Préface
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Politien, humaniste aux sources de la modernité
- Auteur : Viti (Paolo)
- Pages : 7 à 16
- Collection : Rencontres, n° 519
- Série : Lectures de la Renaissance latine, n° 15
Article de collectif : 1/22 Suivant
Préface
Le livre présenté ici est issu d’un colloque organisé à Paris, à l’Université Paris-Sorbonne les 11-13 mai 2015, grâce à la collaboration étroite et fructueuse avec Hélène Casanova-Robin, Professeure de littérature latine dans cette Université1.
Cette rencontre parisienne a bénéficié également de l’implication de la Commission de l’Édition Nationale des Œuvres d’Ange Politien qui a été associée au partenariat entre l’Université du Salento (Lecce) et de l’Université Paris-Sorbonne, pour mettre en lumière l’ancrage parisien de la fortune de Politien, dont la Bibliothèque nationale de France conserve, pour des raisons diverses, une partie de l’œuvre et notamment plusieurs autographes. Il s’agit de manuscrits et d’incunables indispensables, au vu de leur caractère unique, pour explorer la méthode de travail de l’un des plus grands auteurs de la littérature italienne de tous les temps et de la philologie de l’âge de l’Humanisme. Remigio Sabbadini affirmait avec la plus grande conviction qu’« à Florence, personne n’a égalé […] le talent de chercheur d’Angelo Ambrogini, dit le Politien. Il explora toutes les bibliothèques des collectionneurs et des savants florentins et il y découvrit des textes précieux2. »
Ce n’est pas le lieu ici, de s’arrêter sur le rôle joué par Politien au cours du xve siècle, ni sur son excellence, au-delà des polémiques qui l’opposèrent aux savants de son temps, de Lorenzo Valla à Domizio Calderini, de Giorgio Merula à Bartolomeo Della Fonte, de Paolo Cortesi à Giovanni Pontano, de Nicolò Leoniceno à Michele Marullo. À Florence, Politien est considéré comme un personnage de premier plan, riche d’une formation intellectuelle orientée sur l’approfondissement méthodique des traditions littéraires et culturelles antiques. Cristoforo 8Landino en offre un vibrant témoignage dans sa dédicace à Pierre de Médicis, en préface à son commentaire de l’Énéide de Virgile, définissant Politien en ces termes : virum multa ac varia doctrina eruditum, poetam vero egregium egregiumque oratorem ac denique totius antiquitatis diligentem perscrutatorem3 (« un homme érudit en de nombreux domaines, variés, mais aussi un poète exceptionnel, un exceptionnel orateur, et enfin un ardent explorateur de toute l’antiquité »). On pourrait également ajouter, parmi d’innombrables attestations de ce type, les mots de Filippo Redditi lorsqu’il prit position en faveur de Pierre de Médicis, convaincu que le jeune homme aurait su reprendre et poursuivre l’œuvre magnifique de son père Laurent, précisément parce qu’il avait bénéficié de l’enseignement de Politien (romanae grecaeque facundiae doctissimus, ex quo nihil est, quod te discere oporteat, quin ille te abunde edocere non possit (« très savant dans l’art oratoire romain et grec, dont il n’y a rien qu’il te faudrait savoir et qu’il ne saurait t’enseigner largement4. », lui écrit-il).
À la Bibliothèque nationale de France sont conservés divers documents littéraires de Politien tout à fait remarquables pour leur originalité propre et pour les informations qu’ils apportent sur l’activité ecdotique de Politien. On pense en particulier au manuscrit, certes fragmentaire, contenant les livres XVI-XXXVII de l’Historia Naturalis de Pline l’Ancien (Lat. 6798), qui avait appartenu à Coluccio Salutati et à Leonardo Bruni, ou bien à l’un des Zibaldoni autographes (Grec. 3069), constitué de fascicules et d’excerpta variés, élaborés entre 1483 et 1494, riche aussi de transcriptions, d’extraits et même de textes grecs d’auteurs antiques. À partir de certains feuillets de ce manuscrit, que l’on a dissociés de l’ensemble, sont dérivés d’autres morceaux parisiens isolés, comme certains excerpta de l’Onirocriticus d’Artémidore de Daldis (Collection Dupuy 673) et une liste d’abréviations grecques (Franç. 9467).
