Avertissement Précisions sur la publication
- Publication type: Book chapter
- Book: Mélanges de littérature, d’histoire et de philosophie
- Pages: 9 to 23
- Collection: Reading the Eighteenth Century, n° 71
Avertissement
Précisions sur la publication
Les éditions des Mélanges de Littérature,
d’Histoire et de Philosophie
Les éditions des Mélanges ont toutes été publiées dans le format in-12o et au xviiie siècle. Cette présente édition, qui reproduit la première édition en quatre tomes de 1759 et la première édition du tome 5 de 1767, peut être considérée comme la première réédition complète des Mélanges de d’Alembert.
Après la première édition de 1753 en deux tomes, les Mélanges comportent 4 tomes puis 5 tomes à partir de 1767. Ce qui veut dire que les éditions, par exemple de 1764, en 5 tomes rassemblent 4 tomes de 1764 et un 5e de 1767. Il n’y a aucun nom d’auteur sur la page de couverture ou la page intérieure, mais uniquement le titre, en caractères noirs ou noirs et rouges, puis le nom de l’Imprimeur-Libraire et la date de l’édition. À partir de 1759, le contenu des tomes ne change pas de façon importante. En revanche, les Avertissements sont à regarder avec attention car ils sont souvent source de confusion. Il y a des Avertissements qui introduisent la totalité de la publication, des Avertissements au Discours préliminaire, des Avertissements du Libraire et enfin un Avertissement du tome V. Voici un aperçu des éditions.
1re édition de 1753 en 2 tomes
La page de couverture présente un titre aux caractères noirs, le nom de la ville : Berlin, et la date : 1753. Pas de nom d’éditeur. Réalisée en fait à Paris chez Briasson, cette première édition comporte deux tomes. Comme d’Alembert l’indique dans l’Avertissement, l’objectif est de publier le Discours préliminaire en dehors de l’Encyclopédie. C’était rendre ce dernier accessible à un plus grand nombre de lecteurs que celui des souscripteurs. 10Cet Avertissement est unique et il présente à la fois la rééditon non intégrale du Discours et les deux tomes. En effet, d’Alembert a écourté son texte en ne publiant pas les pages dans lesquelles il nommait les savants qui avaient rédigé des articles. Nous avons reporté en note le passage retiré dès 1753. On constatera à l’avenir, comme par exemple dans l’Encyclopédie méthodique, que ce texte sera le plus souvent cité depuis l’édition des Mélanges et non depuis l’Encyclopédie. Quant à l’essai de traduction de morceaux de Tacite, c’est vraiment un « essai », puisque l’auteur s’engage soit à ne plus traduire Tacite soit à continuer ce travail selon les avis des lecteurs.
Il faut souligner encore que cet Avertissement n’appartient qu’à cette première édition et ne sera jamais reproduit1. On ne saurait le comparer à ceux qui vont suivre puisque six ans plus tard, d’Alembert va séparer sa présentation en écrivant un Avertissement global pour la nouvelle édition destiné à présenter les quatre tomes et un Avertissement au Discours Préliminaire.
Pour l’heure, le tome I offre donc une seconde édition du Discours préliminaire des éditeurs de juin 1751 maintenant renommé Discours préliminaire de l’Encyclopédie. Le tableau du Système figuré des connaissances humaines est joint au texte. À la suite, d’Alembert ajoute l’Éloge historique de M. Jean Bernoulli (1748) et l’Éloge de Monsieur l’abbé Terrasson (1751).
Le tome II contient également trois textes qui sont : les Anecdotes & Réflexions sur la reine Christine de Suède, l’Essai sur la Société des Gens de Lettres et des Grands, sur la réputation, sur les Mécènes, & sur les récompenses littéraires puis un Essai de traduction de quelques morceaux de Tacite.
Le titre Réflexions et anecdotes sur Christine, reine de Suède2 fluctuera selon les rééditions. Au milieu du tome II de 1759 on lira sous un texte similaire : Mémoires et Réflexions sur Christine, reine de Suède. Quant aux 11traductions de Tacite, elles feront l’objet d’un tome entier dans la seconde édition de 1759, le tome III. Le public a dû apprécier puisque l’auteur a traduit d’autres passages de l’historien latin. Remarquons sans plus attendre, que les deux premières éditions des Mélanges correspondent avec les deux grands procès de l’Encyclopédie, 1753 et 1759. Ces rapprochements, nous le vérifierons au cours de la lecture des textes, font des Mélanges la mémoire de l’Encyclopédie.
