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Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Perspectives facétieuses et esprit de connivence dans la première modernité
- Pages : 311 à 314
- Collection : Rencontres, n° 502
- Série : Colloques, congrès et conférences sur la Renaissance européenne, n° 117
Résumés
Dominique Bertrand, « Introduction »
La vogue facétieuse dans la première modernité participe d’un esprit de connivence qui assigne aux usages sociaux du rire de nouvelles perspectives : l’otium lettré valorise une nouvelle généricité conversationnelle autour de processus élitaires normatifs de distinction esthétique ; des auteurs plus engagés utilisent la facétie comme voile protecteur pour des usages satiriques risqués ; le dispositif herméneutique facétieux favorise plus largement l’émancipation d’une pensée anticonformiste.
Florence Bistagne, « Naissance et parcours de la facétie comme forme brève au Quattrocento. Des lectures antiques pour une forme moderne »
Le De Sermone de Pontano (1499-1502) a imposé les nouveaux contours d’une généricité facétieuse hybridant des facéties disparates issues de la tradition antique des dicta et de la nouvelle latine, grecque et italienne. Ce texte fondateur, qui a influencé Castiglione et Guazzo, articule la nouvelle dignité poétique de la facétie à un positionnement éthique, constituant un modèle conversationnel à l’usage d’une élite d’hommes bien nés.
Vincent Dupuis, « Le facétieux, une nouvelle catégorie pour l’étude de la comédie renaissante ? »
La facétie, négligée par la Pléiade, se voit soumise à un processus analogue de retour à l’antique et de rupture avec la tradition vernaculaire, en s’imposant, dans les années 1570-1580, comme une composante majeure dans la rénovation de la comédie : la promotion d’un registre facétieux, sensible dans les tromperies verbales, les bons tours, dans l’exercice d’une ironie humaniste cinglante contre la sottise, corrobore un processus obsessionnel de distinction socio-esthétique.
312Marie-Claire Thomine-Bichard, « Facéties fin de siècle. Le Recueil d’Antoine Tyron (1578) et les Contes et Discours d’Eutrapel de Noël Du Fail (1585) »
À quelques années près, les ouvrages examinés offrent deux types de réemploi du matériau facétieux : Antoine Tyron produit une compilation d’anecdotes, nouvelles, bons mots et apophtegmes. Noël Du Fail, juriste et gentilhomme lettré, met en scène un entretien familier entre trois interlocuteurs qui se réapproprient des contes à rire. Ces œuvres très différentes dans leur ancrage culturel et leur réception, restituent chacune à leur manière l’esprit facétieux de l’humanisme florentin, dans le sillage du Pogge.
Cécile Toublet, « Les métamorphoses romanesques de la facétie des recueils aux histoires comiques du xviie siècle »
Si le genre des histoires comiques intègre l’héritage gaillard des narrations facétieuses de la Renaissance, il a été amené à s’en démarquer dans le traitement des anecdotes érotiques et scatologiques pour répondre au nouvel horizon d’attente esthétique d’un public soucieux de rire sans enfreindre les bienséances. Sorel a tenté de résoudre les contradictions inhérentes à cette double contrainte, en plaidant pour une restriction de la matière corporelle à la seule pointe verbale.
Nicolas Kiès, « Que fait la facétie ? Pragmatique de la parole enjouée dans les devis encadrants des recueils bigarrés »
À la Renaissance, le cadre visible de l’oralité partagée sous-tend l’architecture des recueils de joyeux devis : leurs propos encadrants, au-delà de l’artifice littéraire, tendent bien à reconfigurer une forme d’expérience sociale vivante et vitale. La connivence facétieuse se construit dans un espace autonome, sur fond de troubles idéologiques majeurs et de fragilisation des appartenances religieuses et sociales, sauvegardant une possibilité utopique de faire communauté.
