Bulletin bibliographique
- Type de publication : Article de revue
- Revue : La Lettre clandestine
2019, n° 27. La littérature philosophique clandestine et la traduction - Pages : 357 à 413
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Éditions de textes
Alberti (Leon Battista), Momus ou le Prince. Fable politique traduite pour la première fois en français et annotée par Claude Laurens. Préface de Pierre Laurens, Paris, Les Belles Lettres, 2017, 306 p.
« Momus, personnage de la mythologie, mis en scène par Lucien comme le dieu de la critique, devient, entre les mains d’Alberti, qui fait de lui par deux fois une victime injustement persécutée, le premier immoraliste de la littérature moderne. L’exil parmi les hommes aiguise son esprit caustique, le malheur lui enseigne à masquer son caractère, au point que le dieu du franc-parler devient, au rebours de sa nature, le virtuose, mieux : le théoricien de la simulation et de la dissimulation, tel un ingénieux Ulysse égaré dans les cours. Mais surtout, à travers les mésaventures qui le ballottent du ciel à la terre, de la société humaine au parlement de l’univers, il est à chaque instant et partout, comme plus tard le Neveu de Rameau, le génie de la provocation, le grain de levain qui démasque les faiblesses et les hypocrisies, bouscule les idées reçues, désacralise les puissances établies. »
Aubert (Jean-Louis), Correspondance littéraire de Karlsruhe, tome V (15 février 1772 – 31 décembre 1774), éd. Béatrice Ferrier, Cyril Francès, Bénédicte Peralez-Peslier, Paris, Honoré Champion, coll. « Bibliothèque des correspondances, mémoires et journaux », 2018, 536 p.
« La correspondance littéraire de Karlsruhe a été adressée pratiquement sans interruption de 1757 à 1783 à la Markgräfin Karoline Luise von Baden-Durlach. Seule la mort de la destinataire y a mis fin.
Le manuscrit, presque intégralement conservé, contient plus de 600 lettres. Il constitue une partie de l’importante collection des écrits de la margrave conservée actuellement dans le “Großherzogliches Familienarchiv des Badischen Generallandesarchivs” à Karlsruhe.
Le contour de cette correspondance a été fixé dès le début de l’abonnement. Conformément aux désirs de la destinataire, elle offre un vaste panorama de 358la vie culturelle et de la société parisiennes. Chaque envoi contient des nouvelles sur les dernières parutions, sur le théâtre, ainsi que, dans une moindre proportion, sur des événements du moment, politiques et sociaux, et il se clôt, selon une règle non écrite, mais observée par tous les écrits de ce type, par des pièces en vers, relevant du genre de la poésie fugitive.
Quatre correspondants se sont succédés pour assurer la continuité sans faille de cette chronique de la vie parisienne : Pierre de Morand, Antoine Maillet-Duclairon, Pougin de Saint-Aubin et l’abbé Jean-Louis Aubert. »
Bayle (Pierre), Guicciardini, Machiavelli, Savonarola. A cura di Luisa Brotto. Introduzione di Gianni Paganini, Pisa, Edizioni della Normale, 2017, 264 p.
« Le Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle est l’un des textes archétypaux de la “culture des modernes”, il a influencé de nombreuses générations en construisant des canons critiques qui ont profondément influencé l’interprétation des principaux représentants de la culture européenne, abordés sous un angle mêlant considérations historiques et motifs de caractère éthique-politique ou religieux. Ce volume contient les articles sur Guicciardini, Machiavel et Savonarole : un triptyque d’où ressort un jugement sur la Renaissance italienne, vif et tranchant comme une lame capable d’affronter des problèmes cruciaux pour Bayle et, plus généralement, pour la civilisation européenne. »
Bouchard (Amaury), De l’excellence et immortalité de l’ame. Extraict non seullement du Timée de Platon, mais aussi de plusieurs aultres grecz et latins philosophes, tant de la pythagorique que platonique famille. Texte édité et présenté par Sylvain Matton, Paris, SÉHA et Milan, Arché, coll. « Anecdota », 2018, 184 p.
« Lieutenant général de la sénéchaussée de Saintonge, nommé en 1531 maître des requêtes de l’hôtel du roi, humaniste et helléniste, grand lecteur de Marsile Ficin et de Jean Pic de la Mirandole, comme aussi de Maïmonide et du kabbaliste chrétien Paulus Ricius, Amaury Bouchard est surtout connu pour avoir été lié à Rabelais, qui lui dédia en 1532 son édition du Lucii Cuspidii Testamentum, et pour être intervenu dans la “querelle des femmes”, en faveur desquelles il publia en 1522 une érudite Τῆς γυναικείας φύτλης, id est fœminei sexus, apologia, dirigée contre son ami le juriste André Tiraqueau.
C’est apparemment à l’invitation de François Ier, curieux de connaître la psychologie platonicienne, qu’il rédigea vers 1533 son traité, resté jusqu’ici inédit, De l’excellence et immortalité de l’ame, lequel en majeure partie décalque la Platonica theologia de immortalitate animorum (1482) de Ficin et constitue ainsi un important témoignage de la diffusion du néoplatonisme florentin dans la France de la Première Renaissance. »
– Sylvain Matton : « Notice historique sur la vie et les ouvrages d’Amaury Bouchard ».
359– De l’excellence et immortalité de l’ame. Dédicace au roi François Ier. Prologue : De l’excellance et immortalité de l’ame. I. De ceulx que Platon a suyvis escripvant des choses divines et ce qu’il a pensé d’eulx estre creable. II. De l’origine et naissance des ames et par quelles raisons les platonicques ont de leur principe et commancement opiné. III. De quel lieu et commant l’ame descend au corps humain. IV. En quel temps l’ame est au corps infuse et par quelle part elle entre au corps, par quelle part aussi elle en sort. V. Du circuit des ames selon les platonicques.VI. Par qui et de quelle substance fut faicte l’ame. VII. Du privilege de immortalité dont l’ame fut par son facteur anoblie. VIII. Par quelles raisons les platonicques ont pensé l’ame estre incorporelle. X. Les raisons par lesquelles les platonicques consentent l’ame non seullement n’estre corporelle, mais aussi ne pouvoir estre aulcune chose deppendente du corps ou de quelque matiere. XI. Aultres raisons par lesquelles les platonicques attestent l’ame ne estre extraicte du corps ou de matiere aulcune, mais de Dieu seul, sans aulcun moyen. XII. Par quelles raisons la platonicque achademye a mis sa censure sur l’immortalité de l’ame. XIII. Des qualités excellentes en l’ame par les vaccations d’icelle. XIV. De plusieurs aultres excellances dont l’ame humaine fut de son facteur honnorée. XV. De la resurrection de l’ame et reprise de son corps immortel.
– Notes. Glossaire. Index des noms.
Courtilz de Sandras (Gatien de) Mémoires de M. L.C.D.R. contenant ce qui s’est passé de plus particulier sous le ministère du cardinal de Richelieu et du cardinal Mazarin. Avec plusieurs particularités du règne de Louis le Grand. Texte établi et annoté par Carole Atem, Paris, Honoré Champion, 2018, 412 p.
« En 1687, un ancien capitaine de cavalerie, devenu écrivain clandestin, publie anonymement les Mémoires de M. L.C.D.R., récit à la première personne construit comme un pastiche de mémoires aristocratiques et attribué à un héros fictif. Séduit par ce modèle romanesque novateur, le public de l’époque se passionne pour la forme des mémoires apocryphes, que l’auteur mystérieux continue d’exploiter avec succès jusqu’à sa mort en 1712. Pourtant, peu de gens connaissent aujourd’hui Courtilz de Sandras, et son personnage du comte de Rochefort n’a pas bénéficié de la même notoriété littéraire que ses autres héros, d’Artagnan et ses amis mousquetaires, transformés en figures éternelles par Dumas. Aux frontières du picaresque, le récit du pseudo-comte joue une autre partition : en relatant la vie aventureuse mais décevante d’un noble sous le ministère de Richelieu, durant la Fronde et les débuts de l’absolutisme monarchique, ce texte hanté par l’échec retrace la quête d’une impossible gloire. Dans cette fiction de mémoires aux accents parfois désespérés, saluée par la recherche contemporaine, le lecteur découvrira le chef-d’œuvre inaugural d’un précurseur du roman moderne au siècle classique. »
360Sur les activités littéraires clandestines de cet auteur, voir J. Lombard, Courtilz de Sandras et la crise du roman à la fin du Grand Siècle, Paris, P.U.F., 1980, p. 90-97, 102-103, 106-110, 123-124 et 150-158 ; et son article dans le Dictionnaire des journalistes.
Du Châtelet (Émilie), Correspondance. Édition sous la direction d’Ulla Kölving avec la collaboration d’Andrew Brown. Avec la participation de François Bessire, Hugues Chabot, Olivier Courcelle, Pierre Crépel, Stefanie Ertz, Marie Fontaine, Linda Gardiner, André Magnan, Anne-Marie Magnan, Irène Passeron, Gilles Plante, Anne-Lise Rey et Charlotte Simonin, Ferney-Voltaire, Centre international d’étude du xviiie siècle, 2018, 2 vol., 1242 p., 73 ill.
« Nouvelle édition de la correspondance d’Émilie Du Châtelet, la seconde après celle qu’en donna Theodore Besterman en 1958. Le caractère pluridisciplinaire du collectif éditorial, les éclairages nouveaux tirés des avancées de la recherche, les additions nombreuses apportées au corpus, en particulier de lettres relatives aux écrits savants et à leur réception, l’exploitation systématique des documents du temps, de la presse européenne entre autres, permett(ent) de recentrer l’intérêt sur la figure de l’auteur et de l’épistolière. La distribution du travail entre les collaborateurs a permis d’apporter une attention égale et aussi précise que possible aux diverses séries épistolaires – lettres savantes, intimes ou familiales, lettres de réseau, de dispute ou d’affaires – et aux divers correspondants dont la galerie reflète la richesse des intérêts et des rapports d’une vie : des amis de cœur et de cour, des adversaires d’idées, un prince royal puis roi de Prusse, Frédéric II, des scientifiques français et européens, Maupertuis, Wolff, Clairaut, Cramer, Euler et Johann Bernoulli, des hommes de loi, des nouvellistes et même des poètes. Les lettres échangées avec Voltaire manquent encore – reparaîtront-elles un jour ? – mais cette lacune avive un paradoxe du recueil augmenté : ce lien privilégié, fait de séduction, d’admiration et de respect mutuels, diffuse ailleurs son exceptionnelle intensité, en creux ou en écho, jusque dans les lettres du dernier amour de Mme Du Châtelet pour Saint-Lambert, laissant au cœur du recueil la voix féminine trop longtemps minorée. Peu de correspondances historiques et intellectuelles présentent une telle densité de passions, d’engagements, de risques, et l’évocation d’un accomplissement personnel aussi intense. »
L’ouvrage comprend une introduction générale sur la vie et l’œuvre de Mme Du Châtelet, l’historique des éditions, les principes de l’édition, une chronologie, des notices biographiques, le texte modernisé et annoté de toutes les lettres conservées, des annexes documentaires, des concordances avec les édition précédentes, des listes de lettres alphabétique et chronologique, une liste des manuscrits exploités et un index général.
361Dudas de los pirrónicos / Doutes des pyrrhoniens. Traduction à l’espagnol, introduction et notes par Fernando Bahr, Buenos Aires, El cuenco de plata, coll. « El libertino erudito », 2018, 128 p.
« Le premier doute consiste à savoir : Si la Religion n’est pas une invention humaine pour rendre les hommes meilleurs, par la crainte des châtimens que les Dieux peuvent leur infliger. Plusieurs philosophes ont été de cette opinion. Car étant certain que toutes les actions humaines roûlant sur la crainte du mal, (la douleur,) et l’espérance du bien (le plaisir) pour empêcher les hommes de transgresser les Loix qui déffendent de faire certaines choses, on à établi dans le monde divers châtimens et des peines différentes, entr’autres celle du déshonneur, qui est très sensible à l’homme naturellement vain. Mais nonobstant cela la malice des hommes pouvant trouver des inventions pour tromper la vigilance des Magistrats, ou par la force se mettre au dessus des Loix, et par conséquent ôter le pouvoir de les condamner juridiquement, c’est pour cela qu’on a inventé : La crainte des Dieux, où d’un Dieu rémunérateur des bonnes ou des mauvaises […] ».
« Ce manuscrit, inédit jusqu’à aujourd’hui, se compose de 114 pages, divisées en huit chapitre ou doutes, dont le dernier est de loin le plus long. La seule copie connue à ce jour est conservée à la Bibliothèque Royale de Belgique (ms. 15191) sous le titre Doutes des Pirroniens. Premierement si la Religion est formée, où vient de Dieu ; où bien si c’est un artifice des Hom̃es Politiques. Secondement, en suposant que Dieu en soit l’auteur ; savoir, qu’elle est la Veritable, et celle qu’il faut choisir, d’entre le grand nombre des Religions differentes qui sont répandües par toute la Terre. Cette copie est postérieure à 1721, mais, d’après Gianni Paganini, si l’on tient compte des sources citées et, surtout, de celles qui ne sont pas citées (les Lettres persanes de Montesquieu, par exemple), on peut supposer que le texte a dû être écrit un peu plus tôt, dans la deuxième décennie du xviie siècle. Quant à son auteur, tout indique que le texte a été composé par un seul et même auteur, mais aucun élément ne permet de l’identifier. »
Hémery (Joseph d’), Historique des libraires et imprimeurs de Paris existans en 1752. Édition critique par Jean-Dominique Mellot, Marie-Claude Felton et Élisabeth Queval et alii dans La Police des métiers du livre à Paris, au siècle des Lumières. Préface de Robert Darnton, Paris, BnF Éditions, 2017, 560 p.
« Le policier à l’origine du document présenté ici, l’inspecteur Joseph d’Hémery (1722-1806), en charge notamment des affaires de librairie à Paris de 1748 à 1773, semble à première vue tout droit sorti d’un roman policier historique. Digne d’une fiction romanesque, ce personnage n’en a pas moins mené une existence et une carrière bien réelles au sein de la police parisienne. D’Hémery, homme d’action et d’information amené à se spécialiser dans la surveillance de la librairie et des gens de lettres, est sans doute l’un des protagonistes-clés 362de ce moment historique où la police de la capitale forge les outils qui vont lui permettre tout à la fois d’autonomiser ses pratiques et de se rendre indispensable au pouvoir central par ses facultés d’anticipation et de discrétion. L’Historique des libraires est un fichier issu de la très riche collection Anisson-Dupéron, conservée au département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France. Rarement prolixe mais souvent savoureux et éclairant, il constitue un témoignage irremplaçable sur le regard qu’a pu porter un responsable policier bien informé sur une corporation de médiateurs culturels essentiels à la fabrication de l’opinion publique – et de ce fait particulièrement sous contrôle –, celle des libraires et imprimeurs de Paris au milieu du siècle des Lumières. Derrière chaque mot, chaque phrase, du fichier de d’Hémery, même la plus anodine, on discernera une délicate appréciation du rapport implicite des forces qui, selon les cas, pourra motiver ou au contraire retenir le moment venu la suspicion et l’action de la machine policière.