À ces écrits d’autorité, d’un intérêt insigne, il faut ajouter les nombreuses notes autographes de Politien que l’on trouve sur des éditions aux titres évocateurs des intérêts marqués de l’Humaniste : sur l’editio princeps des Scriptores rei rusticae, volume paru à Venise chez l’éditeur Nicolò Jenson en 1472, édité par Giorgio Merula, et sur l’édition des 9œuvres de Virgile publiée à Rome chez Conrad Sweynheym et Arnold Pannartz en 1471, volume estimé pour la richesse de ses annotations que l’on considère comme les plus intéressantes de tout le xve siècle et tout à fait exemplaire de la méthode d’analyse de Politien.
Toujours à Paris, sont conservés des manuscrits des Stanze et de l’Orfeo de Politien, le post-scriptum d’une de ses lettres, non autographe, datée du 23 avril 1491 et adressée à Bernardo Ricci, chancelier de l’ambassadeur florentin à Milan, ainsi que sa lettre du 18 mai 1492 à Iacopo Antiquario sur la mort de Laurent de Médicis survenue le 8 avril précédent (Ital. 1543). On y compte aussi une de ses lettres en vernaculaire, autographe, adressée depuis Pistoia à Laurent de Médicis le 24 août 1478 (Ital. 2033), dans laquelle Politien transmet les Consilia de Bartolomeo Socini et ne manque pas de souligner que ses relations avec Clarice Orsini, l’épouse du même Laurent, sont déplorables : cette lettre était conservée jusqu’à la fin du xixe siècle aux Archives nationales de Florence, avant de passer, au terme de diverses péripéties, dans le giron de la Bibliothèque nationale de France.
À l’occasion de ce colloque, nous avions souhaité revenir à une enquête exhaustive sur toutes ces ressources relatives à Politien offertes par la Bibliothèque nationale de France et en particulier sur le Zibaldone Grec 3069, à la fois pour son intérêt propre et parce que nous voulions le confronter aux autres Zibaldoni de Politien, notamment avec celui de Munich en Bavière, conservé à la Staatsbibliothek : les manuscrits La. 748, 754, 755, 756, 807 et Gr. 182. Malheureusement, ce projet n’a pu être mené jusqu’à son terme pour un certain nombre de raisons, alors qu’il s’agit d’un matériel en partie autographe et d’un intérêt majeur pour appréhender les passions de Politien pour les textes dans leurs degrés divers. Nous avons pu en examiner seulement un échantillonnage limité et partiel, néanmoins assez significatif, à la fois pour rendre compte, à partir d’analyses minutieuses, de la très grande variété des contenus étudiés par l’humaniste et de la diversité de ses méthodes de travail. Dans une telle perspective, ce fut un bénéfice non négligeable qu’à l’occasion de cette rencontre scientifique, la Bibliothèque nationale de France ait pu mettre en ligne et donc rendre accessible, l’un des Zibaldoni de Politien cité ci-dessus, le manuscrit Grec 3069 qui constitue l’un des riches témoignages de son ample érudition et de sa capacité de travail et, dans le même temps, un instrument global de sa 10propre manière de s’approprier et d’organiser le matériel qu’il étudiait. On peut donc reconstruire la préparation culturelle et le dévouement philologique d’Ange Politien, et, partant, sa force intellectuelle ainsi que les résultats de son savoir, qui ont dépassé les limites de sa propre cité et de son siècle. Girolamo Tiraboschi – l’un des plus fameux historiens de la littérature italienne du xviiie siècle – reconnut le rôle extraordinaire de Politien au regard des auteurs qui furent ses contemporains : « Politien fut l’un des premiers, à mon avis, qui inculqua à ses élèves non seulement les préceptes, mais aussi l’exemple d’un style raffiné aussi bien en prose qu’en vers ; il fut d’autant plus digne d’éloge qu’il appliqua son talent à des objets nombreux. Il sut le développer brillamment non seulement en latin, mais aussi en italien, en grec et même en hébreu. Il aimait s’adonner à la littérature divertissante, comme aux sujets les plus sérieux, à la philosophie platonicienne et à celle aristotélicienne et il cultiva même la science juridique. On admire d’autant plus le grand nombre d’objets d’étude qu’il embrassa avec un tel succès quand on considère la brièveté de son existence, puisqu’il mourut à seulement quarante ans. Il mérite pour cela de rester immortel parmi les grands noms de la littérature italienne. […] Pour moi, il me suffit de lui avoir rendu un rapide hommage, dans ce que je viens d’écrire à son sujet, pour que l’on puisse mesurer combien la littérature italienne doit à ce grand homme dont elle reçut, de tous côtés, un honneur et un bienfait immenses5. »
