Résumés
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Saintetés politiques du ixe au xviiie siècle. Autour de la Lotharingie-Dorsale catholique
- Pages: 285 to 289
- Collection: Encounters, n° 435
- Series: Religious history, n° 1
Résumés
Sylvène Edouard et Yves Krumenacher, « Introduction »
Le propos introductif met en évidence le lien fort entre sainteté et politique dans la chrétienté occidentale, catholique pour l’époque moderne. L’espace lotharingien, espace de la frontière, où pouvoirs civils et religieux sont intriqués, illustre l’enjeu de la sacralité comme instrument de la légitimité du pouvoir par le moyen de la sainteté, dont les normes créent une représentation mentale collective nourrie de pratiques institutionnelles, linguistiques et dévotionnelles.
Sébastien Fray, « Maurice, Julien, Martial et les autres. Culte des saints et rivalités politiques en Bourgogne et en Aquitaine du ixe au xiie siècle »
Ancrés autour de sanctuaires jouant un rôle important à l’échelle de leurs régions respectives (Bourgogne, Auvergne, Limousin), les cultes des saints Maurice, Julien et Martial ont connu des usages politiques variés au fil des ixe-xiie siècles. Il sera donc question, dans cet article, de mesurer l’importance des patronages saints et de la polarisation de leur culte au gré des changements politiques.
Anne Wagner, « Hagiographie et Gesta à Toul. Un exemple d’appropriation spirituelle et territoriale ? »
Les Gesta des évêques de Toul soutiennent une revendication politique qui se traduit par une main mise sur l’espace et par la mise en scène d’une sainteté épiscopale à la fois ancienne et actualisée. Le modeste rayonnement de la cité est plus limité que celui du vaste diocèse et, d’autre part, les reliques sont disputées entre la cathédrale et les grandes abbayes comme on le constate dans le cas des miracles de saint Èvre.
286Marie-Céline Isaïa, « Saint Antelme de Belley (et d’ailleurs) »
La Vie de saint Antelme évêque de Belley publiée par Jean Picard (1978) garde la trace de l’histoire complexe du texte hagiographique : l’Église de Belley a exalté la mémoire locale de son pasteur tandis que la tradition monastique a préféré insister sur le caractère existentiel d’une vocation cartusienne qui ne dépend ni des lieux ni des états. C’est la tradition la plus spirituelle qui a été diffusée comme vulgate sur les origines de l’Ordre et un modèle de sainteté exportable.
Julie Dhondt, « Les dauphins et le culte de saint Antoine (xive-xve siècles). De l’intercession du saint thaumaturge à celle du garant de la pérennité de la lignée delphinale »
Figure essentielle du sanctoral dauphinois, saint Antoine l’Égyptien incarne un recours évident et nécessaire pour les dauphins. Nous verrons comment ces derniers sont parvenus à investir son culte et quel fut leur rôle dans la mutation progressive de l’identité du saint. D’Humbert II à Louis XI, les pratiques dévotionnelles des dauphins au sein de l’abbaye de Saint-Antoine-en-Viennois seront présentées au regard du rôle complexe joué par les Antonins, les riches laïcs et les fidèles.
Bruno Maes, « Pèlerinages royaux à Marie et unification du territoire français (xve-xviie siècles) »
Tout pèlerinage étant un déplacement d’une personne vers un territoire en vue de rencontrer le sacré, celui-ci acquiert une dimension politique dès lors qu’il est assumé par le roi, et encore plus quand il se situe à la frontière. Tel est le cas du sanctuaire de Notre-Dame de Liesse dans le diocèse de Laon, situé près de Reims, et de Corbény où le roi pèlerine à Saint-Marcoul pour acquérir le pouvoir de guérir des écrouelles.
Nicolas Balzamo, « La Vierge en ses royaumes. Images, légendes et patronage marial dans l’Europe moderne (xvie-xviie siècles) »
Menée à partir d’exemples issus de différents territoires catholiques (France, Saint-Empire, Pologne), cette enquête vise à explorer le versant politique des légendes de fondation qui s’attachent aux sanctuaires mariaux en même temps qu’à proposer des réflexions plus générales sur le statut de la Vierge comme patronne symbolique au début de l’époque moderne.
287Nicolas Guyard, « Saintetés urbaines et reliques, Lyon, Metz et Toulouse à l’époque moderne. “Il-y-a-t-il ville plus célèbre en saincteté, apres Jerusalmen et Romme que ceste-cy ?” »
Cette contribution se propose d’analyser une certaine construction politique urbaine de la sainteté autour des reliques à l’époque moderne. Les villes étudiées proposent trois modèles distincts : Lyon, où les martyrs lyonnais sont insérés dans l’histoire de la chrétienté ; Toulouse, où les corps de six apôtres sont l’objet d’une appropriation locale ; enfin, Metz, où la présence de saints liés aux Carolingiens sert de fondement à un espace urbain rentré tardivement dans le royaume de France.