Le corpus original (261 notices d’imprimeurs/libraires parisiens, 11 de provinciaux et 1 d’étranger), a été mis au jour, éclairé de notes et complété par Jean-Dominique Mellot, historien, conservateur général à la Bibliothèque nationale de France, Marie-Claude Felton, historienne, chercheur à l’université McGill à Montréal (Québec, Canada), et Élisabeth Queval, bibliothécaire honoraire à la BnF, avec la collaboration de Nathalie Aguirre, conservateur à la BnF. Il est accompagné d’une préface de Robert Darnton, éminent spécialiste des Lumières européennes et de l’histoire du livre sous l’Ancien Régime. »
Montfaucon de Villars (Henri de), Le Comte de Gabalis ou Entretiens sur les sciences secrètes. Texte établi et présenté par Didier Kahn, Paris, Les Belles Lettres, 2018, LVIII + 118 p., avec Bibliographie et Index.
« Le Comte de Gabalis, publié en 1670, est un petit chef d’œuvre d’ironie et de malice. Divisé en cinq dialogues, il met en scène un profane et un initié. Le profane est le type même de l’“honnête homme” des comédies de Molière ; l’initié est un “cabaliste” (d’où son nom, Gabalis) venu des confins de l’Allemagne et de la Pologne. Ce personnage cherche à convaincre son interlocuteur de l’existence d’“esprits élémentaires”, habitant les quatre éléments : les gnomes (esprits de la terre), les nymphes (esprits de l’eau), les sylphes (esprits de l’air) et les salamandres (esprits du feu). Il explique que le plus haut devoir des adeptes de la “sainte cabale” est de s’unir charnellement à ces esprits pour leur conférer l’immortalité, car ils n’ont pas d’âme. Loin d’être séduit par ces révélations – tirées en réalité des idées de Paracelse – son interlocuteur, qui est bon catholique, ne voit dans ces esprits que des démons, et le comte lui paraît fort avancé sur la voie de la perdition. Tout au long de cette satire de la crédulité et des superstitions, des questions plus philosophiques sont aussi abordées, comme celle de la croyance aux oracles.
L’ouvrage de Montfaucon de Villars (1638-1673), paru anonymement, eut un grand succès, mais il fut aussitôt interdit et coûta à l’auteur sa carrière 363d’homme de lettres. Sa postérité fut marquée par un phénomène étonnant : alors que son but était manifestement de se moquer des héritiers de Paracelse, beaucoup de lecteurs le prirent au sérieux, comme s’il révélait de réels secrets sous le voile d’un divertissement. »
Seconde édition de cet ouvrage par D. Kahn, la première publiée chez Honoré Champion en 2010.
Montesquieu, Extraits et notes de lectures, II : Œuvres complètes, 17. Sous la direction de Rolando Minuti. Textes établis, présentés et annotés par Lorenzo Bianchi, Pierre Briant, Denis de Casabianca, Christian Cheminade, José Kany-Turpin, Christophe Martin, Rolando Minuti, Jeanne Peiffer, Pierre Rétat, Philip Stewart, Christine Théré, Catherine Volpilhac-Auger, Paris, ENS Éditions et Classiques Garnier, coll. « Bibliothèque du xviiie siècle », 2018, XXXVI-732 p., 13 ill.
« Les notes marginales laissées par Montesquieu et les extraits, parfois très développés, d’ouvrages constituant sa “bibliothèque manuscrite” étaient pour la plupart inédits. Ils constituent un point d’accès essentiel à son œuvre, tout en révélant sa méthode de travail et la genèse de sa pensée. »
Priestley (Joseph), Recherches sur la matière et l’esprit. Traduction et notes par Antoine Grandjean. Présentation par Pascal Taranto, Paris, Honoré Champion, 2018, 366 p.
« Priestley fut un acteur célébré des Lumières. Pasteur et théologien, expérimentateur et philosophe, intellectuel engagé en faveur de la Révolution française, auteur de plus de cent cinquante ouvrages, celui que ses contemporains qualifient de “furieux libre penseur” est également celui en qui Kant reconnaît une incarnation rare de la vertu philosophique cardinale : la conséquence. Les Recherches sur la Matière et l’Esprit (1777) constituent son ouvrage métaphysique fondamental. Il y défend un matérialisme dynamique dont il assume les implications mortalistes et nécessitaristes radicales. Son discours s’alimente à l’histoire – de la philosophie et des sciences – et appelle une herméneutique des textes religieux soutenue. Ce texte esquisse l’un des possibles saisissants de cette métaphysique post-newtonienne qui constituait, pour beaucoup, le destin de la philosophie au xviiie siècle. »
Cette traduction offre la première édition critique du texte.
– Présentation, par Pascal Taranto. Qui connaît M. Priestley ? Théologien avant tout ? Une métaphysique post-newtonienne. Une métaphysique moniste. La métaphysique du socinianisme. Un étrange matérialisme. Quelques « faits nouveaux » et une théorie nouvelle. L’histoire de l’âme. Un monisme spinoziste ? Remarques sur la présente traduction.
364Recherches sur la matière et l’esprit.
– Dédicace. Préface à la première édition. Explication du frontispice. Préface à la seconde édition. Catalogue de certains livres cités dans ce traité. Avertissement. Introduction. I. De la nature et des propriétés essentielles de la matière. II. De l’impénétrabilité attribuée à la matière. III. Examen détaillé de diverses objections contre la doctrine précédente concernant la nature de la matière (I. Des corps qui agissent là où ils ne sont pas. II. si, d’après cette hypothèse, la matière est quelque chose. III. Des lois du mouvement. IV. Des pouvoirs d’attraction, etc., qui appartiennent aux points physiques). IV. La preuve véritable et directe que le siège du principe sensitif en l’homme est la substance matérielle du cerveau. V. Considérations additionnelles en faveur de la matérialité de l’âme humaine. VI. Avantages du système du matérialisme, en particulier concernant les doctrines de la religion révélée. VII. Considérations se rapportant plus immédiatement aux substances immatérielles, et particulièrement à la liaison de l’âme et du corps (I. De la co-présence de l’âme avec le corps. II. Des influences réciproques de l’âme et du corps). VIII. Des esprits doués d’étendue. IX. Du véhicule De l’âme. X. Examen des objections contre Le système du matérialisme (1re objection : De la difficulté qu’il y a à concevoir comment la pensée peut naître de la matière. 2e objection : Des idées abstraites. 3e objection : De l’influence des raisons. 4e objection. De l’unité de la conscience. 5e objection : D’une conscience séparée, qui n’appartient pas à toute particule du cerveau. 6e objection : De la comparaison des idées, etc. 7e objection : De la nature de l’attention. 8e objection : De la différence entre les idées et l’esprit qui en use. 9e objection : De l’expression : mon corps, etc. 10e objection : Des différents intérêts en l’homme. 11e objection : De l’esprit qui soutient le corps. 12e objection : Du pouvoir automoteur de l’âme. 13e objection : De la nature inépuisable du principe pensant. 14e objection : De la distraction de l’esprit. 15e objection : De la corruptibilité de la matière). XI. Examen plus détaillé de l’objection de la conscience. XII. De l’objection contre le système du matérialisme qui est tirée de l’examen de l’essence divine. XIII. De la connexion entre sensation et organisation. XIV. Des principes de la nature humaine selon les écritures. XV. De l’essence divine selon les écritures. XVI. Des arguments en faveur de l’existence et des perfections de dieu, d’après le système du matérialisme. XVII. Observations sur l’identité personnelle, eu égard à l’état futur de l’homme. XVIII. De l’origine des opinions populaires au sujet de l’âme. XIX. Panorama des différentes opinions que l’on a eues au sujet de l’essence divine, en particulier relativement à la doctrine de l’immatérialité. XX. Exposé des différentes opinions qui ont été professées concernant l’âme (1. Les opinions des païens et des Juifs. 2. Les opinions des pères chrétiens jusqu’au vie siècle. 3. L’état des opinions du vie siècle à l’époque de Descartes. 4. L’état des opinions de l’époque de Descartes à l’époque actuelle). XXI. Brève histoire des opinions concernant l’état des morts. XXII. Exposé des opinions concernant le principe sensitif chez les bêtes.
365Histoire de la doctrine philosophique concernant
l’origine de l’âme et la nature de la matière.
Introduction, contenant les grandes lignes de la doctrine philosophique concernant l’origine des âmes des hommes, etc. I. De la philosophie indienne, ou véritable philosophie orientale. II. De la religion des persans et chaldéens anciens. III. De l’introduction de la philosophie orientale en grèce. IV. Du mélange de la philosophie orientale et grecque avec le christianisme. V. De l’influence du système philosophique sur la doctrine chrétienne concernant la personne du christ. VI. Arguments généraux contre la préexistence du christ. VII. Des opinions que l’on a eues au sujet de la matière, et de leur influence concernant le christianisme.
– Notes du traducteur. Bibliographie. Index des noms.
Raynal (Guillaume-Thomas), Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes, vol. 2 (Livres VI à IX), dir. Andrew Brown et Han Jürgen Lüsebrick, éd. Ute Fendler, Suzane Greilich, Didier Kahn et alia, Ferney-Voltaire, Centre international d’études du xviiie siècle, 2018, XXII-599 p.
Deuxième volet (le premier parut en 2010) de cette première édition critique de l’Histoire des deux Indes (1770), qui « est également la première édition complète depuis plus de 180 ans. Le texte de base est celui de l’édition de 1780, la dernière à avoir été totalement préparée et publiée sous le contrôle de Raynal. Elle est accompagnée de toutes les variantes des deux premières éditions, et d’un appendice donnant les détails des changements apportés à l’édition de 1820, qui fut en très grande partie préparée par Raynal avant sa mort en 1796. On trouvera également une introduction générale substantielle, une bibliographie sommaire des éditions de l’Histoire des deux Indes, des listes des contributions de Diderot, un glossaire, la reproduction des gravures originales (avec une description critique) et un fac-similé in-folio des tables et de l’atlas originaux. Chacun des dix-neuf livres qui composent l’ouvrage est édité par un spécialiste, et est accompagné d’une courte présentation et de notes explicatives. »
Voir pour plus de détails c18.net/18/p.php ?nom=p_ra_texte.
Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, par des amateurs (I-VIII), Introduction et direction éditoriale : Christiane Mervaud et Nicholas Cronk, Œuvres complètes de Voltaire, vol. 37 : 43, Oxford, Voltaire Foundation, 2007-2018, 8 vol.
Le dernier volume de cette édition nouvelle, comprenant l’Introduction et l’Index général (par Dominique Lussier), vient de paraître (vol. 37, 2018, 686 p.).
I. Introduction, description des éditions, index général (vol. 37, 2018).
II. A-Aristée (vol. 38, 2007).
366III. Aristote-Certain (vol. 39, 2008).
IV. César-Égalité (vol. 40, 2009).
V. Église-Fraude (vol. 41, 2010).
VI. Gargantua-Justice (vol. 42A, 2011).
VII. Langues-Prières (vol. 42B, 2012).
VIII. Privilèges-Zoroastre (vol. 43, 2013).
Études critiques
Abramovici (Jean-Christophe), « La redécouverte des libertinages “oubliés” de l’âge classique », dans Delphine Antoine-Mahut et Stéphane Zékian (dir.), Les Âges classiques du xixe siècle, Paris-Cambridge-Philadelphia, Éditions des Archives contemporaines, Coll. « Actualité des Classiques », 2018, p. 81-93. Accessible en ligne sur http://eac.ac/
« La seconde moitié du xixe siècle redécouvre les libertinages de l’âge classique, mais les dissocie et les oppose. Aux études qui, à partir des années 1850-1860, documentent le libertinage de mœurs du xviiie contre les lectures républicaines des lumières, militantes, encyclopédiques et voltairiennes, succèdent deux décennies plus tard les premiers travaux consacrés à ce libertinage que René Pintard baptisera en 1943 d’“érudit”, précisément pour le distinguer de son double ultérieur et dégradé. Cette étude explore les relations complexes qui relient ces deux traditions critiques. »
Agnesina (Jacopo), The Philosophy of Anthony Collins. Free-thought and Atheism, Paris, Honoré Champion, coll. « Libre pensée et littérature clandestine », 2018, 218 p.
« Anthony Collins (1676-1729) est le plus souvent évoqué pour son Discourse of Free-Thinking (1713), alors que ses positions philosophiques sont également audacieuses et largement novatrices : négation de l’intelligence divine et de tout dessein divin, rejet de l’existence d’une âme immatérielle, affirmation d’une conception déterministe de la nature, représentation de l’homme comme une machine proche de l’animal, nantie des mêmes impulsions hédonistes. Cependant, bien que ces principes constituent le noyau de ses travaux philosophiques, Collins était plus attaché à l’idéal de la liberté intellectuelle qu’à ses propres convictions. C’est pourquoi, tout au long de sa vie, depuis ses échanges avec Locke jusqu’aux débats qui se tinrent dans sa bibliothèque 367privée, il a continuellement poursuivi la confrontation ouverte, rejetant avec une ironie cinglante toute limitation de la liberté de pensée. »
– Introduction : Anthony Collins, free-thinker. 1. Foreword. 2. Atheism and schizophrenia. 3. Collins, uneasy Protestant, deist or atheist ? 4. Collins’s role and some unresolved questions. 5. Collins’s library. 6. Biographical notes : early years and his relationship with Locke. 7. Collins’s later life and his relationshipwith Des Maizeaux. 8. His works.
– Chapter 1. Reason and Above Reason. 1. Reason. 2. The polemic against mysteries, above and contrary to reason.
– Chapter 2. The debate with Samuel Clarke. 1. Consciousness, thought, personal identity, materialism. 2. Immaterial soul and material soul, the emergence of thought. 3. Personal identity and the individuation principle. 4. Materialism versus dualism, a proof of atheism ?
– Chapter 3. Collins’s anticlericalism. 1. Priestcraft in Perfection : “pious fraud” in England and Jerusalem. 2. The Independent Whig : practical atheism in the High Church. 3. The Independent Whig : Collins’s other articles.
– Chapter 4. God and his attributes. 1. Introduction. 2. The attributes of God according to William King. 3. Collins’sreply.
– Chapter5. Collins and free-thinking. 1. Introduction. 2. A Discourse of Free-thinking. 3. Collins’s reply to Bénédict. 4. The defence of Whiston’s freedom in Grounds and Reasons. 5. Free-thinking and free communication. 6. The defence of « scheme of liberty » against the Reverend Dr. Rogers. 7. Tolerance, and « scheme of liberty ».
– Chapter 6. Collins and logical determinism. 1. Causal determinism and logical determinism. 2. Hobbes, Locke and Collins. 3. The debate with Clarke. 4. Bayle and the freedom of indifference. 5. The anti-necessitarian model of Bayle and Leibniz. 6. Determinism and necessitarianism : the case of Spinoza. 7. Traces of Spinoza and of « Spinosism » in Collins’s texts. 8. Collins a necessitarian ? Some conclusions. 9. A Dissertation on Liverty and Necessity and its debated attribution.