Par ce colloque parisien, nous souhaitions montrer d’autre part comment on pouvait mettre en valeur, en partant d’un point de vue multidisciplinaire, les modalités de compréhension de l’œuvre de Politien et les convergences intellectuelles des chercheurs français, italiens et allemands. Nous avons cherché à surmonter – du moins telle fut notre intention – les difficultés que l’on rencontre aujourd’hui dans un monde toujours plus détourné de la réflexion à mener sur certaines valeurs fondamentales et incontournables pour la civilisation et pour la mémoire de l’Europe entière. En effet, c’est à partir des acquis de l’Humanisme italien et de la revalorisation de la formation humaine qui en est issue, puis de la reprise de ces valeurs, bien au-delà des Alpes, ainsi que de la position morale qui en a dérivé, que l’Europe a bâti les fondations de 11son histoire moderne, ou d’une moins d’une partie – certainement la plus noble – de son histoire.
Aussi, après l’expérience de ce colloque, nous plaisons-nous à espérer que de nouvelles recherches pourront être approfondies dans l’avenir, soit sur les œuvres déjà connues, soit sur celles qui sont restées à l’écart de notre enquête mais qui demeurent utiles non seulement pour définir la personnalité globale de Politien, mais aussi pour comprendre sa fortune européenne et l’influence qu’il a exercée dans la transmission des textes antiques. Une telle reconstitution apporterait sans aucun doute une contribution très précieuse à la connaissance spécifique de Politien hors d’Italie, et permettrait de mesurer la dimension littéraire qu’on lui a accordée, dans l’Europe entière, et enfin l’incidence de sa personnalité sur la consolidation de la formation aux études classiques. Incontestablement, Politien est devenu la référence par excellence, que l’on choisisse de retracer son expérience dans l’ecdotique et dans la critique des textes ou que l’on entende sa démarche, associée à celle développée à Florence et au sein de l’Europe, comme celle qui fut capable d’allier la récupération et la connaissance du patrimoine antique et la pratique philologique, celle-ci se dotant, grâce à lui, d’une méthode tout à fait novatrice. Assurément, sur cette pratique et, plus largement, sur son activité philologique, les documents, pérennes et sans cesse rassemblés, ne manquent pas, que l’on considère ses écrits propres à sa recherche textuelle, ou, plus encore, son œuvre personnelle. Ainsi, pourrait-on citer en exemple la Fièvre, ancienne divinité romaine, qu’il met en scène dans l’admirable épicède composé à l’occasion de la mort de la toute jeune Albiera degli Albizzi : sous des atours mythologiques, la Fièvre est devenue l’objet d’une création poétique qui compte parmi les plus admirables de toute la littérature italienne et pas seulement du Quattrocento. Composée à partir des sources les plus insolites auxquelles Politien a puisé, l’image de la Fièvre, issue d’une tradition collective, est introduite dans la narration pour exposer l’origine de la maladie de la jeune fille. Or il apparaît manifeste qu’une telle figure symbolique, comme l’écrit Alessandro Perosa, « est le produit d’un jeu complexe où se mêlent toutes sortes de références antiques et d’allusions. La figure de la déesse constitue ainsi une mosaïque de fragments soigneusement sélectionnés et habilement ordonnés. Mais, pour autant, la dimension artistique de la vision n’en est pas affaiblie car les divers éléments sont 12fondus dans un ensemble cohérent, animé par le souffle puissant et vivifiant de l’imagination du poète. Celui-ci démontre son extraordinaire capacité à s’approprier les éléments de la culture antique et à les transformer en une création toute personnelle6. » Je cite Alessandro Perosa, l’un des spécialistes les plus éminents de Politien, à qui l’on doit le remarquable catalogue de la Mostra del Poliziano nella Biblioteca Medicea Laurenziana7, auteur également d’éditions de textes de Politien et de travaux modernes sur cet humaniste.