2e édition de 1759 en 4 tomes
La seconde édition date de 1759 à Amsterdam chez Zacharie Chatelain & fils, Imprimeur-Libraire. Nous le savons, il faut à chaque fois lire Lyon au lieu d’Amsterdam. Elle est en 4 tomes et tous les tomes ont pour page de couverture le titre suivant en caractères rouges et noirs :
Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie. Nouvelle édition, Revue, corrigée & augmentée très considérablement par l’Auteur.
C’est l’édition que nous avons choisi de reproduire parce que c’est la première édition en 4 tomes. Les éditions qui suivront reprendront la plupart du temps cette édition sans grands changements, comme nous allons le voir.
C’est une édition plus complète, mais surtout entre 1753 et 1759, d’Alembert n’a pas fait qu’ajouter des textes, il a aussi effectué des améliorations. Nous avons signalé dans nos notes les ajouts et retraits les plus significatifs, par exemple pour l’Essai sur la Société des Gens de Lettres et des Grands où de nombreux paragraphes ont été ajoutés. Toutefois nous n’avons pas fait de notes particulières lorsqu’il s’agissait de changements dans la conjugaison comme « on arrive à ce vaste temple » au lieu de « on arriverait à » ou bien des parenthèses ajoutées en 1759 alors qu’en 1753 le même texte n’en comportait pas.
Nous venons d’insister sur la question des avertissements. Détaillons-la. À partir de 1759, il y aura deux Avertissements de l’auteur au lieu d’un seul en 1753. Ainsi le tome I de 1759 commence par un Avertissement sur cette nouvelle édition. Il présente les 4 tomes. Comparons le début des avertissements aux Mélanges. En 1753 le début de l’Avertissement aux 2 tomes était :
Des différents morceaux qui composent ces Mélanges, les uns ont été déjà soumis au jugement du Public, les autres paraissent pour la première fois.
Le Discours Préliminaire de l’Encyclopédie a été reçu….
12On voit bien qu’il présentait la réédition du Discours. Maintenant, l’Avertissement sur la nouvelle édition de 1759 commence ainsi :
Des différents morceaux qui composent ce Recueil, les uns voient le jour pour la première fois, les autres ont déjà été soumis au jugement du Public ; & parmi ces derniers, il en est plusieurs qui reparaissent avec des augmentations & des changements.
On a retouché en quelques endroits ….
Il présente les 4 tomes. Pas le Discours préliminaire. Nous invitons le lecteur à lire la suite de ce premier Avertissement global, ci-après dans ce présent volume. Quant à l’Avertissement du Discours qui suit cet Avertissement et qui précède le texte du Discours préliminaire, il reprend des passages de l’Avertissement aux Mélanges de 1753 puisque ce dernier, on s’en souvient et nous venons de le dire, avait pour objet principal de présenter la réédition du Discours hors Encyclopédie. Ce sont des phrases reprises mais on ne saurait comparer la présentation d’un ouvrage en 2 tomes à la présentation d’un texte.
Ajoutons que cette deuxième édition de 1759 constitue la troisième édition du Discours préliminaire. Le tableau du Système figuré des connaissances humaines est joint au texte. Enfin ce premier tome continue avec l’Encyclopédie, non plus par les éloges, mais avec l’Avertissement du tome III, intitulé Préface du troisième volume de l’Encyclopédie. Il se termine avec l’Essai sur la Société des Gens de Lettres et des Grands.
Le tome II commence par les éloges de Bernoulli et Terrasson, lesquels terminaient le tome I de 1753 alors sans introduction. Maintenant ils sont introduits par des Réflexions sur les éloges académiques. Si l’éloge du mathématicien ne comporte pas de différence entre les deux éditions, il n’en est pas de même pour celui de l’abbé. Il ne commence qu’à la deuxième page de celui de 1753, les pages précédentes ayant été reportées au début des Réflexions. Voici le début de l’Éloge en 1753, proche du texte des Réflexions (pour la comparaison, voir ci-après tome 2, p. 277) et intéressant par le point de vue sur l’histoire :
La plupart des Princes sont beaucoup plus loués durant leur vie qu’après leur mort. On peut dire aujourd’hui le contraire des Gens de Lettres ; tant qu’ils vivent, on les critique ou on les oublie, selon qu’ils se distinguent, ou qu’ils restent confondus dans la foule : mais on les célèbre tous, dès qu’ils ne sont plus. Cette multiciplicité d’éloges funèbres historiques est censurée par 13quelques personnes. Si on les en croit, ceux qui par leurs lumières & leurs talents ont éclairé leurs contemporains, & honorés leur Patrie, sont les seuls dignes de nos hommages ; mais à quoi bon, disent-ils, transmettre à la postérité des noms inconnus à leur propre siècle, & leur accorder solennellement une place dans les fastes littéraires, où l’on ne pensera jamais à les chercher ? Quelque exagérés que me paraissent ces reproches, j’avoue que l’usage dont on se plaint a ses abus, (& quel usage n’a pas les siens) mais je soutiens qu’ils sont bien légers en comparaison de ses avantages. Si les Anciens qui élevaient des statues aux grands hommes, avaient eu le même soin que nous de célébrer les Savants, nous aurions, il est vrai, quelques Mémoires inutiles, mais nous serions plus instruits sur le progrès des Sciences & des Arts, & sur les découvertes de tous les âges ; histoire plus intéressante pour nous, que celle d’une foule de Souverains qui n’ont fait que du mal aux hommes. D’ailleurs, ne craignons point que la postérité confonde les rangs : en faisant l’éloge des Gens de lettres, nous assignons à peu près, même sans le vouloir, la place que chacun doit occuper.
