Résumés et présentations des auteurs
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Théâtre et Peuple. De Louis-Sébastien Mercier à Firmin Gémier
- Pages : 581 à 593
- Collection : Rencontres, n° 332
- Série : Études théâtrales, n° 3
Résumés
et présentations des auteurs
Pierre Frantz, « Le peuple dans la théorie théâtrale des Lumières. Diderot et Mercier »
Pierre Frantz est professeur de littérature française à l’université Paris-Sorbonne. Spécialiste du théâtre du xviiie siècle, ses principaux domaines de recherche sont l’histoire et l’esthétique du théâtre, et l’histoire des idées esthétiques. Il dirige en ce moment l’édition du théâtre complet de Voltaire.
Pour analyser la place du peuple dans la théorie théâtrale des Lumières, il faut remonter au procès de différenciation progressive que les historiens ont observé et qui, du xvie au xviiie siècle, caractérise la culture des élites et la sépare de formes culturelles de longue durée. Déterminant dans une terminologie complexe les relations entre le théâtre et le peuple, les théories théâtrales des Lumières ont inscrit leur pensée dans l’écart qui sépare l’utopie de la réalité du public de théâtre.
Gauthier Ambrus, « Charles IX, 4 novembre 1789. La tragédie sur la scène du peuple »
Gauthier Ambrus prépare une thèse sur Marie-Joseph Chénier. Il est l’auteur de plusieurs articles sur le théâtre de la Révolution et sur Jean-Jacques Rousseau. Il a coédité avec François Jacob, le Théâtre de Marie-Joseph Chénier (Paris, 2002).
Créé au Théâtre-Français en novembre 1789, Charles IX, ou la Saint-Barthélemy, tragédie historique de Marie-Joseph Chénier, inaugure la révolution du monde des spectacles. Contestation radicale de la censure, la pièce renouvelle la question du public en l’identifiant non plus à une élite mais au peuple, conçu à la fois comme nation, comme opinion éclairée et comme masse collective. Les témoignages contradictoires des contemporains donnent la mesure du bouleversement politique et esthétique qui s’en est suivi.
582Maurizio Melai, « La représentation du peuple dans les dernières tragédies classiques au xixe siècle (1819-1845) »
Maurizio Melai, docteur en lettres modernes des universités de Pise et Paris-Sorbonne, est actuellement professeur de français dans le secondaire. Spécialiste du genre tragique en France au xixe siècle, il a récemment publié Les Derniers Feux de la tragédie classique au temps du romantisme (Paris, 2015) et dirigé un numéro de la revue Orages (Le Tragique moderne, no 14).
Comparant les tragédies du xixe siècle à sujet romain et celles à sujet médiéval, cet article mène une réflexion sur l’évolution du concept de fatum tragique à l’époque postrévolutionnaire. Les dramaturges libéraux voient dans l’antiquité romaine un espace préchrétien où le libre arbitre exercé par le peuple échappe à la tyrannie du fatum, incarnée par le trône et l’autel. Par ce biais, ces dramaturges critiquent toute tentative de revenir à l’Ancien Régime et préconisent le progrès social.
Patrick Berthier, « Les personnages populaires et le genre “poissard” au théâtre des Variétés (1807-1820) »
Patrick Berthier, professeur émérite à l’université de Nantes, a travaillé sur Honoré de Balzac, le romantisme, la presse littéraire des années 1830, l’histoire du théâtre. Il a notamment publié Le Théâtre en France de 1791 à 1828 (Paris, 2014) et dirige la première édition intégrale de la Critique théâtrale de Théophile Gautier (Paris, depuis 2007).
Ouvert en 1807, le théâtre des Variétés prend la suite du théâtre Montansier, lui-même tributaire du théâtre « poissard » de Vadé dans les années 1750. Les décrets impériaux officialisent cet héritage en inscrivant dans son privilège ces thèmes du « poissard » et du « grivois ». L’étude proposée examine à cette lumière ce que ce théâtre, dans ses quinze premières années d’existence, a de populaire dans son répertoire et ses acteurs.