À travers la diffusion européenne de ses textes et de ses manuscrits, à Paris, à Munich, à Oxford, c’est un Politien qui se manifeste plus que par ses travaux originaux, justement par la prédilection pour la philologie, dont on retrouve des traces exceptionnelles dans les matériaux cités précédemment : d’abord les Zibaldoni, les excerpta latins et grecs et des annotations ou des indications sur les manuscrits ou sur des éditions destinées à être imprimées. Bien qu’il s’agisse de textes fragmentaires, tous ceux-là fournissent des indices précieux sur la méthode de Politien que l’on peut reconstruire à partir de passages particuliers jusqu’à la rédaction de commentaires complets sur les auteurs antiques. Il faut y inclure les chapitres de la première et de la seconde centurie des Miscellanea, modèle extrêmement éloquent de ses connaissances en matière de littérature latine et grecque. Ce recueil doit occuper une place de choix dans l’enquête que l’on mène, propre à l’infléchir, car on y décèle des recherches, parfois, révolutionnaires, orientées pour réviser la compréhension générale d’un monde qui apparaît soudain plus proche, grâce au travail que lui consacre Politien. Son regard s’étend au gré d’une vision – par certains aspects, une interprétation – du savoir qui va de pair avec un encyclopédisme destiné à produire des correspondances heureuses dans les périodes suivantes. Il n’est pas fortuit que Politien ait jugé que l’on pouvait diffuser les premiers écrits des Miscellanea, les traductions du grec et les Silvae qui sont des leçons préliminaires poétiques à ses cours universitaires.
Vittorio Branca, l’un des plus grands spécialistes de Politien et l’un de ses éditeurs, a écrit au sujet de son activité philologique qu’il s’agit d’« une philologie entendue plus comme une histoire intégrale 13de l’homme et de l’humanité, comme une méthode suprême pour rassembler et réduire, en un certain sens, à une unité, toute expression de l’existence humaine. Pour cette raison, <Politien> ne se limite pas à des discussions ponctuelles et à des formulations abstraites, mais il affronte courageusement les textes et les documents qu’il a rassemblés, il assume avec humilité la préparation artisanale même des instruments critiques et des outils de travail (jusqu’aux listes dressées par les juristes), il présente non seulement des occurrences élégantes ou polémiques mais il offre aussi scrupuleusement des exemples à visée méthodologique et pour ainsi dire scolaires. L’œuvre et la philologie de Politien sont alors résolument orientées “non ad persuadendum sed ad docendum” (“non pour persuader mais pour instruire”). La philologie est entendue comme la science préliminaire et implicite à tout savoir, qu’il soit philosophique ou pratique, littéraire, scientifique ou technique8. »
C’est à cette fin que nous avons cherché à créer, et pas uniquement à travers ce colloque parisien, une rencontre fructueuse entre savants qui reconnaissent – si c’est encore nécessaire – la figure intellectuelle et ‘transnationale’ de Politien, la suprématie de sa poésie, l’originalité exceptionnelle de sa philologie. Plus que tout autre genre qu’il a su pratiquer et avec l’écriture épistolaire, incontournable pour définir et comprendre les questions textuelles d’intérêt varié mais aussi pour elle seule, la philologie de Politien a ouvert la voie à une nouveauté sans précédent.
