![Nouveau Répertoire de mises en prose (suite). Récits brefs et autres genres (XIIIe-XVIe siècle) - Chastelaine de Vergi](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/MciMS09b.png)
Chastelaine de Vergi
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Nouveau Répertoire de mises en prose (suite). Récits brefs et autres genres (xiiie-xvie siècle)
- Auteur : Crosio (Martina)
- Pages : 45 à 54
- Collection : Textes littéraires du Moyen Âge, n° 75
- Série : Mises en prose, n° 11
Chastelaine de VergI
(Martina Crosio)
(A) la prose
– auteur : anonyme
– commanditaire : Brocherel 1927 (p. 4) suggère que le manuscrit fut commandité par Georges de Challant, prieur de la collégiale Saint-Ours d’Aoste, pour l’un de ses neveux, à l’occasion du mariage de celui-ci (voir infra).
– datation : fin du xve siècle
– manuscrit unique :
Paris, BnF, n.a.fr. 6639, f. 108r-131v (Gallica). Papier ; filigrane : Deux marteaux croisés, surmontés d’une couronne, proche de Briquet 11638 (Piémont, ca 1488-1497). 143 f. numérotés en chiffres arabes par une main récente ; 200 x 290 mm ; le texte est copié sur longues lignes (24 par page). Initiales des chapitres alternant rouge et bleu ; majuscules à l’intérieur du texte rehaussées à l’encre jaune. Le manuscrit a été sans doute confectionné en Italie, plus précisément dans le Val d’Aoste. Au f. 1r, armes de France ; au f. 42r, armes de Savoie. En se basant sur la présence au f. 65v des armes réunies des familles de Challant-Aymavilles et de La Chambre, Brocherel 1927 (p. 1) fixe le terminus post quem pour la fabrication du manuscrit en mars 1477, date du mariage de Louis Challant-Aymavilles avec Marguerite de La Chambre.
L’exemplaire contient : Mélibée et Prudence (f. 1r-36v, en prose), le Dit des oiseaux (f. 36v-38v), le Conseildes oiseaux (f. 38v-41v), Ponthus et Sidoine (f. 42r-106v, en prose), la Chastelaine de Vergi (f. 108r-131v, en prose), le Débat des deux sœurs (f. 132r-143v). La cohérence de l’ensemble serait thématique, toutes ces œuvres traitant de l’opposition entre loyauté 46et déloyauté, en la déclinant du point de vue de l’exercice du pouvoir (Mélibée et Prudence, Dit et Conseildes oiseaux) oudans une perspective amoureuse (Ponthus et Sidoine, Chastelaine de Vergi, Débat des deux sœurs).
incipit :« Aucunes gens sont quy tant s’apellent loiaulx et secreps et moustrent samblant de donner bon conceil quy, par celles raisons et pour leur bel parller tres decevant, les gens se fient en eulx, si que par droitte foy, amour et charité les gens s’i fient… » (f. 108r).
explicit : « Lequel Dieu glorieux nous doint à tous et à toutes ainssi vivre et finer qu’en la fin nous fasse heritiers de son glorieulx royaulme, en participacion de vision divine et de perdurable paix. Amen. Cy finist l’istoire de la Chastelaine du Vergier et de Tristan le Chevalier. Pour celluy qui m’a escript, Ave Maria soit dit » (f. 131v).
Notices en ligne : Archives et Manuscrits ; Jonas
– organisation du texte
Titre : Istoire de la Chastelaine du Vergier et de Tristan le Chevalier (f. 131v). Le texte est réparti en 25 paragraphes introduits par des lettrines (f. 108r, 108v, 109r, 110r, 111v, 112r, 112v, 113r deux, 114r, 114v, 116v, 119r deux, 120r, 121v, 122r, 123v, 125r, 125v, 126r, 128r, 128v, 129r, 131r).