Roxane Martin, « Du peuple et du populaire dans le mélodrame de Pixerécourt. Fondements d’une poétique »
Roxane Martinest professeur à l’université de Lorraine. Spécialiste du théâtre français du xixe siècle, elle a notamment publié La Féerie sur les scènes parisiennes, 1791-1864 (Paris, 2007), et L’Émergence de la notion de mise en scène dans le paysage théâtral français 1789-1914 (Paris, 2014). Elle dirige l’édition des Mélodrames de Pixerécourt (Paris, depuis 2013).
583Les notions de « peuple » et de « populaire » sont intimement liées à la pratique et la réception du mélodrame. À travers l’analyse des textes théoriques de Pixerécourt, éclairée par celle de ses mélodrames et de la façon dont le peuple y fut représenté, l’article met en perspective le rôle esthético-politique que l’auteur attribua au genre et, par ricochet, éclaire la fracture idéologique qui se fit jour sous la monarchie de Juillet entre le père du mélodrame moderne et les défenseurs du drame romantique.
Sylviane Robardey-Eppstein, « Foules belliqueuses pour foules sentimentales. Le Théâtre du Cirque-Olympique comme école du peuple dans le discours critique : visions paradoxales »
Sylviane Robardey-Eppstein, maître de conférences HDR en littérature française à l’université d’Uppsala, est l’auteur d’une thèse sur la métathéâtralité dans le drame hugolien (Uppsala, 2004). Ses travaux portent notamment sur les didascalies et les relations texte-scène dans le théâtre romantique. Elle a codirigé Revoir la fin. Dénouements remaniés au théâtre (xviiie-xixe siècles) (Paris, 2016).
Souvent historiques et militaires, toujours « oculaires », les pièces du Cirque-Olympique lui ont valu le statut d’école du peuple, notion chargée d’idéologie et de mésestime. Le discours critique du temps a exacerbé le clivage axiologique entre littéraire et spectaculaire et mis en avant le rôle didactique et social de ce théâtre. Ainsi a été occulté son apport esthétique, précurseur de la rénovation scénique moderne, qui avait fait du peuple le premier témoin du romantisme théâtral naissant.
Noémi Carrique, « Histoire du théâtre, histoire populaire. Regard de Guizot sur les liens entre le peuple et la scène dans son Étude sur Shakspeare, 1821 »
Noémi Carrique, normalienne agrégée de lettres, écrit une thèse sur les figures d’assassins dans le théâtre romantique. Elle a publié en ligne des contributions sur Robert Macaire et Giuseppe Fieschi. Dans l’ouvrage collectif Revoir la fin (Paris, 2016), elle étudie les enjeux du parricide. En 2014 elle a travaillé sur les figures d’assassins chez Mérimée et sur le geste homicide au mélodrame.
En 1821, François Guizot préface sa nouvelle traduction du théâtre de William Shakespeare. Il y mène une analyse fine et approfondie de ce qu’est, ce que fut et ce que devrait être le théâtre, où la notion de peuple tient une place essentielle. Ses réflexions complexes et parfois paradoxales sur les liens entre le peuple et le théâtre, mêlant histoire politique et histoire littéraire, 584aspirations utopiques et réalités concrètes du théâtre, donneront quelques ingrédients à la théorie romantique.
Florence Naugrette, « Le public idéal des romantiques : peuple, foule, masse ? De l’utopie au malentendu »
Florence Naugrette, professeur à l’université Paris-Sorbonne, a publié Le Théâtre romantique (Paris, 2001), Le Plaisir du spectateur de théâtre (Levallois-Perret, 2002) et Le Théâtre de Victor Hugo (Lausanne, 2016). Elle a codirigé Le Théâtre français du xixe siècle (Paris, 2008), Victor Hugo. Le Théâtre et l’exil (Caen, 2009). Elle dirige l’édition collective en ligne des lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo.
Dans quelle mesure les romantiques ont-ils voulu réussir un théâtre populaire ? Les préfaces de Victor Hugo à son théâtre, étudiées dans leur évolution chronologique, permettent de suivre la relation fantasmée à son public du dramaturge romantique qui, avec George Sand, a laissé le plus de traces écrites sur cet idéal en partie utopique. Les travaux de la commission chargée sous la IIe République de réfléchir à la mission de l’État dans l’institution d’un théâtre pour le peuple en montrent l’enjeu politique.
