Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Lectures russes de Pascal. Hier et aujourd’hui
- Pages : 241 à 244
- Collection : Constitution de la modernité, n° 24
Résumés
Françoise Lesourd, « Introduction. La réception de l’œuvre de Pascal dans la culture russe »
Comment expliquer que Pascal soit le penseur français qui a eu la plus grande influence en Russie ? Ce pays a connu un développement historique différent de l’Europe occidentale, et le religieux a gardé dans la culture russe une place centrale jusqu’à l’époque moderne. L’influence des œuvres de Pascal se distingue chez la plupart des grands penseurs russes, mais tout spécialement chez Léon Tolstoï.
Galina Streltsova (traduction de Françoise Lesourd), « Pascal et la culture russe »
La « voix du cœur » de Pascal, dans l’hyper-rationalisme du xviie siècle européen, était vouée à « crier dans le désert ». En Russie seulement, cette voix fut entendue et même portée jusqu’à la création d’une « métaphysique du cœur » propre à la Russie, chantée tout particulièrement par Dostoïevski. Tolstoï adorait Pascal et n’a cessé de s’instruire auprès de lui. Florenski a noté à juste titre « une ressemblance spirituelle toute spéciale » entre Pascal et l’orthodoxie.
Boris Tarassov, « La notion de “cœur” chez Pascal et dans la littérature et la philosophie russes »
L’auteur montre ici comment, par la notion de « cœur », la tradition chrétienne rattache la pensée de Pascal à celle de Dostoïevski, Tioutchev, Vycheslavtsev… Pour eux comme pour Pascal, le cœur est la partie la plus intime de l’être humain, siège de la volonté, lieu de la rencontre (ou non-rencontre) avec Dieu. Pour eux, le cœur est un instrument gnoséologique permettant de connaître la causalité spirituelle qui gouverne la vie, de déceler des niveaux d’existence qui échappent à la raison.
242Véronika Altashina (traduction de Françoise Lesourd) « Le “roseau pensant” dans la poésie russe »
Cet article est consacré à l’étude de l’image du « roseau pensant » dans la poésie russe du xixe au xxie siècle. C’est Fiodor Tioutchev qui contribue à ancrer cette image dans la poésie russe. Au début du xxe siècle, ce sont Anna Akhmatova et Marina Tsvétaïeva qui ont recours à cette image poétique dans leurs œuvres. Au xxe et au xxie siècle, Pascal ne fait pas partie des penseurs les plus connus, mais on rencontre chez plusieurs poètes modernes la référence au « roseau pensant », devenu simple cliché.
Françoise Lesourd, « La réception tolstoïenne de Pascal, vue par les penseurs russes »
Les critiques russes ont montré un certain scepticisme à l’égard de Tolstoï « maître à penser », et, dans ce cadre, à l’égard de sa réception de Pascal. Mark Aldanov, dans sa célèbre étude, L’énigme de Tolstoï, voit la « lumière » qui apparaît à la fin de La Mort d’Ivan Ilitch comme peu convaincante. Mais Ivan Bounine décèle chez Tolstoï une intuition de l’éternité qui témoigne d’une convergence profonde avec le sens de l’infini qui se manifeste chez Pascal.
Laurent Thirouin, « La maladie d’Ivan Ilitch. Tolstoï lecteur de Pascal »
Comme l’ont vu les critiques, La Mort d’Ivan Ilitch est habitée par Pascal. La proximité de Tolstoï avec l’écrivain français n’est pas d’ordre savant, mais elle relève d’une intimité créatrice. Indice de son intelligence profonde du texte français, Tolstoï reconstitue par son dispositif narratif une liasse des Pensées (« commencement ») dont tous les éléments étaient dispersés au sein des éditions qui s’offraient à lui. Et il exploite les potentialités narratives de la célèbre notion de divertissement.