Du point de vue de l’intrigue, la prose suit dans l’ensemble son modèle, mais l’esprit du remaniement diffère sensiblement du conte en vers du xiiie siècle. Parmi les divergences entre les deux versions : le chevalier anonyme du texte original reçoit le nom de Tristan ; le caractère présumé adultère de l’amour entre les protagonistes ne l’est plus dans la mise en prose, qui fait de la châtelaine une jeune fille non mariée ; les vers de la chanson du Châtelain de Coucy insérés dans le récit du xiiie siècle sont supprimés. Dans le remaniement, on relève également des changements importants dans la représentation des quatre personnages principaux (la châtelaine, Tristan, le duc et la duchesse de Bourgogne) et dans un recours plus massif au discours direct et aux dialogues. La prose est aussi fortement marquée par le ton moralisateur et par le souci du remanieur de tout expliquer, en particulier dans la description circonstanciée des débuts de la liaison entre les protagonistes.
Prologue :
Aucunes gens sont quy tant s’apellent loiaulx et secreps et moustrent samblant de donner bon conceil quy, par celles raisons et pour leur bel parller 47tres decevant, les gens se fient en eulx, si que par droitte foy, amour et charité les gens s’i fient ; et ceulx les destruisent de leur intencion, parce que ceulx quy le veullent savoir promettent de les celler, et eulx, par leur courage trahistre et failly, tantost qu’ilz ont la pocession, s’efforcent de les descouvrir et desceller, à la grant blasme, comfusion et honte de ceulx quy feablement s’i fient et leur ont ouvert et desclos leur pencees. Et les langues de telles gens sont comparees aux langues des serpens, qui souvent tout se qu’elles touchent nafvrent à mort. Si seroit moult profitable sagesse de savoir celler son secrept contre telles gens, quy les pourroit congnoistre ; dont, pour les grans perilz quy s’en peullent enssuivir, et que faulceté n’est pas apperceue partout où elle habite, mais se cache souvent soubz la couverture de Biau Samblant, bon seroit de croirre le conceil d’un acteur, quy dist en ceste magniere : ‘Tant que ton secrept as en ton cuer sans l’avoir descouvert, tu le tiens en ta prison, mais, sitost que tu l’as desclos à aultre, il le tient en la scienne’. Et la raison principalle pour quoy je conceille à chascun garder et celler son secrept contre tous, c’est pource que mainttes personnes nobles et vaillans ont esté menees à povretté, à honte et à mort pour avoir dit leurs secreps aux mauvais ypocriptes desloyaux et decevans ; dont à ce propos veuil racompter une ystoire de merveilleuse pitié (f. 108r-v).
Épilogue :
Quant le duc eust occis la duchesse, il se prist à complaindre piteusement en ceste magniere : ‘Helas, moy povre dollant et desconforté ! Je suis cause de la mort des plus loyalles amoureuses creatures qui fussent au monde et que j’amoye le plus, lesquelz sont mors par ma parolle, combien que je n’y eusse onques penssé mal ; puis, par courroulx, ay mis mon espouse à mort, qui par faulce envie et janglerie avoit perpetré tout se meschief. Si suis ores tout seul et sans confort, et useray tout le plus de ma vie en habondance de tristesses ; dont, affin que Dieu ait mercy de moy, je propose laissier le monde et toutes ses vanittés et entrer en religion pour contempler à servir Dieu en penitance, et priant à Dieu qu’y se meuve à pitié et qu’y pardonne aux ames des deux loyaulx amoureulx.’ Lequel Dieu glorieux nous doint à tous et à toutes ainssi vivre et finer qu’en la fin nous fasse heritiers de son glorieulx royaulme, en participacion de vision divine et de perdurable paix. Amen. Cy finist l’istoire de la Chastelaine du Vergier et de Tristan le Chevalier. Pour celluy qui m’a escript, Ave Maria soit dit (f. 131r-v).
(B) la source
Court récit anonyme de 958 octosyllabes à rimes plates, la Chastelaine de Vergi a été probablement composée entre 1230 et 1240 ca par un auteur bourguignon ou picard.
48Certains copistes, surtout à partir du xve siècle, banalisent et modifient le nom de la châtelaine : la Chastelaine « de Vergi », à l’origine nom d’une puissante famille proche de la cour de Bourgogne, devient ainsi la Chastelaine « du Vergier », avec une allusion évidente au cadre des rencontres des amants ; le verger du conte primitif prend donc une valeur symbolique et s’élève au rang de nom propre.
