Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : La Couronne littéraire d’André Suarès
- Pages : 393 à 398
- Collection : Rencontres, n° 172
- Série : Littérature des xxe et xxie siècles, n° 25
Résumés
Vital Rambaud, « Suarès contre Barrès »
Suarès n’a jamais éprouvé la moindre admiration à l’égard de Barrès qu’il a, au contraire, toujours méprisé et systématiquement rabaissé ou ridiculisé. C’est même, en grande partie, contre lui qu’il a composé son Voyage du Condottière. S’il s’est aussi constamment opposé à l’auteur du Culte du Moi et de La Colline inspirée, c’est au nom d’une certaine conception de l’art et de la vie : Barrès n’a jamais cessé d’être, à ses yeux, un anarchiste fasciné par la mort.
Frank Lestringant, « Gide et Suarès »
Très réservé d’abord sur Suarès dont il critique le « faux sublime », Gide en vient néanmoins à l’apprécier, et le fait entrer comme chroniqueur à La N.R.F. Mais lorsqu’il s’agit de Rimbaud, il le sacrifie à Claudel. Les deux hommes, qui se sont à la fois compris, comme en témoigne une belle lecture par Suarès de L’Immoraliste, et détestés, se brouillent en 1925 quand Gide vend avec ses livres, quelques lettres de Suarès qu’ils contiennent.
Jacques Lecarme, « De Suarès à Malraux »
Suarès a trouvé des lecteurs passionnés dans la génération de ses cadets. Montherlant, Drieu la Rochelle, Rivière en ont témoigné. Mais l’influence la plus profonde et la moins avouée s’est exercée sur André Malraux. Elle implique une image du héros et de l’artiste, un ton et un style qui tendent à l’ellipse et à la grandeur. Après l’avoir montré, on s’est attaché à la figure du Condottière dans les derniers écrits sur l’art de Malraux : celui-ci a accompli pleinement le rêve échoué de celui-là.
394Paola Cattani, « “Je suis Pascal sans Jésus-Christ”. Douleur et religion chez Suarès »
Pourquoi et comment Suarès peut-il se concevoir comme étant à la fois « chrétien » et « païen » ? L’article explore les présupposés de ce paradoxe à partir des réflexions de Suarès sur Pascal ; en analysant la façon dont la lecture de Pascal par Suarès prend forme en réaction à d’autres lectures contemporaines (notamment celles de Barrès et de Bourget), il attire l’attention sur la signification et le rôle que le thème de la « douleur » acquiert dans la réflexion de Suarès.
André Guyaux, « Le Baudelaire d’André Suarès »
Baudelaire est pour Suarès une figure tutélaire, presque une obsession. Son admiration rencontre un consensus en train de se former. Il s’en distingue par une intensité hagiographique, s’identifiant au poète persécuté et martyr de la poésie et invectivant Jeanne Duval, « la roue de cet Ixion ». Il voit en Baudelaire « notre Dante », un esprit paneuropéen ; mais il est attentif aussi au travail du vers, et souligne l’importance de l’écoute de Wagner par un poète lui-même « musical ».
Adrien Cavallaro, « Les deux Rimbaud de Suarès »
Longtemps resté intime, le rimbaldisme de Suarès, dont témoignent une série de textes et de notes des années 1910-1920, ne se réduit pas à une « ténébreuse affaire » au sein de La N.R.F., avec Claudel pour marionnettiste, comme a pu le soutenir Étiemble. En opposition au mythe catholique, Suarès forge un Rimbaud qui s’inscrit dans la lignée du « double Rimbaud » de Segalen, et qui, par le réinvestissement de l’œuvre et du mythe, participe en plein de l’élaboration d’une mythopoétique de réception.
Marc Porée, « Suarès au miroir des écrivains de langue anglaise »
Adepte d’une critique au miroir, à la « courbure » prononcée, Suarès refléta dans sa prose les grands auteurs anglo-saxons. Entre détestation et adulation, il confirme plus qu’il ne corrige à leur contact son équation personnelle. Son angle d’attaque varie, mais il soumet les auteurs qui le requièrent, l’Écossais Thomas Carlyle, le Nord-Américain Edgar Poe, l’Anglais Keats et le Celte 395(sic) Shakespeare, « prince des poètes », à un même désir, celui d’une langue d’ici plus que d’ailleurs.
Lourdes Rubiales, « Don Quichotte après le Condottière »
Suarès n’a pas visité l’Espagne, mais il a œuvré pour se faire connaître dans ce pays. L’étude est centrée sur le Cervantès paru en 1916. Alors que l’Espagne reste neutre, Suarès fait de don Quichotte « le plus grand des poilus » et mêle à son éloge des diatribes contre les boches. Traduit par Ricardo Baeza, le livre est reçu comme un manifeste « alliadophile », dont on souligne la convergence avec les vues d’Unamuno. Mais Suarès voyait aussi en don Quichotte l’exemple de sa propre folie héroïque.
Didier Alexandre, « André Suarès et Paul Claudel, écritures en guerre »
Claudel n’a pu convertir Suarès, mais ils ont partagé le même engagement pendant la guerre. Celui de Suarès est plus chauvin et plus haineux, celui de Claudel plus retenu et plus officiel. Tous deux inscrivent le conflit dans une réflexion sur l’histoire des civilisations et des religions, et feront le lien entre les deux guerres. Ce qui les sépare dans la perception du pangermanisme tient, face au catholicisme de Claudel, au fait que Suarès ne reconnaît comme absolu que l’art et la littérature.
