Glossaire
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Préludes à l’argumentation proustienne. Perspectives linguistiques et stylistiques
- Pages : 683 à 688
- Collection : Bibliothèque proustienne, n° 12
glossaire1
Analepse, prolepse (4) : En narratologie, l’analepse renvoie à ce qui précède et la prolepse (« anticipation ») annonce ce qui suit. L’analepse est le retour sur des événements antérieurs au récit en cours, alors que la prolepse annonce des évènements postérieurs.
Anaphore, cataphore (2, 3, 4) : L’anaphore consiste à reprendre un élément du texte par un autre élément. L’interprétation de l’élément anaphorique s’appuie sur un élément antérieur du texte (antécédent). Une expression anaphorique peut reprendre un segment précis du texte antérieur (anaphore segmentale), ou bien constituer le résumé d’un fragment du texte antérieur (anaphore résomptive, notamment avec cela), ou bien être en relation avec un élément du texte antérieur (anaphore associative, indirecte). Inversement, la cataphore consiste à annoncer un élément du texte par un autre élément. L’élément cataphorique représente un élément postérieur du texte.
Autonymie (2) : Emploi d’un signe linguistique en mention, dans un contexte métalinguistique, par opposition à l’emploi en usage, dans un contexte référentiel. Dans l’emploi en mention, le signe autonyme est l’objet du discours (Albertine est un prénom féminin / a 9 lettres), alors qu’il sert à référer à une entité dans son emploi en usage (Albertine est disparue).
Clivage (2, 3) : Extraction d’un constituant de la phrase, encadré par c’est… qui / que. Cette extraction, qui aboutit à une phrase clivée (anglais : cleft sentence), constitue une opération de focalisation de l’élément extrait.
Concession (2, 3, 4) : 1. Rhétorique. « Fait d’abandonner à son adversaire un point de discussion » (GRob 2013). « Figure consistant à accepter, sans perdre l’avantage, un argument ou une objection que l’on pourrait réfuter. « Par la Concession, on veut bien accorder quelque chose à son adversaire, pour en tirer ensuite un plus grand avantage » (P. Fontanier 1968 [1827], p. 415) » (TLFi). Dans une perspective polyphonique, le locuteur concède à un adversaire potentiel un argument qu’il ne prend pas à sa charge comme énonciateur. La concession constitue la première étape du distinguo (infra). 2. Grammaire. Relation de restriction ou d’opposition exprimée par un complément circonstanciel indiquant qu’un phénomène qui en entraîne normalement un autre n’a pas eu cet effet ou a eu un effet
contraire. Bien qu’Albertine ne le trompe pas, Marcel est jaloux. Cette relation s’exprime dans une phrase complexe qui comporte une subordonnée concessive. Celle-ci comporte une assertion dont la vérité n’est pas contestable. Mais sa relation causale avec la principale est inopérante ou refusée par le locuteur.
Connecteurs (1, 2, 3, 4) : Au sens large, les connecteurs servent à établir un lien entre deux fragments d’une phrase ou d’un texte, généralement des propositions ou des ensembles de propositions, sans être anaphoriques. Ils contribuent à l’organisation du texte en marquant des relations sémantico-logiques entre les fragments mis en relation. Les connecteurs peuvent être des adverbes, des groupes prépositionnels, des conjonctions, etc. On peut distinguer deux groupes de connecteurs : les connecteurs référentiels (spatiaux, temporels), qui ordonnent la réalité référentielle ; les connecteurs logiques qui marquent les articulations du raisonnement (argumentatifs, énumératifs, etc.). Au sens étroit, on réserve l’appellation de connecteurs aux termes de liaison entre des unités sémantiques d’un texte. Au sens large, le terme connecteur peut désigner tout terme marquant une relation logique entre des propositions, même à l’intérieur d’une phrase, notamment les conjonctions de subordination (parce que, puisque…).
Cotexte (2,3) : Environnement linguistique d’un mot, d’un groupe, d’une phrase, d’une séquence textuelle, par opposition au contexte extralinguistique, qui regroupe les différents éléments de la situation d’énonciation. (certains auteurs emploient aussi contexte pour cotexte).
Dislocation (2, 3, 4) : Une phrase disloquée comporte un terme qui se trouve au début ou à la fin d’une proposition complète dont il semble avoir été détaché, et qui est repris ou annoncé, à l’intérieur même de la proposition, par une expression coréférentielle, le plus souvent un pronom personnel (le port de Balbec, le héros l’a d’abord imaginé / le héros l’a d’abord imaginé, le port de Balbec).