Je souhaiterais seulement, que pour donner à ces sortes de Mémoires toute l’utilité possible, on s’attachât à peindre l’homme encore plus que l’Écrivain, au risque de changer quelquefois le panégyrique en histoire : les ouvrages d’un grand génie, ou d’un Savant illustre, fixent assez par eux-mêmes le jugement qu’on doit porter de ses talents : mais le spectacle de sa conduite, de ses mœurs, de ses faiblesses même, est une école de Philosophie : surtout, quelle instruction ne peut-on pas en retirer, lorsque par son caractère & sa façon de penser, il a mérité de servir de modèle à ceux qui courent la même carrière ?
Tel fut M. l’abbé Terrasson….
En 1759, l’éloge de l’abbé commence après les deux points du deuxième paragraphe « Les ouvrages d’un grand génie… » que nous avons soulignés. Il convient de remarquer qu’entre la version de 1753 et les Réflexions sur les éloges de 1759, d’Alembert insiste sur les talents littéraires et scientifiques :
Le but des éloges littéraires est de rendre les Lettres respectables, & non de les avilir. Si donc, par un malheur qui n’est pas sans exemple, la conduite a déshonoré les Ouvrages, quel parti prendre ? Louer les Ouvrages. Et si d’un autre côté la conduite est sans reproche, & les Ouvrages sans mérite, que dire alors ? Se taire. On oublie qu’on doit parler d’un homme de Lettres, ou plutôt on en fait indirectement la satire, quand on se borne à célébrer en lui l’homme vertueux ; titre très estimable dans la Société, mais très peu littéraire. Que penserait-on d’un Général d’armée, dans l’éloge duquel on ne trouverait ni batailles gagnées, ni villes prises ?
[…]
14Les réflexions philosophiques sont l’âme & la substance de ce genre d’écrits ; tantôt on les entremêlera au récit avec art & brièveté, tantôt elles seront rassemblées & développées dans des morceaux particuliers, où elles formeront comme des masses de lumière qui serviront à éclairer le reste.
Les Mélanges ne contiendront pas d’autres éloges que ceux de ce tome, à savoir de Jean Bernoulli, de l’abbé Terrasson, de Montesquieu, de Mallet et de Du Marsais, ces trois derniers étant la seconde édition de leur première publication dans l’Encyclopédie. En règle générale, les textes de d’Alembert intitulés « réflexions » consistent à énoncer les principes qui gouvernent leur objet que sont soit l’éloquence, la poésie, la traduction, etc.
Le tome III, nous l’avons dit, est entièrement consacré à la traduction de morceaux choisis de Tacite. Enfin le tome IV contient l’important Essai sur les Éléments de philosophie ou sur les principes des connaissances humaines. Il développe le Système figuré dont le point de départ des connaissances humaines est l’entendement humain divisé selon les trois facultés primordiales de l’entendement humain que sont la mémoire, la raison et l’imagination. Voir notre introduction ci-après.
Une troisième édition en 1763 et 1764
À partir de 1763, d’une part Zacharie Chatelain l’Imprimeur-Libraire paraît prendre en main la publication jusqu’à modifier par endroits le texte3, d’autre part la multiplication des éditions semble avoir commencée. En effet, théoriquement toutes les rééditions à partir de 1759 sont réalisées par Zacharie Chatelain. Elles nous paraissent correctes, à condition d’avoir les quatre tomes complets. Mais il y a d’autres éditions effectuées à Amsterdam « Aux dépens de la Compagnie ». Elles sont peut-être moins fiables.
