Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Marguerite Duras, paysages
- Pages : 225 à 229
- Revue : La Revue des lettres modernes
- Série : Marguerite Duras, n° 5
Résumés/Abstracts
Cécile Hanania, « Inspirations paysagères de Marguerite Duras. Savanes de l’Ouellé, vallée de la Lune et cimes de la mort »
S’écartant de la notion de cycle et de la dimension fantasmatique et imaginaire auxquelles a souvent été rattachée la géographie durassienne, l’article examine à travers quatre textes, L’Empire français, Le Marin de Gibraltar, Les Impudents et Emily L., les paysages durassiens tirés de représentations préalables, qu’elles relèvent du document ou de la littérature. L’exploration de leurs caractéristiques met au jour un questionnement sur l’écriture et un parcours scriptural.
Departing from the notion of the cycle and from the fantasmatic and imaginary dimension to which Durassian geography has often been linked, this article uses four texts, L ’ Empire français , Le Marin de Gibraltar , Les Impudents , and Emily L ., to examine Durassian landscapes based on prior representations, whether these fall under the heading of documentary evidence or literature. The exploration of their characteristics brings into focus questions about writing and a textual itinerary.
Marie-Annick Gervais-Zaninger, « (D)écrire dit-elle. Le geste descriptif chez Duras »
Marguerite Duras infléchit singulièrement les modalités de la description, dans le sens d’une déréalisation qui raréfie les notations descriptives, voire les supprime, en une pure nomination. La référence se voit débordée par le fonctionnement poétique de l’écriture, où s’inscrit un processus de fantasmatisation. Le ressassement affecte aussi bien la nature des paysages que les modes de formulation (anaphores, métaphores récurrentes…), qui configurent une géographie intime, réduite à une palette élémentaire.
In a singular way, Marguerite Duras modifies the modalities of description, in the sense of a derealization that dilutes descriptive notation or even suppresses it with pure naming. Reference is overwhelmed by the poetic operation of writing in which a process of fantasmatization takes place. Repetition affects both the nature of the landscapes 226 and the modes of formulation (anaphoras, recurring metaphors, and so on), which shape an intimate geography, reduced to an elementary palette.
Marie-Françoise Berthu-Courtivron, « Le paysage durassien, entre abstraction et fantasme »
Le paysage chez Duras n’est jamais anodin : il n’est pas décrit, mais traversé par une problématique existentielle constante, celle du trop plein ou du manque. Peu de panoramas s’offrent à l’œil contemplatif : soit la vue est bouchée ou menacée par l’ombre, soit le personnage lui-même est englouti au cœur du paysage. Malgré les tentatives de normalisation, le paysage ne cesse d’être déstabilisé par le fantasme. Il reste l’espace du déchaînement, comme miné tragiquement par la folie d’un manque initial.
The landscape in Duras ’ work is never trivial: it is not described but pervaded by a constant existential problematic, that of an overflow or lack. Only a few panoramas are offered to the contemplative eye: either the view is blocked or threatened by shadow or the character himself/herself is engulfed by the landscape. Despite attempts to normalize it, the landscape is constantly being destabilized by fantasy. It remains the space where something is unleashed, as if tragically undermined by the madness of an initial lack.
Florence de Chalonge, « Le paysage, le dehors et le tout. Le Camion de Marguerite Duras »
Le paysage du Camion est d’une part ancré dans la supposée présence de la dame montée dans le camion (le camion voyant) ; de l’autre, le paysage à l’image est celui du camion passant dans la campagne. Le paysage est un dehors du sujet qui voit, se souvient, imagine ou rêve. Par différence, le tout apparaît comme le monde célébré de la perte, de la bienheureuse annihilation de soi, un invisible du paysage qui sous les yeux fermés de la dame nous fait accéder à l’envers des choses.
The landscape in Le Camion is, on the one hand, anchored by the supposed presence of the lady who has gotten in the truck (the seeing truck); on the other hand, the visual landscape is the landscape of the truck passing through the countryside. The landscape constitutes an exterior vis-à-vis the subject who sees, remembers, imagines, or dreams. By comparison, the whole appears to be a celebrated world of loss, of the blissful annihilation of the self, an invisible part of the landscape that, under the closed eyes of the lady, gives us access to the other side of things.
227Anne Cousseau, « Valeurs du paysage dans L’Homme assis dans le couloir de Marguerite Duras »
Le paysage participe étroitement de l’érotisme du texte : la description du paysage s’écrit tout à la fois en dehors (du) et avec (le) récit érotique. Le paysage se trouve ainsi incarner l’altérité essentielle propre à l’éros durassien, ouvrant par ailleurs l’imaginaire du texte sur d’autres scènes, d’autres textes de l’œuvre. Paysage-horizon qui alimente la tension désirante du regard, il fonctionne comme une utopie du désir, un lieu poétique qui renvoie à l’indicible de l’amour.
The landscape is closely related to the eroticism of the text: the description of the landscape is written both outside of and with the erotic narrative. The landscape thus embodies the essential alterity proper to the Durassian eros, opening the imaginary dimension of the text onto other scenes and other texts of hers. A landscape-horizon that feeds the desiring tension of the gaze, it functions as a utopia of desire, a poetic place that refers to what is unspeakable in love.
David Amar, « Notes sur les rapports entre Duras et Blanchot. La jeune fille et la mort »
Les rapports entre Marguerite Duras et Maurice Blanchot sont anciens et complexes : amitié et complicité militante (Algérie, Mai 68), regard admiratif sur leur œuvre respective (depuis la première critique de Blanchot pendant la guerre jusqu’à La Maladie de la mort), mais aussi influence réciproque et imbriquée dans les récits fictifs où Blanchot devient un personnage de Duras et, peut-être réciproquement Duras un modèle pour certaines héroïnes de Blanchot.
