Résumés et présentations des auteurs
- Publication type: Journal article
- Journal: Revue d’études proustiennes
2016 – 2, n° 4. Proust au temps du cinématographe : un écrivain face aux médias - Pages: 359 to 364
- Journal: Journal of Proustian Studies
Journal article: Previous 23/23
Résumés et présentations
des auteurs
Jean-Pierre Sirois-Trahan, « Un spectre passa… Marcel Proust retrouvé »
Jean-Pierre Sirois-Trahan est professeur de cinéma au département des littératures de l’université Laval depuis 2003. Il a codirigé l’ouvrage Le Montage des identités (Laval, 2008) et a codirigé plusieurs numéros de revue. Théoricien et historien, il travaille sur le découpage et le cinéma de Georges Méliès dont il a établi l’autobiographie : La Vie et l’œuvre d’un pionnier du cinéma (Paris, 2012).
Dans un film de la famille Greffulhe daté de 1904, réalisé à l’occasion du mariage d’Armand de Guiche, un ami cher à Marcel Proust, et d’Elaine Greffulhe, la fille du comte Henry Greffulhe, on nous fait admirer l’aristocratie du faubourg Saint-Germain. Nous sommes dans le monde des Guermantes, univers fait d’apparat et de richesse. Un homme, à l’accoutrement original, dévale le tapis rouge. Ce texte montre que ce spectre n’est autre que Proust et qu’il s’agit du premier film dans lequel on le voit apparaître.
In a film from the Greffulhe family dating from 1904, created on the occasion of the marriage of Armand de Guiche, a close friend of Marcel Proust, and Elaine Greffulhe, the daughter of the Count Henry Greffulhe, we are led to admire the aristocracy of the Saint-Germain district. We are in the world of the Guermantes, a realm of pomp and wealth. A man in an original outfit moves down the red carpet. This text shows that this specter is none other than Proust and this film is the first in which he appears.
Patrick Désile, « Figures, figurants, figurines »
Patrick Désile est docteur en arts et sciences de l’art de l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et chercheur associé au CNRS. Ses travaux portent sur l’histoire des images et des spectacles aux xviiie et xixe siècles, et sur l’émergence du cinéma. Sur ces questions, il anime, à l’Institut national d’histoire de l’art, un séminaire de recherche (en 2016-2017, « Littérature et spectacles de curiosité »).
360À partir d’une confrontation entre le diorama La Grande Semaine – représentation, par les dessinateurs Sem et Roubille, des personnalités du Tout-Paris sous forme de figurines, dont l’exposition se conclut en 1910 par une conférence de Robert de Montesquiou – et À la recherche du temps perdu, ce texte révèle la présence, dans l’œuvre de Proust, d’une part d’une culture ordinaire de l’effigie (caricatures, statuettes, découpures, marionnettes, théâtre d’ombres) et d’autre part du dispositif panoramique.
Based on a comparison of the diorama of La Grande Semaine—a depiction by the designers Sem and Roubille of characters from Parisian high society as figurines, an exposition that ends in 1910 with a lecture by Robert de Montesquiou—and À la recherche du temps perdu, this text reveals in Proust’s work the presence on the one hand of an everyday culture of representing people in the form of physical objects (caricatures, statuettes, cut-outs, marionettes, shadow theater), and the panoramic apparatus on the other hand.
Giusy Pisano, « À l’écoute de À la recherche du temps perdu. Bruits, sons et voix dans le roman proustien »
Giusy Pisano est professeure à l’ENS Louis-Lumière, Associate Professor, au Center of Korean History, directrice de recherche à l’université Sorbonne nouvelle – Paris 3 et membre de l’IRCAV. Elle a publié de nombreux ouvrages, dont Une archéologie du cinéma sonore (Paris, 2004). Actuellement elle codirige avec Jean-Marc Larrue le projet international « Les arts trompeurs. Machines, magie, médias ».
Les références très importantes à la peinture, à la photographie, aux boîtes d’optique et aux spectacles visuels ont souvent été soulignées. Néanmoins, le héros de À la recherche du temps perdu considère les images reproduites comme un instrument utilitaire destiné à nourrir la mémoire volontaire. Ce texte étudie les bruits du dehors entendus de l’intérieur, les voix-corps en contrepoint aux voix-chorales et la mémoire des sons mécaniques permettant d’accéder à la mémoire involontaire, si chère au narrateur.