Politien, en un sens, porte jusqu’à son accomplissement le long « voyage » des Humanistes, commencé avec Pétrarque, dans la reconquête de la culture antique – latine et grecque – et leurs efforts pour reconstruire un patrimoine sans égal et poser les fondations originelles de la formation moderne de l’homme. Voilà quelle mission et quel objectif s’étaient fixés les Humanistes de toutes les générations et toutes les origines géographiques : valoriser le rôle et les fonctions de l’individu à travers les formes les plus insolites – parfois les plus exaltantes – des expériences de vie, et cela à travers la reconstitution d’ensemble d’une civilisation où ils se reconnaissaient toujours davantage et dont ils exaltaient les liens avec le monde antique. Dans une telle perspective, Politien joua un rôle décisif et incontournable, pour ainsi dire inégalé, comparable à celui de 14Lorenzo Valla (encore vivant jusqu’en 1457) ou à celui d’Ermolao Barbaro, son contemporain : tous trois incarnent l’expression la plus haute d’une force intellectuelle capable de dépasser les frontières de l’Italie pour s’étendre jusqu’aux limites les plus admirables et les plus importantes de l’Humanisme européen, force qui repose sur une suprématie absolue, rigoureuse, de la langue que l’on entend comme un moyen d’assimilation, d’intégration et d’exégèse efficace et talentueux.
Les nombreuses éditions des œuvres de Politien produites en Italie mais surtout dans toute l’Europe – en France et en Allemagne, notamment – démontrent la grande attention, sinon la fascination avec lesquelles on lut et on jugea les écrits de Politien et, partant, la circulation de ses idées et de ses représentations. C’est en France, tout particulièrement, à partir de la fin du Quattrocento que les œuvres de Politien connurent un succès majeur : d’abord grâce à un heureux succès éditorial, dans lequel jouèrent un rôle important les imprimeurs et les éditeurs comme Nicolas Wolf, Jean Petit et Josse Bade. Ce dernier en particulier, formé en Italie, imprégné de culture humaniste, fut l’un des grands acteurs de la fortune de Politien en France – il publia aussi les Elegantie latine lingue de Lorenzo Valla – dans la première moitié du xvie siècle, comme le montrent certains travaux développés à l’occasion de ce colloque.
Les sections qui ont fourni l’armature de cette rencontre parisienne sur Politien – la poésie, la philologie, la philosophie, la science et l’histoire, l’épistolaire, la fortune – rendent compte, au moins dans leur ensemble, de la variété des champs disciplinaires auxquels se consacra l’Humaniste et de la diversité des sujets qui l’intéressaient en général. Mais unique et homogène m’apparaît le regard que l’on porte sur lui : la reconnaissance de sa personnalité singulière et la conscience du rôle qu’il joua dans la littérature européenne du xve siècle et bien au-delà de cette limite temporelle.
De ce point de vue aussi le colloque parisien porta ses fruits et, malgré le temps passé entre cette manifestation et la publication des actes, il s’est inscrit dans une étroite continuité avec les manifestations antérieures ou ultérieures qui ont eu lieu sur Politien au cours de ces dernières années. Je pense au colloque organisé par mon ami et collègue Thomas Baier sur Angelo Poliziano9 et à celui soutenu par 15la Commission pour l’Édition Nationale des Œuvres d’Ange Politien intitulé Cultura e filologia di Angelo Poliziano10 qui visait prioritairement à faire le point sur les éditions et sur les études concernant les traductions et les commentaires de Politien. Ces deux rencontres ont été précieuses : la première, en particulier, a permis de poser le problème, sur le plan méthodologique, d’une nouvelle édition des Opera omnia de cet auteur, assortie d’un appareil critique et philologique solide, édition moderne désormais absolument indispensable. L’Édition Nationale des Œuvres d’Ange Politien s’est fixé cet objectif. Elle a été programmée par le Ministère dédié au Patrimoine et aux Activités culturelles (aujourd’hui Ministère de la culture) le 27 avril 2006, avec Gianvito Resta comme Président et l’auteur de ces lignes comme Vice-Président, devenu ensuite Président lors de la disparition de Gianvito Resta le 25 février 2011. Le projet a été défini, à l’instar des autres projets des Éditions Nationales consacrées aux poètes et aux écrivains italiens depuis Dante Alighieri jusqu’aux représentants les plus importants de la culture italienne du xxe siècle, pour donner une reconnaissance, pour ainsi dire officielle, aux plus grands auteurs de la littérature italienne. Il s’agit de publier leurs œuvres à partir d’éditions critiques fondées sur des témoins solides et fiables. La situation est certes très variable lorsqu’il s’agit d’auteurs dont on possède les manuscrits autographes ou d’autres pour lesquels il ne reste rien de tel. Concernant Politien, la situation est à la fois l’une et l’autre, si bien qu’il faut prendre en compte surtout l’écriture et donc la conservation de ses textes, mais aussi les caractéristiques propres à un humaniste. Or, plus celui-ci est intégré dans la culture de son époque, plus grandes apparaissent de telles caractéristiques qui doivent être, de fait, recueillies et prises en compte.