Marion Lemaire, « Robert Macaire et Frédérick Lemaître. Héros du peuple, hérauts du théâtre populaire ? »
Marion Lemaire, docteure en études théâtrales, est l’auteur d’une thèse intitulée « Robert Macaire : la construction d’un mythe. Du personnage théâtral au type social. 1823-1848 ». Elle consacre ses recherches à l’étude du couple Robert Macaire/Frédérick Lemaître et aux méthodes de l’historiographie théâtrale.
Cette étude des discours critiques produits autour des représentations de L’Auberge des Adrets et de Robert Macaire, permet de mesurer l’impact social du personnage de Robert Macaire et sa réception comme héros du peuple. En devenant un type social, le personnage de Robert Macaire sous-tend des enjeux politiques et esthétiques que notre étude met en exergue afin de comprendre son influence dans le développement, au sein de la critique, de la catégorie du populaire.
585Marjolaine Forest, « Marie-Jeanne ou la Femme du peuple. Le mélodrame social en ses contradictions »
Marjolaine Forest est vacataire à l’université Lumière – Lyon 2 et membre associée de l’UMR IHRIM. Ses travaux concernent l’histoire des représentations mentales, sociales et culturelles dans le théâtre et l’opéra romantiques. Elle prépare un essai dans lequel elle s’emploie à créer le concept de somatisation du social appliqué aux principales formes romantiques d’expression scénique.
Apparu dans les années 1840, le mélodrame social fédère un répertoire tendu vers le désir de mettre en acte sa réflexion sur la récente visibilité de la question sociale. Contant, à grand renfort de ficelles lacrymales, les multiples infortunes d’une couturière, Marie-Jeanne a certes le mérite d’éclairer cette question à la lumière de la condition féminine ouvrière ; cependant, cette pièce se singularise aussi par l’équivocité de sa représentation du peuple comme de la femme.
Alban Ramaut, « Présence du peuple et du populaire dans la musique et l’opéra d’Hector Berlioz »
Alban Ramaut, ancien élève du CNSMD de Paris, est professeur de musicologie à l’université Jean-Monnet – Saint-Étienne et membre titulaire du laboratoire IHRIM. Sa recherche porte sur l’articulation xviiie-xixe siècle. Il a notamment publié Généalogies du romantisme musical français (Paris, 2012) et D’un Orphée l’autre, 1762-1859. Métamorphoses d’un mythe (Saint-Étienne, 2014).
La personnalité créatrice d’Hector Berlioz manifeste pour la musique du peuple une attirance qui mérite attention : c’est le combat contre l’académisme et le succès de la musique savante qui s’y révèle. L’exemple du séjour de Berlioz à Rome est à ce titre très instructif puisqu’on voit le compositeur fuir les salons, les églises et les théâtres pour rejoindre les montagnes des abbruzzes et les musiques des villages. Autant de forces contradictoires qui sont mises en scène dans Benvenuto Cellini.
Philippe Régnier, « L’utopie saint-simonienne d’une refondation religieuse et populaire du théâtre (1830-1836) »
Philippe Régnier, directeur de recherche au CNRS, a consacré l’essentiel de sa carrière à mettre les outils de l’histoire et de l’analyse littéraires au service d’une réinterprétation tous azimuts des textes et de l’action du mouvement saint-simonien. 586Il a contribué à une réédition des Œuvres complètes de Saint-Simon (Paris, 2012), et est actuellement l’un des partenaires du projet ANR saint-simonisme 18-21.
Relues de près, les diverses interventions publiques des saint-simoniens (conférences, articles de journaux, brochures, prédications, cérémonies en plein air…) paraissent trouver leur cohérence littéraire dans l’ambition esthétique qu’ils présentent comme essentielle à leur projet de refondation religieuse moderne : réaliser performativement l’utopie d’une re-théâtralisation générale de la vie sociale et renouer ainsi avec les origines cultuelles et populaires les plus anciennes de la fête.
Françoise Sylvos, « Le fouriérisme et le théâtre du peuple en France au xixe siècle »
Françoise Sylvos est professeur de lettres modernes à l’université de La Réunion. Ses recherches portent sur la période romantique, mais aussi sur des auteurs de la fin de siècle et de l’océan Indien. Elle privilégie une approche politico-historique et sociocritique de la littérature. Elle est l’auteur de L’Épopée du possible ou l’arc-en-ciel des utopies, 1800-1850 (Paris, 2008).