– Chapter 7. Collins’s Biblical criticism. 1. Introduction. 2. Spinoza and the Theological-Political Treatise. 3. Richard Simon, the “father of Biblical criticism”. 4. Locke and The Reasonableness of Christianity. 5. Toland and Collins : the rejection of “above reason”. 6. The Bible and knowledge : revelation as a source of information. 7. A philosophical crusade : the Boyle Lectures. 8. William Whiston : prophecy and the restoration of the Holy Scriptures. 9. Behind the scenes : Newton, Whiston, and the role of prophecy for the new science. 10. Collins, critic of Whiston. 11. Collins and the allegorical symbolic solution : Surenhusius’s way. 12. Reason or rhetoric ? The true significance of Collins’s criticism.
– Chapter 8. Irony and ridicule : persecution and the art of writing.1. Question of attribution. 2. The case of Thomas Woolston and A Discourse on Ridicule : is there a link ?3. A Discourse on Irony : why was it written, when was it published ? 4. A Discourse on Ridicule and Irony in Writing.
368– Conclusion. Collins : a systematic atheism. 1. Some conclusions. 2. The crisis of dualism : criticism of Clarke and the affirmation of a materialist ontology. 3. The attributes of God and atheism : God as first cause with no design. 4. Determinism and logical necessity. 5. Criticism of the literal reality of the Scriptures : an attack on Newton. 6. Public morality and freedom : the conclusions of Collins’s philosophical system.
– Appendix : Collins translator of Cicero. 1. A translation never published ? 2. Posthumous publication ? 3. Why De natura deorum ? 4. A possible attribution ? 5. Conclusions.
– Bibliography. Anthony Collins’s works. Further primary bibliography. Secondary bibliography on Anthony Collins. Monographs. Articles and Essays. Further secondary bibliography.
– Index.
Agnesina (Jacopo), « Collins, Hume e i miracoli : il caso Saragozza », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 247-260.
« Une version de l’essai de Hume Of Miracles fut incluse dans son Enquiry concerning Human Understanding (1748), mais le premier projet remonte probablement aux années du Treatise (1738-1740). L’essai commence par une citation d’un sermon de John Tillotson, probablement tiré de A Discourse against Transubstantiation (1684), que Hume utilise “pro domo sua” : alors que Tillotson ne fait que critiquer le miracle de la transsubstantiation, Hume élargit la cible de son scepticisme jusqu’à inclure la question entière de la possibilité de miracles. Comme Anthony Collins avant lui, il insiste tout d’abord sur le rôle des témoignages dans des faits qui relèvent du domaine de la foi. Cependant, au cours de son essai, il étend son approche critique aux témoignages eux-mêmes, pour conclure qu’aucun miracle ne peut être considéré comme réel du point de vue de la raison. Cela est clairement confirmé par l’analyse faite par Hume du miracle de Saragosse, appuyée par un grand nombre de témoignages, mais qui doit néanmoins être considérée comme fausse en raison de son absence de fondement rationnel. »
L’Année rabelaisienne, no 2, 2018, no 2, 525 p.
– ΤΥΧΗ ΑΓΑΘΗ ΞΥΝ ΘΕΩ. Rabelais éditeur des Anciens et des Modernes. Mireille Huchon : « Rabelais Prot(é)e » ; Claude La Charité : « Sous le signe de la Bonne Fortune. Chronologie et typologie du travail éditorial de Rabelais » ; Jean Céard : « Rabelais éditeur des Lettres médicales de Manardo » ; Richard Cooper : « Rabelais éditeur archéologue » ; Claude La Charité : « Ut Galenusexponit.Rabelais annotateur du Régime dans les maladies aiguësd’Hippocrate dans la traduction de Guillaume Cop » ; Romain Menini : « Une nouvelle édition rabelaisienne.L’Alphabetumgræcum publié par Gryphe en 1533 » ; Guillaume 369Berthon : « Rabelais éditeur des œuvres de Clément Marot (Lyon, 1533-1535) » ; Raphaël Cappellen : « De Galliot du Pré à François Juste. Rabelais éditeur du recueil Hecatomphile. Les Fleurs de poesie françoyse (1534) et des Œuvres de Coquillart (1535) » ; Olivier Pédeflous : « Rabelais incognito ».
– Miscellanées. Marie-Claire Thomine : « Le Pantagruélisme est-il un humanisme ? » ; Louise Million : « Le Lion, la Vieille et le Renard, une fable démoralisante » ; Nicolas Le Cadet : « Rabelais et l’Officina de Ravisius Textor. Pantagruel, i et Gargantua, x » ; Olivier Séguin-Brault : « Thélème. Parcours descriptif et mécanique rhétorique » ; Myriam Marrache-Gouraud : « Rabelais en pantoufles, moufles et guedoufles. Objets quotidiens, objets sibyllins » ; Carine Roudière-Sébastien : « Livres rabelaisiens et livres bibliques » ; Hans den Besten (†) : « L’écossais de Panurge » ; Alicia Yllera : « Quelques réflexions sur la traduction de Rabelais en espagnol » ; Diane Desrosiers : « Rabelais sur la scène canadienne »
– Annotatiunculæ. Luigi-Alberto Sanchi : « Guillaume Budé, inspirateur de Gargantua » ; Romain Menini : « Salutations rabelaisiennes (et budéennes) » ; Rowan Buttneithernore : « Le démon de l’acronyme » ; Nicolas Le Cadet : « Rabelais et l’art de contrepéter honnêtement en société » ; Bernd Renner : « “Découvrir le pot aux roses”. Critique et polémique » ; Claude La Charité : « Les symptômes de la pleurésie dans la “BriefveDeclaration” et le “gualant Cl. Galen” » ; Olivier Pédeflous : « L’Hippocrate grec de Rabelais (BnF RES-T-23-1 alpha). Nouveau regard sur une Aldine » ; Raphaël Cappellen : « Rabelais, “Lucien de notre temps” ».
– Chronicques. Comptes rendus. Rabelais sur le marché de l’ancien (1997-2016).
– Fanfreluches. Michèle Clément : « La braguette ou “la débandade du sens” » ; Henri Vernal : « Le garum au beurre du Luxe d’Apicius » ; Maistre Alcolenas Cidet : « La sauce verte » ; EpistolæprioresBasiocunni et Odoropediti ; Guillaume Berthon : « Proverbes énigmatiques ».
– Résumés/Abstracts.
Baldin (Gregorio), « Irenista, calvinista, scettico, o ateo nascosto ? Il dibattito sulla religione di Paolo Sarpi », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 121-161.
« Parmi les principaux sujets abordés dans les études sur Sarpi, la question de l’attitude religieuse des Servites est assurément la plus populaire. Aucun autre sujet n’a suscité autant d’intérêt, ni n’a provoqué de désaccord aussi profond, surtout depuis la redécouverte de son manuscrit des Pensieri (dont la première édition fiable ne remonte qu’à 1996). Dans cet article sont analysées les interprétations les plus importantes de l’attitude de Sarpi à l’égard de la religion et de la théologie qui ont émergé jusqu’à présent. Cette analyse ouvre la voie à un examen plus direct de plusieurs textes de Sarpi qui ont été utilisés pour appuyer les différentes lectures de ses pensées. Enfin, je propose quelques considérations concernant la possibilité d’inclure Sarpi dans l’histoire de l’athéisme de la première modernité. »
370Barroux (Gilles), Le Cabinet médical de Diderot. La part de la médecine dans l’élaboration d’une philosophie matérialiste, Paris, Éditions matériologiques, coll. « Histoire du matérialisme », 2018, 312 p.
« Encyclopédiste, philosophe, romancier et auteur de théâtre, critique d’art, libertin ou encore révolutionnaire, Denis Diderot a été évoqué sous de multiples facettes. Mais existe-t-il un Diderot “médecin” » ?
Que Diderot ait écrit sur la médecine n’est un secret pour aucun lecteur attentif de son œuvre. Depuis la traduction du Dictionnaire universel de médecine de Robert James, dans les années 1746 à 1748, jusqu’à la parution du Rêve de D’Alembert, en 1769, la pensée du philosophe s’enrichit au contact de l’univers scientifique et médical de son temps, sur lequel il porte une attention soutenue, éveillant en lui une curiosité toujours insatisfaite.
Si Diderot n’a jamais songé à devenir médecin, son œuvre, à travers des figures imaginaires et réelles, à l’exemple du médecin Théophile de Bordeu, donne progressivement vie à un véritable « cabinet médical » au sein duquel Diderot confronte autant qu’il expérimente les effets des observations et des expériences médicales et physiologiques de son époque.
En empruntant à la médecine des concepts, en reprenant les conjectures issues des nombreuses observations et expériences rapportées dans les journaux de médecine, Diderot esquisse une anthropologie matérialiste : « les sources de la santé physique comme morale de l’Homme se logent au sein même de la matière, matière sensible, matière vivante. C’est ainsi que son “cabinet médical” participe à l’élaboration d’une philosophie matérialiste. »
– Introduction : Quelle pensée médicale chez Diderot ? (1. La médecine pour Diderot : un centre d’intérêt parmi d’autres ? 2. Le « cabinet médical » de Diderot : lieu d’élaboration d’une pensée protéiforme. 3. Une médecine figurée par des personnages réels et imaginaires. 4. Médecine et médecins dans l’œuvre de Diderot. 5. Repenser la philosophie à partir de la médecine. 6. Élaborer une anthropologie matérialiste à partir de la médecine. 7. Trois éclairages pour s’orienter dans le cabinet médical de Diderot).
– Première partie. La médecine tout autour de Diderot 1. La figure tutélaire d’Hippocrate : la légende Hippocrate ; Hippocrate et Démocrite : le mythe de leur rencontre. 2. L’empirisme de la médecine : une source conflictuelle. Qu’est-ce que l’empirisme en médecine ? Médecin et chirurgien : la confrontation de deux types d’expériences ; la contribution de Diderot « citoyen zélé ». 3. L’état des sciences du vivant et leur impact sur les thérapeutiques : entre tradition et progrès ; observation et expérience : deux outils inhérents au développement de la médecine, deux concepts dynamiques dans la philosophie de la nature chez Diderot. 4. Circulation des concepts, circulation des savoirs : enjeux d’une philosophie expérimentale renouvelée : une circulation de concepts, une circulation d’expériences ; présences de l’Europe).
371– Deuxième partie. La médecine. Laboratoire d’une philosophie de la nature chez Diderot (1. Du Dictionnaire universel de médecine à l’Encyclopédie : la trajectoire de Diderot ; le DUM et le Discours préliminaire : deux approches de l’histoire ; de l’idée de somme à celle d’encyclopédie : la part de la médecine et son influence sur la trajectoire de Diderot ; un même objet traité par cinq sources différentes : l’anatomie ; éclectisme et encyclopédisme. 2. De l’éclectisme et du scepticisme en médecine : éclectisme, empirisme et scepticisme ; l’esprit du jeu contre l’esprit de système ; l’éclectisme médical comme modèle d’une économie du savoir ; qu’est-ce qu’un médecin sceptique ? 3. Rêver pour mieux philosopher : voyage au milieu des glandes : de Bordeu à Diderot… ; des polypes de Tremblay aux polypes humains ; continuité et contiguïté : deux concepts majeurs pour élaborer une matière sensible ; la vie et le vivant).
– Troisième partie. La part de la médecine dans la constitution d’une anthropologie matérialiste chez Diderot (1. Qu’est-ce qu’une anthropologie au xviiie siècle ? La connaissance médicale de l’homme aux origines de l’anthropologie ; variations anthropologiques, autour des figures de Diderot et de Cabanis. Enjeux et usages de la sensibilité. 2. Les monstres de Diderot : triomphe d’une logique des effets, crépuscule du finalisme : les monstres des cabinets du xviiie siècle ; les monstres des conjectures de Diderot. 3. La part de l’utile dans une évaluation médico-philosophique de l’homme : l’utile, au creuset des notions d’expérimentation et d’expérience ; l’horizon de l’utile : un engagement “corps et âme” pour Diderot ; l’anatomie dans le cabinet de Diderot : l’« utile », le « beau », le « cruel » ; l’utile et la morale : l’évocation d’une économie de la sexualité dans le Supplément ; le cours de la nature et l’exigence morale : la « médecine » de Diderot face à la morale des prêtres. 4. Diderot et ses médecins : de l’évocation de la médecine à celle des médecins ; les médecins de Diderot sont-ils bons ? Sont-ils méchants ? La sensibilité médicale de Diderot ; la part de la mélancolie).
– Conclusion : l’univers médical de Diderot : cabinet réel, cabinet imaginaire.
– Bibliographie générale. Index des noms propres.
Benigni (Fiormichele), Itinerari dell’ antispinozismo. Spinoza e le metafisiche cartesiane in Francia (1684-1718), Firenze, Le Lettere, 2018, 216 p. (Giornale critico della filosofia italiana. Quaderni, 38).
« Dans l’histoire de sa première réception, le “spinozisme” ne fut souvent qu’un nom pour désigner l’athéisme : on était pour ainsi dire “spinoziste” comme l’on était “impie”, “sceptique” ou “libertin”. Toutefois avec une particularité : la genèse de cette forme d’athéisme l’encrait maintenant principalement dans la problématique ouverte par la pensée de Descartes. Pour immortaliser cette filiation entre les deux philosophes, le slogan serait devenu célèbre : “Descartes est l’architecte du spinozisme” (Descartes spinozismi architectus). Et ceci explique pourquoi, prudemment, ce furent les cartésiens qui se mobilisèrent en premier contre Spinoza, dans un règlement 372de comptes douloureux qui a impliqué une génération entière, de Poiret, Lamy. Jacquelot et Régis, jusqu’aux plus célèbres Malebranche, Arnauld et Fénelon. Ce fut la prise de conscience que, désormais, le cartésianisme ne serait plus le même. Avec un résultat qui tient du paradoxe, puisque cette tentative de sauver Descartes et de réfuter Spinoza a finalement fait un perdant ; mais que les formes sous lesquelles il fut vaincu ont fatalement contribué à forger et à alimenter l’image dominante du “Spinoza” des siècles suivants : le matérialiste, l’athéiste, le cartésien. »
I. L’antispiozismo cartesiano (F. Lamy, P.-S. Régis, I. Jacquelot, P. Poiret). 1. Astrazione e creazione. 2. Materia e libertà. Postilla : alcuni sviluppi.
II. Malebranche, Arnauld, Spinoza. 1. L’estensione : Arnauld. 2. L’estensione : Malebranche. 3. La potenza : Malebranche. 4. La potenza : Arnauld. 5. La verità eterne. 6. Il trattato De l’action de Dieu sur les créatures. Postilla : Leibniz e Malebranche.
III. Lo “Spinoza” di Fénelon. 1. La “grande moda dei libertini”. 2. Le “due ipotesi”. 3. Fénelon anticartesiano ? 4. Anti-Fénelon.
IV. L’articole “Spinoza” del Dictionnaire de Bayle. 1. Il caso e la necessità. 2. « Spinoza prova troppo ». 3. Il punto di equilibrio. Postilla : Bayle e il buddismo cinese.
– Conclusioni.
– Indice dei nomi.
Bernier (Myriam), « La réception de Pascal par les libertins », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 215-238.
« Cet article étudie la réception des Pensées de Pascal par les libertins, d’abord par les amis de Pascal, Méré et Mitton, longtemps tenus pour les principaux destinataires de son œuvre ; mais plus largement par ceux du xviie-xviiie siècle dont on a pu trouver des traces. Cette étude nous amènera à réévaluer le statut des Pensées, à se demander si elles ont bien été écrites dans le but de convertir un lecteur extérieur ou si elles ne sont pas d’abord destinées à Pascal lui-même. »
Bianchi (Lorenzo), « Libertinage et hétérodoxie chez Bayle : quelques questions », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 19-38.