Michel Jarrety, « Vues sur l’Europe »
Suarès a fait paraître en avril 1939 des Vues sur l’Europe écrites de 1929 à 1935 et qui s’attachent à définir l’action que les démocraties devraient conduire pour se protéger de la menace italienne et allemande. Sous un titre d’apparence distanciée, ce livre qu’on a parfois lu comme une sorte de prophétie laisse difficilement percevoir qu’il s’agit avant tout d’une œuvre de combat que sa nature pamphlétaire rend largement manichéenne et du même coup souvent peu convaincante.
Michel Drouin, « Le cycle prophétique »
Vues sur l’Europe, loin d’être un simple pamphlet, contient une architecture secrète inspirée de la Bible : Suarès y intervient en tant que juif, par 396solidarité avec les juifs d’Allemagne. Dès sa lecture de Mein Kampf, il pressent les massacres qu’appelle l’idolâtrie de la race : « Qui invoque la biologie renie l’homme. » Il s’insurge contre la faiblesse des démocraties et prône le réarmement, tout en défendant une paix fondée sur la liberté et la charité, position qu’il réaffirmera après la guerre.
Frédéric Gagneux, « André Suarès, Richard Wagner et le wagnérisme français »
La découverte de l’œuvre de Richard Wagner, alors qu’il est encore enfant, marque profondément André Suarès. Il est impressionné par le musicien, le dramaturge et théoricien de l’art total, et déclare même en 1890 vouloir devenir « Wagner plus que lui ». Le wagnérisme et la recherche d’un art complet nourrissent ses premiers écrits. Sa réflexion esthétique se cristallise autour de la figure du compositeur. Confronté aux deux guerres mondiales, il invoque Wagner dans ses essais sur l’Allemagne.
Marie Gaboriaud, « Masculin et féminin dans la critique musicale d’André Suarès »
L’intérêt constant de Suarès pour le genre, et la violence de ton qu’il manifeste à ce propos, appellent l’analyse. Son œuvre de critique musicale est un lieu privilégié pour l’expression d’une gynophobie dont l’article étudie les variations et les contradictions à travers les discours suarésiens sur Chopin, Beethoven, Wagner, Mozart et Debussy. Il apparaît que le genre n’est pas un simple thème mais bien une question transversale, et qui manifeste des tendances de pensée profondes chez l’écrivain.
Antoine de Rosny, « L’Antiquité dans le théâtre de Suarès »
Toute sa vie, Suarès a pratiqué l’écriture théâtrale et s’est laissé inspirer par l’Antiquité. Pourtant, c’est l’essayiste que la postérité a retenu, non le dramaturge ; et c’est à d’autres noms que l’on associe, à son époque, la création de pièces mythologiques. La présente contribution entend faire resurgir un pan peu connu de l’œuvre suarésienne, marqué du double sceau de l’échec (celui des premiers projets) et de l’ambiguïté générique (celle des pièces postérieures à 1910).
397Pascal Dethurens, « La tentation du roman dans le Voyage du Condottière »
Le Voyage du Condottière n’est plus aussi lisible qu’il l’a été, et on peut voir dans cette désaffection une forme d’injustice. Mais ce qui rend l’œuvre digne d’être sauvée de l’oubli, en dépit des critiques qui lui ont été adressées, tient à ses caractéristiques mineures. Ses lourdeurs stylistiques, esthétiques et morales n’occultent pas sa propension à faire roman, à tirer le récit de voyage et la description d’art vers le roman. Et ce roman, méconnu, singulier, donne tout son sens au Voyage.
Pauline Bernon-Bruley, « Aspects du style de Suarès critique. Un “fil de gemmes rompu” ? »
La conception suarésienne du style associe la dévaluation de la rhétorique scolaire à la promotion classique du génie d’une dispositio singulière, dans une langue simple. Suarès vise ainsi une « grandeur » qui se laisse observer dans son discours sur l’ellipse, correspondant à un imaginaire du langage sur fond de pensée et de passions, et à ses réalisations sur les plans syntaxique et rhétorique. Cette figure, souvent associée à une éloquence des passions, contribue ainsi à la pose du ton.
Dominique Millet-Gérard, « Poétique de Suarès dans Antiennes du Paraclet »
Cet article s’intéresse au recueil posthume (alors que les poèmes datent de 1939) intitulé Antiennes du Paraclet. On y étudie, comme le titre y invite, le recours aux formes liturgiques, suscité par le dialogue avec Claudel, puis les trouvailles rythmiques mises en œuvre dans un cadre apparemment très classique. On tente enfin de résoudre l’énigme de ce « Paraclet » suarésien, dont le motif habite les poèmes comme il a hanté l’auteur tout au long de sa vie.
Clément Girardi, « Une mathématique pour Bergson. Figures de la science suarésienne »
L’œuvre d’André Suarès, après la guerre, est parcourue par l’idée que la philosophie bergsonienne ne s’accomplira réellement que lorsqu’elle parviendra à se donner une mathématique. Cet article essaie d’analyser cette proposition aussi centrale pour l’imaginaire scientifique suarésien qu’elle est paradoxale pour Bergson, et d’en tirer des conclusions quant à la signification 398du bergsonisme de Suarès : syncrétique, unitaire, orienté par la pensée d’un temps plein et d’une substance sans défaut.
Gustave Fayet, « Témoignage. Comment j’ai connu Suarès »
Le peintre et décorateur Gustave Fayet (1865-1925), ami d’Odilon Redon, acquéreur de l’abbaye de Fontfroide qu’il restaura, rencontre Suarès au début des années vingt. Les deux hommes se lient d’amitié. Gustave Fayet, qui illustra le recueil japonais de Suarès et le reçut souvent dans sa maison d’Igny, évoque de façon très vivante le souvenir de leurs rencontres.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-05982-0
- EAN : 9782406059820
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-05982-0.p.0393
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 21/12/2017
- Langue : Français