Dans le monde meilleur des fouriéristes, le théâtre est un divertissement, un moyen d’éducation, d’élévation pour les classes modestes. Le théâtre est du reste une dimension intégrante du caractère humain et de la vie sociale. Au phalanstère (Condé-sur-Vesgres, familistère Godin), il occupe une place essentielle comme institution ou bâtiment et est présent, à travers des pièces pour enfants, dans des journaux d’obédience fouriériste.
Amélie Calderone, « La Baraque à Polichinelle de Savinien Lapointe ou la forme théâtrale populaire à l’épreuve de la légitimité du peuple »
Amélie Calderone est agrégée et docteur de l’université Lumière – Lyon 2 en langue et littérature du xixe siècle. Elle a soutenu en 2015 une thèse intitulée « Entre la scène et le livre. Formes dramatiques publiées dans la presse à l’époque romantique (1829-1851) ». Ses recherches portent sur le théâtre romantique, en particulier dans les relations qu’il noue avec le monde éditorial et médiatique au xixe siècle.
Savinien Lapointe, ouvrier cordonnier, édite en 1849 dans le feuilleton du Journal de la Vraie République une série de textes politiques, La Baraque à Polichinelle. Ces écrits se veulent « action » pour relever les masses populaires. Mais la quête d’une éloquence populaire semble vouée à devenir un populisme. Ces apories sont ainsi représentatives des difficultés rencontrées à l’époque par les classes les plus humbles pour faire émerger et reconnaître leur voix dans l’espace public.
587Sarah Mombert, « Alexandre Dumas et le théâtre populaire »
Sarah Mombert est maître de conférences à l’ENS de Lyon et membre de l’UMR 5317 IHRIM. Ses travaux portent sur le roman historique, le roman populaire et l’histoire de la presse au xixe siècle. Elle a dirigé l’édition numérique des journaux périodiques d’Alexandre Dumas.
Après la bataille romantique du théâtre, Alexandre Dumas cherche le moyen d’offrir au peuple un théâtre à la mesure de l’appétit culturel que lui a donné le progrès social de la monarchie de Juillet. Le Théâtre-Historique, immense salle dédiée aux représentations spectaculaires d’adaptations dramatiques de romans, matérialise ce rêve. Balayé par la tourmente de Février, puis en butte à l’hostilité du Second Empire, le rêve dumasien trouvera refuge dans la fiction des Mohicans de Paris.
Barbara T. Cooper, « Essai sur des pièces dites “populaires”. L’exemple des Carrières de Montmartre de Dupeuty et Bourget (1855) »
Barbara T. Cooper, professeure émérite de français à l’université du New Hampshire (USA), est spécialiste du théâtre français de la première moitié du xixe siècle. Elle s’intéresse aux grands auteurs romantiques, mais aussi au théâtre populaire et à la représentation des Noirs sur les scènes parisiennes. Elle a notamment publié Le Tremblement de terre de la Martinique (Paris, 2014) d’Adolphe Dennery.
Cette étude porte sur un corpus de pièces écrites entre 1830 et 1869 qui comprennent le mot « populaire » dans leur désignation générique. Elle examine en particulier Les Carrières de Montmartre (1855) afin de voir si l’on peut en dégager des caractéristiques spécifiques à cette sous-catégorie de pièces et mieux cerner le sens de l’adjectif « populaire ».
Marine Wisniewski, « Le café-concert, scène populaire ? »
Marine Wisniewski est docteur en littérature française de l’université Lumière – Lyon 2. Ancienne élève de l’ENS de Lyon, agrégée de lettres modernes, elle a consacré plusieurs articles au café-concert et à son inscription dans le paysage littéraire et culturel. Ses recherches portent sur les spectacles populaires, dans leur lien avec la littérature et le monde social.