Distinguo (1, 2, 3, 4) : Figure qui consiste à énoncer une distinction dans une argumentation et qui se décompose en deux parties : concedo (j’accorde) et nego (je nie) : Certes j’aurais pu me dire qu’à Paris, si Albertine avait ces goûts, elle trouverait bien d’autres personnes avec qui les assouvir. Mais chaque mouvement de jalousie est particulier et porte la marque de la créature qui l’a suscité.
Doxa (1) : Ensemble des opinions reçues sans discussion, comme une évidence naturelle, dans une civilisation donnée. Des doxas. Une doxa. → Doxique. (GRob 2013) « Chaque parler (chaque fiction) combat pour l’hégémonie. S’il a le pouvoir pour lui, il s’étend partout dans le courant et le quotidien de la vie sociale, il devient doxa, nature : c’est le parler prétendument apolitique des hommes politiques, des agents de l’État, c’est celui de la presse, de la radio, de la télévision, c’est celui de la conversation… » (R. Barthes, Le Plaisir du texte, p. 47).
Emphase (2, 3) : Forme de phrase (facultative) qui sert à mettre en relief un constituant de la phrase, au moyen
de deux procédés syntaxiques, la dislocation et l’extraction (infra et supra).
Énallage (3) : Figure qui consiste en l’emploi d’une forme grammaticale non appropriée. On relève principalement des énallages de personne (il pour je, par exemple) et de nombre (le singulier pour le pluriel, ou inversement). Exemple de Britannicus : Néron dit : « Néron est amoureux ». C’est un énallage de personne (la 3e pour la 1re personne).
Énonciation : Acte individuel de production d’un énoncé, destiné à un (ou plusieurs) allocutaire(s), dans une situation spatio-temporelle particulière. L’énoncé peut contenir des indices de l’énonciation : marques du locuteur et de l’allocutaire (je, tu…), marques de temps (maintenant) et de lieu (ici). O. Ducrot (1984) distingue l’énonciateur qui est responsable de l’acte de parole du locuteur, ou sujet parlant, être physique qui profère l’énoncé. Cette distinction est nécessaire en cas de polyphonie (infra).
Enthymème (3) : Syllogisme incomplet (une prémisse manque, ou la conclusion).
Ethos oratoire (1) : En rhétorique, impression que l’orateur donne de lui-même par ses propos (Perelmann, p. 429) (caractère ou « mœurs »), place assignée par le genre oratoire.
Extraction (2, 3) : voir clivage.
Focalisation (2, 3) : opération de création d’un focus, le plus souvent au moyen de l’emphase (c’est… qui / que) : c’est M. de Norpois qui a oublié ce chapeau.
Focus (2, 3) : élément le plus important de la phrase, élément saillant de l’information.
Hyperonyme / hyponyme (2, 3, 4) : Du point de vue de la sémantique lexicale, l’hyponymie est une relation hiérarchique entre deux termes : l’hyponyme est un terme subordonné et l’hyperonyme est un terme qui lui est super-ordonné, le sens du premier incluant celui du second : un cheval (hyponyme) est un animal (hyperonyme).
Idiolecte (1) : Utilisation personnelle d’une langue par une seule personne ; usage d’une langue que l’on peut induire de l’ensemble des discours d’une seule personne. (G Rob 2013)
Illocutoire (1, 2) : L’acte illocutoire (ou illocutionnaire) est l’acte de langage accompli en parlant (injonction, promesse…). Par convention, un type de phrase est associé directement à un acte de langage fondamental (assertion, injonction, interrogation). L’emploi d’un verbe performatif à la 1re personne du singulier du présent de l’indicatif, avec un pronom complément de 2e personne, permet également d’accomplir un acte de langage déterminé (je te promets de venir demain : promesse). La visée illocutoire est l’acte de langage visé par la production de l’énoncé. Trope illocutoire : voir infra.
Interaction verbale (1) : L’interaction désigne les influences réciproques qu’exercent les uns sur les autres les participants d’une situation d’énonciation donnée, qui se trouvent en co-présence physique. Les moyens de l’interaction sont verbaux (les discours de chacun) et non verbaux (gestes, mimiques, position dans l’espace). Toute interaction répond à des règles,
qu’elles soient institutionnelles (école, commerce, tribunal, …) ou qu’elles organisent des échanges informels. Les interactions verbales comportent différents actes de langage (voir p. 42).