25 manuscrits (sigles et datation de Stuip 1970, sauf pour 4, 8, 25, datés d’après Jonas) :
(1) Angers, BM, 548, f. 57v-76v (début du xve siècle) ; (2) Berlin, SBB-PK, Hamilton 257, f. 37va-42rb (fin du xiiie siècle ; d’après Raynaud 1892, p. 146, l’incipit manque) (B) ; (3) Bruxelles, KBR, 9574-9575, f. 138va-144ra (ca 1300) (I) ; (4) Cambridge, Trinity Hall, 12, f. 90r-96v (début du xve siècle) ; (5) Covington (VA), Coll. A. Walton, De Ricci suppl. Census A 2200, f. 155r-161v (ca 1325) (L) ; (6) Genève, BPU, fr. 179bis, f. 14r-31v (xve siècle ; Raynaud 1892, p. 148, signale que l’incipit manque, ainsi que les v. 1-44 et 287-333) ; (7) Hamburg, SuUB, Gall. 001, f. 161r-191r (milieu du xve siècle ; d’après Raynaud 1892, p. 148, l’incipit et l’explicit manquent) ; (8) Manchester, J. Rylands UL, coll. C. C. Rattey, f. 155r-161v (deuxième moitié du xive siècle ; localisation actuelle inconnue) ; (9) Oxford, Bodl. Libr., Bodley 445, f. 142r-158r (milieu ou fin du xve siècle) ; (10) Paris, B. Arsenal, 3123 (xviiie siècle ; copie de H faite par Étienne Barbazan, propriété du marquis de Paulmy, qui mourut en 1787 ; Gallica) ; (11) Paris, BnF, fr. 375, f. 331va-333va (ca 1300) (A) ; (12) Paris, BnF, fr. 780, f. 97r-110v (fin du xve siècle ; incomplet du début) ; (13) Paris, BnF, fr. 837, f. 6rb-11ra (fin du xiiie siècle ; l’incipit manque : Raynaud 1892, p. 146) (C) ; (14) Paris, BnF, fr. 1555, f. 82v-96v (début ou milieu du xve siècle) (D) ; (15) Paris, BnF, fr. 2136, f. 139r-152v (début du xive siècle ; d’aprèsRaynaud 1892, p. 146, l’incipit manque ; Stuip 1970, p. 140, signale une lacune de 60 vers (v. 411-470), suite à l’arrachement d’un feuillet ; Gallica) (E) ; (16) Paris, BnF, fr. 2236, f. 71r-92r (xve siècle ; l’incipit manque : Raynaud 1892, p. 147 ; Gallica) ; (17) Paris, BnF, fr. 15219, f. 77r-93r (xvie siècle ; l’incipit manque : Raynaud 1892, p. 147) ; (18) Paris, BnF, fr. 25545, f. 84ra-89va (premier tiers du xive siècle) (H) ; (19) Paris, BnF, n.a.fr. 4531, f. 88rb-94vb (début du xive siècle ; Gallica) (F) ; (20) Paris, BnF, n.a.fr. 13521, f. 398ra-403vb (fin du xiiie siècle) (Go) ; (21) Paris, BnF, Moreau 1715-1719, f. 221r-250r (l’explicit manque ; 1773 ; 49copie de Go faite par G.-J.-J. Mouchet (1737-1807) pour Lacurne de Sainte-Palaye (1697-1781) d’après Raynaud 1892, p. 147) (G) ; (22) Paris, B. Ste-Geneviève, 2474, f. 2r-17v (entre 1742 et 1762 ; copie de H faite pour le duc de la Vallière) (Hc) ; (23) Rennes, BM, 243, f. 121ra-126ra (milieu du xive siècle ; ARCA) (K) ; (24) Valenciennes, BM, 417, f. 83r-99v (xve siècle) ; (25) localisation actuelle inconnue, f. 156r-163v (anc. Sir Henry Spelman ; Rev. Cox Macro ; John Patterson (vente, 1820) ; Hudson Gurney ; C. C. Rattey)
Le texte en vers a également connu une diffusion en moyen néerlandais (F. A. Stoett, De Borchgrauinne van Vergi.Middelnederlandsch Gedicht uit het begin der 14de eeuw, Zutphen, Thieme, 1892 ; A. van Loey, De Borchgrauinne van Vergi. Diplomatische uitgave naar het Hulthemse handschrift, Leiden, E. J. Brill, 1949) et en italien (Fiore di leggende, Cantari antichi, Editi e ordinati da Ezio Levi, Bari, Laterza, 1914, p. 123-142).
