Résumés
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Objets et anatomie du corps héroïque dans l'Europe de la première modernité
- Pages: 343 to 347
- Collection: Encounters, n° 398
Résumés
Antoinette Gimaret, « “Ses gants et son livret pour faire testament”. Le récit de la mort de Jane Grey dans l’Histoire des Martyrs de Jean Crespin et les Tragiques d’Agrippa d’Aubigné »
Cette étude porte sur l’héroïsation de la figure de Jane Grey, martyre protestante exécutée à Londres en 1554, dans deux récits écrits par des protestants français, Jean Crespin et Agrippa d’Aubigné. Par le travail de l’écrivain, qui « anatomise » le tableau du corps et des vêtements ou parures qui le prolongent, des objets aussi simples que des gants sont intégrés à une gestuelle du renoncement héroïque de la figure du martyre pour devenir les instruments privilégiés d’un don mimétique du sacrifice christique.
Yan Brailowsky, « Les joyaux de la reine »
Pour les deux figures de reines que sont Élisabeth Ire et Marie Stuart, l’héroïsation passe par l’utilisation des joyaux à la symbolique complexe. Liés à la reine par métonymie, les joyaux de Marie, comme les objets qui l’accompagnent sur l’échafaud sont traités comme des reliques de son corps héroïque et martyr. Quant à Élisabeth, bien que protestante, elle fait l’objet d’un culte quasi marial, qui passe très largement par l’utilisation d’une iconographie officielle faisant la part belle aux joyaux comme objets emblématiques.
Laïla Ghermani, « Le bouclier de Satan dans Paradise Lost de John Milton, objet d’incertitude »
Cet article étudie l’utilisation que fait Milton dans le Paradis perdu du bouclier, topos héroïque qui s’inscrit dans la tradition de l’ekphrasis instaurée par le livre XVIII de l’Iliade. Au livre Premier, Satan est décrit comme un héros en armes, muni d’une lance et d’un bouclier. Renvoyant le lecteur du xviie siècle aux images du globe lunaire décrites par Galilée, Milton détourne cet objet qui devient indice de la subversion du modèle épique.
344Chantal Schütz, « Héroïne ou martyre ? Approches de la femme à l’épée »
Cet article étudie le motif pictural et littéraire de la femme à l’épée en prenant pour point de départ les héroïnes armées de l’Arioste, Bradamante et Marphise, dont les similitudes avec des figures historiques telles que Jeanne d’Arc ou Catherine d’Alexandrie suggèrent le lien profond entre la virago et la vertu cardinale de la foi. Dans la traduction du Roland furieux par John Harington (1591), le portrait des viragos glisse parfois subrepticement vers un traitement burlesque.
Annette Bächstädt, « Camille, Judith, martyre. Réflexions sur les représentations de Marie de Lorraine entre 1548 et 1560 »
Cette étude est consacrée à la figure de la reine d’Écosse Marie de Lorraine représentée dans la littérature polémique du xvie siècle ou sous la plume de Ronsard. La construction de cette figure héroïque passe par la convocation de mythes et de références complexes : tour à tour figure d’Amazone, Camille guerrière à l’instar de celle de l’Énéide ou nouvelle Judith biblique et martyre – la labilité des images rend compte du statut ambigu de ce personnage dont l’héroïsme est contesté par ses détracteurs.
Andy Auckbur, « Le Corps héroïque féminin dans le récit de la captivité des princesses dans The Countess of Pembroke’s Arcadia de Sir Philip Sidney »
Dans Arcadia, dominé par un mode d’expression épique, Sidney construit une figure de l’héroïsme au féminin qui met l’accent sur un corps martyrisé mais résistant. S’inspirant de techniques picturales, l’écrivain s’intéresse aux travaux d’aiguille : l’aiguille peut être la translation féminine de l’épée et la broderie l’équivalent féminin de l’écriture masculine. En héroïsant le geste créateur, il témoigne du basculement de l’héroïsme vers le domaine de l’art dans une démarche maniériste réflexive.
Aurélie Griffin, « Corps héroïques, corps de saintes dans The Countess of Pembroke’s Arcadia de Sir Philip Sidney (1590) et The Countess of Montgomery’s Urania de Lady Mary Wroth (1621) »
L’étude porte sur les stratégies d’héroïsation de personnages féminins dans deux romans pastoraux anglais : alors que dans l’Arcadia de Sidney, l’héroïne 345revêtait et maniait armes et armure, dans l’Urania de Lady Mary Wroth, les armes sont retournées contre des victimes féminines. Ce nouveau type de modèle de martyre au féminin passe ainsi par une relecture critique des codes de la pastorale et réinvente la dialectique entre dissimulation et dévoilement du corps.