Sylvène Édouard, « La translation des saints patrons de Tolède (1565 et 1587) ou les ambitions d’un roi et d’une ville »
En 1565 et 1587, deux translations furent l’occasion de restituer à la Primatiale de Tolède les corps des saints patrons Eugène et Leocadia. Le cas tolédan exemplifie les modalités et les stratégies de transfert de sacralité à plusieurs échelles en s’inscrivant dans l’espace hispanique et, au-delà, dans une perspective universaliste. Par une association sacrée de Tolède, de ses saints et du roi, une écriture sainte de l’histoire pro patria permet d’assurer la survivance de l’Hispania.
Luc Duerloo, « Saint Albert de Louvain. La récupération d’un saint dynastique »
Cet article reviendra sur les circonstances de la translation des reliques de saint Albert de Louvain au monastère des Carmes Déchaussées, en 1612, et les récits qui suivirent, réécrivant l’histoire pour souligner les similitudes entre la biographie du saint et celle de l’Archiduc Albert. Ce saint, tout d’abord évêque et saint, ancré à Liège, devint, sous les archiducs, un saint dynastique, enraciné dans le Brabant, associant l’universalité du catholicisme romain à la légitimité de sa dynastie.
Marie Lezowski, « La trame de l’amitié politique. Une étole de saint Charles Borromée et trois fils entrecroisés des relations entre Lombardie et Lorraine autour de 1600 »
L’envoi d’une relique de Charles Borromée à Nancy en 1608 permet d’explorer les implications politiques, spirituelles et économiques de la « Dorsale 288catholique ». Par ce cadeau diplomatique, les relations entre Lombardie et Lorraine s’intensifient : la relique du bienheureux milanais concourt à l’éclosion de Nancy comme capitale, soulage ses princes malades et, en retour, soutient la réputation et la présence des Lombards en Lorraine.
Paolo Cozzo, « Un saint “manqué”. Le vénérable Alessandro Ceva (1538-1612) dans la politique hagiographique de la Maison de Savoie »
Cette contribution examine les multiples facteurs de nature religieuse et politique qui sont à prendre en compte dans l’échec de la reconnaissance canonique de l’ermite Alessandro Ceva (1538-1612), confesseur et conseiller du duc de Savoie Charles-Emmanuel Ier et fondateur de la congrégation camaldule dans le Piémont. Sa figure, restée au cœur de l’érudition camaldule, fut cependant en vogue au cours du Risorgimento, pendant les années du dur conflit entre État et Église.
Géraldine Lavieille, « “Il ne fesoit point beau voir qu’un Espagnol tournast le dos à St Louys et à un roy de France”. Saint Louis au xviie siècle, saint dynastique et saint national »
L’avènement d’Henri IV marque une étape importante dans le développement des références à saint Louis en France mais le pouvoir royal n’est pas l’unique responsable du culte et de l’image de saint Louis. Son essor est le fait de personnes et de groupes mobilisant saint Louis en fonction d’intérêts qui leurs sont propres. Les images du saint roi révèlent des enjeux nombreux, entre promotion d’une société chrétienne, glorification du roi, manifestation de loyalisme et d’attachement au royaume.
Jean-François Ryon, « Sainteté et identité territoriale en Franche-Comté aux xviie et xviiie siècles. Saint André et saint Claude »
Durant la période difficile des conflits avec la France et des tensions avec les territoires protestants voisins, l’unité des habitants de Franche-Comté, tel un rempart intérieur, se fit par le sentiment religieux, resserrant les liens autour de dévotions particulières. Cette contribution entend revenir sur les dévotions à saint André, à saint Claude ainsi qu’au Christ et à la Vierge Marie, ainsi que sur leur contribution aux particularismes de la région.
289Philippe Martin, « Saint Nicolas est-il un saint lorrain ? »
Tous les ans, en décembre, les grandes villes lorraines résonnent de chants de festivités de la Saint-Nicolas. En dépit d’une imposante littérature et de « preuves » expliquant pourquoi et comment saint Nicolas est un grand patron lorrain, cette contribution entend interroger la part de mythe et sa construction par les lotharingistes du xixe siècle. En effet, les duchés sont avant tout dédiés à la Vierge et c’est vers des sanctuaires mariaux que les villes et les foules ont porté leurs prières.
Frédéric Meyer, « Conclusions »
Les quatorze contributions de ce volume, dirigé par Sylvène Édouard, répondent au projet Lodocat, coordonné par Christine Barralis, centré sur l’histoire religieuse et culturelle de l’espace lotharingien en traitant des questions politiques. Ce livre conçoit la sainteté comme une notion utile en politique dans les territoires de la « Dorsale catholique » jusqu’en Espagne depuis le ixe au xviiie siècle, à travers les pèlerinages mariaux et les cultes des saints patrons.
- CLIL theme: 4046 -- RELIGION -- Christianisme -- Théologie
- ISBN: 978-2-406-09650-4
- EAN: 9782406096504
- ISSN: 2261-1851
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-09650-4.p.0285
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 01-27-2020
- Language: French