15C’est le cas d’une édition de 1760. Le tome I a pour titre aux caractères rouges et noirs :
Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie.
Nouvelle édition, Revue, corrigée
& augmentée très considérablement par l’Auteur.
Il commence directement avec l’Avertissement du Discours préliminaire puis le texte du Discours avec le tableau du Système figuré des connaissances humaines inséré à la fin. L’absence d’Avertissement aux 4 tomes ne permet pas de conclure à une réédition des Mélanges mais plutôt à une édition à part des tomes I et II et à la suite de celle de 1759. Revenons à la troisième édition.
Les éditions de 1763 et 1764 contiennent les mêmes titres que ceux de 1759, à Amsterdam chez le même éditeur Zacharie Chatelain, mais ont une page de titre différente, à savoir :
Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie.
Nouvelle édition, Augmentée de plusieurs notes
sur la traduction de quelques morceaux de Tacite.
Il y a les deux Avertissements, celui de l’édition de 1759 aux Mélanges et celui au Discours. Ils resteront inchangés. En 1763 et 1764, s’ajoutent deux autres Avertissements du Libraire : un au tome I et un au tome III pour annoncer les notes ajoutées à la traduction de Tacite. Lisons l’Avertissement du Libraire au tome I :
Cette édition ne diffère de celle de 1759 que par un petit nombre de changements légers que l’Auteur y a faits ; mais on y a corrigé plusieurs fautes d’impression considérables, & dont quelques unes même altéraient le sens.
Il y a dans ces lignes aussi un argument de vente. L’aspect commercial paraît bien fonctionner car depuis 1759, c’est pour ainsi dire chaque année qu’une édition des Mélanges est publiée, par morceaux ou intégralement.
L’Avertissement qui introduit au tome I ces deux éditions successives s’intitule Préface de l’édition de 1759 et reproduit, comme son titre l’indique l’Avertissement sur cette nouvelle édition de 1759. Les mêmes textes se retrouvent ensuite, c’est-à-dire l’Avertissement au Discours préliminaire, le Discours, etc. Toutefois, il peut y avoir des tomes marqués de la même 16année d’édition, 1763, et être différents avec ou sans, le tableau du Système figuré des connaissances humaines à la fin du Discours préliminaire (sans signe d’arrachement de pages). Si le tome II est inchangé, par rapport à 1759, il n’en est pas de même du tome III qui comporte le second Avertissement du Libraire. Il annonce par la même occasion qu’il réalise des éditions séparées par tome. Ceci précise nos doutes sur des éditions ne comportant qu’un ou deux tomes. Voici cet Avertissement :
Cet Essai de Traduction de Tacite forme le troisième volume des Mélanges de Littérature de M. d’Alembert. Je me suis déterminé à l’imprimer séparément en faveur des jeunes Étudiants, à qui j’ai cru qu’il pouvait être utile. L’Auteur a joint à sa Traduction des Notes, qu’on trouvera à la fin de ce Livre.
En effet les notes ne sont pas insérées dans le texte mais sont regroupées dans des pages supplémentaires en fin de volume (p. 435-470). Ces notes rendent raison de la manière dont d’Alembert a traduit Tacite. Le traducteur s’explique sur le sens qu’il a compris dans le latin de Tacite et traduit par d’autres mots français plutôt que de faire de la traduction littérale. Sauf erreur de notre part, il semblerait que seule cette troisième édition comporte les pages de Notes ajoutées à la traduction de Tacite dans ce tome III édité séparément pour les étudiants.
Le tome IV correspond à celui de cette présente réédition.
Un 5e tome en 1767, quatrième édition
Les Mélanges ne semblent pas avoir d’éditions en 1765. Il y a une autre publication en 1765, bien plus retentissante, je veux dire celle des volumes de discours de l’Encyclopédie qui permet d’affirmer que la grande œuvre des Lumières est achevée. Il faut attendre 1767 pour voir paraître un cinquième tome des Mélanges. Il sera ajouté aux éditions précédentes en 4 tomes pour faire, comme nous le faisons nous-mêmes ici, 5 tomes.
La page de titre est la suivante :
Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie.
Quatrième Édition.
Ce sont les tomes de la troisième édition repris à l’identique. Le tome I contient donc la Préface à l’édition de 1759, l’Avertissement au Discours préliminaire, le Discours, la Préface du troisième volume de l’Encyclopédie, etc.
