Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : La Littérature en bas-bleus. Tome III. Romancières en France de 1870 à 1914
- Pages : 337 à 342
- Collection : Masculin/féminin dans l’Europe moderne, n° 13
- Série : xixe siècle, n° 4
RÉSUMÉS
Brigitte Louichon, « Discours sur les bas-bleus entre 1870 et 1914 »
Cet article s’intéresse aux discours sur les bas-bleus, c’est-à-dire au discours dévalorisant sur la femme auteur. Le recours à cette appellation dépréciative inchangée depuis des décennies masque des évolutions. La période qui va de 1870 à 1914 est riche pour les femmes en avancées législatives et sociétales mais celles-ci font constamment débat. Les Bas-bleus, l’ouvrage de Barbey d’Aurévilly, paru en 1877 est le point de référence pour toute cette période, qu’il soit critiqué ou copié.
Andrea Del Lungo, « Les raisons d’un oubli. Quelques remarques sur l’exclusion des femmes du canon littéraire au tournant du xxe siècle »
C’est au tournant du siècle que l’histoire littéraire se constitue comme discipline et comme forme de transmission du savoir. Cette période marque l’apogée d’un mouvement de dévalorisation qui tend à exclure les femmes auteurs du canon littéraire. Cet article analyse la place qu’occupent les romancières du xixe siècle dans les manuels d’histoire littéraire, puis définit des critères possibles d’exclusion, par référence à deux discours critiques : Les Bas-bleus de Barbey d’Aurevilly, et Nos femmes de lettres de Paul Flat.
Margot Irvine, « “…et je serais désireux de l’avoir, cette collaboration féminine”. Goncourt, Daudet, Bonnetain et la collaboration littéraire des femmes »
Il existe plusieurs exemples de collaborations entre des écrivains naturalistes et des femmes de leur réseau : Julia Daudet collabore avec son mari et ses carnets sont utilisés par Edmond de Goncourt, Paul Bonnetain collabore avec l’actrice Marie Colombier et avec son épouse, Raymonde. Ces collaborations ont permis aux femmes de développer des carrières littéraires et permettent d’imaginer de nouvelles associations professionnelles entre hommes et femmes dans la société de la Belle Époque.
338Patricia Izquierdo, « La réception de trois romancières entre 1903 et 1914 (Anna de Noailles, Gérard d’Houville et Lucie Delarue-Mardrus) »
Cet article concerne la parution de douze romans écrits par trois femmes poétesses, Anna de Noailles, Gérard d’Houville et Lucie Delarue-Mardrus, entre 1903 et 1914. L’étude présente trois approches successives : une approche sociocritique, avec l’analyse d’un texte de Lucie Delarue-Mardrus ; une approche sociologique qui s’intéresse aux modalités de diffusion et de réception des écrits d’Anna de Noailles ; enfin, une approche sociopoétique qui analyse les postures non discursives et discursives de Gérard d’Houville.
Rachel Mesch, « Femina, La Vie heureuse et le “féminisme littéraire” de la Belle Époque »
Cet article prend pour objet la symbiose entre la presse et la littérature féminines au début des années 1900, examinant le rôle joué par les magazines Femina et La Vie Heureuse dans le succès foudroyant des femmes écrivains. Ces revues proposent un nouveau modèle de féminité à travers « le féminisme littéraire de la Belle Époque », idéologie qui cherche à concilier la femme traditionnelle avec les nouvelles égalités de l’époque, et qui conduit la femme écrivain à un succès jusqu’alors inconnu.
Nicole Laval-Turpin, « Myriam Harry et le prix Vie heureuse. Une affaire de romancières »
En 1905, un jury de femmes, excédées par la suprématie masculine en matière littéraire, fonde le prix Vie heureuse, en réaction à une nouvelle distinction, le prix Goncourt qui venait de sacrifier la favorite, Myriam Harry, à un auteur mineur, Léon Frapié. Cette mobilisation féminine trouva appui et tribune dans la revue La Vie heureuse, démocratisant la pratique littéraire sans distinction de sexe. Après La Vie heureuse, en 1920 Femina sa rivale rebaptise et pérennise un prix toujours vivant.