« Bayle a entretenu des relations avec les “libertins érudits” tout au long de sa vie, en témoignent sa correspondance, les articles dédiés à La Mothe le Vayer et à Guy Patin dans le Dictionnaire historique et critique, ou son édition des Naudaeana et Patiniana (1703). On trouve trois sujets majeurs communs entre Bayle et les auteurs du “libertinage érudit” : celui de la critique historique, celui de la distinction entre raison et foi et celui de l’athée vertueux. De toute 373façon, Bayle n’opère pas un simple rétablissement de ces thèmes ; il les reprend et les réélabore dans le nouveau cadre de la philosophie post-cartésienne. »
Binoche (Bertrand), « Écrasez l’infâme ! ». Philosopher à l’âge des Lumières, Paris, La Fabrique, 2018, 208 p.
« Ce livre a deux objets. Le premier est bibliographique : si étrange que cela puisse paraître, aucune synthèse n’est actuellement disponible en français sur ce qu’on appelle “la philosophie des Lumières” […] en tant qu’elles furent l’œuvre des “Philosophes”. Et donc pas sur l’Aufklärung, l’Illuminismo, ou l’Enlightenment. Le second objectif est à la fois spéculatif et militant : il s’agit de produire une autre appréhension des Lumières » en soulignant leur « pratique foncièrement agonistique de la philosophie : philosopher, c’est philosopher contre, anéantir le faux sans pour autant prétendre dire le vrai – Voltaire le dit littéralement. D’où la structure de l’ouvrage : que signifie au juste lutter contre le préjugé et mettre en mesure chacun de “penser par lui-même” ? Si la forme la plus toxique du préjugé est la superstition, jusqu’où faut-il aller dans la dévaluation du culte religieux ? Si la superstition a pour nom la Providence et que le refus de celle-ci ne permet plus d’ordonner l’histoire universelle, comment écrire cette dernière ? Enfin, si l’esclavage est le mot qui désigne aussi bien l’assujettissement de l’esprit aux préjugés de la superstition que, par exemple, la traite des Noirs, les ilotes spartiates ou l’enfermement des femmes au sérail, de quoi parle-t-on finalement sous ce nom ? […] »
Introduction. I. Préjugé (I. L’ennemi. II. La critique. III. De la critique à la critique. IV. Point trop n’en faut. V. La raison dans le préjugé). II. Superstition (I. Préjugé, superstition, origine. II. Origines. III. Superstition, religion, athéisme). III. Providence (I. « Un mot vide de sens » ? II. « Philosophie de l’histoire »). IV. Esclavage (I. En métaphores. II. À la lettre. III. Dans l’antiquité). Conclusion (I. La réduction au sensualisme. II. Le partage des disciplines. III. L’ombre kantienne. IV. La transition critique). Bibliographie complémentaire.
Boscq (Marie-Claire), Imprimeurs et libraires parisiens sous surveillance (1814-1848). Préface de Jean-Yves Mollier, Paris, Classiques Garnier, coll. « Littérature et censure », (no 4), 2018, 464 p.
« La présente étude dissèque le dispositif de contrôle que la direction de la Librairie exerça sur les imprimeurs et les libraires (1814-1848) : enquêtes de moralité préalables à l’obtention d’un brevet, serments de loyauté, rapports des inspecteurs, traque des imprimeries clandestines, sanctions pénales. »
– Préface de Jean-Yves Mollier.
– Introduction. L’époque et le lieu. « Librairie » ou « Librairie » ? La législation napoléonienne. Une réglementation drastique. Une mesure capitale. L’instauration du brevet. L’héritage napoléonien.
374– I. Brevet et professionnels du livre. Le brevet ou surveillance à l’entrée (Formalités à accomplir pour être breveté. Conditions d’exercice). Les professionnels (Dénombrements. Recherche des origines. Les femmes dans la librairie. Un marqueur du cadre parisien : les cabinets de lecture. Éditeur : un métier nouveau pour une activité ancienne).
II. Les armes de la surveillance. La loi, cadre de la surveillance (Les principes du décret napoléonien. La législation en vigueur de 1814 à 1848). La librairie et ses inspecteurs (Création de l’institution. Mobilité de l’institution. Inspecteur de la Librairie : un métier attractif ?). La préfecture de police et ses commissaires (Les préfets de police. Les commissaires de police).
III. La surveillance en action. Tableau d’ensemble du domaine d’intervention (Rapports des inspecteurs de la Librairie. Rapports de la direction de la Librairie). Surveillance des établissements parisiens (Inspection d’une imprimerie. Inspection des boutiques qui donnent à lire). Surveillance des écrits (Subversion politique. Subversion religieuse. Ouvrages contraires à la morale ou aux mœurs). Librairie surveillée, librairie punie (Exercice de la profession sans brevet. Défaut de formalités. Publications séditieuses. Double peine. Le retrait du brevet).
– Conclusion.
– Annexes. I. Texte du décret de Napoléon constituant règlement sur l’imprimerie et la librairie. II. Texte de la loi de Louis xviii relative à la liberté de la presse. III. Tableau récapitulatif des brevets accordés par période gouvernementale de 1814 à 1850. IV. Principaux départements « pourvoyeurs » de la librairie parisienne. V. Pourcentages de femmes brevetées sur l’ensemble de la période 1814-1850. VI. Statut des femmes brevetées par périodes gouvernementales. VII. Femmes non-veuves ayant exercé le métier d’imprimeur. VIII. Liens de parenté des successeurs de femmes imprimeurs. IX. Statut des femmes brevetées tenant un cabinet de lecture. X. Rattachement hiérarchique des inspecteurs de la Librairie. XI. D’un préfet à l’autre : mobilité des commissaires de polices dans les 48 quartiers de Paris. XII Tarif des peines : extraits des lois de 1819, 1822 et 1835. XIII Exemples de condamnations. XIV. Demande de restitution de brevet d’imprimeur Jean-Nicolas Barba.
– Illustrations. Bibliographie. Index.
Boureau (Alain), Le Feu des manuscrits. Lecteurs et scribes des textes médiévaux, Paris, Belles Lettres, 2018, 192 p., 42 ill.
Méditation du grand médiéviste sur l’« unicité fragile » des manuscrits anciens, sur les péripéties diverses que rencontre le déchiffreur, son difficile accès à des textes qui subissent « les aléas et infortunes des choses et les inadvertances des hommes qui en gèrent la fabrication », mais aussi sur ses rapports parfois « incommodes » avec les institutions détentrices, et même avec « une discipline qui s’est voulue scientifique, avec une exigence de généalogie qui se fondait sur une recherche en paternité, bien vaine pour les textes médiévaux où les traces de l’auteur s’effacent au profit de celles des scribes, malgré d’illustres exceptions ». 375L’auteur en vient alors à ceux qu’il appelle « ses frères », « les scribes eux-mêmes, quand je traite des marges du manuscrit comme lieu d’organisation du texte par les scribes, avant de présenter leur intervention directe et inventive dans le texte. »
1. Le manuscrit, obscur objet du désir patrimonial (Les aventures d’un manuscrit. Trésors. De main d’homme. De la culture à revendre). 2. La peau des scribes. 3. Arbres, feuilles, brouettes et râteaux (Contre les hybridations : le stemma. Herbiers et flores : le cas de Chiaro de Florence. La confusion de deux commentaires sur Job. Le commentaire attribuable à Richard de Mediavilla. Un stemma impossible). 4. Les voiles de l’auteur et l’envol des scribes (La certitude des témoins. La fulgurance du schéma : Bartolo de Sassoferrato. Les manuscrits autographes en scolastique. La main passe : Richard de Mediavilla). 5. Haute couture et mise en pièces (Du cousu main. Des copies en cours d’achèvement. Profession : scribe. La pecia. Démembrements : la cécité des relieurs. Interpolations. Mélanges). 6. Aux marges de la copie (Les graphes des scribes. De la fiche au tableau : les aventures d’une chèvre. Une fiche en quête de tableau : les cartilages de Béhémoth. Les risques du tableau. Des maîtrises différentes du tableau. Le renoncement de Turin. Le cheval de Troyes. L’ordre trompeur de Todi. Le mélange de Florence. La cohérence de Padoue. Du tableau de scribe au tableau d’auteur. Aux interstices du temps). 7. Écritures des scribes (Inadvertances : Nicole Oresme et la stéréoscopie du scribe. Les lapsus d’un scribe. Quand un scribe se rebiffe. Une substitution. Un scribe philologue. Un prisme du réel).
Boussuge (Emmanuel) et Launay (Françoise), « Du nouveau sur Jacques André Naigeon (1735-1810) et sur ses livres et manuscrits », Recherches sur Diderot et sur l’Encyclopédie, 2018-1 (nov.), no 53 (Dossier « Le travail encyclopédique »), p. 145-192.
« Cet article est consacré à une figure des Lumières célèbre, mais cependant encore bien mal cernée. Il se concentre sur deux périodes : les débuts de Naigeon jusqu’aux années 1770, et la dernière étape concernant la dispersion de son héritage intellectuel et matériel. L’enquête biographique est largement renouvelée et permet enfin de préciser certaines données élémentaires : naissance, parenté, ancrage social et géographique. Le parcours personnel de Naigeon jusqu’à son intégration au groupe des encyclopédistes est entièrement revu. L’article fait aussi le point sur le devenir de ses riches collections de livres et manuscrits et sur la diffusion des informations dont il est à l’origine, notamment par l’intermédiaire privilégié d’Antoine Alexandre Barbier. Clarifier les choses à cet égard a nécessité de suivre pas à pas les péripéties de la succession familiale qui passe de Jacques André Naigeon après sa mort en 1810, par son frère Charles Claude (1737-1815) et par sa sœur Catherine Françoise Dufour de Villeneuve disparue en 1820. De nombreux ouvrages annotés et des manuscrits longtemps supposés perdus peuvent être ainsi suivis et localisés. L’article permet par ailleurs d’attribuer à Diderot trois articles de l’Encyclopédie non signés et propose l’arbre généalogique de la famille Naigeon. »
376Boutros-Jacqueline (Maxime), « La liberté n’est-elle qu’un mot ? Bayle et les controverses théologiques sur la liberté entre 1685 et 1688 », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 123-145.
« Dans les années 1680, Bayle se prononce sur les controverses théologiques sur la liberté. Il dénonce leur vacuité, les réduisant à une querelle de noms. “Liberté” est traitée comme une étiquette applicable à toutes les positions en présence, y compris le spinozisme. Plutôt que de défendre positivement la compatibilité de la liberté et de la détermination, Bayle suggère que cette “liberté” pourrait aussi être décrite comme une absence de liberté. »
Breton (Nicolas), Guillemin (Thomas) et Lunel (Frédéric), (dir.), Les dialogues interreligieux. Lieux et acteurs (xvie-xxie siècle), Rennes, P.U. de Rennes, coll. « Histoire », 2018, 316 p.
« Ce volume propose une approche diachronique des rencontres interreligieuses et interconfessionnelles depuis le xvie siècle jusqu’au temps présent. Il s’intéresse aux trois religions monothéistes, mais aussi au bouddhisme ou à la franc-maçonnerie. Sous le double prisme des lieux et des acteurs, il examine les conditions du dialogue et interroge les perspectives religieuses ou politiques qui en résultent. »
Quelques études touchant notre période : Claude Denjean : « L’histoire des juifs médiévaux. Quels apports pour une histoire des rencontres interreligieuses » ; Marie Barral-Baron : « Érasme, un artisan du dialogue interconfessionnel ? » ; Marianne Carbonnier-Burkard : « Le colloque religieux de Ratisbonne (1541) traduit par Calvin pour les Français » ; Hélène Vu Thanh : « Les rencontres interreligieuses dans le cadre des missions extra-européennes. Le cas des jésuites et des bonzes au Japon (xvie siècle) » ; Irina Falkovskaya : « L’irénisme de Louis Le Roy. Entre philosophie grecque et réalité française » ; Claire Rösler-Le Van : « Arcanum negotium. Les tentatives d’union des Églises protestantes de G.W. Leibniz et de D.E. Jablonski » ; Julien Léonard : « Le dialogue Ferry-Bossuet (1666). Pour un regard apaisé ».
Brix (Michel), Libertinage des Lumières et guerre des sexes, Paris, Kimé, coll. « Détours littéraires », 2018, 338 p.
« Dans Les Sacrifices de l’amour (1771), le romancier Claude-Joseph Dorat définit le xviiie siècle comme une époque où les hommes cherchent à séduire les femmes “pour obtenir le droit de les mépriser”. Pareil propos a de quoi surprendre : aujourd’hui, on a plutôt l’habitude d’entendre parler élogieusement du libertinage des Lumières, qui aurait fait éclater le corset moral et religieux qui réprimait les désirs sexuels. Mais faut-il vraiment associer “libertinage” et 377“liberté” ? Le présent ouvrage voudrait rendre la parole, sur ce point, aux écrivains du xviiie siècle. Leurs écrits suggèrent que, pour comprendre les enjeux du libertinage, il faut replacer celui-ci dans le temps long d’un affrontement entre les deux sexes qui dure depuis l’aube de l’humanité. L’Éros des Lumières correspond à une stratégie mise en œuvre par les hommes pour exercer sur les femmes une domination sans partage. Sous le prétexte d’inviter celles-ci à prendre leur part dans les plaisirs amoureux, les séducteurs tendent un piège au sexe féminin : la sophistique libertine s’emploie à faire de chaque femme une esclave heureuse, asservie à la toute-puissance masculine, rendue disponible à merci et forcée de reconnaître pour seul et unique maître, le phallus. »
Carvallo (Sarah), L’Homme parfait. L’anthropologie médicale de Harvey, Riolan et Perrault (1628-1688), Paris, Classiques Garnier, coll. « Histoire et philosophie des sciences », 2018, 302 p.
« L’anthropologie médicale moderne propose une réinterprétation du projet philosophique de la connaissance de soi éclairé par les découvertes anatomiques et physiologiques récentes. Harvey, Riolan et Perrault présentent trois manières de réaménager l’héritage antique à la lumière de la découverte de la circulation sanguine. »
– Introduction : l’homme parfait.
– Sources textuelles et institutionnelles du topos du corps parfait. L’anatomie : gestes, textes et images (La construction d’une tradition médicale universitaire. L’esthétique et l’architecture). Le corps fabrique (L’héritage antique. La reprise vésalienne. Vésale et la Modernité. L’anatomie entre médecine et peinture).
– La question anthropologique. Le cercle et la perfection (Les Anciens et les Modernes. Refonte, réaménagement ou réforme de la médecine ? Le cercle et la perfection : topos théologique et médical. L’analogie, la connaissance et le symbole. L’argument rhétorique du cercle : Harvey et Descartes ; sang et vie ; le cercle et l’âme ; prior esse : les sens ontologique ; logique et axiologique de la perfection).