Lemmatiser (2) : Regrouper (les formes différentes telles qu’elles apparaissent dans un texte) sous une forme unique, de manière à définir des unités lexicales. Lemmatiser les formes verbales, les variantes orthographiques dans un texte. (G Rob 2013) → Lemmatisation
Macrostructure, microstructure, superstructure (1, 4) : En grammaire de texte, on distingue trois niveaux de structuration du texte : microstructure : relation locale entre les propositions ; macrostructure : organisation globale du texte, qui apparaît notamment dans le résumé du texte ; superstructure : organisation générale du texte, « plan de texte » (Adam 2005), déterminée par le type du texte (la superstructure d’un texte argumentatif est différente de celle d’un texte descriptif ou narratif). Ces trois niveaux sont interdépendants : ainsi, la superstructure détermine la macrostructure.
Marqueur (3) : Le terme marqueur est souvent employé comme synonyme de connecteur (supra) : marqueurs de prise en charge énonciative : ils indiquent le point de vue d’une source de savoir déterminée (GMF 2009, p. 1049) : d’après N, selon N, pour N ; marqueurs de reformulation : ils introduisent la reformulation du discours : c’est-à-dire, à savoir, autrement dit, en d’autres termes ; marqueurs d’intégration linéaire (MIL) : ils signalent une sériation (l’un – l’autre ; le premier – le deuxième…), une conclusion (bref, en résumé, en somme), etc.
Modalité (3) : Attitude prise par l’énonciateur à l’égard de ce qu’il énonce (le dictum, mise en rapport d’un sujet avec un prédicat). – Syn. : modus. (G Rob 2013).
Modifieur (2) : En grammaire distributionnelle, un modifieur (ou expansion) est un mot ou un groupe de mots qui peut s’ajouter à un terme principal pour apporter une information sémantique supplémentaire, sans changer la structure syntaxique existante. On distingue principalement les modifieurs du nom (adjectifs épithètes ou apposés, complément du nom, subordonnées relatives) et les modifieurs du verbe (adverbes ou équivalents). Ces différents modifieurs, qui sont facultatifs, peuvent se cumuler entre eux. Leur suppression n’affecte pas la structure syntaxique, mais peut avoir des effets importants sur le sens ou la référence du groupe concerné.
Parémie : Le terme parémie désigne au départ les proverbes, conformément à son étymologie (du grec paroimia, « proverbe »). Puis, par extension de sens, il désigne aujourd’hui les expressions apparentées au proverbe : sentences, maximes, préceptes, slogans, devises… « La parémie est, d’après nos études, un énoncé mémorisé en compétence qui se caractérise par la brièveté, la fonction utilitaire et didactique (fournir un enseignement) et l’enchâssement dans le discours. » (Julia Sevilla Munoz, « Les proverbes et phrases proverbiales français, et leurs équivalences en
espagnol », Langages, no 139, 2000, « La parole proverbiale », p. 100-101).
Polyphonie (1, 2) : Dans un même discours, les voix de plusieurs énonciateurs distincts peuvent être mêlées, même si le discours est pris en charge par un seul locuteur. C’est le cas des différentes formes du discours rapporté (discours direct, discours indirect et style indirect libre), mais aussi de la négation polémique, de la concession (supra), de l’ironie.
Progression thématique (2, 4) : voir thème (infra)
Prophrase (affirmative, négative) (1) : Un terme représente à lui seul globalement toute une phrase : oui pour une phrase affirmative et non pour une phrase négative.
Prototype (1) : Meilleur exemplaire d’une catégorie (exemple : le moineau est le meilleur exemplaire de la catégorie oiseau) (Kleiber 1990, p. 60).
Pseudo-clivée (phrase) (ou semi-clivée) (2, 3) : Structure de phrase particulière combinant l’extraction et le détachement en tête de phrase. Le premier élément de la phrase est généralement une relative périphrastique (Ce qui / que …), et le second élément, séparé par une pause, est constitué de c’est suivi d’un groupe nominal ou infinitif qui a le statut d’un complément du verbe de la relative : Ce qu’on appelle se rappeler un être c’est en réalité l’oublier.
Sociolecte (1) : Usage langagier spécifique d’un groupe social, à l’exception des usages liés à la zone géographique (dialectes). Syn. : dialecte social. (G Rob 2013).