D’abord considéré comme le divertissement des classes populaires, le café-concert, devient, avec l’avènement de la iiie République, le vecteur publicitaire de l’unité harmonieuse de la nation française. S’il peut donc être considéré 588comme une scène populaire à la fin du xixe siècle, ce n’est pas tant parce qu’il serait l’expression d’un groupe délimité de la société comme son ancêtre la goguette, mais parce qu’il ébauche une image efficace et pédagogique, fût-elle factice, du peuple-citoyen.
Claire Barel-Moisan, « Populariser les sciences sur scène. L’expérience du théâtre scientifique de Louis Figuier »
Claire Barel-Moisan est chargée de recherches au CNRS (UMR IHRIM, ENS-Lyon). Spécialiste de la poétique romanesque balzacienne, elle a publié des travaux portant sur la littérature romanesque du xixe siècle (en particulier sur Honoré de Balzac, George Sand et Gustave Flaubert). Elle dirige l’ANR Anticipation, sur le roman d’anticipation scientifique au tournant du xixe siècle (1860-1940).
Entre 1877 et 1889, Louis Figuier écrit douze pièces pour « populariser la science par le théâtre ». Avec des biographies de savants héroïsés (Johannes Kepler) ou présentés dans un cadre familier (Benjamin Franklin), Figuier poursuit son œuvre vulgarisatrice sur un nouveau support. Mais au-delà de cet enjeu didactique, en recourant aux codes du mélodrame et du vaudeville, Figuier expérimente un nouveau genre de théâtre populaire et militant, où viennent s’incarner les valeurs de la IIIe République.
Isabelle Martin-Pradier, « Populaires, spectaculaires, spéculaires. Les arts mineurs dans les premières œuvres pour la scène de Jean Cocteau »
Isabelle Martin-Pradier est professeure agrégée de lettres modernes en CPGE. Elle a soutenu à l’université Lumière – Lyon 2, sous la direction d’Olivier Bara, un Master 2 sur Jean Cocteau et les arts populaires, de Parade aux Parents terribles. Elle travaille désormais sur le théâtre inédit de George Sand et les petites formes adaptées des contes et féeries.
Enfant, hypnotisé par le spectacle, Jean Cocteau fait de cette modalité d’adhésion l’objet d’une quête poétique. Ses premières créations scéniques déploient les virtualités perçues dans la diversité des genres mineurs. Spectaculaires, il leur confère le pouvoir de régénérer le théâtre et le public. Le populaire est alors pensé comme la possibilité d’un autre public avec lequel il s’agit de coïncider, mais dont l’altérité est résorbée dans une quête de soi et dont la séduction fragilise l’assomption.
589Michèle Fontana, « Contre les “malfaiteurs du théâtre”. Combat de la réaction religieuse et politique »
Michèle Fontana, maître de conférences à l’université Lumière – Lyon 2 jusqu’en 2012, est membre associée de l’IHRIM. Spécialiste de l’œuvre de Léon Bloy, elle a publié de nombreux articles sur les rapports entre politique, presse et littérature au xixe siècle, sur la question des altérités et sur la littérature populaire. Elle est l’auteur de Léon Bloy, Journalisme et Subversion (1874-1917) (Paris, 1998).
Sous la IIIe République perdure une hostilité de principe au théâtre, jugé immoral et subversif. À l’argumentaire religieux devenu caduc se substitue l’autorité scientifique établissant la nature malsaine du théâtre, à réserver à un public socialement privilégié. La censure fait place à des projets globaux d’éducation du peuple que conduisent républicains et ligues réactionnaires. On observe toutefois, issues du monde catholique, quelques initiatives visant à recréer un théâtre populaire.
Marion Denizot, « Histoire et mémoire du “théâtre populaire” »
Marion Denizot est maître de conférences habilitée à diriger des recherches en études théâtrales à l’université Rennes 2. Ses travaux portent sur l’histoire des politiques et des institutions théâtrales, les héritages du théâtre populaire et les liens entre histoire et théâtre. Elle a notamment coédité Le Théâtre du Peuple de Bussang : cent vingt ans d’histoire (Arles, 2015) avec Bénédicte Boisson.
Le théâtre populaire, en tant que notion polysémique et labile, doit être envisagé dans sa double dimension d’objet historique et d’enjeu mémoriel. Retracer l’histoire du théâtre populaire oblige à intégrer une perspective mémorielle, afin de déceler les effets de reconstruction et de distorsion, mais aussi les éléments de permanence et de continuité qui caractérisent son histoire tout au long du xxe siècle.