– La fabrique du corps. Perfection, beauté, santé. Le projet anthropographique de la médecine moderne (Anatomie et anthropologie. Conséquences pratiques, épistémologiques et pédagogiques). Ontologie, esthétique et axiologie (Le sens esthétique de la perfection. Le canon. Le canon et la différence sexuelle. Perfection, beauté et santé (La connaissance de soi. L’échelle des êtres. Santé et pathologie). Le cercle et ses figures. Réforme et tradition.
– Perrault et la synthèse française de la connaissance de soi. La fabrique dans une perspective architecturale (La tradition architecturale. La Renaissance italienne. Perrault et le bon goût. Architecture et peinture académiques. De la fabrique à la mécanique). La circulation (L’univers. Les vivants. La sensibilité. La circulation de la sève. L’échelle des êtres). Analogie et perfection (Analogie. Perfection. Merveille). L’âme. Les Anciens et les Modernes, de nouveau.
378– Conclusion. Architecture, anatomie, philosophie naturelle et religion du corps au xviie siècle.
– Bibliographie générale. Index nominum. Index des notions. Table des illustrations.
Castro (Clara), « Molécules malfaisantes, molécules sensibles et molécules organiques : Sade lu d’après Diderot, Buffon et Gassendi », Dix-huitième siècle, no 50, 2018, p. 413-429.
« Dans l’Histoire de Juliette (1801) de Sade, le personnage de Saint-Fond tient un discours mystérieux sur l’Être suprême en méchanceté, soutenant l’existence de molécules malfaisantes : philosophie intenable et suspecte, aux yeux de ses comparses. La dissertation de Saint-Fond est pourtant plus philosophique qu’elle ne semble, nourrie par le concept de molécule de Diderot comme par ses sources, Buffon et Gassendi. »
Cocula-Vaillières (Anne-Marie), Étienne de La Boétie et le destin du “Discours de la servitude volontaire”, Paris, Classiques Garnier, coll. « Études montaignistes », 2018, 340 p.
« Cet ouvrage étudie la vie d’Étienne de La Boétie et son rôle au Parlement de Bordeaux dans les années 1556-1563, celles de son amitié avec Montaigne. Déjà, il a écrit le Discours de la servitude volontaire dont le contenu, la diffusion et les éditions successives, jusqu’à nos jours, constituent l’enquête de ce livre. »
I. La Boétie, auteur de la “Servitude Volontaire”. L’enfant de Sarlat et l’étudiant d’Orléans. Les jeunesses parallèles de La Boétie et Montaigne. La Servitude volontaire d’Étienne de La Boétie.
II. La Boétie, conseiller du roi au Parlement de Bordeaux. Les gens de Justice du palais de l’Ombrière. Marguerite, le Médoc et Montaigne. La Boétie dans l’ombre de Charles de Coucy, seigneur de Burie.
III. Les fortunes de la “Servitude volontaire”. Montaigne éditeur des « reliques » de La Boétie. Montaigne renonce à publier la servitude volontaire. Les échappées belles de la servitude volontaire.
– Conclusion : lectures plurielles du Discours de la servitude volontaire aux xixe et xxe siècles.
– Chronologie. Bibliographie. Index nominum et des lieux.
Darnton (Robert), Un tour de France littéraire. Le monde du livre à la veille de la Révolution, trad. Jean-François Sené, Paris, Gallimard, coll. « NRF Essais », 2018, 400 p.
Parmi les archives de la Société typographique de Neufchâtel, fondée en 1769 se trouve « le carnet tenu au jour le jour par un commis voyageur, Jean-François Favarger, qui entreprend, pour la STN en 1778 et pendant 379plusieurs mois, un tour de France littéraire en rendant visite aux libraires (un quadrilatère de Pontarlier et Besançon jusqu’à Poitiers et La Rochelle puis Bordeaux, Toulouse, Montpellier et Marseille, retour par Lyon et Bourg-en-Bresse). Il prend des commandes, classe les libraires en partenaires fiables ou aventuriers mauvais payeurs, affiche des valeurs calvinistes rigoureuses (se défier d’un libraire catholique, bon bougre mais qui a trop d’enfants et conséquemment ne se concentre pas assez sur son commerce). Il négocie des traites ou des échanges d’ouvrages publiés par la STN contre d’autres succès imprimés par les libraires-éditeurs et livrés dans des balles de feuilles non reliées et mélangées avec des ouvrages édifiants et autorisés car le commerce porte sur des textes soit censurés, soit interdits puisque piratés en violation du privilège des éditeurs parisiens ; enfin, il évalue les risques des voies empruntées par les colporteurs-passeurs à la barbe des douaniers ou avec leur complicité, tant la corruption règne. Cette chaîne du livre, depuis les entrepôts de la STN jusqu’aux mains des lecteurs, permet enfin d’évaluer ce que furent à la STN les meilleures ventes des Lumières en dehors des élites politiques et sociales : Anecdotes sur Mme la comtesse du Barry de Pisandat de Mairobert ; l’An 2440 de Mercier ; le Mémoire de Necker ; La révolution opérée par M. de Maupeou de Mouffle d’Angerville ; l’Histoire philosophique de l’abbé Raynal, loin devant La Pucelle d’Orléans de Voltaire. Il s’agit donc ici d’un livre essentiel à la compréhension des Lumières et des origines culturelles et intellectuelles de la Révolution. »
Desan (Philippe), Montaigne. Penser le social, Paris, Odile Jacob, 2018, 352 p.
« Faire découvrir en Montaigne un penseur de la vie en société, de ses contraintes et de ses libertés : telle est l’ambition, originale et audacieuse, de l’ouvrage de Philippe Desan. Les Essais ne se résument pas à un récit de soi, d’où l’appartenance sociale aurait été totalement effacée. Le moi de Montaigne est un moi en société. Et le but des Essais est de penser le rapport entre l’existence singulière et le social, l’individuel et le collectif. C’est donc à la sociologie bien plus qu’à la psychologie qu’il nous faut avoir recours pour comprendre l’œuvre de Montaigne. Les grands thèmes de sa pensée, scepticisme et curiosité, relativisme culturel et civilité, se trouvent dès lors éclairés d’un jour nouveau, qui leur confère toute leur portée sociale et historique. On découvre un Montaigne inattendu, loin de l’image du sage réfugié en sa bibliothèque, coupé du monde et de la vie en société. C’est à une leçon inédite de sociologie que l’on assiste alors, capable d’articuler ensemble individu et société, dans un monde de conflits et de violences où l’idéal d’honnêteté toutefois n’est pas totalement oublié. »
–Avant-Propos : Sur la méthode. Introduction : Morale et sciences sociales.
– Première Partie : Conjonctures. 1 : Qu’est-ce qu’être sceptique dans les années 1560-1580 ? (Doute et vérité. L’axe politico-religieux. Un conservatisme de circonstance). 2. Curiosité scientifique et irrésolution (Curiosité et irrésolution. 380Science et hasard). 3. Négociation scientifique et réfutabilité (« Pratique et negotiation de science ». Connaissance scientifique et vie sociale. Falsifiabilité et réfutabilité). 4. Les ambiguïtés du relativisme culturel de Montaigne (« Il est des peuples où […] on peut honnestement faire des enfans à sa mère ». « [Q]ue chacun observe [la loi] du lieu où il est »).
– Deuxième Partie : Propositions. 5. Que faire du corps de Montaigne ? (Anatomie d’un corps. Universalité de l’homme. Du corps à la gloire de Montaigne). 6. Éléments d’une sociologie de Montaigne (Institutions et habitus. Économie et rapports sociaux). 7. L’idéologie des Essais (L’idéologie comme histoire. Vie privée et écriture du quotidien). 8. De l’utile et de l’honnête dans la vie publique (Utilité et honnêteté. La liberté du métis).
– Troisième Partie : Usages. 9 Usages anecdotiques de Montaigne dans les sciences sociales (Émile Durkheim et la critique des « têtes bien faites ». Clifford Geertz et les « hauts-de-chausses » des Cannibales. Raymond Boudon et « le rouet » de Montaigne. Richard Sennett et « la chatte » de Montaigne). 10. Leo Strauss ou comment lire Montaigne entre les lignes (Des lecteurs suffisants. Le docteur Armaingaud, pionnier du straussisme. Retour à Leo Strauss).
– Pour conclure.
– Notes bibliographiques. Bibliographie. Index nominum.
Duchesneau (François), Organisme et corps organique de Leibniz à Kant, Paris, Vrin, coll. « Mathesis », 2018, 528 p.
« Leibniz a contribué à forger les notions d’organisme et de corps organique. Le modèle qu’il élabore à l’orée des Lumières suscitera adaptations et métamorphoses et servira de ferments aux théories proto-biologiques. Christian Wolff, mais aussi Louis Bourguet, développant les implications du “mécanisme organique”, repensent des éléments clés de la science du vivant. Maupertuis, Buffon et Needham s’inspirent de la doctrine des monades pour rendre compte de l’organisation vitale et des lois de la génération. Déterminant l’irritabilité et la sensibilité comme propriétés de la vie organique et de la vie animale, Haller postule un cadre leibnizien pour les hypothèses que lui inspire l’harmonie préétablie. Charles Bonnet développe ces hypothèses en système et élabore les prémisses d’une monadologie physiologique. L’empreinte du modèle leibnizien se manifeste aussi chez Michael Christoph Hanov, créateur du vocable “biologie”, reformulant les principes leibniziens-wolffiens pour les ajuster à l’épigenèse des corps organisés. Issues plus indirectement de ce même modèle, surgissent des théories d’inspiration vitaliste qu’illustrent aussi bien les philosophies de Diderot et de Jean-Claude de la Métherie, que les physiologies de Blumenbach et de Kielmeyer. Avec la théorie kantienne des êtres organisés se dévoile une ultime incarnation de cette “physique spéciale” vouée à l’organisme, que Leibniz faisait reposer conjointement sur la causalité efficiente et la finalité. »
I. Leibniz. Organisme et préformation. La machine animale. L’invention du concept d’organisme. L’opposition entre Leibniz et Stahl sur la théorie 381de l’organisme. La critique des natures plastiques. Principes de vie et natures plastiques matérielles. Monade, harmonie et composition du corps organique.
II. Christian Wolff et quelques wolffiens. Le corps animé et ses éléments. Les corps organiques selon Wolff. L’hypothèse de Bilfinger. Le modèle de Canz. L’organisation vitale selon Winckler.
III. Bourguet. Le mécanisme organique. L’analyse critique des thèses sur la génération Développement et mécanisme organique.
IV. Maupertuis et Buffon. Épigenèse et monades physiologiques. Critique du couple monade-corps organique chez Maupertuis. L’invention de la monade physiologique. Buffon et les molécules organiques vivantes Le moule intérieur.
V. Needham. Forces et formes de l’organisation vitale. Le rapport déclaré à Leibniz. L’approche méthodologique issue des premières recherches. Les Nouvelles Observations microscopiques : l’hypothèse en formation. La force vitale de végétation. Principes du système de l’épigenèse. Approfondissements théoriques : en réplique à Spallanzani.
VI. Haller et Bonnet. Corps subtils et propriétés physiologiques. Composition organique et mouvements vitaux selon Haller. Le statut des propriétés physiologiques. Le modèle théorique des corps organisés selon Bonnet. L’ordre organique selon la Palingénésie philosophique. La reconfiguration des machines de la nature. L’immortalité des vivants.
VII. Hanov. Épigenèse et causalité monadique. Formation organique et force perceptive. Le corps organique chez l’animal et l’humain. Une épigenèse programmée.
VIII. Diderot et la métherie. Sensibilité et principe de formation des corps. Les corps organisés comme matière sensible et vivante selon Diderot. Éléments de la réalité physique et ordre vital selon La Métherie. Formation des corps organisés et morphogenèse organique.
IX. Blumenbach et Kielmeyer. Épigenèse et organisation vitale. Bildungstrieb et forces vitales. Types spécifiques et variations. Téléologie et explication causale. Kielmeyer et l’esquisse d’une loi biogénétique.
X. Kant. Téléologie et causalité organisatrice. Le modèle kantien de la force formatrice. Signification épistémique du concept d’épigenèse. Organisation vitale et jugement réfléchissant.
– Conclusion. Bibliographie. Index des matières. Index des noms.
Duflo (Colas), « Les romans clandestins sont-ils matérialistes ? », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 135-146.
Des romans clandestins à succès comme Thérèse philosophe ou Dom Bougre, qui contiennent des passages argumentatifs, ont été plus diffusés que les écrits théoriques matérialistes : on ne peut en faire l’économie pour comprendre la diffusion du matérialisme au xviiie s. Cependant les adversaires du matérialisme 382ont-ils raison quand ils considèrent même les livres “obscènes” les moins spéculatifs comme les sous-produit de cette doctrine ?
Dutray-Lecoin (Élise), Lefèvre (Martine), Muzerelle (Danielle), (dir.), Les Plaisirs de l’Arsenal. Poésie, musique, danse et érudition au xviie et au xviiie siècle, Paris, Classiques Garnier, coll. « Rencontres », 2018, 747 p.
« Au xviie et au xviiie siècle, l’Arsenal de Paris était un lieu de sociabilité dont Sully, Sébastien Le Camus et les Précieuses, la duchesse du Maine, ou le marquis de Paulmy ont été les principaux acteurs, associant tour à tour ballet, poésie, musique, théâtre et érudition. » Les trois premières parties sont respectivement intitulées : L’Arsenal, théâtre des ballets de cour ? L’Arsenal, haut lieu de la préciosité ? De Sceaux à Paris : la duchesse du Maine à l’Arsenal. La quatrième porte sur ce grand collectionneur que fut le marquis de Paulmy, qui nous a conservé beaucoup de pièces fugitives plus ou moins clandestines :
IV. Entre érudition et divertissement : le marquis de Paulmy. Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval : « Le théâtre de société à Paris dans la seconde moitié du xviiie siècle » ; Valérie De Wispelaere et Thomas Vernet : « Les annotations du marquis de Paulmy sur le fonds “Musique” de sa bibliothèque » ; Dominique Quéro : « Paulmy auteur dramatique » ; Dominique Coq : « “Poésies anciennes en caractères gothiques”. Le Moyen Âge qu’aimait le duc de La Vallière » ; Danielle Muzerelle : « À la recherche du “bon vieux temps”. Le marquis de Paulmy et ses collections médiévales » ; Fanny Maillet : « Petites mains et grandes plumes. Le marquis de Paulmy face à ses collaborateurs » ; Maria Colombo Timelli : « Le marquis de Paulmy lecteur des “romans” du xve siècle. Entre la Bibliothèque Universelle des Romans et les Mélanges tirés d’une grande bibliothèque » ; Xavier Bisaro : « De la cathédrale au salon. Le médiévalisme musical à l’époque du marquis de Paulmy ».
Dyonet (Nicole), Nicolas Delamare théoricien de la police, Paris, Classiques Garnier, coll. « Histoire du droit », 2018, 503 p.
« Le commissaire au Châtelet, Nicolas Delamare (1639-1722) que ni son origine sociale, ni son niveau d’étude ne préparaient à cette tâche, a mené indépendamment des devoirs de sa charge, une œuvre théorique destinée à établir les fondements juridiques de la police, “portion importante du droit public” ».
– Abréviations. Préface. Prologue.
I. Le commissaire, ses archives, son livre. Biographie de Delamare (Famille et carrière. Les apprentissages du commissaire. L’exercice de la charge). Les manuscrits, le livre publié, le livre reçu.