Claire Barel-Moisan, « Utopies et dystopies au féminin »
Dans les années 1870 et 1880, Louise Michel et André Léo cherchent à investir la fiction d’une parole politique. Dans La Commune de Malempis, André Léo a recours au conte, développant une dialectique constamment renégociée 339entre l’ancrage dans une réalité concrète et référentielle et l’énonciation d’un discours utopique. Avec Le Monde nouveau, Louise Michel se situe entre prose prophétique et roman populaire, mettant l’hybridité des registres et des esthétiques littéraires au service d’un projet révolutionnaire.
Isabelle Guillaume, « Joséphine-Blanche Colomb. Les jeunes filles modèles acquièrent une profession »
En vingt ans de carrière littéraire, Joséphine-Blanche Colomb a écrit une œuvre abondante publiée par la Librairie Hachette, à l’époque où l’éditeur du boulevard Saint-Germain développe son secteur destiné aux adolescents. En romancière, elle a accompagné, voire anticipé, les mutations des modèles féminins en incitant les jeunes filles de la bourgeoisie à s’assurer une source de revenus par leur travail. Elle a situé sa réflexion sur le terrain de la conquête d’une indépendance financière.
Béatrice Laville, « Une écriture de l’engagement »
Cet article montre combien l’écriture engagée de la femme auteur constitue un double danger : prolifération d’une parole subversive et altération des prérogatives masculines. L’écriture des femmes qui parlent au nom des sans voix est vécue comme une menace symbolique et économique par leurs confrères. Marie-Anne de Bovet et Marie-Louise Gagneur éclairent une littérature pensée comme transitive, et suggèrent que la femme est habilitée à penser une refondation éthique et politique… mais aussi des formes littéraires.
Laurent Robert, « La tentation du roman à thèse chez Daniel Lesueur »
Dans Nietzschéenne (1908), roman de la maturité, Daniel Lesueur (1860-1920) se confronte aux textes du « philosophe à la mode » à l’époque, Friedrich Nietzsche. Prenant au mot ceux qui veulent voir l’influence de Nietzsche dans toute manifestation d’indépendance et de créativité féminine, elle fait sciemment du philosophe un « professeur d’énergie ». Nietzschéenne lui permet aussi d’explorer la possibilité du roman d’idées, proche plutôt d’un modèle zolien que du moralisme d’un Bourget.
340Laetitia Hanin, « Devenir du modèle “champêtre” chez deux romancières de la fin du xixe siècle. Thérèse Bentzon et Henry Gréville »
Cet article étudie la postérité des romans dits « champêtres » de George Sand en France sous le Second Empire et la Troisième République. Deux pistes sont suivies : la référence au modèle sandien dans le discours de la critique sur la représentation littéraire du paysan pendant cette période ; la représentation du paysan dans des romans de femmes (Thérèse Bentzon, Henry Gréville).
Cheryl Morgan, « Marc de Montifaud. De la comédie au comique lubrique »
Cet article situe la fiction de Marc de Montifaud dans le contexte du comique littéraire français. Le rire devient une arme autour de 1880 dans la fiction de cette héritière de Rabelais et de Balzac, qui refuse alors les diktats d’une écriture genrée et s’attaque à la censure et à l’ordre (im)moral de l’époque. Quand Montifaud aborde le sexe et le rire, elle s’aventure dans des terres où la plupart des écrivaines ne vont pas et passe de la comédie érotique de ses romans au comique lubrique de ses nouvelles.
Juliette M. Rogers, « Les femmes, l’argent et l’humour à la Belle Époque. Les Escompteuses (1883) d’Olympe Audouard »
Quelles représentations les auteures de la Belle Époque ont-elles créées des femmes financières ? Cet article se focalise sur Les Escompteuses d’Olympe Audouard, nouvelle qui décrit une société économique menée par les femmes. Elle offre non seulement un foisonnement de portraits de femmes sachant manipuler l’argent, mais aussi une structure dramatique qui rappelle ses pièces de théâtre et discours politiques ainsi qu’un usage, fort inusité à l’époque, de l’humour pour discuter du pouvoir dans le monde de la finance.