Françoise Lesourd, « Le Cercle de lecture. Une œuvre tardive de Tolstoï »
Le Cercle de lecture – ensemble de lectures édifiantes destiné à susciter et accompagner une méditation quotidienne –, est une œuvre tardive de Tolstoï. Chaque jour comporte une dizaine de réflexions rassemblées sous un thème unique. Ce sont en général des citations appartenant aux principaux « maîtres de sagesse » de l’humanité. Celles de Pascal y occupent une grande place. Ce sont plutôt des adaptations, qui montrent le prisme à travers lequel il le lisait.
243Laurent Thirouin, « Le Pascal de Tolstoï »
Tolstoï puise largement dans l’œuvre de Pascal pour constituer son « Cercle de lecture ». Mais la fidélité au texte original n’est pas son souci. Il s’agit d’un véritable travail de création littéraire. À travers les choix opérés par Tolstoï et les transformations qu’impose sa traduction, les divergences entre les deux auteurs apportent un éclairage précieux. La Vie de Pascal, une des « lectures de la semaine », est une interprétation originale, centrée sur le souci de la gloire et ses métamorphoses.
Oleg Pankratiev (traduction de Françoise Lesourd), « Pascal et Dostoïevski, à la naissance de la pensée existentialiste »
La pensée de Pascal comme celle de Dostoïevski exprime les dispositions d’esprit fondamentales de l’homme moderne. Celles-ci tendent à justifier irrationnellement l’image du monde fermée sur soi propre à la science moderne. Le silence des espaces infinis cache l’expérience de l’absence de Dieu, ouvrant les profondeurs du mal. Au contraire, chez ces deux penseurs la présence de Dieu se révèle dans une joie profonde, qui transforme le temps homogène en instants existentiels d’éternité et de bonheur.
Pierre Caussat, « Sémion Frank face à Blaise Pascal. L’inconcevabilité ordonnée face à l’inconcevabilité dissonante »
Le rapport de Frank à Pascal est marqué par l’ambivalence. Un texte de 1930 marque bien la tension entre le « Dieu des philosophes » et le « Dieu des prophètes ». Cette tension devient une véritable charge contre Pascal en 1946, dans Dieu est avec nous. Au cœur du débat est la notion de « pari », source de polémiques dont la recherche récente a montré le caractère fallacieux. Le débat rebondit en 1939 avec L’inconcevable, où Pascal est ignoré dans la centralité qu’il accorde à la personne du Christ.
Artiom Krotov (traduction de Françoise Lesourd), « Descartes et Pascal dans la pensée de Nicolas Berdiaev et Boris Vycheslavtsev »
La pensée religieuse russe du xxe siècle s’est souvent tournée vers la philosophie classique française. Berdiaev liait catégoriquement Descartes à des voies épuisées pour la philosophie, tandis que dans les idées de Pascal il a vu 244les reflets d’une vérité éternelle, il y a aperçu le futur de la culture humaine. Vycheslavtsev, lui, affirmait que c’était la réalité d’une nouvelle dimension qui s’était découverte à Descartes, tandis que chez Pascal il s’agissait d’une « émotion religieuse supérieure ».
Françoise Lesourd, « La Nuit de Gethsémani. Pascal vu par Léon Chestov »
La Nuit de Gethsémani se fonde sur le passage du Mystère de Jésus, où Pascal affirme : « Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde. Il ne faut pas dormir pendant ce temps-là ». Ici, sous le terme « sommeil », Chestov entend la « raison » humaine bornée mais protectrice, qui permet à l’homme de « dormir » malgré le tragique de sa condition. Tout en affirmant la nécessité du « sommeil » pour les simples mortels, il admire en Pascal l’un de ceux qui ont le douloureux privilège de rester éveillés.
- Thème CLIL : 4127 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie éthique et politique
- ISBN : 978-2-406-10396-7
- EAN : 9782406103967
- ISSN : 2494-7407
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10396-7.p.0241
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 26/10/2020
- Langue : Français