The extremely important references to painting, photography, optical boxes, and visual spectacles have often been underscored. Nevertheless, the hero of À la recherche du temps perdu considers reproduced images as a utilitarian instrument intended to stimulate voluntary memory. This text studies the external noises heard within, the body-voices in counterpoint to choral-voices, and the memory of mechanical sounds that make it possible to access the involuntary memory that is so precious to the narrator.
361Frank Kessler, « Changements à vue. Proust et la féerie »
Frank Kessler est professeur en histoire des médias à l’université d’Utrecht où il dirige en ce moment l’Instituut voor Cultuurwetenschappelijk Onderzoek (ICON). Ancien président de DOMITOR et cofondateur avec Sabine Lenk et Martin Loiperdinger de KINtop. Jahrbuch zur Erforschung des frühen Films, ses travaux portent notamment sur le cinéma des débuts. Il a publié un ouvrage qui s’intitule Mise en scène (Utrecht, 2014).
Cette contribution étudie la manière dont le personnage de la fée ainsi que le spectacle de la féerie théâtrale apparaissent dans la Recherche de Proust. Évoquant non seulement le monde des contes fantastiques, mais beaucoup plus encore une réalité féerique dont les apparences peuvent changer à tout moment grâce à des artifices, la féerie devient un point de référence important pour Proust afin de décrire les caractéristiques du monde social qui l’entoure.
This contribution studies the way the character of the fairy as well as the spectacle of a theatrical fairyland appear in Proust’s Recherche. Evoking not only the world of fantastic stories, but also, even more so, an otherworldly reality whose appearances can change by artifice at any moment, fairyland becomes an important reference point for Proust as he attempts to describe the characteristics of the social world that surrounds him.
Stéphane Tralongo, « Du côté de Cythère. Le “demi-monde” des actrices de Marcel Proust »
Stéphane Tralongo est premier assistant à la section d’histoire et esthétique du cinéma de l’université de Lausanne. Membre affilié du GRAFICS, il a publié plusieurs recherches sur l’émergence du cinéma dans le contexte du spectacle de scène. Parmi ses travaux récents mettant en relation littérature et spectacle, il a rédigé un article intitulé « Des passages aux cinémas. Le music-hall comme espace de mobilité ».
Cette étude suggère de relier les personnages de demi-mondaines qui peuplent la Recherche à ces courtisanes que l’on surnommait au début du xxe siècle les « théâtreuses ». En suivant les trajectoires de femmes galantes, la contribution démontre une connexité entre music-hall et demi-monde que viennent appuyer les figures d’Odette et de Rachel. Une fois ces liens établis, il s’agit de saisir une hybridité entre prostitution et spectacle qui va de l’architecture des salles jusqu’aux attractions qu’on y présente.
362This study suggests connecting the disreputable female characters who populate Recherche with those prostitutes who were called, at the beginning of the twentieth century, théâtreuses. By following the trajectories of courtesans, this contribution shows a connection between the music hall and the demi-monde, with evidence provided by the figures of Odette and Rachel. Once these links are established, we can grasp a hybrid form combining prostitution and spectacle that stretches from the architecture of venues all the way to the attractions that are being presented there.
Robert Lévesque, « Une heure n’est pas qu’une heure »
Robert Lévesque a été critique de cinéma et directeur des pages culturelles de Québec-Presse de 1971 à 1975, puis critique dramatique, chroniqueur littéraire et directeur des pages culturelles du quotidien Le Devoir de 1981 à 1996. Il a publié plusieurs essais dont Un siècle en pièces (Montréal, 2000), L’Allié de personne (Montréal, 2003), Déraillements (Montréal, 2011) et Digressions (Montréal, 2013).
Cet article s’attarde sur ce soir de septembre 1908 où, dans la salle de l’ancien casino du Grand-Hôtel de Cabourg, Marcel Proust assista à une séance de projection de vues animées avec un jeune ami de dix-neuf ans, Marcel Plantevignes. Dans ses mémoires, Plantevignes se rappelle cette lettre de Proust où il évoque « ce triste soir de septembre à Cabourg ». Proust assis sur une chaise droite assistait-il à ce qu’il qualifia de « guignol cinématographique » dans une lettre à ce jeune ami qui l’accompagnait ?
This article focuses on that evening in September 1908 when, in the viewing hall of the old casino of the Grand-Hotel in Cabourg, Marcel Proust attended a showing of moving pictures with a young, nineteen-year-old friend, Marcel Plantevignes. In his memoirs, Plantevignes recalls that letter from Proust where he mentions “that sad September evening in Cabourg.” Did Proust, seated in a straight-backed chair attend what he described as “cinematic Grand-Guignol” in a letter to this young friend who joined him?
