Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : La Présupposition entre théorisation et mise en discours
- Pages : 573 à 578
- Collection : Rencontres, n° 350
- Série : Linguistique, n° 3
Résumés
Louis de Saussure, « Des présuppositions stricto sensu aux présuppositions discursives »
Cette étude rappelle les principales propriétés des présuppositions, en accordant une attention particulière au problème complexe de l’accommodation présuppositionnelle. Sont ensuite considérés des cas de présuppositions entièrement pragmatiques, inférées à partir d’un énoncé entier, aux effets persuasifs notables. Enfin, une typologie des niveaux de sens est proposée, qui revisite la distinction traditionnelle entre contenus posés, présupposés et implicites.
Jacques Moeschler, « Présupposition et implicature. Où passe la frontière ? »
La question de la frontière entre sémantique et pragmatique constitue une problématique centrale depuis l’apparition des concepts d’implicatures conversationnelle et conventionnelle. Les conséquences de l’apparition de ces concepts, qui recouvrent partiellement le domaine des présuppositions, sont discutées, en proposant une frontière nouvelle entre sémantique et pragmatique, incluant les relations de sens comme l’implication, la présupposition, l’explicature et l’implicature.
Sandrine Deloor et Jean-Claude Anscombre, « Faut-il présupposer l’humanité du roi de France ? »
Cet article oppose la définition de la présupposition en termes de savoirs partagés (approche issue des travaux de R. Stalnaker et majoritaire actuellement) à une approche énonciative inspirée des recherches d’O. Ducrot et J.-C. Anscombre. Les auteurs montrent que les problèmes de délimitation du phénomène présuppositionnel soulevés par la première approche peuvent être résolus en adoptant une conception énonciative du sens et en mettant en avant la dépendance du posé par rapport au présupposé.
574Pierre-Yves Raccah, « De la présupposition logique à la présupposition argumentative. Étude d’un outil de manipulation idéologique »
Ce texte réexamine la notion de présupposition. On y voit d’abord que, même dans un cadre vériconditionnel, le présupposé ne peut pas être une phrase, mais relève du domaine du signifié. On y propose ensuite une conception instructionnelle de la sémantique, dans laquelle une réélaboration du concept de présupposition, en termes de points de vue nécessaires à la construction d’un sens, est présentée. On y montre enfin le rôle de la présupposition dans la manipulation idéologique.
Jacques Jayez et Robert Reinecke, « La loi d’enchaînement dans une perspective expérimentale »
On analyse ici les résultats d’une expérience comportementale utilisant des phrases dites factives (du type Marie sait que Paul vient) pour détecter une différence éventuelle de saillance cognitive entre la partie concernant le contenu principal (Marie sait) et celle concernant la présupposition (Paul vient). Les résultats suggèrent que les propriétés discursives (voir Ducrot, 1972) sont un facteur de différenciation plus plausible que la saillance.
Georges-Elia Sarfati, « De la présupposition au sens commun. Morphogenèse et sémiogenèse de l’évidence discursive »
Cette étude plaide pour une extension de la problématique présuppositionnelle, au profit d’une théorie des formes de l’évidence sémantique, qui prend notamment en compte la description des formations pré-énonciatives et énonciatives du « sens commun » à partir d’une conceptualisation des « états du discours ». Elle intéresse particulièrement l’analyse des discours et des textes, à partir des récents développements du modèle de la pragmatique topique.
Corinne Rossari, « La présupposition discursive dans les structures concessives »
Cette contribution porte sur le statut discursif de la notion de présupposition en relation avec l’amorce des séquences concessives. L’auteure prend appui sur un corpus comprenant des constructions déclenchant une interprétation concessive pour identifier des indices signalant qu’un élément relatif au contenu concédé est déjà présent dans le background discursif. C’est par le biais de ces indices que la présupposition concernant le contenu en jeu dans de tels énoncés est activée.