éditions et traductions
E. Barbarzan – M. Méon 1808, Fabliaux et contes des poètes françois des xie, xiie, xiiie, xive et xve siècles, tirés des meilleurs auteurs, Nouvelle édition, augmentée et revue sur les manuscrits de la Bibliothèque impériale, Paris, Warée, IV, p. 296-326 [texte d’après A, C et H]
A.-A. Renouard 1829, Fabliaux ou contes, fables et romans du xiie et du xiiie siècle traduits ou extraits par Legrand d’Aussy. Troisième édition considérablement augmentée, Paris, Jules Renouard, IV, p. 98-116 [traduction en français moderne]
G. Raynaud 1892, « La chastelaine de Vergi », in Romania, 21, p. 145-193 [texte de C avec variantes de A, B, D, E, F, G, H]
L. Brandin 1903, The Chatelaine of Vergi : A 13th-century French Romance, done into English by A. Kemp-Welch, London, Nutt [texte de l’éd. Raynaud 1892]
G. Goyert 1919, Liebesnovellen des französischen Mittelalters, München, Müller, p. 79-92 [traduction en allemand]
A. Mary 1920, La Châtelaine de Vergy, Paris,Léon Pichon [traduction en français moderne]
J. Bédier 1927, La Châtelaine de Vergy. Conte du xiiie siècle, Paris, L’édition d’art H. Piazza [texte de C avec variantes de A, B, D, E, F, G, H ; traduction en français moderne en regard]
C. Pellegrini 1929, La Castellana di Vergi. Poemetto francese del Secolo 50xiii, riveduto nel testo, con versione a fronte, introduzione e note, Firenze, G. C. Sansoni [traduction italienne en regard]
F. Whitehead 1944, La Chastelaine de Vergi, Manchester, Manchester University Press [texte de C avec variantes de A, B, D, E, F, G, H]
A. Pauphilet 1952, Poètes et romanciers du Moyen Âge, Paris, Gallimard, 1939, 2e éd. augmentée de textes nouveaux présentés par R. Pernoud et A.-M. Schmidt, p. 348-374
L. Foulet 1963, La Chastelaine de Vergi. Poème du xiiie siècle édité par G. Raynaud. Quatrième édition revue par L. Foulet, Paris, Honoré Champion [texte de C avec variantes de A, B, D, E, F, G, H, I, K]
A. Henry 1965, Chrestomathie de la littérature en ancien français, Bern, Francke Verlag, p. 153-157
R. E. V. Stuip 1970, La Chastelaine de Vergi, Édition critique du ms BnF, fr. 375 avec Introduction, Notes, Glossaire et Index, suivie de l’édition diplomatique de tous les manuscrits du xiiie et du xve siècle, The Hague – Paris, Mouton [texte de A et édition diplomatique de A, B, C, E, F, Go, H, I, K, L]
L. A. Arrathoon 1975, La Chastelaine de Vergi : A New Critical Edition of the Text with Introduction, Notes and an English Paraphrase, PhD Dissertation, Princeton University
D. Régnier-Bohler 1979, Le cœur mangé : récits érotiques et courtois des xiie et xiiie siècles, Paris, Stock, p. 179-220 [traduction en français moderne]
L. A. Arrathoon 1984, The Lady of Vergi, Merrick (NY), Cross-Cultural Communications, [traduction en anglais ; texte de C, avec amendements de A, E, Go]
R. E. V. Stuip 1985, La Châtelaine de Vergy, Paris, Union générale d’éditions [texte de A corrigé sur E, C et Go, avec traduction en français moderne]
F. Carmona 1986, Jean Renart, El lai de la sombra. El lai de Aristóteles. La Castellana de Vergi. Introducción, traducción y edición, Barcelona, PPU [avec traduction en espagnol]
F. Wolfzettel 1986, Französische ‘Schicksalsnovellen’ des 13. Jahrhunderts. ‘La chastelaine de Vergi’, ‘La fille du comte de Pontieu’, ‘Le roi Flore et la belle Jehanne’, München, Fink, p. 82-129 [traduction en allemand avec facsimilé de l’éd. Raynaud revue par Foulet]
G. Angeli 1991, La Castellana di Vergy, Roma, Salerno Editore [traduction en italien et texte de l’édition Stuip 1970 en regard]
51J. Dufournet – L. Dulac 1994, La Châtelaine de Vergy, Paris, Gallimard [texte de C avec traduction en français moderne en regard]
S. Méjean-Thiolier – M.-F. Notz-Grob 1997, Nouvelles courtoises occitanes et françaises, Paris, Librairie Générale Française, p. 450-503
M. García Fernández 1999, O lai de Graelent / A castelá de Vergy, Santiago de Compostela, Ed. Xunta de Galicia – Conselleria de Presidencia [texte bilingue français–galicien]
(C) histoire de la prose
L’histoire de la Chastelaine de Vergi a joui d’une immense popularité et a fasciné le public sous différentes formes et sous divers titres du xiiie au xixe siècle. Si nous les mentionnons ici, ce n’est que pour souligner que ces versions dérivent toutes, directement ou non, du récit en vers.
