Avant-propos
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Marguerite Duras, paysages
- Auteur : Alazet (Bernard)
- Pages : 9 à 10
- Revue : La Revue des lettres modernes
- Série : Marguerite Duras, n° 5
Avant-propos
L’année 2014 a amplement donné à Marguerite Duras, à l’occasion du centenaire de sa naissance, la place qui lui revient dans le champ de la littérature française du xxe siècle. En marge des manifestations de toutes sortes qui ont célébré l’écrivain et la cinéaste qu’est Duras, la recherche scientifique continue d’explorer une œuvre qui, ne connaissant depuis la mort de son auteur aucun purgatoire, ne cesse d’interroger notre modernité et la valeur du fait littéraire, son enjeu, ses formes et sa nécessité.
Le cinquième volume de la Série Marguerite Duras a choisi dans un premier temps de livrer au public un entretien que Yann Andréa a accordé à Catherine Rodgers en 2004, dans le cadre d’un colloque organisé par Brian Stimpson et Myriem El Maïzi en Angleterre.
Le dossier qui donne son titre à ce recueil permet d’envisager cette œuvre d’un point de vue rarement actualisé par la critique, celui du paysage, la mettant à l’épreuve du geste descriptif, moins rare qu’on l’a souvent dit. Anne Cousseau1, depuis longtemps attentive à la scansion poétique des textes de Duras, réunit ici cinq contributions (Cécile Hanania, Marie-Annick Gervais-Zaninger, Marie-Françoise Berthu-Courtivron, Florence de Chalonge, Anne Cousseau) qui analysent diversement la part du monde sensible, la porosité qui affecte personnages et lieux, le manque à voir qui paradoxalement place au premier plan un regard confronté à ce qui résiste et se soustrait à la représentation.
Le deuxième volet réunit, comme à l’accoutumée, des études critiques qui témoignent de l’avancée de la recherche. Trois contributions (David Amar, Marie-Hélène Boblet, Midori Ogawa) mettent en place des rencontres entre des écritures contemporaines et celle de Duras, instaurant un dialogue imaginaire à plus d’un titre éclairant. Rencontres 10parfois revendiquées (Maurice Blanchot, Jean-Luc Lagarce), parfois plus secrètes (Tsushima Yūko) qui nous permettent d’entendre davantage et autrement les résonnances du texte durassien. S’il est une œuvre qui ne sépare pas geste d’écriture et réflexion ontologique, c’est bien celle de Duras : Philippe Pansiot Preud’homme montre dans son exégèse du Ravissement de Lol V. Stein combien le syntagme être là informe et complexifie la question de la présence-absence au monde. Sélila Mejri revisite les formes de la répétition dans la pratique théâtrale de Duras, répétition qui déplace l’enjeu de la réécriture et lui donne pouvoir de création. Enfin Catherine Rodgers explore la façon dont la peur, depuis l’imaginaire de l’enfance, structure l’œuvre et accompagne ses errements.
Le carnet critique qui clôt ce volume nous permet de prendre acte d’un certain nombre de publications récentes qui, chacune à leur manière, concourent à dessiner le « paysage » durassien. Celui-ci, que traversent des questions plus que des réponses, nous invite une fois de plus à nous pencher au bord de ce que Marguerite Duras a nommé “le gouffre”, celui que creusent tout autant le désir que l’écriture.
Bernard Alazet
Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
1 Anne Cousseau a publié Poétique de l’enfance chez Marguerite Duras en 1999 chez Droz et, parmi les nombreux travaux qu’elle a consacrés à l’œuvre de Duras, a participé à l’édition des Œuvres Complètes de la Pléiade en 2014.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-05912-7
- EAN : 9782406059127
- ISSN : 0035-2136
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-05912-7.p.0009
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 27/05/2017
- Périodicité : Mensuelle
- Langue : Français