575Mervi Helkkula, « La présupposition et les constructions pseudo-clivées »
Cette étude sur le rôle de la présupposition pour l’analyse des constructions pseudo-clivées trouve son point de départ dans l’article classique d’Ellen F. Prince, paru dans Language en 1978. L’usage de la pseudo-clivée est fréquemment motivé par le désir du locuteur d’imposer un certain état de choses comme une vérité indéniable aux yeux de son interlocuteur. Les textes littéraires examinés offrent des exemples abondants de pseudo-clivées utilisées dans des fonctions persuasives.
Marc Bonhomme, « La présupposition dans le discours grammatical normatif des remarqueurs du xviie siècle »
À la base du français classique, les productions grammaticales des remarqueurs du xviie siècle (Vaugelas, Ménage et Bouhours) sont parcourues par des présupposés cadratifs qui imposent, sans vraiment le dire, une idéologie préconstruite du bon usage. En outre, ces productions grammaticales mettent en jeu des présupposés discursifs plus conjoncturels qui révèlent la gestion personnelle du bon usage effectuée par ces remarqueurs et qui orientent leur argumentation normalisante.
Marion Carel, « Présupposition et organisation du sens »
Ce texte montre que les présupposés ne sont pas indépendants des posés. Loin de constituer de simples préalables à l’assertion de ceux-ci, ils sont communiqués par l’énoncé et ils les complètent sémantiquement, influençant la construction textuelle. On distingue deux sortes de présupposés : les présupposés argumentatifs, qui forment avec leurs posés un unique enchaînement argumentatif, et les présupposés co-signifiés, qui constituent avec leurs posés deux facettes d’un même Événement.
Amir Biglari, « La présupposition et la manipulation discursive dans Les Contemplations de Victor Hugo »
Cet article vise à étudier les effets manipulatoires de la présupposition dans Les Contemplations de Victor Hugo. Il cherche à montrer que la présupposition, en présentant un cadre discursif comme déjà connu et partagé, donc comme hors débat et hors doute, s’impose au lecteur. Afin de poursuivre la 576lecture des poèmes, celui-ci doit croire aux contenus mis en œuvre et doit les éprouver. On souligne aussi que, sous certaines conditions, un effet semblable se produirait par les éléments posés.
Jean-Paul Dufiet, « Le présupposé dans le texte dramatique »
Cette étude dégage les caractéristiques discursives du présupposé dans un corpus de textes dramatiques contemporains. L’analyse sémio-linguistique opérée montre que les rapports entre le posé et le présupposé nourrissent la fiction et la narration théâtrales. En outre, si le présupposé est actif dans la relation référentielle, il constitue également une structure féconde du dialogue, en raison de ses particularités énonciatives et de son rôle dans la dialogie externe du texte dramatique.
Anna Jaubert, « Modulations et modularité de la contrainte présuppositionnelle. Le dialogue exemplaire de Marivaux »
L’opposition entre présupposition et sous-entendu (Ducrot, 1972) se fonde sur un critère apparemment décisif : pour la première, l’implicite est linguistiquement marqué, indépendant des circonstances de l’énonciation ; pour le second, l’implicite est livré aux aléas du contexte. Mais la réalité est moins tranchée. Cette étude défend une thèse continuiste révélant imbrication et enchaînements entre les deux stratégies phares de l’implicite. Un dialogue de Marivaux en fera l’illustration.
Catherine Kerbrat-Orecchioni, « La présupposition in situ »
Ce texte s’intéresse à la présupposition envisagée dans son fonctionnement in situ, à partir d’un corpus de débats présidentiels. On se demandera dans quelle mesure la distinction classique entre « présupposé » et « sous-entendu » est applicable à ce type de données, quels sont les principaux types de présupposés exploités dans ces débats, comment ils sont mis au service de la visée argumentative des débatteurs, et comment ils peuvent être négociés entre les locuteurs en présence.
Ruggero Druetta, « Quand la présupposition est dans la parenthèse. Analyse du débat de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle française de 2012 »
Cet article montre que la syntaxe et la prosodie des énoncés parenthétiques en font le lieu privilégié de la présupposition pragmatique, présentée comme 577partagée et consensuelle. Or le recours aux parenthèses dans un discours agonal tel que le débat politique correspond à un coup de force vis-à-vis de son adversaire, car cette stratégie soustrait leurs contenus à la possibilité de la réfutation, sous peine pour le rival d’afficher un comportement non coopératif, nuisible à son éthos.