Stéréotype (1) : Opinion toute faite, cliché, réduisant les singularités. Ensemble de constantes subsistant à travers les variations individuelles d’un objet, et qui le définit comme tel. (G Rob 2013).
Thématisation (2) : Mise en position de thème d’un élément de la phrase, généralement par son placement en tête de phrase. La dislocation est un des moyens de la thématisation, quand l’élément détaché est antéposé. syn. topicalisation.
Thème / propos, rhème (2, 3, 4) : Communiquer consiste à transmettre une information à autrui, à lui dire quelque chose de quelque chose ou de quelqu’un. Ainsi, la proposition peut s’analyser sémantiquement en deux parties selon la répartition de l’information : le thème est l’élément dont on parle, dont on dit quelque chose, qui est généralement connu, le support de l’information ; le rhème, ou propos, est ce qu’on dit du thème, il constitue l’apport d’information, généralement nouvelle. Cette distinction correspond à l’opposition topique (topic) / comment (aire) d’origine anglo-saxonne. Dans le dynamisme communicatif de la phrase, la progression de l’information suit l’ordre linéaire : le thème, est généralement placé au début de la phrase et son pouvoir informatif est moins important que le propos qui le suit. Dans la phrase canonique simple, le thème correspond au sujet grammatical, le rhème ou propos au groupe verbal (La terre | est ronde). Mais cet ordre est différent dans certaines structures de phrases, et l’on peut rencontrer des phrases sans thème (phrases impersonnelles ou phrases à présentatif). Dans l’organisation d’un texte, on distingue différents
types de progression thématique, selon les thèmes qui se succèdent d’une phrase à l’autre (GMF 2009, p. 1025-1028). Dans un texte se produisent aussi des ruptures thématiques.
Thétique vs non thétique (2) : Est considéré comme non thétique tout ce qui met le procès en débat – interrogation, négation, hypothèse –, comme thétique tout ce qui pose le procès sans restriction d’assertion.
Trope (1, 2) : En rhétorique, figure par laquelle un mot ou une expression sont détournés de leur sens propre. (G Rob 2013). Les trois principaux tropes sont la métaphore, la métonymie et la synecdoque. En rhétorique classique, on oppose les tropes, qui provoquent un changement de signification du mot (« sens figuré »), aux simples figures de rhétorique, qui apportent différentes modification de forme des mots ou des propositions. Dans le cadre de la théorie des actes de langage, C. Kerbrat-Orecchionni (L’implicite, 1986, p. 78) définit le trope illocutoire comme un sorte de détournement de sens d’un énoncé, une « valeur dérivée qui impose à l’énoncé sa fonction pragmatique dominante ». Elle distingue les tropes illocutoires lexicalisés, dont la valeur est inscrite en langue (Peux-tu me passer le sel ?) et les tropes illocutoires d’invention, identifié dans la situation de discours (Entrée des cuisines. Merci.).
Types et formes de phrases : Dans la tradition linguistique issue de la grammaire générative et transformationnelle de Chomsky, on distingue 4 types de phrases : assertif (ou déclaratif), interrogatif, injonctif, exclamatif et 4 formes de phrases : passive, négative, emphatique, impersonnelle. Le classement des phrases en types et formes ne fait pas consensus. L’un des désaccords entre linguistes réside notamment dans la pertinence du classement proposé en France par Dubois (1970), qui distingue, d’une part, des types de phrase obligatoires et exclusifs et, d’autre part, des formes de phrases facultatives et non exclusives. Un tel classement pose en effet quelques problèmes (GMF, p. 663-664) : ainsi, le type exclamatif, contrairement aux trois autres types obligatoires, ne correspond pas à un acte de langage fondamental (asserter, questionner, ordonner), mais il exprime la subjectivité du locuteur. C’est pourquoi la GMF (2009, p. 664) propose de revisiter ce classement, en distinguant les types énonciatifs (assertion, interrogation, injonction), les types logiques (positif vs négatif), les types de réarrangement communicatif (passif, emphatique, impersonnel) et le type exclamatif, parfois qualifié d’expressif.
1 Le numéro entre parenthèses indique la (ou les) partie (s) de l’ouvrage où le terme est employé.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-8124-4725-9
- EAN : 9782812447259
- ISSN : 2258-9058
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4725-9.p.0683
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 23/10/2015
- Langue : Français