À la fin du xve siècle, il semble avoir existé une version dramatisée, peut-être une moralité, intitulée La Chastellene [sic] du Vergier : cet ouvrage, mentionné dans le catalogue rédigé par un libraire anonyme de Tours vers 1490-1500 (Paris, BnF, fr. 29129), n’a pas été retrouvé (G. A. Runnalls, « The Catalogue of the Tours Book-Seller and Late Medieval French Drama », in Le moyen français, 11, 1982, p. 112-128, p. 123).
La matière a pris la forme d’un long récit dialogué en octosyllabes, La Chastelaine du Vergier, publié par Denis Janot vers 1540 (Lorenz 1909, p. 62, suggère l’hypothèse, reprise par Arrathoon 1976, que la pièce de théâtre de la fin du xve siècle, aujourd’hui perdue, ait été la source de l’imprimé) :
La Chastelaine du Vergier. Livre d ’ amours du Chevalier et de la Dame Chastellaine du Vergier. Comprenant l ’ estat de leur amour et comment elle fut continuee jusques à la mort. [bois] On les vend à Paris en la rue neufve Nostre Dame à l’enseigne Sainct Jehan Baptiste, près Saincte Geneviefve des Ardans, Paris, s. n. [Denis Janot], s. d. [1540 ca] (Paris, BnF, Rés. Ye-2963 : lacunaire des f. d4-d5 ; Gallica)
Édition signalée par Brunet (Manuel du libraire, 1860, I, p. 1820-1821)
USTC, 79458 (95421, no known surviving copy) ; Renouard, V, 1540, n. 1636 ; FVB, 34892
Au xvie siècle, le récit se retrouve encore : dans la nouvelle 70 de l’Heptaméron (1559) de Marguerite de Navarre (traduite par Bandello et publiée en 1573 ; puis retraduite en français par Belleforest vers 521582) ; dans Radegonde, duchesse de Bourgogne (tragédie en quatre actes en alexandrins, 1599).
C’est sans doute la version de Belleforest, imprimée plusieurs fois jusqu’en 1620, qui est à la base d’un nouveau remaniement : La Comtesse de Vergi. Nouvelle historique galante et tragique, du Comte de Vignacourt (1722).
Au xviiie siècle, dans plusieurs textes, l’héroïne prend le nom de Gabrielle et est identifiée avec la dame de Fayel– protagoniste du romande Jakemes –, tandis que son amant se confond avec le châtelain de Coucy (Stuip 1970, p. 159, n. 2). Cette confusion s’explique non seulement par une ressemblance sonore entre les noms de Vergy et de Coucy, mais aussi par un renvoi au Châtelain de Coucy dans le texte même du xiiie siècle. En 1752 parut ainsi à Paris une plaquette anonyme de 32 pages intitulée Les infortunés Amours de Gabrielle de Vergi et de Raoul de Coucy, romance, œuvre rééditée en 1766 par M. Mailhol, qui la combine avec une Lettre en vers de Gabrielle de Vergy, a la comtesse de Raoul, sœur de Raoul de Coucy.
