Résumés et présentations des auteurs
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Le Pouvoir contourné. Infléchir et subvertir l’autorité à l’âge moderne
- Pages : 397 à 402
- Collection : Rencontres, n° 166
Résumés et présentations
des auteurs
Pierre Savy, « Le feudataire, relais du prince ou petit prince ? Insolences et usurpations féodales dans la Lombardie du xve siècle »
Pierre Savy est ancien élève de l’ENS Ulm et ancien membre de l’École française de Rome, il est maître de conférences en histoire à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée. Ses recherches portent sur la société et la politique dans l’Italie médiévale. Il a publié Seigneurs et condottières : les Dal Verme (Rome, 2013) et assuré l’édition de Des Juifs et de leurs mensonges, de Martin Luther (Paris, 2015).
Tout en encadrant territoire et société locale pour le compte du prince, les feudataires du duché de Milan sont en position de jouer un jeu politique qui leur est propre. Ils sont d’ailleurs souvent dépeints par les sources ducales comme ayant des comportements perturbateurs. Dans un système où toute souveraineté n’est pas transférée au prince, une relation irréductible à la pure obéissance s’instaure entre prince et feudataires. Ces derniers sont donc des relais du prince et parfois des « petits princes ».
José Javier Ruiz Ibáñez, « (Re)définir le pouvoir souverain, se (re)définir dans le pouvoir souverain. Les magistratures municipales françaises dans les villes contrôlées par les Espagnols (1594-1598) »
José Javier Ruiz Ibáñez est professeur d’histoire de la pensée à l’université de Murcie. Il est spécialiste de l’histoire politique de l’Europe moderne et notamment de la présence et de l’influence de la monarchie espagnole en dehors de ses frontières. Il est l’auteur de sept ouvrages, a édité seize ouvrages collectifs et publié près de soixante-dix articles.
L’article étudie le système de domination établi par les Espagnols sur les villes du nord de la France entre 1594 et 1596. La nécessité de recourir aux élites locales pour administrer les territoires occupés active une dynamique de coproduction des cadres de la domination où les agents français adaptent
leurs pratiques et leurs cultures politiques pour rendre possible leur participation au nouveau pouvoir. Chaque localité occupée montre ainsi des effets d’hybridation qui infléchissent les cadres de la domination.
Héloïse Hermant, « Du pouvoir souverain en partage ? Le roi, le valido et les factions de cour dans l’Espagne du xviie siècle »
Héloïse Hermant, ancienne élève de l’ENS (Ulm) est maître de conférences en histoire moderne à l’université Côte d’Azur. Elle travaille sur les processus de cohésion des structures politiques, la notion d’espace public et la dimension culturelle des conflits. Elle a publié Guerres de plumes. Publicité et cultures politiques dans l’Espagne du xviie siècle (Madrid, 2012).
Instrument de la monarchie exécutive, le valido menace le gouvernement des letrados et la place de la noblesse de sang dans la polysynodie. La cour devient ainsi le théâtre d’un conflit pour le partage de la souveraineté structuré par une incompatibilité de valeurs (raison d’État, corporatisme, ethos nobiliaire). L’article examine l’obstructionnisme gouvernemental, les pressions et les refus masqués et obliques, qui infléchissent et subvertissent les cadres de la domination dont l’adaptabilité assure la pérennité.
Diane Roussel, « Justice locale et société au début de l’époque moderne. Une construction partagée de l’ordre »
Diane Roussel est ancienne élève de l’ENS de Fontenay-Saint-Cloud et maître de conférences en histoire moderne à l’université de Reims Champagne-Ardenne. Spécialiste d’histoire sociale et culturelle de la justice, elle s’intéresse à l’histoire urbaine et à l’étude de la régulation sociale. Elle a étudié le cas de Paris au xvie siècle dans Violences et passions dans le Paris de la Renaissance (Seyssel, 2012).
Dans une approche d’histoire sociale, l’article analyse, à travers le cas de la justice seigneuriale de Saint-Germain-des-Prés, les mécanismes de l’épreuve du procès, les usages du pluralisme judiciaire conçu comme une ressource ainsi que les interactions de face-à-face entre les habitants et les sergents du faubourg. Ces phénomènes montrent les mécanismes pluriels de l’encadrement de la société moderne et des situations dans lesquelles la construction de l’ordre semble plus souvent partagée qu’imposée.