Il me semble important de rappeler que l’Édition Nationale des Œuvres d’Ange Politien – représentée au colloque parisien par Gabriella Albanese, Donatella Coppini, Raffaella Maria Zaccaria – prévoit la publication de deux sections spécifiques : une intitulée « Textes », destinée à rassembler et à publier les œuvres de Politien, l’autre « Instruments », destinée aux travaux annexes, ouvrages critiques et bibliographie concernant Politien et son environnement. Jusqu’à ce jour, ont été publiés dans les « Textes », 16deux volumes : ses Praelectiones, livre édité par Giorgia Zollino11 et sa traduction des Amatoriae narrationes de Plutarque, éditée par Claudio Bevegni12 ; dans les « Instruments », est paru un volume d’Actes du colloque sur Politien (déjà mentionné) qui s’est tenu à Florence en 201413 ; paraîtra bientôt la publication du matériel préparatoire rassemblé par Alessandro Perosa pour l’édition (jamais parue) de la première centurie des Miscellanea.
Le colloque de Paris a donc apporté une contribution essentielle, solide et prestigieuse pour la mise en lumière de la personnalité et de l’activité scientifique de Politien et ce livre montre, confirmant l’espoir et la confiance en cette entreprise, que les objectifs de cette rencontre ont abouti à des études stimulantes et à des appréciations constructives.
Paolo Viti
Università del Salento
1 Je tiens à lui témoigner ici toute ma reconnaissance pour sa grande disponibilité, pour son implication constante et pour son amitié sincère.
2 R. Sabbadini, Le scoperte dei codici latini e greci ne’ secoli XIV e XV, a cura di E. Garin, Firenze, Sansoni, 19672, p. 151.
3 Cristoforo Landino in Vergilii Maronis Opera, Firenze, [Tipografia del Virgilio], 1488, f. IIa.
4 F. Redditi, Exhortatio ad Petrum Medicem con appendice di lettere, a cura di Paolo Viti, Firenze, Olschki, 1989, p. 23.
5 Girolamo Tiraboschi, Storia della letteratura italiana, Modena, presso la Società Tipografica, 1791, p. 1098-1099, 1108.
6 A. Perosa, Studi di filologia umanistica, I, Angelo Poliziano, a cura di P. Viti, Roma, Edizioni di Storia e Letteratura, 2000, p. 82.
7 Firenze, Sansoni, 1955.
8 Vittore Branca, Poliziano e l’umanesimo della parola, Torino, Einaudi, 1983, p. 250-251.
9 Angelo Poliziano. Dichter und Gelehrter, hrgg. von Th. Baier, T. Dänzer, F. Stürner, Tübingen, Narr Francke Attempto, 2015.
10 Cultura e filologia di Angelo Poliziano. Traduzioni e commenti, Atti del Convegno di studi (Firenze, 27-29 novembre 2014), a cura di Paolo Viti, Firenze, Olschki, 2016.
11 Angelo Poliziano, Praelectiones, II, a cura di G. Zollino, Firenze, Olschki, 2016.
12 Angelo Poliziano, Traduzione delle « Amatoriae narrationes » di Plutarco, a cura di C. Bevegni, Firenze, Olschki, 2018.
13 Cultura e filologia di Angelo Poliziano, cit.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-11988-3
- EAN : 9782406119883
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-11988-3.p.0007
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 03/11/2021
- Langue : Français
- Mots-clés : Politien, colloque, édition, culture, humanisme, Europe