Bernd Renner, « “Icy n’y ha seulement que pour rire ?”. Facétie et satire, une tentative de conciliation herméneutique »
Dans un contexte marqué par la censure, la prétendue innocence de la facétie recouvre les stratégies subtiles d’un rire critique obligé de dissimuler ses enjeux véritables pour contourner la contrainte : on peut ainsi relire Boccace, 313Marguerite de Navarre, Castiglione, Le Pogge, Des Périers et Rabelais dans cette perspective serio-comique d’un amusement à vocation sérieuse dont la facétie serait le voile protecteur et qui induit l’herméneutique comique d’une lecture complice, à double entente.
Ruxandra Vulcan, « Le sel de la facétie dans les Dialogues du désordre de Pierre Viret »
Les Dialogues du désordre du protestant Viret publiés à Genève en 1545, font servir l’art du « devis » à un engagement religieux satirique et polémique. Viret récupère à des fins oratoires un dispositif dialogique facétieux influencé par l’écriture rabelaisienne et le serioludere d’inspiration lucianique : ce dialogue truculent, qui convoque le rabaissement carnavalesque pour stigmatiser les abus de la cour romaine, invite à repenser une éthique communautaire.
Christian Bonnet, « Facétie et identités dans le théâtre aquitain d’expression occitane. Ca. 1620-1650 »
Les usages limités de la facétie dans le théâtre aquitain occitan d’expression occitane ca. 1620-1650 trahissent des origines et influences espagnoles et peuvent intéresser pour leurs résonances politiques. L’Hausano de la Feuillade, tragi-comédie composée vers 1635, laisse affleurer, au-delà d’un discours nataliste, et sous le couvert de gaillardises, qui en appellent à une connivence entre initiés, une parole féminine audacieuse révélatrice des jeux de pouvoirs et des conflits de genres.
Olivier Roux, « Facéties soréliennes »
Sorel oppose à une facétie mécanique qui se borne à susciter le rire, sans portée didactique, un style facétieux naïf qui lui permet de faire la promotion de son esthétique comique romanesque. Cette légitimation pro domo recouvre une pratique satirique et libertine de la facétie qui prend pour cible la sottise et les faux savoirs pédantesques, dans la tradition humaniste et que Sorel met en œuvre dans ses fictions narratives mais aussi dans des ouvrages sérieux, à des fins démystificatrices.
314Bruno Roche, « L’art libertin de la facétie dans les dialogues de La Mothe Le Vayer »
Les entretiens libertins du philosophe de La Mothe Le Vayer depuis les Dialogues faits à l’imitation des anciens de 1630 jusqu’à L’Hexaméron rustique, publié en 1670, font la part belle à des jeux facétieux indissociables de stratégies de dissimulation et d’exhibition paradoxale des propos blasphématoires et hétérodoxes. Laissant au lecteur la responsabilité de décrypter une apologie épicurienne, la connivence facétieuse fonde une émancipation intellectuelle, cependant fragile et instable.
Tom Conley, « Du chien espagnol. À propos du “Colloque de Scipion et Bergance” (1615) »
La première transcription en français par le Sieur d’Audiguier du fameux « Colloque de Scipion et Bergance » de Cervantès (Nouvelles Exemplaires) révèle les bénéfices paradoxaux de la traduction infidèle. En effaçant les signes de localisation de l’énonciation, le traducteur favorise une rupture de perspective facétieuse qui libère une imagination poétique et décuple le plaisir de la méditation philosophique sur l’ordre et le désordre du monde.
Xavier Fontaine, « Du Volksbuch renaissant à l’Ulenspiegel de Charles De Coster. Éléments de caractérisation de la tradition du livre espiègle »
Le Volksbuch, hapax littéraire du début du xvie siècle, est le point de départ de la tradition du « livre espiègle » autour de la figure d’Ulenspiegel, et il a bénéficié, comme les Facéties du Pogge, d’une large diffusion européenne, influençant notamment Rabelais. Sa postérité a été aussi durable, inspirant la joyeuse élaboration de La Légende d’Ulenspiegel de Charles De Coster (1867-1869), fondatrice pour la littérature francophone belge.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-11086-6
- EAN : 9782406110866
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-11086-6.p.0311
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 21/07/2021
- Langue : Français