Alain Carou, « “Cinéphobie” et “cinéphilie” dans les milieux littéraires de la Belle Époque »
Alain Carou est conservateur des collections d’images en mouvement de la Bibliothèque nationale de France. Chercheur sur l’histoire du cinéma des premiers temps, il a publié notamment Le Cinéma français et les écrivains : histoire d’une rencontre (1906-1914) (Paris, 2002) et Cinéma premiers crimes (Paris, 2015). Il a dirigé plusieurs numéros de la revue 1895 et de la Revue de la BNF.
363Le spectacle cinématographique, à ses débuts, n’est pas uniformément livré à l’hostilité ou à l’indifférence des gens de lettres. Avant 1912, il serait très hasardeux de qualifier un écrivain de « cinéphile » ou de « cinéphobe ». Que le cinéma soit perçu comme un spectacle forain lui attire la sympathie de lettrés. C’est son accession au statut de spectacle de masse qui lui fournit ses premiers adversaires. L’article souligne les ambivalences de la notion de « vision cinématographique » invoquée par Proust.
In its earliest days, cinema did not uniformly encounter hostility or indifference from people of letters. Before 1912, it would be quite risky to describe a writer as a “cinephile” or “cinephobe.” The perception that the cinema could be a sort of carnival sideshow attracts the sympathy of literary people. Its rise to the status of mass spectacle is what provides it with its first enemies. This article underscores the ambivalence of the notion of “cinematic vision” invoked by Proust.
Jean-Pierre Sirois-Trahan, « Le plus beau film du monde. Marcel Proust et le cinématographe »
En 1923, le critique d’art Paul Fierens, dans un hommage à l’écrivain, imagina les rapports analogues entre l’œuvre de Proust et le cinéma naissant. Cet article tente de cerner les rapports multiples entre l’écrivain et le cinématographe, des premiers temps de l’invention jusqu’à son avènement comme art pendant la Grande Guerre. À l’inverse d’idées reçues, le cinéma définit, en creux, l’un des projets de la Recherche. L’écrivain se trouve à être lui-même un personnage plongé dans l’histoire du cinéma.
In 1923, the art critic Paul Fierens, in an homage to the writer, evoked the analogies between Proust’s work and the nascent cinema. This article tries to capture the multiple relations that connect the writer and the cinema, from the earliest days of its invention until its emergence as an art during the Great War. Contrary to popular belief, the cinema implicitly defines one of the aims of the Recherche. The writer is himself a character immersed in the history of the cinema.
Thomas Carrier-Lafleur et Guillaume Lavoie, « Les dispositifs retrouvés. Images et objets techniques dans Le Temps retrouvé de Raoul Ruiz »
Thomas Carrier-Lafleur est stagiaire postdoctoral et chargé de cours au département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques de l’Université de Montréal. Il a publié Une Philosophie du « temps à l’état pur ». L’Autofiction chez Proust et Jutra 364(Québec, 2010). Il vient de publier son deuxième ouvrage L’œil cinématographique de Proust (Paris, 2015).
Guillaume Lavoie est doctorant en études cinématographiques et littéraires à l’université Laval. Il est l’auteur de plusieurs articles portant sur les adaptations cinématographiques de l’œuvre proustienne. Il est auxiliaire d’enseignement au département des littératures de l’université Laval et secrétaire de rédaction pour la revue sur le cinéma québécois Nouvelles Vues.
Délaissant le temps du cinématographe pour plonger dans celui propre au cinéma baroque de Raoul Ruiz, cet article s’intéresse à l’adaptation du Temps retrouvé qu’a proposée le réalisateur chilien en 1999. Afin de faire ressortir la manière par laquelle Ruiz transpose par des moyens proprement cinématographiques l’esthétique proustienne de l’omnitemporalité, l’étude s’intéresse à l’entremêlement des différents objets et dispositifs techniques qui accompagnent les révélations de Marcel dans son parcours initiatique.
Leaving behind the time of the cinematograph to plunge into the time peculiar to the baroque cinema of Raoul Ruiz, this article focuses on the adaptation of Le Temps retrouvé created by the Chilean director in 1999. In order to bring to light the way Ruiz uses specifically cinematic methods to transpose the Proustian aesthetic of omnitemporality, this study is interested in the mixture of different objects and technical devices that accompany Marcel’s revelations on his initiatory journey.
- CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN: 978-2-406-06802-0
- EAN: 9782406068020
- ISSN: 2430-8218
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06802-0.p.0359
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 01-20-2017
- Periodicity: Biannual
- Language: French