Claire Judde De Larivière, « Pragmatique du pouvoir et agents subalternes. Construire, respecter, contourner l’ordre politique (Murano, xvie siècle) »
Claire Judde de Larivière est maître de conférences en histoire médiévale et de la Renaissance à l’université Toulouse – Jean-Jaurès et honorary research fellow au Birkbeck College (University of London). Ses travaux portent sur l’histoire sociale et politique de Venise aux xve et xvie siècles. Elle a notamment publié La Révolte des boules de neige. Murano face à Venise, 1511 (Paris, 2014).
L’article analyse un procès organisé en 1517 à Venise contre le gendarme (cavalier) de Murano, île soumise à la domination politique de la capitale. L’affaire met en scène des officiers et des habitants de l’île et les voit agir en situation. Leurs discussions portent sur la délimitation du pouvoir et des attributions des officiers. À travers les récits des acteurs de l’affaire, il s’agit de comprendre comment ces agents participent à l’exercice de la domination, à sa construction, voire à sa contestation.
Michael Braddick, « Face, légitimité et identité partisane dans la négociation du pouvoir de l’État en Angleterre (1558-1660) »
Michael Braddick est professeur d’histoire moderne à l’université de Sheffield. Ses travaux portent sur la formation de l’État, la politique populaire et la Révolution anglaise. Il a notamment publié State formation and social change in early modern England (Abingdon, 2000) et God’s Fury, England’s Fire (New York, 2008). Il travaille actuellement à une étude sur John Lilburne et la Révolution anglaise.
L’article étudie les situations de face-à-face entre les populations et les agents de la monarchie anglaise, contraints de négocier à chaque fois leur autorité en l’absence de moyens financiers et coercitifs suffisants. La nécessité d’un consentement pratique à la légitimité de mesures mises en œuvre dans l’interaction avec les sujets engendre des frictions et donne lieu à diverses formes d’humiliation des agents (évoquées dans de nombreux procès) qui limitent le pouvoir souverain en le modelant en creux.
Christophe Duhamelle, « Refuser les réformes en disqualifiant le curé. L’Eichsfeld catholique (Saint-Empire) au temps des Lumières »
Christophe Duhamelle est ancien élève de l’ENS de Fontenay-Saint-Cloud et directeur d’études à l’EHESS. Il a été directeur de la Mission historique française en Allemagne puis du Centre de recherches historiques et dirige le Centre interdisciplinaire
d’études et de recherches sur l’Allemagne. Il a notamment publié : L’Héritage collectif. La noblesse d’Église rhénane (Paris, 1998) et La Frontière au village (Paris, 2010).
Dans l’Allemagne catholique, les Lumières sont marquées par de nombreuses réformes sur les pratiques de piété. Le cas de l’Eichsfeld, région rurale de l’archevêché-électorat de Mayence, montre que les résistances envers ces réformes sont rarement frontales, mais s’expriment plutôt dans un horizon local et par des stratégies dérivées contre le curé, instance nécessaire mais vulnérable de l’application des mesures générales. L’article étudie ainsi des figures d’évitement du conflit et d’évidement de l’autorité.
Jérémie Foa, « Survivre malgré la loi. Le contournement des édits de pacification au temps des premières guerres de Religion »
Jérémie Foa est ancien élève de l’ENS de Fontenay-Saint-Cloud et maître de conférences en histoire moderne à l’université d’Aix-Marseille. Il travaille actuellement sur l’expérience de la guerre civile et les compétences mobilisées par les personnes impliquées dans les guerres intestines, notamment à la fin du xvie siècle. Il a publié Le Tombeau de la paix. Une histoire des édits de pacification (Limoges, 2015).
Avec les « paix de Religion » initiées par les édits de pacification dans chaque bailliage, les protestants se voient accorder des temples et des cimetières souvent éloignés des centres-villes. Les guerres de Religion se poursuivent alors dans la sphère normative au gré des contournements des règles. S’intéresser aux conditions d’application des lois et à ses habituels contournements fait éclater la fiction du caractère unitaire du droit formel et montre la pluralité normative sous l’Ancien Régime.
