Si l’on considère leur personnalité et leur caractère, rapprocher Madame de Motteville, dame de compagnie d’Anne d’Autriche, et Mademoiselle de Montpensier, cousine germaine de Louis et célèbre frondeuse, relève de la gageure. La première est une femme de l’ombre, discrète et timide, la seconde fut sans doute exubérante, et faite pour la vie mondaine. Leur parcours moral présente néanmoins des similitudes qu’il est intéressant d’explorer. Ainsi, elles ont vécu toutes deux sans l’amour d’un homme ni l’affection d’un enfant. Cette solitude fut un choix plus ou moins consciemment déterminé qui s’est mû en jalouse préservation de leur indépendance. La vie publique, avec ses codes et ses exigences, s’est toutefois chargée de leur rappeler à quel point la liberté était un idéal fragile, parfois illusoire. De sorte qu’elles ont toutes deux, de façon marginale et troublante, forgé conjointement un idéal de la condition féminine dans un échange épistolaire entretenu pendant plusieurs mois, en même temps qu’elles ont, chacune dans son cabinet de travail, constamment interrogé la place des femmes dans l’histoire et dans la société à travers l’entreprise mémorialiste qu’elles ont menée, dans un univers littéraire où le genre des Mémoires se déclinait alors au masculin. Leurs doutes, leurs questionnements, leurs attentes et leur goût de l’écriture ont fini par faire de ces autrices si différentes deux sœurs unies par la plume.