Helga Meise, « Courasche, ou La Vagabonde Courage de Grimmelshausen. Gender-crossing, politique et écriture »
Avec la figure de Courasche, Grimmelshausen met les ressorts du roman d’aventure moderne au service du façonnement d’un héroïsme proprement féminin. Courage n’a plus rien de la virago classique. Bien loin de la masculiniser, son appropriation des vêtements masculins et des armes du héros martial viril lui donne en réalité le moyen d’affirmer sa féminité et sa sexualité. Elle témoigne ainsi d’une des caractéristiques centrales du héros moderne qui est l’affirmation de son individualité.
Claire Gheeraert-Graffeuille, « Les objets de la guerre et le corps féminin de l’héroïsme dans The Lady Errant de William Cartwright et Bell in Campo de Margaret Cavendish »
Cet article étudie deux pièces anglaises mettant en scène des femmes soldats, qu’elles se soulèvent contre les hommes (The Lady Errant) ou que, femmes du royaume de la Réforme, elles combattent victorieusement l’armée du royaume de la sédition (Bell in Campo). Dans la première, les objets de l’héroïsme, impuissants à définir un véritable héroïsme féminin, sont tournés en ridicule ; dans la seconde, les heroickesses sont les dernières dépositaires d’un héroïsme dont les hommes ne sont plus capables.
Diane Larquetoux, « Des composantes à la décomposition du corps héroïque dans Coriolan de William Shakespeare »
Figure de la virtus romaine, le Coriolan de Shakespeare semble d’abord pouvoir être rapproché du stoïque, mais son éducation à l’héroïsme se révèle être avant tout l’histoire d’une construction corporelle et physiologique en phase avec les traités médicaux contemporains. Son corps ne lui appartient pas en propre : il est la métaphore des blessures de Rome. L’anatomie de ce corps héroïque en déliquescence préfigure l’avènement du héros moderne tragique, plus singulier et moins exemplaire.
346Florence Dumora, « Engagement corporel des héroïnes du peuple dans la comedia lopesque. De la défense individuelle à la réaction collective (Peribañez et Fuente Ovejuna) »
Cet article s’intéresse au traitement du corps féminin héroïque dans deux comédies du Siècle d’Or. Soumises au désir concupiscent de seigneurs tyranniques, leurs héroïnes entrent en résistance et contribuent à la rébellion qui mène au meurtre de l’agresseur. La déliquescence de l’héroïsme aristocratique s’accompagne d’une valorisation du corps féminin comme site de résistance. Dans ces deux pièces, un rôle majeur est accordé aux femmes dont le corps est mis à l’épreuve par l’autorité masculine abusive.
Laetitia Sansonetti, « Les armes font-elles le héros ? L’identité guerrière en question dans The Faerie Queene »
La littérature élisabéthaine regorge de figures de héros déchus qui déposent les armes et incarnent l’affaiblissement de l’héroïsme, comme le lascif Antoine se dissipant auprès de Cléopâtre ou Verdant auprès de l’enchanteresse Acrasia. L’armure, détachée du héros « déchu » devient le support indépendant d’une réflexion esthétique, dans une ekphrasis dissociée de tout contexte martial. Ce phénomène témoigne ainsi d’un mouvement d’esthétisation des objets et de la poétique maniériste de l’ornement.
Vanessa Chaise-Brun, « Charles Ier, du héros guerrier à sa féminisation ? »
Alors que les représentations de Charles Ier au début de son règne présentaient un roi martial et héroïque, le roi est rarement mis en scène en tant que chef de guerre lorsque éclate la guerre civile. Eikon Basilike confirme cette redéfinition de l’héroïsme royal dans une perspective spirituelle et stoïcienne qui est lue comme ses opposants comme une féminisation de la figure royale.
Gilles Sambras, « “Yet was his sword or armour all his glass”. Marvell et l’héroïsme narcissique »
Cet article porte sur la représentation paradoxale par Andrew Marvell de deux héros cromwelliens morts au combat, Francis Villiers et Archibald Douglas, qui met à mal l’imaginaire héroïque. Les objets emblématiques du héros martial (épée, armure) ne sont plus que des miroirs réfléchissant les traits 347de la personne. La figure du beau Narcisse vient s’inscrire, tel un palimpseste, à la surface de l’arme, oblitérant en partie le visage du héros épique.
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- ISBN: 978-2-406-08404-4
- EAN: 9782406084044
- ISSN: 2261-1851
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-08404-4.p.0343
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 06-25-2019
- Language: French