The relationship between Marguerite Duras and Maurice Blanchot was longstanding and complex: a friendship and militant bond (Algeria, May 1968), mutual admiration of their respective works (from Blanchot ’ s first critique during the war to La Maladie de la mort ) as well as reciprocal and intertwined influence when it came to fictional narratives in which Blanchot became a Durassian character and perhaps, conversely, Duras a model for some of Blanchot ’ s heroines.
Marie-Hélène Boblet, « Des cris et de l’écrit, de Marguerite Duras à Jean-Luc Lagarce »
Histoire d ’ amour (repérages), première pièce d’un diptyque dont la seconde s’intitule Histoire d’amour (derniers chapitres), indique la présence de l’intertexte 228durassien dans le théâtre lagarcien des années 1980. C’est à cette présence sur le mode mineur du moderato cantabile, discrète et retenue, que se consacre cet article qui élucide, outre les affinités électives des deux auteurs, les enjeux sur le plan thématique et esthétique de la mémoire et de la filiation littéraires.
Histoire d ’ amour (repérages) , the first piece of a diptych, the second part of which is called Histoire d ’ amour (derniers chapitres) , indicates the presence of the Durassian intertext in the Lagarcian theater of the 1980s. This presence in the minor mode of moderato cantabile , discreet and restrained, is the topic of this article, which elucidates, besides the elective affinities of the two authors, the stakes of memory and literary filiation on the thematic and aesthetic plane.
Midori Ogawa, « Marguerite Duras et Tsushima Yūko. Sur la mer des ténèbres »
Née en 1947, l’écrivaine japonaise Tsushima Yūko est quasi-contemporaine de Marguerite Duras. Ayant perdu son père par une noyade, Tsushima était depuis toujours attirée par le monde aquatique dont elle traite dans de nombreux romans. Cet article propose de confronter ces deux écrivaines pour mieux comprendre tous les avatars – rêves et cauchemars – engendrés par l’image aquatique.
Born in 1947, the Japanese writer Tsushima Yūko was almost a contemporary of Marguerite Duras. Having lost her father to drowning, Tsushima had always been attracted to the aquatic world, which she explores in many novels. This article suggests comparing these two female writers to better understand all the avatars–dreams and nightmares–engendered by aquatic imagery.
Philippe PansiotPreud’homme, « L’Être et le “là” dans Le Ravissement de Lol V. Stein »
L’étude de l’adverbe de lieu « là » sera l’occasion de redécouvrir les grandes thématiques durassiennes. En quelques aperçus de ces déploiements, l’adverbe s’avère inextricablement lié à la problématique ontologique et le syntagme « être là » peut prétendre caractériser le style Duras tout comme il définit le mot-trou. L’une de ces occurrences sera ensuite analysée dans une approche à dominante lacanienne (via le stade du miroir).
The study of là , the adverb of place, will provide the opportunity to rediscover the major themes found in Duras ’ work. Several illustrations of this usage shows that the 229 adverb is inextricably linked to the ontological problematic, and the syntagm être là can claim to characterize Duras ’ style just as it defines the mot-trou . One of these occurrences will then be analyzed with a predominantly Lacanian approach ( via the mirror stage).
Sélila Mejri, « Jeu et enjeu de la répétition dans La Musica Deuxième de Marguerite Duras »
La répétition est désir, quête, mémoire, intertextualité. L’article observe les formes de répétition dans l’Acte I, où l’auteur reprend quasi intégralement les deux actes de LaMusica, pour délimiter les lieux de modification par rapport au genre. Il perçoit ensuite en quoi le nouvel acte peut incarner l’idée de la parole déguisement-déplacement et réécrit le drame de la passion chez Racineà travers un subtil jeu d’inversion, d’opposition et de transposition.
Repetition is desire, searching, memory, intertextuality. This article studies the forms of repetition in Act I, in which the author almost completely reproduces the two acts of La Musica in order to delineate places where modifications are made vis-à-vis genre. It then observes how the new act can embody the idea of the word déguisement-déplacement and rewrites the drama of passion in Racine ’ s work through a subtle game of inversion, opposition, and transposition.
Catherine Rodgers, « Les peurs de Marguerite Duras »
Cet article explore le thème de la peur dans l’œuvre durassienne, commençant par en étudier les symptômes dans La Douleur. Les origines des différentes peurs – de la folie, de l’écriture, de la mer, de la forêt, de l’autre, de la mort, de l’inconnu – se trouvent dans l’enfance de Marguerite Duras : une mère inconstante et déprimée, un frère violent, des coups, la cruauté des colonies. Finalement, l’article fait appel à la psychanalyse freudienne pour expliquer le mécanisme de la peur dans ses textes.
This article explores the theme of fear in Duras ’ work, beginning with an examination of its symptoms in La Douleur . The origins of various fears–of madness, writing, the sea, the forest, the Other, death, the unknown–are found in Marguerite Duras ’ childhood: a fickle and depressed mother, a violent brother, blows, the cruelty of the colonies. Finally, the article draws on Freudian psychoanalysis to explain the mechanism of fear in her texts.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-05912-7
- EAN : 9782406059127
- ISSN : 0035-2136
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-05912-7.p.0225
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 27/05/2017
- Périodicité : Mensuelle
- Langue : Français