Marie-Francoise Berthu-Courtivron, « Les distorsions du genre dans les premiers romans de Colette »
Les romans de Colette publiés avant 1914 sont analysés au prisme du genre. Ils illustrent la tentative des femmes d’intérioriser leurs lois du genre et de se conformer à un impératif mimétique. Tout concourt à les façonner, tout en les persuadant que ce jeu de rôle leur est naturel. Mais un brouillage 341des catégories vient dans l’œuvre saper insidieusement la binarité des sexes et interroger le cloisonnement arbitraire du genre, pour considérer comme travestissement le produit artificiel de la fabrication sociale.
Claude Puidoyeux, « La comtesse de Gencé, traductrice ou auteure du roman de Collodi, Les Aventures de Pinocchio ? »
La Comtesse de Gencé, nom de plume de Marie-Louise Pouyollon (1872-1951 ?), accède à la postérité grâce à la traduction de l’œuvre de Collodi Le Avventure di Pinocchio. Cette traduction est considérée comme une matrice des traductions françaises ultérieures. L’article s’interroge sur les raisons d’une telle influence. Il met en évidence la posture auctoriale adoptée par la traductrice dans l’avant-propos de l’édition originale et montre comment cette posture oriente encore la réception de l’œuvre de Collodi.
Laurence Brogniez, « Bas-bleus et draps blancs. Femmes et littérature spirite (1865-1914) »
Cet article a pour objectif de questionner le rôle qu’a pu jouer, pour les femmes, le mouvement spirite en France, dans la seconde moitié du xixe siècle, en tant qu’espace d’émancipation et d’expression. Pour répondre à cette question, l’étude examine la production littéraire de quelques « bas-bleus » actifs dans les milieux spirites en nous appuyant sur deux hypothèses : l’existence d’un lien fort entre spiritisme et féminisme d’une part, et entre spiritisme et littérature d’autre part.
Laura Colombo, « Gynographie et chorégraphie. Le discours sur la danse chez les écrivaines au tournant du xxe siècle »
De 1870 à 1914, le geste de l’écriture et les gestes de la danse se conjuguent de plus en plus chez les romancières, telles Jean Bertheroy, Rachilde et Colette. Désormais libérées de l’exigence exclusive de légitimer leur auctorialité et leur relation à la publicité, les écrivaines se jouent des tabous et des fantasmes en mettant en scène un corps déculpabilisé par l’accent mis sur sa prestation physique, et qui donne à voir les difficultés des femmes ainsi que leur droit à la réalisation personnelle et artistique.
342Michela Gardini, « Jane de la Vaudère sous le signe de l’occultisme »
Cet article propose une analyse de la modalité de réélaboration de l’imaginaire de l’occultisme dans l’œuvre de Jane de la Vaudère (1857-1908). Par une écriture qu’on pourrait définir de somnambulique, l’écrivaine se fait l’intermédiaire entre les dépositaires d’un savoir secret et son public. En entrecroisant souvent surnaturel, science et technique, l’écriture de Jane de la Vaudère, caractérisée par le citationnisme et l’intertextualité, incarne une reformulation tout à fait originale de la culture décadente.
Marie-Christine Desmaret, « Modélisation et différences dans Après la pluie, le beau temps de la comtesse de Ségur »
L’analyse concerne le jeu anamorphique des portraits et la question des minorités – raciale et féminine – dans l’un des derniers textes de Sophie Rostopchine, conte et roman d’apprentissage, relevant d’une étude à la fois genrée, visuelle et culturelle ; l’écriture met en place un dispositif instaurant un jeu de tensions qui revisite les stéréotypes pour définir le récit comme le lieu d’exercice de la liberté.
Martine Reid, « À propos du Massacre des Amazones de Han Ryner »
Ouvertement misogyne, l’ouvrage de Han Ryner passe en revue les publications contemporaines écrites par des femmes pour les décrier à peu près unanimement. Conçue en deux parties, cet article porte une réflexion sur la singularité du travail de Ryner et le sens de ses attaques contre les femmes auteurs, mais aussi sur la personnalité curieuse de cet anarchiste, auteur de quelques romans qui tous interrogent, assez grossièrement, la question de la différence et de l’orientation sexuelle.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-06310-0
- EAN : 9782406063100
- ISSN : 2261-5741
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06310-0.p.0337
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 18/04/2017
- Langue : Français