Cet ouvrage a vu le jour dans un contexte marqué par le constat que, passé le temps des clivages est-ouest et des inféodations diverses, la littérature polonaise est aujourd’hui redécouverte comme une littérature européenne incontournable. Si elle constitue une partie intégrante de la sensibilité centre-européenne, son développement au xxe siècle a été indissociable d’une double orientation à la fois sur la culture méditerranéenne (comme chez Jarosław Iwaszkiewicz, Jan Parandowski et Zbigniew Herbert), en reprise d’anciennes et originelles traditions (on pensera notamment à Jan Kochanowski), et l’échelle mondiale (comme chez Gustaw Herling, Czesław Milosz, Witold Gombrowicz).
À cela s’ajoute que l’héritage culturel de l’ancienne Pologne (celle qui coïncide largement avec les « terres de sang » délimitées par Timothy Snyder) peut être revendiqué par – au moins – cinq communautés : polonaise, lituanienne, ukrainienne, biélorussienne et juive. Il faut espérer qu’ils seront nombreux ceux qui en France s’attacheront à exhumer cette Atlantide culturelle, je pense notamment à la mise à disposition du public français de cet incomparable roman de la fin du xixe siècle qu’est la Poupée de Bolesław Prus, de la Trilogie de Henryk Sienkiewicz (composée du Déluge et de Messire Wołodyjowski, et non uniquement de Par le fer et par le feu), des poésies de Bolesław Leśmian, Julian Tuwim et Władysław Broniewski, des romans de Maria Dąbrowska, Zofia Nałkowska, Maria Kuncewiczowa ou encore de Hanna Malewska.
1 Sauf avis contraire, je traduis toutes les citations.