Romain Piana, « Le théâtre grec antique, modèle utopique pour le théâtre populaire. Exégèse d’un lieu commun »
Romain Piana, maître de conférences à l’Institut d’études théâtrales de l’université Sorbonne nouvelle – Paris 3, est l’auteur d’une thèse intitulée « La réception d’Aristophane en France de Palissot à Vitez, 1760-1962 ». Il s’intéresse également à l’histoire du théâtre français du xixe siècle, sur lequel il a publié de nombreux travaux.
590Le théâtre grec antique apparaît généralement comme un mythe fondateur indiscuté pour le théâtre populaire, dont il est donné à la fois comme l’ancêtre et le modèle indépassable. Ce lieu commun est en réalité une construction du xixe siècle, inséparable de la réception du répertoire tragique et comique grec lui-même. D’abord véritablement structurant dans les utopies de théâtre populaire, le parallèle avec le théâtre athénien finit par se constituer en cliché à usage fréquemment idéologique.
Anne Pellois, « L’utopie symboliste d’un théâtre populaire »
Anne Pellois est maître de conférences en études théâtrales à l’ENS Lyon. Elle travaille sur le théâtre symboliste et la question de l’acteur (histoire, théories et pratiques du jeu, xixe-xxe siècles). Elle a codirigé Les Héroïsmes de l’acteurau xixe siècle (Lyon, 2015) et Le Rythme, une révolution ! Émile Jaques-Dalcroze à Hellerau (Genève, 2015). Elle est membre du comité éditorial de la revue Agôn.
Il semble paradoxal d’associer théâtre populaire et théâtre symboliste, tant ce dernier véhicule l’image d’un théâtre abscons et élitiste. Il existe bien, sinon une réalité, du moins un rêve symboliste de théâtre pour le peuple, associant ainsi les poètes au grand mouvement de réflexion autour de la question à la toute fin du xixe siècle, et prenant pour modèle fantasmé le spectacle grec. L’analyse questionne également les missions assignées à ce projet de théâtre : rassembler et éduquer.
Lucette Monnin-Tonetti, « La démocratisation de l’Opéra de Paris sous la IIIe République »
Lucette Monnin-Tonetti est musicienne et docteur en littérature française et comparée. Sa thèse, intitulée « Le Cahier des charges au Palais Garnier (1879-1914) : grandeur et misères du grand opéra », a été obtenue en 2013 sous la direction d’Olivier Bara et France Marchal-Ninosque. Elle est actuellement associée à l’équipe de recherche du Centre Jacques Petit de Besançon.
C’est sous la IIIe République que les gouvernants, qui avaient à cœur de démocratiser l’art musical, créèrent pour la première fois, en 1879, les représentations populaires, auxquelles s’ajoutaient les représentations gratuites qui pouvaient avoir lieu chaque fois que le gouvernement le requérait. Parallèlement, l’administration des Beaux-Arts sous l’égide du ministère de l’Instruction publique tenta de créer un opéra populaire.
591Sylvain Nicolle, « “Il est là le vrai théâtre populaire”. Les “représentations-ceintures” de l’œuvre des Trente ans de théâtre dans les faubourgs de Paris (1902-1914) »
Sylvain Nicolle, membre du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC) de l’université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines, est docteur en histoire. Sa thèse, La Tribune et la Scène. Les débats parlementaires sur le théâtre en France au xixe siècle (1789-1914), a reçu en 2016 le prix de recherche du CL 19 et le prix de thèse en histoire et droit parlementaires de l’Assemblée nationale.
« Le Bien par le Beau ». Telle est la devise que Gustave Larroumet donne à l’œuvre des Trente ans de théâtre fondée par Adrien Bernheim en 1901. Cette société philanthropique vise à secourir les gens de théâtre nécessiteux en organisant dès 1902 une série de galas populaires dans les faubourgs de Paris. Cette expérience de démocratisation théâtrale est interrogée à partir d’une enquête historique portant sur le choix des salles, le contenu du programme et l’accueil qui lui fut réservé.