17Le tome V est l’occasion de préciser les Éléments de philosophie par des Éclaircissements, de rapporter les questions qui ont occupé l’époque dont celle concernant l’inoculation et de finir avec l’Encyclopédie sur l’article Genève, puis la critique des pasteurs et la position de Rousseau. Attirons l’attention à nouveau sur les Avertissements car ce tome V contient un nouvel Avertissement pour présenter ce tome. Il débute par l’évocation du grand roi, Frédéric II, protecteur des philosophes français, et termine sur l’état misérable de la philosophie, « philosophe » étant un nom avec lequel on épouvante les enfants. Le faux est alors gagnant sur le vrai. Mais le tome ne se finit pas ainsi. Dans un retour sur la querelle initiée par l’article Genève avec Rousseau, d’Alembert inverse la situation en démontrant que son jugement sur les pasteurs était juste puisque maintenant Rousseau partage son avis. Il était dans l’erreur pendant que lui disait « vrai ». C’est ainsi que les Mélanges se terminent par le mot « vrai ». Entre les deux, les Réflexions sur les probabilités, l’inoculation, la poésie, l’étude et l’harmonie des langues rendent ce tome majeur (voir ci-dessous les tables des matières puis notre introduction).
Autres éditions de 1768 à 1783
À partir de 1768, pour toutes les rééditions, le titre des Mélanges change à nouveau pour reprendre celui de 1759, à savoir :
Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie.
Nouvelle édition, Revue, corrigée
& augmentée très considérablement par l’Auteur.
L’édition de 1768, dont nous n’avons trouvé que le tome 5 est réalisée à Amsterdam aux dépens de la Compagnie.
En 1772, une édition, aux caractères toujours rouges et noirs, comporte des Libraires différents. Pour le tome I, il est marqué à Paris, et se trouve chez Laurens jeune, Imprimeur-Libraire, rue Saint-Jacques, no 32, vis à vis celle des Mathurins. Il commence par l’Avertissement sur cette nouvelle édition, c’est-à-dire qu’il reprend le titre de 1759, puis l’Avertissement au Discours préliminaire de 1759, le Discours, etc.
Le tome II est édité à Amsterdam, chez Arkstée et Merkus et Marc-Michel Rey et il y a une modification dans les textes autour de l’affaire des pasteurs de Genève. Après l’Extrait des Registres de la Vénérable 18Compagnie des Pasteurs & Professeurs de l’Église & de l’Académie de Genève est ajoutée une Lettre d’un Professeur en Théologie d’une Université Protestante à Mr d’Alembert. Ce tome II insère le dossier sur cette querelle paru dans le tome V de 1767 qui, de plus, ne contient pas cette Lettre. On peut s’interroger pour savoir si c’est vraiment d’Alembert qui a ajouté cette Lettre en 1772. En effet, la Lettre prend appui sur les Mélanges pour dénoncer des incohérences de la part de l’auteur. Le Professeur présente une étude comparative détaillée entre certaines pages du tome II, c’est-à-dire de la Lettre à Rousseau de 1759 et le tome IV. Il reproche à d’Alembert de ne pas avoir appliqué la même logique à la religion protestante que celle qu’il a appliquée dans sa philosophie ou ses œuvres mathématiques. Bref, il prend le parti des Pasteurs de Genève, tout en s’en défendant et en insistant sur ses maîtres que sont Newton, Leibniz et Wolf. La fin de la Lettre fournit la raison de l’écrit. D’Alembert aurait porté tort à la religion protestante déjà suffisamment meurtrie par « l’Apologiste de la St Barthélémy pour les opprimer. » De surcroît, l’année suivante, une publication similaire aux précédentes paraît chez Zacharie Chatelain en 5 tomes.
Enfin, en 1783, année de la mort de l’auteur, on trouve des tomes édités à Leide, chez les Frères Murray. Le titre ne comporte que des caractères noirs et le tome III est sans les Notes ajoutées sur la traduction de Tacite.
Sans aller plus loin dans les détails, il nous semble raisonnable de ne considérer comme éditions correctes que les éditions chez Zacharie Chatelain uniquement jusqu’en 1767 compris. Pour plus de clarté, nous listons ci-dessous les Tables des matières de 1753 et 1759, seules exactes :
I. Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie, Berlin, 1753, 2 tomes
Tome I :
Avertissement
Discours préliminaire des éditeurs de l’Encyclopédie
Explication détaillée du Système des connaissances humaines
Observations sur la division des sciences du chancelier Bacon
Éloge de Bernoulli
Éloge de Terrasson
Tome II :
Réflexions et anecdotes sur Christine, reine de Suède
Essai sur la société des gens de lettres, à M***
Essai de traduction de quelques morceaux de Tacite
19II. Mélanges de Littérature, d’Histoire et de Philosophie, Nouvelle édition revue, corrigée & augmentée très considérablement par l’Auteur, à Amsterdam, chez Zacharie Chatelain & fils, Imprimeurs-Libraires.