Paola Paissa, « Majorité silencieuse. Une formule à fondement présuppositionnel dans les campagnes présidentielles françaises de 2007 et 2012 »
Cette contribution examine les présupposés liés à la formule majorité silencieuse, dont elle reconstruit la genèse. L’étude en illustre les enjeux discursifs pour les campagnes présidentielles de N. Sarkozy de 2007 et 2012, en se focalisant sur l’agencement de ses présupposés « constitutifs » et « occasionnels » dans le discours sarkozyen. À travers des conversations numériques, l’article montre aussi les réactions des blogueurs envers les fondements présuppositionnels de cette formule.
Ruth Amossy, « La présupposition à l’épreuve du discours polémique »
La micro-analyse d’un énoncé tiré d’un article de B.-H. Lévy permet de s’interroger sur la présupposition en contexte polémique. Soustraite à la discussion, elle n’en est pas moins destinée à un allocutaire qui peut l’assimiler ou la rejeter : c’est le sens de « l’accommodation » des pragmaticiens. Qu’arrive-t-il alors en situation de controverse ? On tente de montrer que le refus des présupposés signale moins une rupture du dialogue que sa continuation sur le mode du dissensus.
Alain Rabatel, « Les parcours interprétatifs des présupposés et des sous-entendus, de la phrase au texte et à sa mise en page »
Cette étude met l’accent sur la gradualité des relations entre présupposés et sous-entendus dans un article de presse, selon leur nature lexicale ou syntaxique, l’ordre des constituants, les régimes de lecture (au fil du texte ou globale), la prise en compte des stratégies de mise en page et de mise en discours, ces derniers paramètres étant davantage cruciaux pour les sous-entendus que pour les présupposés. En conclusion, le caractère éthique de certaines pratiques d’implicitation est interrogé.
578Karine Berthelot-Guiet, « Sous la publicité, la consommation. Discours publicitaires contemporains et présupposition »
On présuppose souvent que la publicité influence, mais les présupposés qui sont les siens ou qu’elle véhicule sont rarement examinés. La présupposition passée au filtre de la publicité est abordée en trois points : la présupposition au sens classique ; puis la présupposition du produit, de la marque et de la consommation ; enfin, la présupposition qui postule la reconnaissance du caractère publicitaire des discours et des tentatives que peuvent faire les marques pour s’en démarquer.
Christophe Genin, « Présupposé et interprétation. Une image peut-elle s’entendre sans prérequis ? »
À partir du sens logique de la présupposition comme condition d’intelligibilité d’une proposition, l’auteur s’interroge sur les conditions d’interprétation des œuvres visuelles. À travers un comparatisme culturel (France/Chine), en s’appuyant sur trois exemples, il cherche à comprendre comment une conception de l’espace-temps pré-ordonne nos conditions de réception. De là il est amené à redéfinir le statut de la présupposition entre régression et interculturalité.
Nicole Everaert-Desmedt et Guy Everaert, « Magritte, je présuppose… ? »
Cet article propose d’adapter la notion de présupposition pour interpréter une peinture de René Magritte. L’exposé est divisé en trois sections. Dans une première partie, les concepts généraux de la théorie néo-gricéenne sont présentés. Par la suite, ces concepts sont intégrés pour analyser le système de la peinture figurative, et finalement les auteurs montrent sur un exemple concret (La Durée poignardée de Magritte) ce que produit une telle approche.
Georges Roque, « Présupposés et images fixes. Deux approches »
Ce texte vise à sonder la pertinence de l’application du concept linguistique de présupposition aux images fixes. Dans un premier temps, il analyse des cas de mixtes verbo-visuels où la présupposition est donnée par le texte. Dans un second temps, il traite de la possibilité pour une image seule d’exprimer un présupposé, lorsqu’au plan narratif elle renvoie à un moment antérieur, ce qui conduit à insister sur l’opposition entre présupposé et sous-entendu.
- Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
- ISBN : 978-2-406-06648-4
- EAN : 9782406066484
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06648-4.p.0573
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 22/08/2018
- Langue : Français