II. L’ordre des lois. La méthode et l’ordre des lois (La méthode. Les évènements et les lois. Autonomie du système). L’étude du droit public (L’étude 383du droit public jusque vers 1700. Après 1700, lecture de Domat. L’étude de Pufendorf).
III. L’invisible par le visible. Le magistrat et le territoire. (Le magistrat de police. L’espace parisien. L’espace du royaume). La police par l’image (La police à Versailles. L’invention delamarienne. Les usages des images).
– Épilogue. Une œuvre moderne. L’usage du droit naturel. La méthode delamarienne. L’ordre des lois. La simplification des institutions. La fonction éducative du Traité. Une entreprise sans suite.
– Annexes. Illustrations. Sources. Bibliographie. Index des noms de personnes.
Ferté (Louise), Rey (Lucie), (dir.), Tolérance, liberté de conscience, laïcité. Quelle place pour l’athéisme ?, Paris, Classiques Garnier, 2018, 252 p.
Ce volume rassemble les actes de trois journées d’étude qui ont été organisées les 21, 22 et 23 janvier 2015 par le laboratoire LLCP (Laboratoire sur les logiques contemporaines de la philosophie de l’Université Paris 8), l’UMR 5037 (université de Saint-Étienne) et le Labex Comod (Université de Lyon). Ces journées d’étude portaient « sur la manière dont les philosophies du xviie, du xviiie et du xixe siècles envisagent l’idée d’un fondement théologique de l’État et la coexistence des différentes croyances en son sein. Elles se centrent sur la question de l’athéisme et sur la manière dont sa place est envisagée dans les différents régimes politiques de cohabitation des options spirituelles et philosophiques. Elles envisagent notamment les différentes hypothèses ouvertes par les concepts de tolérance, de liberté de conscience et de laïcité. »
– Introduction par Louise Ferté, Lucie Rey et Patrice Vermeren.
– Première partie : xviie siècle. Nicole Gengoux : « L’athéisme au xviie siècle, une aporie morale ou politique ? La naissance douloureuse de l’idée de tolérance dans le Theophrastus redivivus » ; Antony McKenna : « Pierre Bayle, liberté de conscience, liberté de penser » ; Jacques-Louis Lantoine : « Tolérer pour tenir en respect ? La défense de la liberté de philosopher chez Spinoza ».
– Deuxième partie : xviiie siècle. Alain Sandrier : « Tolérer [selon] l’athéisme. Les leçons du baron d’Holbach » ; Francine Markovits Pessel : « Figures de l’athéisme » ; Sophie Wahnich : « Quelle place pour l’athéisme après le décret sur l’Être suprême du 18 floréal an II ? ».
– Troisième partie : xixe siècle. Frédéric Brahami : « Comte : pourquoi la religion ? » ; Lucie Rey : « La critique de l’athéisme philosophique et du protestantisme dans l’Encyclopédie nouvelle » ; Louise Ferté : « La critique de l’athéisme chez Quinet » ; Georges Navet : « L’antithéisme de P.-J. Proudhon » ; Jacqueline Lalouette : « La morale laïque et le religieux. Débats entre républicains (1880-1905) » ; Anne-Claire Husser : « Ferdinand Buisson et l’athéisme. Une reconnaissance ambiguë ».
– Index. Résumés. Table des matières.
384Fontes (Manuel da Costa), El arte de la subversión en la españa inquisitorial Spain : Fernando de Rojas y Francisco Delicado (con dos notas sobre Cervantes), Madrid, Iberoamericana / Vervuert, 2018, Coll. « Biblioteca Áurea Hispánica », 470 p.
Ce livre a été initialement publié (hormis l’annexe) en 2005 sous le titre The Art of Subversion in Inquisitorial Spain : Rojas and Delicado (West Lafayette, Indiana, Purdue University Press).
« Certains spécialistes ont détecté un élément subversif dans la vision corrosive présentée par Fernando de Rojas et Francisco Delicado, respectivement dans La Celestina (1499) et La Lozana andaluza (1528), au sujet de la société chrétienne dans laquelle ils vivaient. Ce livre va au-delà de telles suggestions en montrant, au moyen d’une abondante évidence textuelle, que les deux auteurs ont utilisé la débauche, la métaphore, l’ironie, la parodie, l’allégorie et des assertions sur le caractère moral de leurs œuvres respectives afin de codifier leurs attaques contre la prière chrétienne, les saints et les principes centraux du christianisme [Annonciation, Naissance virginale, Incarnation, Sainte Trinité]. Comme en témoignent des témoignages tirés de processus inquisitoriaux, ces attaques correspondaient aux objections des Juifs à la foi chrétienne. »
– Prefacio. [lisible sur le site de l’éditeur]
– I. El problema converso. II. La represión y la expresión artística. III. La idea de « limpieza » en La Celestina, La Lozana andaluza y otras obras. IV. Celestina como una antítesis de la Virgen María. V. La oración y los dogmas cristianos en la Celestina. VI. La « navegación », la Roma renacentista y el exilio en La Lozana andaluza. VII. La Santísima Trinidad y la Anunciación en La Lozana andaluza. VIII. Rojas, Delicado y el arte de la subversión.
– Apéndices. I. El poder nivelador del amor en La española inglesa. II. El enigma del puente y la expulsión de los moriscos en Don Quijote.
– Publicaciones periódicas. Obras citadas. Índice de nombres y de materias.
Fukuoka (Atsuko), The Sovereign and the Prophets : Spinoza on Grotian and Hobbesian biblical argumentation, Leiden et Boston, Brill, 2018, XV-425 p.
« Traquant des sujets bibliques clés récurrents dans les propos de Grotius et de Hobbes sur la relation entre l’État et l’église, ce livre examine l’interprétation de l’Ancien Testament donnée par Spinoza dans le Traité théologico-politique et met en lumière ses efforts pour établir ce que Hobbes ne pouvait suffisamment offrir aux Hollandais : la liberté de philosopher. L’auteur développe une méthode originale pour appréhender les arguments bibliques du xviie siècle comme formant un paradigme politique commun. Son analyse révèle les discours qui ont convergé sur cette question : “Qui se tient immédiatement sous Dieu pour faire connaître sa volonté au peuple ?”. Cette interrogation subtilement nuancée a non seulement relié diachroniquement les grands théoriciens l’un à l’autre – des Remonstrants tels que Grotius au juriste anti-hobbesien Ulrik 385Huber (1636-1694) – mais a également construit de manière synchronique l’axe des résonances et des dissonances entre le Léviathan et le TTP. »
Introduction. « God Sets Out Things by Mediation of Other Men » : The Question of Mediation in the Remonstrant Controversy. Hobbes’s Twist on Mediation : The Sovereign Prophet. The Bible as Shared Political Paradigm. Spinoza on Jus circa sacra. Spinoza on Libertas philosophandi. Spinoza and Hobbes on the Authority of the Bible. The Making of Hobbes’s and Spinoza’s Polarity (1) : Media of Revelation. The Making of Hobbes’s and Spinoza’s Polarity (2) : The Spirit of God. Ulrik Huber and the Hobbesiani : The Mediator Concept within Jus publicum universale. Conclusion : Where the Paths Cross.
Gengoux (Nicole), « Le mal est-il un problème ? De l’athéisme du Theophrastus redivivus à Bayle », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 81-103.
« Une comparaison à partir de la question du mal entre Bayle et l’auteur anonyme du Theophrastus redivivus (1659), un auteur proche sur de nombreux points mais radicalement athée, nous permet de proposer une hypothèse à propos du “pessimisme” de Bayle et de l’“optimisme” de l’Anonyme. Cette différence anthropologique fondamentale a une conséquence paradoxale sur le plan politique : Bayle sera plus tolérant à l’égard de l’athéisme et va couper la politique de la religion et de la morale, tandis que l’Anonyme reste enfermé dans l’idée de l’utilité morale de la religion en politique. »
Gil (Linda), L’Édition Kehl de Voltaire. Une aventure éditoriale et littéraire au tournant des Lumières. Préface de Christiane Mervaud, Paris, Honoré Champion, coll. « Les dix-huitièmes siècles », 2018,2 vol., 1454 p.
Ce travail procède d’une thèse soutenue à Paris-Sorbonne en 2014.
« À la mort de Voltaire, une équipe d’admirateurs du patriarche fonde la “Société Littéraire Typographique” pour entreprendre une nouvelle édition complète de son œuvre. Ce projet, réalisé sous la direction de Beaumarchais et de Condorcet dans des conditions difficiles, s’inscrit dans la perspective d’une diffusion militante des textes et des idées des Lumières. En dépit des innombrables obstacles qui s’opposent à cette entreprise subversive, les éditeurs parviennent à “finir ce cher Voltaire” et livrent à la postérité, entre 1785 et 1790, une édition in-octavo en 70 volumes et une édition in-douze en 92 volumes des Œuvres complètes de M. de Voltaire. Cette édition posthume et intégrale constitue une première dans le champ éditorial français, à la fois par le luxe et le soin apporté à l’édition, “chef d’œuvre de l’art typographique”, et par l’apport d’une correspondance déjà monumentale, qui livre l’image de l’homme privé et même intime, à côté de son œuvre littéraire. Le dernier volume, intitulé Vie de Voltaire, est le texte qui lie les deux ensembles. Pour 386Condorcet, Voltaire a fait de sa vie un chef d’œuvre, qu’il s’agit d’offrir à la postérité pour sa valeur morale et politique. Par-delà son caractère exemplaire, cette édition pose de nombreuses questions historiques, philologiques et idéologiques, qui touchent à l’histoire du livre, à la connaissance du corpus voltairien, à l’enjeu politique et idéologique majeur que représente l’œuvre de Voltaire dans le contexte très polémique des années pré-révolutionnaires, au mythe littéraire institué par ce monument éditorial et à la réception de l’œuvre ainsi rendue publique. Cette enquête historique et littéraire s’appuie sur des archives dans leur majeure partie inédites, pour la première fois rassemblées. »
– Préface. Remerciements. Abréviations. Introduction.
– I. Conception et production de l’édition. 1. Un projet : les enjeux d’une nouvelle édition. 2. Un espace : l’édition de Kehl, une aventure européenne. 3. Un atelier. Histoire du livre.
– II. Un corpus : histoire philologique de l’édition kehl. 4. Une équipe : organisation du travail éditorial. 5. Voltaire poète. Chapitre 6. Voltaire prosateur.
– III. Compléter l’œuvre. 7. Voltaire épistolier. 8. L’édition des Lumières : un nouveau modèle éditorial pour les Œuvres complètes de Voltaire. 9. Illustrer le livre : le supplément gravé de Moreau le Jeune.
– IV. Un combat.1. Éditer Voltaire, une posture dissidente. 2. Guerre sainte contre l’édition de Kehl. 3. Les éditeurs de Kehl en résistance.
– Conclusion. Bibliographie. Index des noms de personnes.
Grasso (Grazia), « Pietro Tamburini, chrétien éclairé et lecteur de Bayle », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 185-211.
« À fin du xviiie siècle les œuvres de Bayle circulaient désormais librement en Europe mais en Italie elles rencontraient encore de fortes résistances. Face à la rareté des contributions sur la pensée baylienne dans ce pays, l’article propose une relecture de Bayle par Pietro Tamburini, janséniste, juriste et théologien lombard ; il veut montrer aussi la très grande proximité du philosophe au sujet de la tolérance civile, dans l’actualité brûlante des nouveaux enjeux politiques et religieux. »
Gros (Jean-Michel), « Bayle et les libertins graves », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 105-122.
« Dans la lettre centrale de Ce que c’est que la France toute catholique, un jeune protestant “révolté” contre l’église de France, en vient, sous l’influence explicite de “libertins graves”, à une critique radicale de la religion en elle-même. Quelle est la part de Bayle dans cette dénonciation de la nocivité intrinsèque à toutes les religions ? La question est d’autant plus compliquée 387qu’en cette même année 1686, Bayle publie aussi le Commentaire philosophique, où il tente de définir les conditions d’une tolérance philosophique des religions tandis que le texte précédent paraît invalider, par avance, un tel espoir. »
Haffemayer (Stéphane), Les Lumières radicales de la Révolution anglaise. Samuel Hartlib et les réseaux de l’Intelligence (1600-1660), Paris, Classiques Garnier, coll. « Histoire des Temps modernes », 2018, 640 p.
« Cet ouvrage ressort de l’analyse à travers les archives de Samuel Hartlib, intellectuel protestant allemand réfugié à Londres au début de la Guerre de Trente ans. Cet intelligencer s’évertua à faire évoluer la politique anglaise dans le sens de l’idéal réformateur qu’il partageait avec un milieu intellectuel puritain. »
– Préface. Introduction.
– Les fondements idéologiques de l’esprit réformateur hartlibien. S’exiler dans l’Angleterre des années 1620. Utopie et millénarisme hartlibien : Antilia et Clavis Apolyptica. Vulgarisation du baconisme. L’Advancement of learning : réformer et promouvoir l’éducation pour tous. L’Advancement of learning : étendre le champ du savoir. Conclusion.
– L’engagement d’un « intelligencer ». Diplomatie parallèle et réseaux de l’information (1630-1641). Les réseaux de l’information de Hartlib. L’antipapisme, puissant agent mobilisateur. De la sphère privée à la sphère publique : publications. L’engagement politique de 1640-1641. La résonance de la rébellion irlandaise de 1641.
– Hartlib au temps de la guerre civile (1642-1648). Une capitale sans roi (janvier 1642) : effets immédiats. L’information pendant la guerre civile : Hartlib et la défense de la cause parlementaire. La récompense officielle du soutien parlementaire à partir de 1645. Le « Bureau d’Adresse », avatar de la « Maison de Salomon » ? Engagements politiques.
– Hartlib et l’interrègne (1649-1660). Troubles autour de la mort de Charles ier. Célébration de la liberté de penser et publier. La controverse de l’Engagement et de la légitimité de l’obéissance. Hartlib et le travail des comités (1649-1654). Le soutien du cercle hartlibien à Cromwell. L’implication du cercle hartlibien dans la politique étrangère du Protectorat : diplomatie et information. Hartlib et les réactions anglaises au massacre des Vaudois (1655). Hartlib et l’improvment. Bilan : Le désenchantement des intellectuels à la fin du Protectorat ?
– Conclusion. Annexe I : Publications de Hartlib et de Dury, par ordre chronologique. Annexe II : Liste des imprimeurs et libraires concernés par les publications de Hartlib et de Dury. Sources manuscrites. Sources imprimées mentionnées. Bibliographie des ouvrages mentionnés. Index.
388Hildesheimer (Françoise) et Morgat-Bonnet (Monique), Le Parlement de Paris. Histoire d’un grand corps de l’État monarchique (xiiie-xviiie siècles), Histoire et archives, no 16 [Diffusion : Honoré Champion], 2018, 830 p.