Tome I (1759) :
–Avertissement sur cette nouvelle édition (écrit le 24 février 1759)
–Discours préliminaire de l’Encyclopédie
•Avertissement
•Discours préliminaire de l’Encyclopédie
•Explication détaillée du Système des connaissances humaines
•Observations sur la division des sciences du Chancelier Bacon
–Préface du troisième volume de l’Encyclopédie
–Essai sur la Société des gens de lettres et des grands, sur la réputation, sur les mécènes et sur les récompenses littéraires
–Table
Tome II (1759)
–Réflexions sur les éloges académiques
–Éloge historique de M. Jean Bernoulli
–Éloge de M. l’abbé Terrasson
–Éloge de M. Le Président de Montesquieu
–Analyse de L’Esprit des lois
–Éloge de M. l’abbé Mallet
–Éloge de M. Du Marsais
–Mémoires et réflexions sur Christine, reine de Suède
–Discours de M. d’Alembert à l’Académie Française du 19 décembre 1754
–Réflexion sur l’élocution oratoire et sur le style en général
–Description abrégée du gouvernement de Genève
–Lettre à M. Rousseau, citoyen de Genève
–Table de ce qui est contenu dans ce second volume
Tome III (1759)
–Observations sur l’art de traduire en général
–Essai de traduction de quelques morceaux de Tacite
–Table de ce qui est contenu dans ce troisième volume
Tome IV (1759)
–Essai sur les éléments de philosophie ou sur les principes des connaissances humaines
–Réflexions sur l’usage et sur l’abus de la philosophie dans les matières de goût
–De l’abus de la critique en matière de religion
–De la liberté de la musique
–Table de ce qui est contenu dans ce quatrième volume
Tome V (1767)
–Avertissement
–Table de ce qui est contenu dans ce cinquième volume
–Éclaircissements sur différents endroits des éléments de philosophie
20–Doutes et questions sur le calcul des probabilités
–Réflexions philosophiques et mathématiques sur l’application du calcul des probabilités à l’inoculation de la petite vérole
•Avertissement
•Réflexions sur l’inoculation
–Réflexions sur la poésie
•Lettre à un journaliste
–Suite des réflexions sur la poésie et sur l’ode en particulier
–Réflexions sur l’histoire
–Apologie de l’étude
–Sur l’harmonie des langues et sur la latinité des modernes
•Notes sur quelques endroits de l’écrit précédent
–Justification de l’article Genève de l’Encyclopédie
•Avertissement
•Extraits des registres de la vénérable compagnie des Pasteurs
•Extrait de la Lettre imprimée de M. Rousseau à M. d’Alembert du 20 mars 1758
•Extrait des Lettres écrites de la Montagne par le même M. Rousseau, Amsterdam 1764
•Extrait de l’Ouvrage intitulé, Nouveaux Mémoires ou Observations sur l’Italie & sur les Italiens par M. Grosley
Terminons par les éditions des Œuvres complètes de d’Alembert4 par Bastien en 1805 (18 vol.) et par Belin en 1821-1822 (5 vol.). Elles ne reprennent pas tous les écrits de l’auteur et n’en suivent pas l’ordre de publication mais reprennent quelques textes des Mélanges. Il en est de même pour l’édition souvent utilisée de Belin qui n’est ni introduite ni annotée mais qui commence par le bel éloge que lui avait consacré Condorcet. Elle est aussi riche en préfaces prises ici et là, notamment dans les Opuscules mathématiques et diverses publications de la fin du xviiie siècle comme celle de Pougens en 1799. À la fin du xixe siècle, l’ouvrage de Charles Henry, Œuvres et correspondances inédites de d’Alembert en 1887, reste pertinent.
21Orthographe
Nous avons adopté une orthographe moderne, jugeant que la substitution des terminaisons des mots en « oit » par « ait », ou « élémens » par « éléments », ou « tems » par « temps » et autres modernisations, ne modifiait pas la pensée de l’auteur mais rendait la lecture plus fluide. En revanche nous avons respecté la ponctuation ainsi que l’usage particulier des majuscules pour les noms communs. Par exemple, nous avons changé « Poëte » en « Poète » et non en « poète ». Nous avons également laissé les « & » pour « et » afin de conserver pour le regard l’image d’un texte du dix-huitième siècle. La ponctuation a été respectée car c’est la respiration du texte.
