de salut : Ephrem le Syrien et l'eucharistie ») ; J. Day (« Ε'eucharistie à Jérusalem : un rapide survol de quelques pro¬ blèmes posés par les prières eucharistiques [de Cyrille de Jérusalem] et leur contenu ») ; L Ramelli (« E'eucharistie chez Grégoire de Nysse en tant que participation au corps du Christ : préparation de la restauration et de la theôsis ») ; R. Brandie (« Eucharistie et vie chrétienne chez Jean Chrysostome et Théodore de Mopsueste ») ; A. Fitzgerald (« Eucharistie et culture chez Ambroise et Augustin »), H. Eundhaug (« Ea théologie eucharistique de Chenouté en contexte ») : A. Mûller (« Ees "mystères du Seigneur" chez Jean Damascène ») ; N.A. Pedersen («Repas sacrés et eucharistie dans les sources manichéennes : leur relation avec les tradi¬ tions chrétiennes »). Ee troisième volume contient les contributions dévolues aux tradi¬ tions proche-orientales et gréco-romaines ainsi qu'à l'archéologie, cela sans qu'un ordre strict soit observé. Se succèdent les contributions sui¬ vantes : A. Kucharek (« Profane - cultuel - funéraire : Contextes de repas dans l'Égypte ancienne ») ; G Ekroth (« Repas sacrés dans la Grèce ancienne ? Ee dîner dans le cadre familial en comparaison avec le repas dans les sanctuaires ») ; M. Ôhler (« Repas et actes de sacrifice dans les associations gréco-romaines : le repas du Seigneur chrétien primitif en contexte ») ; K. Usener (« Symposium et sexualité dans l'Antiquité grecque : banquet privé et symposium ») ; G Baudy (« Ee gâteau sacré dans les cultes attiques [Athènes et Eleusis] ») ; U. Egelhaaf-Gaiser (« ab avis ad mala : luxe de la table et sémantique des aliments au premier siècle avant notre ère ») ; E. Kâppel, « Ee banquet philosophique dans la littérature grecque ») ; J. Rupke (« Ees repas des prêtres romains ») ; K. Vôssing (« Banquets publics et banquets dans des lieux publics ») ; A. Bettenworth (« Ea rencontre de Dieu et des hommes dans l'épopée biblique de Sedulius »), R Ruggendorfer (« Ee repas en l'honneur des morts : banquets en contexte funéraire dans la Grèce et l'Asie Mineure antiques», avec II illustrations en fin de volume); N. Zimmermann (« Témoignages archéologiques de repas communautaires et cultuels de l'époque romaine : à l'exemple d'Ephèse », avec 14 illustrations en fin de volume) ; B. Domagalski (« Repas antiques dans les témoignages archéo¬ logiques », avec 21 illustrations en fin de volume) ; V. Blomqvist (« Ee
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repas cultuel païen dans la littérature chrétienne primitive ») ; J. Cook (« Réactions à l'eucharistie au sein du paganisme ») ; A. Hultgârd (« Repas en commun à caractère religieux dans la tradition iranienne et dans le monde romano-hellénistique ») ; Ch. Muller-Kessler (« Repas et rituels sacrés chez les mandéens », avec 2 illustrations en fin de volume) ; F. Graf (« Repas sacrés dans les cultes d'Isis et de Sérapis ») ; B. Eckhardt (« Manger et boire avec Dionysos » ; « Les repas dans les cultes de Cybèle et d'Attis ») ; H.-D. Betz (« Unique en comparaison : l'eucharistie et le culte de Mithra ») ; E. Thomassen (« L'eucharistie dans le valen- tinisme », contribution dont on peut se demander si elle n'aurait pas été mieux à sa place dans le deuxième volume, mêrne s'il est clair que Valentin ne peut être compté parmi les Pères de l'Église) ; D. Hellholm («Aliments d'immortalité dans la vie après la mort ; notions apocalyp¬ tiques et eschatologiques de la vie éternelle », étude comparative d'une très grande richesse qui vient offrir une magnifique conclusion à l'ensemble). Ce troisième tome est non seulement complété par les illustrations déjà mentionnées mais aussi par des index généraux des trois volumes (auteurs anciens et modernes cités, thématique [40 pages]). L'ensemble représente ainsi une somme d'une richesse et d'un intérêt considérables qui devra être consultée et prise en compte par quiconque s'intéresse à l'eucharistie dans quelque domaine de la théologie que ce soit. Ch. Grappe
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- Thème CLIL : 4046 -- RELIGION -- Christianisme -- Théologie
- ISBN : 978-2-406-09333-6
- EAN : 9782406093336
- ISSN : 2269-479X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09333-6.p.0121
- Mise en ligne : 23/04/2019
- Périodicité : Trimestrielle
- Langue : Français