« Au Moyen Age et durant l’Ancien Régime, le Parlement de Paris était la plus haute Cour de justice du royaume de France. Instrument de la souveraineté royale, il représentait le roi qui était avant toute chose en charge de la justice et de la paix. Mais, issu de la Curia regis, il a gardé de ses origines d’autres attributions, de nature plus politique, tant dans le domaine législatif, administratif, économique et social, même quand le souverain s’est doté d’un Conseil de gouvernement. À une époque qui ne connaissait ni la distinction des pouvoirs, ni la séparation de la justice civile, criminelle, et administrative, où seule existait une justice de droit commun pour tous, le roi, l’État et les particuliers, le Parlement a été, tout au long de son histoire, non seulement une autorité politique, mais aussi la Cour suprême régulatrice de la jurisprudence et du droit qu’il a contribué à créer. »
– Table des matières sur le site d’Honoré Champion (www.honorechampion.com/fr/) sous « Extraits ».
Jacot Grapa (Caroline), « Un matérialisme clivé. Autour de Sénèque (Diderot et La Mettrie) », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 115-131.
Cette contribution entend « mettre en perspective l’Essai sur les règnes de Claude et de Néron de Diderot et l’Anti-Sénèque de La Mettrie », et montrer notamment combien la conception qu’a le dernier d’une coupure radicale entre la pensée et la pratique (soumise à notre « organisation ») hante l’auteur de l’Essai : la présence de La Mettrie « configure les tensions qui traversent le texte, en engageant une querelle qui permet de cerner ses enjeux moraux, stylistiques et politiques ».
Lavaert (Sonja) et Schröder (Winfried) (dir.), Aufklärungs-Kritik und Aufklärungs-Mythen. Horkheimer und Adorno in philosophiehistorischer Perspektive, Berlin/Boston, De Gruyter, 2018.
« La Dialectique de la Raison de Max Horkheimer et Theodor W. Adorno constitue sans doute la mise en cause la plus radicale du siècle des Lumières. Alors que les discussions qui ont suivi se sont surtout concentrées sur la critique fondamentale de la rationalité qui y est formulée, les historiens de la philosophie ont rarement soulevé la question de savoir si les philosophes consultés par Horkheimer et Adorno sont effectivement des témoins appropriés pour leur critique des Lumières. Les contributions dans ce volume reviennent donc sur cette question et mettent à l’épreuve l’image globale 389des Lumières dessinée par Horkheimer et Adorno et leurs interprétations de Bacon, Spinoza, Kant et Sade. »
Sonja Lavaert et Winfried Schröder : Einführung. James Schmidt : « What, if anything, does Dialectik of Enlightenment have to do with “the Enlightenment” ? » ; Gunzelin Schmid Noerr : « Zum werk- und zeitgeschichtichen Hintergrund der Dialektik der Aufklärung » ; Oliver L. Scholz : « Nachgedanken zu Nachtgedanken : die Dialektik der Aufklärung im Rückblick » ; Dietrich Schotte : « Shadows History with a Hidden Agenda ? Francis Bacon als Positivist in der Dialektik der Aufklärung » ; Pierre-François Moreau : « Adorno und Horkheimer als Spinoza-Leser » ; Sam Fleischacker : « Kant in the Dialektik der Aufklärung » ; Marcel Hénaff : « Welches Aufklärungsprojekt ? Sade und Kant in der Dialektik der Aufklärung » ; Else Walraavens : « Moses Mendelssohns Idee eines Missbrauchs und einer Korruption von Kultur und Aufklärung. Eine Aufklärungskritik aus aufklärerischer Sicht » ; Petra Gehring : « Dialektik oder Parrhesiastik der Aukklärung ? Horkheimer / Adorno und Foucault ».
– Sachregister. Namenregister.
Léchot (Timothée), « Un ange dans les rouages : Jacques Delille et le matérialisme », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 165-185.
« Chantre de la science contemporaine et poète didactique soucieux d’écarter tout soupçon d’hétérodoxie, Jacques Delille (1738-1813) » n’en vient pas moins à définir la poésie comme un procédé « matérialiste » fondé sur « l’harmonie imitative ».
Lehmann (Aude), (dir.), Diderot et l’Antiquité classique, Paris, Classiques, Garnier, coll. « Rencontres », 2018, 388 p.
« Associer Diderot, champion de la modernité, à l’Antiquité classique, relève du paradoxe. Force est néanmoins de constater l’omniprésence des auteurs anciens dans l’œuvre du Langrois ainsi que sa familiarité avec les textes fondateurs du monde gréco-romain. »
– Aude Lehmann : Avant-propos. Robert Bedon : « Diderot et l’article “Langres” de l’Encyclopédie ».
– I. Diderot critique d’art à l’École des Anciens. Jean-Marie André : « Diderot et l’Antiquité romaine. Antiquités et Antiquité » ; Mary-Anne Zagdoun : « Diderot et l’esthétique d’Aristote » ; Dominique Bocage-Lefèbvre : « La célébration de l’Antiquité dans trois œuvres esthétiques de Diderot : Essais sur la peinture, Éloge de Térence, Pensées détachées sur la peinture » ; Nadège Neumuller : « Diderot et l’histoire plinienne des arts » ; Charles Philippe Assembé Ela : « Un paragone oublié, Diderot-Falconet-Pline ».
390– II. Diderot et les philosophes de l’Antiquité. Sophia Felopoulou : « Le dialogue diderotien avec Aristote et Platon » ; Christine Hammann : « Sénèque avocat de Diderot, procureur de Rousseau » ; Cécile Merckel : « La figure de Sénèque dans l’Essai sur les règnes de Claude et de Néron de Diderot » ; Valérie Pérez : « Le jeu agonistique de la parole. Diderot et le parler-vrai ».
– III. Diderot critique littéraire des Anciens. Tatiana Smoliarova : « L’inspiration pindarique chez Diderot ou la composition personnifiée » ; Marie Saint Martin : « “La vérité ! La nature ! Les Anciens ! Sophocle ! Philoctète !”. Diderot et l’Antiquité, l’invention d’une modernité à l’antique » ; Gualtiero Calboli : « L’essai Sur Térence de Diderot et la Vie de Térence chez Donat. Étude critique et comparée » ; Marilina Gianico : « “Avons-nous plus de délicatesse et plus de génie que les Athéniens ?”. L’Antiquité classique, légitimation de la réforme théâtrale diderotienne ».
– IV. L’impact des auteurs anciens sur la pensée de Diderot. Houda Landolsi : « Suzanne Simonin, une héroïne de l’Antiquité ? » ; Aude Lehmann : « L’image de Cicéron dans l’œuvre de Diderot » ; Aurélien Gautherie : « Celse et le De Medicina dans l’Encyclopédie de Diderot ».
– Index des auteurs anciens ; des auteurs classiques et modernes ; des personnes réelles, personnages de fiction et peuples ; des divinités et héros ; des lieux et monuments ; thématique. Résumés.
Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 : Pierre Bayle et les libertins, (dir. Nicole Gengoux, Pierre Girard, Mogens Lærke), Paris, Classiques Garnier, 2018, 278 p.
– Avant-propos et Introduction par Nicole Gengoux, Pierre Girard, Mogens Lærke.
– Bayle et les libertins. Lorenzo Bianchi : « Libertinage et hétérodoxie chez Bayle : quelques questions » ; Isabelle Moreau : « Du “mot de gueule” aux “idées accessoires” : Pierre Bayle et les obscénités libertines » ; Anne Staquet : « De l’athée vicieux à l’athée vertueux : genèse du démontage d’une idée toute faite » ; Nicole Gengoux : « Le mal est-il un problème ? De l’athéisme du Theophrastus redivivus à Bayle » ; Jean-Michel Gros : « Bayle et les “Libertins graves” » ; Maxime Boutros-Jacqueline : « La liberté n’est-elle qu’un mot ? Bayle et les controverses théologiques sur la liberté entre 1685 et 1688 » ; Antony McKenna : « Pierre Bayle, les vérités évidentes et les vérités particulières » ; Elena Muceni : « Le grand marionnettiste et son apprenti : Leers et Bayle, les premières années » ; Grazia Grasso : « Pietro Tamburini, chrétien éclairé et lecteur de Bayle ».
– Varia. Myriam Bernier : « La réception de Pascal par les libertins » ; Anna Lisa Schino : « Hobbes et les libertins : comparaison sur le rôle politique de la religion ».
– Résumés/Abstracts.
391Lloyd (Henry Martyn), Sade’s Philosophical System in its Enlightenment Context, Cham, Palgrave Macmillan, 2018, 305 p.
« Ce livre relie la philosophie du marquis de Sade – l’une des figures les plus notoires, emblématiques et encore mal comprises de l’histoire de la pensée européenne – aux thèmes plus vastes des Lumières. Plutôt que de se considérer comme un simple pornographe, Sade s’est conçu comme prolongeant la tradition progressiste de la philosophie des Lumières françaises. Il aspirait à être un philosophe. Ce livre utilise l’histoire intellectuelle et l’histoire de la philosophie pour reconstruire son “système” philosophique. Celui-ci se déploie au sein du discours contemporain sur la sensibilité, pour aborder de manière critique les deux grands axes de la théorie éthique du xviiie siècle : le sens moral et les traditions de la loi naturelle. »
The Problem of Sade. Sade’s Philosophical “System”. Sensibility, Vitalist Medicine, and embodied Epistemology. Sensibility, Genre, and the Roman philosophique. Moral Sense Theory in the French Enlightenment. Rousseau’s Knowing Heart, Sade’s Knowing Body. Heart and Head, Love and Libertinage, in Histoire de Juliette. Natural Law, and the Law and Voice of Nature. Living it Up in the State of Nature : Sade contra Hobbes and Rousseau. Sadean Natural Law in Histoire de Juliette. Sade’s Theory of Libertine Askesis. Juliette’s ambiguous Apprenticeship. Against the Dialectic of Enlightenment ; or, How not to read Kant Avec Sade.
Lucci (Diego), « John Locke on Atheism, Catholicism, Antinomianism, and Deism », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 201-246.
« La conception religieuse de la moralité propre à Locke a joué un rôle primordial dans la formulation de ses vues sur la tolérance et sur le salut. Dans A Letter Concerning Toleration (1689), il excluait les athées de la tolérance parce qu’il les regardait comme immoraux par nature, et les catholiques romains, dont il jugeait la morale nuisible à la société. Dans The Reasonableness of Christianity (1695), il s’est tourné vers la révélation chrétienne pour y chercher les fondements de la moralité. Sa sotériologie moraliste a refusé la possibilité du salut à ceux qui, comme les antinomiens et les déistes, ont rejeté le message moral et salvifique du Christ. Pour Locke, les antinomiens ont nié l’importance des bonnes œuvres, tandis que les déistes ne se sont appuyés que sur la raison naturelle, négligeant ainsi les limites d’une raison sans soutien surnaturel et la faiblesse de la nature humaine. Néanmoins, l’hostilité de Locke envers l’antinomianisme et le déisme ne l’a pas amené à invoquer le pouvoir civil contre leurs partisans, qu’il jugeait encore capable de comprendre, serait-ce partiellement et imparfaitement, la loi divine et donc de se comporter moralement. »
392McKenna (Antony), « Pierre Bayle, les vérités évidentes et les vérités particulières », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), 2018, p. 147-166.
« Cet article conteste l’interprétation courante de Bayle comme un sceptique pyrrhonien ou académique et souligne le rationalisme moral qui fonde sa conception de la tolérance religieuse. Bayle souligne la nécessaire concordance entre la raison et la foi sur le plan de la morale ; les autres articles de la doctrine sont relégués, pour ainsi dire, au domaine de l’éducation, de l’habitude, du “goût” et du “zèle”. Les “droits de la conscience errante” ne s’étendent pas à la méconnaissance des principes de la morale fondés en raison ; ils ne concernent que les croyances irrationnelles (adiaphora) ancrées en nous par l’éducation et par l’habitude. Puisqu’il n’y en a aucune démonstration rationnelle, l’existence de Dieu figure nécessairement parmi les croyances irrationnelles, parmi ces “vérités particulières” de la doctrine sur lesquelles on peut se tromper innocemment. »
McKenna (Antony), « Pierre Bayle, rationalism and religious faith : self-evident truths and particular truths », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 163-181.
« Nous examinons ici les prémisses de l’interprétation de Bayle comme sceptique et fidéiste et cherchons à réfuter certains des arguments avancés en faveur de cette lecture. La distinction cruciale entre les principes moraux et les vérités “particulières” ou “spéculatives” permet de présenter Bayle comme un rationaliste moral qui souligne le caractère irrationnel de la foi chrétienne, incompatible avec les principes évidents de la morale naturelle. La position fidéiste de Bayle (c’est-à-dire son adoption de la définition de la foi par Jurieu) est présentée comme un “bouclier” contre la persécution. Ses arguments sur l’existence de Dieu et sur sa nature s’inscrivent toujours dans le cadre d’une concession hypothétique destinée à contribuer à la réfutation radicale de la théologie rationaliste. »
McKitterick, David, La Quête de l’ordre. Textes imprimés et textes manuscrits, 1450-1830 [é.o. : Cambridge, 2003], Paris, ENS Éditions, coll. « Métamorphoses du livre », 2018, 358 p.
Traduction française de l’ouvrage paru en 2003 aux Presses de l’université de Cambridge. « Le livre propose au lecteur français de revisiter les aspects fondamentaux de ce qu’on a appelé la révolution de l’imprimerie des premiers temps modernes. L’auteur démontre que nombre de mutations associées à l’imprimerie n’ont été que progressivement assimilées durant près de 400 ans, une période bien plus longue que ne le pensent généralement les historiens. Depuis les années 1450, le texte et l’image imprimés sont devenus familiers 393dans la plus grande partie de l’Europe. L’usage du manuscrit a perduré très longtemps, et pour les auteurs, les fabricants de livres, et les lecteurs, le manuscrit et l’imprimé ont été davantage complémentaires que concurrents. Alors que l’imprimé semble offrir davantage de cohérence textuelle et graphique, l’auteur nous rappelle que cela n’a pas toujours été le cas. McKitterick montre ainsi que les historiens du livre comme les bibliographes ont été influencés par des considérations sur les usages des premiers livres imprimés qui ne sont pas apparues avant la fin du xixe siècle, et il invite ses lecteurs à travailler plutôt depuis le passé qu’à rebours. »
1. La chose imprimée et le bibliographe moderne. 2. L’interdépendance des talents et des techniques. 3. Images en mélange. 4. La chambre des erreurs. 5. Le parfait et l’imparfait. 6. L’art de l’imprimerie. 7. Réévaluation : vers le livre moderne. 8. Des machines et des hommes. 9. Instabilités : l’inhérent et le délibéré.
Mazza (Emilio), « The broken brake : Hume and the “proper office of religion” », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 261-317.
Dans les Dialogues concernant la religion naturelle, Cleanthes définit le « rôle propre » de la religion : « réglementer le cœur des hommes, humaniser leur conduite, insuffler l’esprit de tempérance, d’ordre et d’obéissance ». Ce point de vue est repris par Hume dans plusieurs textes des années 1755-1756 et rappelle celui du narrateur de l’essai philosophique “Des conséquences pratiques de la religion naturelle” (1748) : ceux qui détruisent les préjugés religieux “libèrent les hommes d’une contrainte posée sur leurs passions et rendent l’infraction aux lois de l’équité et de la société, dans un sens, plus facile et plus sûre”. Hume le croit-il vraiment ? De nombreux spécialistes de Hume prennent cette déclaration au sérieux. Les Essais philosophiques, les Dialogues et l’Histoire, leurs relations, leurs sources possibles et leurs lectures, nous disent le contraire. La religion n’est pas un frein à nos passions, ni n’insuffle la moralité. La “fonction propre” de la religion, plutôt qu’elle ne correspond à la conviction de Hume, semble plutôt être l’une de ses tentatives pour adoucir son traitement offensif des croyances religieuses et de leurs conséquences.