Bien sûr, nous avons respecté la minuscule de toutes les particules « d’ » ou « de » devant les noms propres afin de rappeler la distinction dans la langue française entre la particule et l’article indéfini. Cette distinction, inconnue des logiciels « word », est essentielle puisqu’elle est à l’origine de la place d’un auteur dans le classement alphabétique. En effet, la règle de l’ordre alphabétique étant que tout nom propre est classé à la première lettre majuscule de son nom, mettre une majuscule aux particules revient à classer tous les noms nobles à la lettre « D » ! Nombreux sont les récents index qui montrent cette aberration éditoriale issue du logiciel anglais. Malheureusement peu de commentateurs ont compris ce phénomène dont le risque est la perte de l’auteur. Il aurait fallu connaître les règles du français ou encore tout simplement consulter les dictionnaires. D’Alembert, toujours classé à « A » est maintenant classé à « D » dans les index uniquement, bien sûr. Pas dans les dictionnaires. La personne qui aura l’ingénieuse idée de dire un jour : « mais son vrai nom est Le Rond », le fera classer à « L » et, pourquoi pas « le » étant un article défini pour word, ne retrouvera-t-on pas d’Alembert à « R ». Si j’insiste sur ce fait, c’est que la perte d’un auteur revient à la perte d’un savoir. Le changement de place est un bon début vers le négatif comme nous l’avions indiqué dans les Archives Internationales d’Histoire des sciences5.
22Pour le texte du Discours préliminaire par lequel commence les Mélanges, nous avons signalé les différences entre le texte de 1759 et celui de 1751 dans notre édition chez Champion puis Champion Classiques, en 1999 et 2011. Il existe également de légères différences dans la ponctuation et les écritures. On peut remarquer que le mot « nature » est beaucoup moins souvent écrit avec une majuscule dans la version des Mélanges que dans celle de l’Encyclopédie. De nombreuses modifications consistent dans des améliorations de style. Toutefois certaines sont plus intéressantes que d’autres, comme par exemple lorsque « âme » devient en 1759 « esprit ».
Notes
Le marquage « Note de d’Alembert » désigne les notes de l’auteur et celui de « Note de l’éditrice », les notes qui me reviennent. Dans ces notes Wikipédia a été très peu consultée. Cette encyclopédie en ligne que je soutiens absolument a pour revers de la médaille de pouvoir être corrigée parfois dans le mauvais sens. C’est malheureusement le cas pour l’Encyclopédie et pour d’Alembert dont les articles sont sectaires et tentent autoritairement de faire croire par exemple que les dix-huitiémistes ont choisi de mettre une majuscule au nom du mathématicien. Dans ces conditions, lorsqu’il s’agissait de personnes célèbres facilement identifiables sur Internet, je me suis limitée parfois à inscrire leurs dates pour permettre simplement au lecteur de les situer rapidement dans l’époque. Pour l’essentiel, j’ai puisé dans le Dictionnaire Larousse universel de 1923 en 2 vol., ou dans d’autres dictionnaires plus récents. J’ai également tourné mon regard vers les ouvrages, comme ceux de Jacques Roger, qui contiennent des index à l’ancienne avec la date des auteurs.
Le tome III est particulier puisqu’il présente en vis à vis le texte latin de Tacite et la traduction en français. L’orthographe latin ainsi que la ponctuation de 1759 ont été conservées. Or, il y a de grandes différences entre le latin de ces extraits du xviiie siècle et celui des éditions actuelles. Comme il est expliqué dans l’introduction qui suit, il semblerait que d’Alembert ait utilisé la version de Thomas Gordon. La comparaison avec les textes choisis par Gordon, alors traduits en 1751 en français 23par Pierre Daudé, dans les Discours historiques, critiques et politiques de Tacite, n’a pas été entreprise. Dans ces conditions, aucune note n’a été ajoutée au texte français. En revanche les notes dans le texte latin visent à indiquer des points de repères. J’ai choisi les textes de la collection Budé pour permettre au lecteur de retrouver rapidement les passages de Tacite. Les paragraphes des Annales viennent tout d’abord du texte établi par Henri Goelzer aux Belles-Lettres en 1938 pour les Livres I à XII (tomes I et II des Annales), puis dans la même collection, du texte établi par Pierre Wuilleumier en 1978 pour les Livres XIII à XVI (tome IV). Ce même traducteur avait présenté une nouvelle traduction des Livres XI-XII en 1976 (tome III). Les références des autres extraits tirés de Histoires, La Germanie et Vie de Julius Agricola sont également précisées en notes.