Catherine Faivre-Zellner, « Le TNP de Firmin Gémier. Cheminement d’une “marotte” »
Catherine Faivre-Zellner est docteur en études théâtrales de l’université Sorbonne nouvelle – Paris 3. Elle est l’auteur de Firmin Gémier, héraut du théâtrepopulaire (Rennes, 2006), et a publié Théâtre populaire, Acte I (Lausanne, 2006, textes inédits de Firmin Gémier) et Firmin Gémier (Arles, 2009).
Firmin Gémier consacre sa vie d’acteur, de metteur en scène et de directeur de théâtre à donner forme à son idéal de théâtre populaire, sa marotte. Depuis le Festival Vaudois en 1903 jusqu’aux grands spectacles à partir de 1914, il invente le théâtre de la foule dont le Théâtre national populaire serait la structure institutionnelle. Premier directeur de la cinquième scène nationale fondée en 1920, puis abandonnée par les pouvoirs publics, Gémier jette les bases du théâtre populaire contemporain.
Nathalie Coutelet, « Firmin Gémier, une réforme scénique dédiée au “populaire” »
Nathalie Coutelet, maître de conférences au département Théâtre de l’université Paris 8 – Vincennes – Saint-Denis, mène des recherches sur les formes de théâtre populaire, l’histoire de la mise en scène, les relations entre spectacle et politique 592(fin xixe-début xxe siècles). Elle a publié Le Théâtre populaire de Firmin Gémier (Sarrebruck, 2010) et Démocratisation du spectacle et idéologie républicaine (Paris, 2012).
Firmin Gémier, connu comme le père fondateur du Théâtre national populaire, a pensé les relations entre public et art dramatique non seulement en termes de lieu, de tarifs ou de programmation, mais encore en termes de mise en scène. Pour ce faire, il crée les conditions d’un véritable rapprochement entre œuvre et public : fin du « quatrième mur » ; gigantesques escaliers ; richesse spectaculaire et sensorielle des scènes, afin de concrétiser le verbe pour les spectateurs modestes.
Amélie Gregório, « Henri-René Lenormand et Firmin Gémier. Une amitié au service du théâtre populaire »
Amélie Gregório est agrégée de lettres modernes. Professeure dans le secondaire, elle a soutenu une thèse de doctorat sur « L’Arabe dans le théâtre français, du début de la conquête de l’Algérie aux grandes expositions coloniales (1830-1931) », à l’université Lumière – Lyon 2. Ses travaux portent sur la question de l’altérité dans les arts de la scène, en relation avec la colonisation de l’Afrique du Nord.
Firmin Gémier et le dramaturge Henri René Lenormand sont deux personnalités de premier plan dans le milieu du spectacle parisien du début du xxe siècle. Au cœur des combats de leur époque pour le renouveau de l’art dramatique, ils n’ont cependant pas la même image auprès du public et de la postérité. Leurs parcours respectifs et les liens professionnels et amicaux qui les unissent permettent d’explorer la complémentarité, a priori paradoxale, entre le théâtre populaire et le théâtre d’art.
Bérénice Hamidi-Kim, « Théâtres populaires (républicain + socialiste + paternaliste) = théâtre public ? De la diversité historique des grammaires du théâtre populaire en France »
Bérénice Hamidi-Kim, ancienne élève de l’ENS de Fontenay, maîtresse de conférences en arts de la scène à l’université Lumière – Lyon 2, est directrice du laboratoire Passages XX-XXI (EA4160) et membre de l’IUF. À la croisée de l’esthétique et de la sociologie, ses travaux portent sur les enjeux politiques du théâtre entre fin xixe et xxie siècle et sur l’histoire des politiques publiques du spectacle vivant.
L’image du « long fleuve tranquille » a longtemps prévalu dans la description d’une évolution esthétique et institutionnelle majeure du théâtre en France : 593la transformation du théâtre populaire en théâtre public dans les années 1940, institution reposant sur des valeurs républicaines et démocratiques. Le présent article cherche à comprendre les principes fondateurs autant que les tensions constitutives d’un modèle qui prévaut encore aujourd’hui.
- Thème CLIL : 4028 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes de littérature comparée
- ISBN : 978-2-406-06866-2
- EAN : 9782406068662
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06866-2.p.0581
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 21/12/2017
- Langue : Français