Jean-Pascal Gay, « Genre et sexualité au risque de leur mise en doctrine. Théologie catholique moderne et comportements sexuels hétéropratiques »
Jean-Pascal Gay est ancien élève de l’ENS Ulm et maître de conférences en histoire moderne à l’université de Strasbourg. Ses recherches portent sur l’histoire du savoir théologique dans le monde catholique. Il est notamment l’auteur de Morales en conflit. Théologie et polémique au Grand Siècle (1641-1700) (Paris, 2011) et de Jesuit Civil Wars. Theology, Politics and Government (1687-1705) (Farnham, 2012).
L’article explore comment la maîtrise d’un discours savant au sein d’une orthodoxie peut aussi constituer une ressource pour subvertir l’ordre que cette orthodoxie fonde : en l’occurrence comment la maîtrise du discours de
la théologie catholique moderne sur la sexualité peut fournir des ressources pour justifier des comportements hétéropratiques. Ce qui apparaît alors est une tension contradictoire au sein de la logique de disciplinement social portée par la confessionnalisation catholique.
Pierre-Yves Beaurepaire, « Contourner l’illégalité par la légitimité sociale, l’action charitable et la neutralisation politique. L’exemple des francs-maçons européens au xviiie siècle »
Pierre-Yves Beaurepaire est professeur d’histoire moderne à l’université Côte d’Azur et membre de l’Institut universitaire de France. Ses recherches portent sur l’Europe des Lumières, la sociabilité et les réseaux. Il vient de publier Échec au roi. Irrespect, contestations et révoltes dans la France des Lumières (Paris, 2015).
Dès sa naissance, la Franc-maçonnerie spéculative sent le soufre. Le secret qui lie les frères est soupçonné de protéger de noirs desseins, notamment une conspiration contre les trônes et les autels. Si certains francs-maçons optent pour la tenue d’assemblées clandestines, la majorité préfère accueillir dans le temple les représentants de la meilleure société afin de gagner des protecteurs et fait assaut d’allégeance aux souverains pour protester de l’innocence de la Fraternité et de son utilité publique.
Thomas Glesener, « “Le Conseil est une mer à boire pour des étrangers”. Les enquêtes de pureté de sang des candidats flamands aux ordres militaires espagnols (xviiie siècle) »
Thomas Glesener est ancien membre de la Casa de Velázquez et maître de conférences en histoire moderne à l’université d’Aix-Marseille. Il travaille sur les processus d’intégration et d’exclusion des étrangers et notamment sur l’exil flamand consécutif au démembrement de la monarchie hispanique au xviiie siècle. Il prépare une monographie intitulée « Les Flamands et le gouvernement de l’Espagne au xviiie siècle ».
L’article interroge le rôle et le sens des enquêtes de pureté de sang menées par le Conseil des Ordres dans l’Espagne d’Ancien Régime. En analysant les écarts de procédure dans le cas des candidats flamands à un habit, il souligne l’importance de la dimension sociale de l’épreuve. Quand une relation de confiance a été établie avec le candidat, le Conseil montre une grande souplesse dans l’application des règles allant jusqu’à déléguer à l’entourage du candidat certaines de ses prérogatives.
Valérie Piétri, « Être noble par-delà les lois du roi. Des anoblissements taisibles en Provence après les enquêtes de vérification de noblesse (1716-1789) »
Valérie Piétri est maître de conférences en histoire moderne à l’université Côte d’Azur. Elle a soutenu en 2001 une thèse sur la noblesse de Provence orientale des années 1660 à la veille de la Révolution. Elle a publié, avec Germain Butaud, Les Enjeux de la généalogie (Paris, 2006) et plusieurs articles sur les pratiques généalogiques et la question des preuves de noblesse à l’époque moderne.
Dans un contexte de renforcement des contraintes légales qui accompagne ce que l’on a identifié comme une fermeture de l’ordre nobiliaire et qui rend théoriquement impossibles les formes d’anoblissement par genre de vie ayant jusqu’alors alimenté le second ordre, l’étude d’une figure de noblesse imparfaite ou locale dans la Provence des Lumières montre la persistance de ces formes prudentes de contournement et d’inflexion de la norme légale jusqu’à la veille de la Révolution.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-05829-8
- EAN : 9782406058298
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-05829-8.p.0397
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 30/08/2016
- Langue : Français