Dans la mesure où mes recherches au CNRS ont porté sur d’Alembert et l’Encyclopédie je me suis permise de faire référence à mes articles publiés ainsi qu’aux ouvrages, Savoir et Matières. Pensée scientifique et théorie de la connaissance de l’Encyclopédie à l’Encyclopédie méthodique, CNRS, 2011 et D’Alembert et la mécanique de la vérité dans l’Encyclopédie (1999) tout en le résumant en D’Alembert et […] l’Encyclopédie. J’y reviendrai dans l’introduction. Il faut enfin indiquer que certains articles de l’Encyclopédie méthodique ont soit cité soit repris des textes des Mélanges. Cette dernière fait l’objet d’un Atelier Panckoucke au Centre Jean Pépin (UMR 8230 CNRS/ENS : http://umr8230.vjf.cnrs.fr/spip.php?article87). Les publications récentes de ses membres, soit dans la collection La vision nouvelle de la société dans l’Encyclopédie méthodique, dirigée par Josiane Boulad-Ayoub aux Presses Universitaires de Laval, soit aux éditions Classiques Garnier pour les Prospectus et Mémoires de Charles-Joseph Panckoucke, sont signalées en notes.
1 Nous avons repris cet Avertissement de 1753 dans notre édition de Jean d’Alembert, Discours préliminaire, Paris, Champion 1999 et Champion Classiques, 2011, aux pages 189-194. Nous conseillons de s’y référer ainsi que pour la différence entre la version de 1751 et celle des rééditions. Nous y avons ajouté l’Avertissement aux Mélanges de 1759, p. 195-200 ainsi que l’Avertissement au Discours préliminaire dans les Mélanges de 1767, p. 200-204. Nombreux sont les commentateurs qui n’ont pas fait la distinction entre les Avertissements aux 2 tomes et les Avertissements au Discours préliminaire à partir de 1759. La confusion malheureuse est souvent faite entre l’Avertissement aux Mélanges de 1753 où les 2 tomes sont présentés et l’Avertissement au Discours préliminaire de 1767. L’Avertissement aux Mélanges de 1767 correspond à l’Avertissement sur cette nouvelle édition de 1759, pas à celui au Discours préliminaire. Voir plus loin nos explications.
2 Dans l’Avertissement de 1753 (ibid., p. 192), d’Alembert évoque à la tête du second volume les Anecdotes…, puis, à l’intérieur du volume le titre est modifié avec une inversion entre Anecdotes et Réflexions. En 1759, le terme Anecdotes est remplacé par celui de Mémoires.
3 C’est cette édition de 1763 qui avait été choisie par F. Picavet en 1894 (Armand Colin). Une note de l’éditeur précisait que « le texte de 1763 est identique, à quelques infimes changements près, à celui de 1759. » Il ajoutait que « Picavet signale en notes les variantes, corrections ou additions significatives ». L’éditeur Vrin reprend cette édition en 1984 et reproduit les notes. Ce sont ces notes que nous avons corrigées en « Inchangé » dans notre édition de 1999 (repris en Champion Classiques en 2011) car les modifications signalées par Picavet ne correspondent pas à l’édition de 1751 annoncée. Enfin, l’Avertissement dans cette édition de Picavet ne différencie pas les Avertissements des Mélanges d’avec les Avertissements du Discours préliminaire si bien qu’il y a quelques confusions. L’édition du Discours préliminaire en 2000, a repris le texte de Picavet. Nous espérons avoir fait un premier pas vers plus de clarté, mais reconnaissons que c’est extrêmement difficile et nous avons aujourd’hui plus de facilités pour avoir accès aux textes qu’au xixe siècle.
4 Nous avons listé les rééditions de ses œuvres dans notre Bibliographie de D’Alembert et […] l’Encyclopédie, Champion, 1999, p. 447-448. C’est à l’intégralité de cette Bibliographie, p. 447-489, que nous renvoyons le lecteur pour les publications concernant l’auteur et l’Encyclopédie.
5 « Note sur l’orthographe de d’Alembert » dans Archives Internationales d’Histoire des sciences, Vol. 49, No 142, Juin 1999, p. 153.
- CLIL theme: 3439 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moderne (<1799)
- ISBN: 978-2-406-06364-3
- EAN: 9782406063643
- ISSN: 2275-2765
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06364-3.p.0009
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 01-23-2018
- Language: French