En 1799 Legrand d’Aussy imprime une sorte de traduction du récit du xiiie siècle ; tout en suivant d’assez près le texte d’un des manuscrits de la Bibliothèque Nationale, Legrand introduit quelques changements : le chevalier prend le nom d’Agolane et la seule strophe lyrique d’une chanson du Châtelain de Coucy est supprimée.
Au xixe siècle, le récit original est enfin remodelé sous la forme d’un opéra : Gabriella di Vergy de Gaetano Donizetti.
– Bibliothèques du xviii e siècle
Bibliothèque de campagne, ou Amusemens de l ’ esprit et du cœur, XI, Amsterdam, Marc Michel Rey, 1756, p. 231-336 [version de La Comtesse de Vergi. Nouvelle historique galante et tragique par le Comte de Vignacourt]
P. J.-B. Legrand d ’ Aussy, Fabliaux ou contes, fables et romans du xiie et du xiiie siècle traduits ou extraits d’après divers Manuscrits du tems, Paris, Onfroy, III, 1779, p. 196-219
(D) bibliographie
(1) éditions
G. Civelli 1888, Novella e poesie francesi inedite o rarissime del secolo xiv, Firenze, Civelli
53J. Brocherel 1927, « Une chanson de geste du xiiie siècle transcrite en prose par un Valdôtain du xve siècle », in Augusta Prætoria. Revue de pensée et d’action régionalistes, 1, p. 1-17
A. M. Babbi 1985, La Chastelaine du Vergier, novella in prosa francese del sec. xiv, Verona, Università di Verona
B. A. Gauthier 1985, La Chastelaine du Vergier : A Critical Edition, PhD Dissertation, Vanderbildt University, Nashville [en-ligne]
R. E. V. Stuip 1985, La Châtelaine de Vergy, Paris, Union générale d’éditions
J.-F. Kosta-Théfaine 2009, Istoire de la Chastelaine du Vergier et de Tristan le Chevalier, London, Modern Humanities Research Association, [en ligne]
(2) bibliographie critique
E. Lorenz 1909, Die altfranzösische Versnovelle von der Kastellanin von Vergi in spätern Bearbeitungen. Halle a. S., Kaemmerer
J. Frappier 1946, « La Chastelaine de Vergi, Marguerite de Navarre et Bandello », in Mélanges. II : Études littéraires, 1945, Paris, Publications de la Faculté des lettres de Strasbourg, 105, p. 110-111 (Réimpr. in Du Moyen Âge à la Renaissance, Paris, Honoré Champion, 1976, p. 419-420)
L. A. Arrathoon 1976, « The ‘Compte en viel langaige’ Behind Heptaméron, LXX », in Romance Philology, 30, p. 192-199
R. E. V. Stuip 1985, « L’Istoire de la Chastelaine du Vergier », in Actes du ive colloque international sur le moyen français, Amsterdam, Rodopi, p. 337-359
C. F. de Almeida Ribeiro 1988, « De ‘la Castelaine de Vergi’ à ‘la Chastelaine du Vergier’ : mise en prose et moralisation », in Ariane : revue d’études littéraires françaises, 6, p. 15-23
J. Kjær 1988, « L’Istoire de la Chastelaine du Vergier et de Tristan le chevalier (xve siècle). Essai d’interprétation », in Revue romane, 23, p. 260-282
A. Negri 1992, « A proposito de La chastelaine du Vergier », in Francofonia, 22, p. 143-157
D. Malfait-Dohet 1994, « Du chevalier anonyme Li fin amant au Loial amy Tristan. Une évolution de l’écriture amoureuse du xiiieme au xveme siecle. Istoire de la Chastelaine du vergier et de Tristan le chevalier, BN 54n.acq. 6639 », in La « Fin’amor » dans la culture féodale, Greifswald, Reineke Verlag, p. 97-107
P. Cifarelli 2017, « Récits brefs et mise en prose », in Raconter en prose, xive-xvie siècle, Paris, Classiques Garnier, p. 303-324
R. Décloître 2017, « La Chastelaine de Vergy et son Istoire : interférences de la matière tristanienne dans le passage du vers à la prose », in Memini, 21 (en ligne)
- Thème CLIL : 3438 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moyen Age
- ISBN : 978-2-406-15796-0
- EAN : 9782406157960
- ISSN : 2261-0804
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-15796-0.p.0045
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 30/04/2024
- Langue : Français