Mercier (Franck) et Rosé (Isabelle) (dir.), Aux marges de l’hérésie. Inventions, formes et usages polémiques de l’accusation d’hérésie au Moyen Âge, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2018, 384 p.
« Si l’histoire traditionnelle de l’hérésie au Moyen Âge s’est longtemps confondue avec celle des exclus de la société, l’approche récente se focalise davantage sur les diverses autorités qui, au cœur du pouvoir, élaborent l’orthodoxie : l’hérésie n’existe que parce que l’orthodoxie en a d’abord décidé. Cette enquête repose 394sur la conviction que c’est encore en se situant aux marges de l’hérésie, au contact d’activités répréhensibles voisines, telles que l’usure, la sorcellerie ou encore la rébellion politique, que l’on peut le mieux saisir les principes et les mécanismes de la fabrique de l’hérésie. »
– Introduction par Franck Mercier et Isabelle Rosé.
– I. Dire la dissidence : genèse des stéréotypes antihérétiques. Valentina Toneatto : « Aux marges de la foi, aux confins de l’humanité. Bestialité, hérésie et judaïsme de l’Antiquité au début du Moyen Âge » ; Emmanuel Bain : « Aux sources du discours antihérétique ? Exégèse et hérésie au xiie siècle » ; Uwe Brunn : « Dialectique, dualité christologique et monisme institutionnel. La construction d’un monde sans division… avec les “manichéens” en marge (de Grégoire VII à Innocent III) » ; Clément Lenoble : « L’économie des hérétiques. Note sur le rapprochement entre usure et hérésie » ; Martine Ostorero : « Des papes face à la sorcellerie démoniaque (1409-1459) : une dilatation du champ de l’hérésie ? ».
– II. Extension du domaine de l’hérésie : l’accusation en actes. Bruno Dumézil : « La chasse aux Bonosiens dans la Burgondie, ve-viie siècles : une affaire d’hérésie ? » ; Isabelle Rosé : « Simon le Magicien hérésiarque ? L’invention de la simoniaca heresis par Grégoire le Grand » ; Alessia Trivellone : « Le Mont-Cassin, une fabrique de l’hérésie au xie siècle » ; Florian Mazel : « Entre ordre ecclésial et consensus civique : l’instrumentalisation de l’hérésie dans la Passio sancti Petri Parentii martiris (Orvieto, vers 1199-1212/1216) » ; Sylvain Parent : « Entre extorsion de fonds et procès truqués. Le contrôle de l’activité des inquisiteurs en Italie au xive siècle » ; Franck Mercier : « “Un homme plein du diable”. Astrologie, magie et sorcellerie dans le procès pour crime de lèse-majesté de Jean II d’Alençon (1456-1458) ».
– Conclusion, par Franck Mercier et Isabelle Rosé : « Vers une marginalisation de l’hérésie ».
– Index.
Merle (Alexandra), Jettot (Stéphane), Herrero Sánchez (Manuel), (dir.), La Mémoire des révoltes en Europe à l’époque moderne, Paris, Classiques Garnier, coll. « Constitution de la modernité » (no 14), 2018, 462 p.
« Cet ouvrage traite de la mise en mémoire à l’époque moderne de révoltes survenues dans différents espaces européens. Il montre la variété des modes de consignation de cette mémoire, depuis les diverses formes de l’écrit jusqu’à l’oralité, et explore son utilisation dans l’action politique. »
– A. Merle, S. Jettot et M. Herrero Sánchez : Introduction.
– I. L’écriture de la révolte. Les usages politiques de l’historiographie. Jesús Gascón Pérez : « “La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón”. Memoria, olvido y proyecto político en las obras sobre la rebelión de 1591 contra Felipe II 25 » ; Anne-Lise Richard : « Entre interprétations et omissions. Les 395Germanías de Valence dans quelques textes historiographiques espagnols de l’époque moderne au xixe siècle » ; Alexandra Merle : « Interprétations et échos des Comunidades de Castille de l’historiographie à la réflexion politique dans l’Espagne moderne » ; Marion Bertholet : « Écritures, mémoires et usages politiques d’une révolution manquée. La conjuration des Pazzi et la révolte des Florentins (1478) dans l’historiographie des Lumières à Sismondi » ; Éric Leroy du Cardonnoy : « Clio, une muse mineure ? ou l’Histoire du soulèvement des Pays-Bas de Friedrich Schiller »
– II. Mémoires publiques, mémoires privées : les archives familiales de la révolte. Laura Casella : « Mémoire de la révolte et mémoires de famille. La crudel zobia grassa (1511) dans les livres de famille du xvie siècle : brève histoire des manuscrits et des éditions » ; Ann Hughes : « Taking Account and Making Memories in the English Civil War » ; Stéphane Jettot : « De la dissimulation à la commercialisation. Les mémoires familiales de la première révolution anglaise (1660-1740) »
– III. Oralités et transmissions : les effets subversifs de la remémoration. Vincent Challet : « Entre oubli et résurgence. Le souvenir des révoltes paysannes dans l’Occident médiéval » ; Jan Dumolyn et Jelle Haemers : « “We Will Ask for a New Artevelde”. Names, Sites, and the Memory of Revolt in the Late Medieval Low Countries » ; Éva Guillorel : « La mémoire comme moteur de la révolte. Réflexions autour du rôle subversif des traditions orales dans l’Europe moderne » ; José Luis Egío : « “Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor”. Percepción y fundamentación histórica en la sublevación de los malcontents (1574-1576) »
– IV. La mémoire de la révolte dans l’action politique. Alberto Rodríguez Martínez : « Negociación, sublevación y concierto. Memoria e imagen de la revuelta de Flandes en los Países Bajos meridionales durante la negociación de la Tregua de los Doce Años (1598-1609) » ; Manuel Herrero Sánchez : « La memoria de la revuelta de Flandes en la toma de decisiones y en la acción política de la Monarquía Hispánica entre 1621 y 1700 » ; Diego Pizzorno : « The Ever-impeded Revolt. The Seventeenth-century Genoese Conspiracies and their Memory » ; Domenico Cecere : « History in the service of order. The memory of popular revolts in the public domain and in judicial practices (Kingdom of Naples, 17th-18th century) » ; Ulrich Niggemann : « Contested Memories. The Revolutions of the Past in Eighteenth-Century Britain ».
– Sources et bibliographie. Index des noms propres. Résumés.
Moreau (Isabelle), « Du “mot de gueule” aux “idées accessoires” : Pierre Bayle et les obscénités libertines », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 39-58.
« Lorsque le Dictionnaire de Bayle est censuré par le consistoire de Rotterdam, la première accusation est celle d’obscénité. La réponse de Bayle est très satirique à l’égard des censeurs. Elle met en question les compétences respectives des 396diverses instances de contrôle et de censure, pour mieux assurer l’autonomie de la République des Lettres. Dotée d’une forte dimension réflexive, elle interroge aussi le fonctionnement de la langue et réfléchit sur le “lieu” obscène et ses ambiguïtés. »
Mori (Gianluca), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe : dossier (Monographica, II) de Ethics & Politics / Etica & Politica, XX-3, 2018 [p. 91-340].
En ligne sur http://www2.units.it/etica/
La présentation (traduite) de Gianluca Mori est reproduite à la fin de la section « Comptes rendus ».
– Introduction par Gianluca Mori : « Atheism, Religion, and Politics in Early-Modern Europe ».
– A. Mothu : « Athéisme et politique à la Renaissance : le cas du Cymbalum mundi (1537) » ; G. Baldin : « Irenista, calvinista, scettico, o ateo nascosto ? Il dibattito sulla religione di Paolo Sarpi » ; A. McKenna : « Pierre Bayle, rationalism and religious faith : self-evident truths and particular truths » ; G. Paganini : « Enlightenment before the Enlightenment : Clandestine Philosophy » ; D. Lucci : « John Locke on atheism, Catholicism, antinomianism, and deism » ; J. Agnesina : « Collins, Hume e i miracoli : il caso Saragozza » ; E. Mazza : « The broken brake : Hume and the “proper office of religion” » ; G. Mori : « Hume, Bolingbroke, and Voltaire : Dialogues concerning Natural Religion, Part XII ».
Mori (Gianluca), « Hume, Bolingbroke and Voltaire : Dialogues concerning Natural Religion, Part XII », dans idem (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir ci-dessus), p. 319-340.
« La 12e partie des Dialogues concerning Natural Religion offre au lecteur un large éventail de positions philosophiques, dont la teneur dépend de la stratification d’un texte que son auteur révisa à plusieurs reprises. Certaines interventions manuscrites de Hume peuvent être datées, comme M.A. Stewart l’a brillamment montré, cependant leur contexte n’a pas encore été étudié. C’est le cas en particulier de la révision de 1757 : elle a une source secrète (Bolingbroke) qui permet à Hume de discuter de la possibilité d’une alternative déiste à l’athéisme aussi bien qu’au théisme chrétien. Toutefois le déisme ne pouvait représenter une solution réelle pour Hume : tout en empruntant ce manteau protecteur dans la partie XII, il parvient en fait à des conclusions bien plus radicales. Quant à la révision de 1776, elle porte la marque des récents débats continentaux entre Voltaire et d’Holbach. Hume se montre ici proche de Voltaire pour faire valoir que la division entre athéisme et déisme peut être repensée, si et seulement si le concept de Dieu laisse place à celui de la simple existence d’un ordre éternel des choses – un point que la plupart des athées auraient admis sans aucun scrupule. »
397Mothu (Alain), « Nodier, Johanneau et le Cymbalum mundi : l’éclairage d’un dossier blésois », Archive ouverte HAL, 2018 : <hal-01888517>
« L’exploitation d’un dossier entré en 2005 aux Archives départementales du Loir-et-Cher, à Blois, “Travaux d’Éloi Johanneau pour la publication d’une nouvelle édition du Cymbalum mundi”, apporte d’utiles éclairages sur l’érudit blésois Éloy Johanneau (1770-1851) et ses relations savantes, ainsi que sur la genèse de sa “Clef du Cymbalum mundi”, publiée en 1841 dans la première édition de ce texte par Paul Lacroix (alias “le bibliophile Jacob”). Enfin et peut-être surtout, ce dossier enrichit notre documentation relative à une affaire fameuse impliquant Charles Nodier (1780-1844) : sa tentative de spoliation de Johanneau touchant le décodage anagrammatique de la dédicace de “Thomas du Clevier à son amy Pierre Tryocan” ouvrant le Cymbalum mundi. »
Mothu (Alain), « Athéisme et politique à la Renaissance : le cas du Cymbalum mundi (1537) », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 95-119.
« L’athée est longtemps passé pour un insensé isolé, un cousin du monstre ou de la bête, mais entre 1540 et 1560, il commence à être pris au sérieux et regardé comme une réelle menace pour la chrétienté, au même titre que n’importe quel “hérétique”. Le Cymbalum mundi (1537), ouvrage athée dont l’auteur, Bonaventure des Périers, avait auparavant adhéré à la Réforme avant de s’en détourner (nous dit-on), nous renseigne sur une des causes possibles de ce nouveau regard, qui semble n’être pas fantasmatique mais correspondre à une réalité. Le Cymbalum pointe en direction de la déception sociale causée par la Réforme partout où elle s’impose, la ruine des espoirs d’égalité et de liberté que beaucoup avaient investi en elle. »
Mothu (Alain), « De la légende noire à l’apothéose romantique : le Cymbalum mundi entre xviie et xixe siècles », dans Michèle Rosellini et Stéphane Zékian (dir.), Un xviie siècle hors Panthéon : les « libertins » au xixe siècle [Actes de la journée d’étude de décembre 2016], xviie siècle, 2019-2, p. 95-119.
Depuis sa prohibition précoce en 1538 jusqu’au début du xviiie siècle, où il ressortira des limbes à la faveur de sa redécouverte à la Bibliothèque royale puis de sa réédition par Prosper Marchand (1711), le Cymbalum mundi connaît une occultation presque totale. Des « esprits forts » l’ont eu entre les mains au xviie siècle, mais ils ne semblent pas en avoir perçu le caractère antichrétien, à la différence de Mersenne, qui estime que son auteur était “un fripon d’une impiété achevée”. Au xviiie siècle, la curiosité est vive, quatre éditions se succèdent, mais l’immense majorité de ses lecteurs et commentateurs prétendent ne rien comprendre au texte ou le jugent inoffensif. C’est véritablement au siècle suivant, après le déchiffrement par Éloy Johanneau de la dédicace de 398« Thomas Du Clevier à Pierre Tryocan » (Thomas incrédule à Pierre croyant), que le Cymbalum mundi va revêtir une importance historique, au titre de monument de la “libre pensée”, mais aussi, par la grâce de Nodier, de chef d’œuvre littéraire conçu par un génie singulier.
Moureau (François), « Malesherbes et la censure : une histoire à relire ? », Dix-huitième siècle, 50, 2018, p. 527-547.
Auteur de six Mémoires sur la librairie et la liberté de la presse (1759-1788) et de l’Édit de tolérance qui « réintégra les protestants dans la Nation française », protecteur de l’Encyclopédie et de bien des « philosophes », profondément conscient « que le siècle exigeait une réforme intellectuelle, sinon une “révolution”, au sens du temps, qui équilibrerait les pouvoirs », Malesherbes ne fut pas moins « l’avocat d’une cause qu’il savait perdue au procès de Louis xvi ». « Une réconciliation des deux images ne serait pas inutile ».
Muceni (Elena), « Le grand marionnettiste et son apprenti : Leers et Bayle, les premières années », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 167-184.
« L’article propose un aperçu des modalités et des résultats de la collaboration entre Pierre Bayle et l’imprimeur de Rotterdam Reinier Leers (1654-1714) pendant les années 1680. L’analyse de la correspondance permet d’établir qu’au cours de ces années Bayle a travaillé pour Leers tant comme intermédiaire que comme éditeur et reviseur et a contribué à la notoriété des ouvrages imprimés par son ami à travers son activité de journaliste. L’histoire éditoriale des pièces de la querelle Malebranche-Arnauld entre 1683 et 1687 permet de cerner les mécanismes exploités par Bayle et Leers pour alimenter cette controverse et stimuler l’intérêt du public. »
Muceni (Elena) et Pitassi (Maria-Cristina), (dir.), Le Malebranchisme à l’épreuve de ses amis et de ses ennemis. Actes de la journée d’étude organisée à Genève par l’Institut d’Histoire de la Réformation (27 novembre 2015), Paris, Honoré Champion, 2018, 246 p.
« Le système de Malebranche représente une des plus remarquables “architectures de la raison” que le xviie siècle nous ait laissée. Ébauché dans son ensemble dans la Recherche de la vérité, ouvrage qui marque l’exorde littéraire et philosophique de l’auteur, ce système n’a pourtant pas cessé d’évoluer, de se développer et de se perfectionner au fil du temps.
Issu des travaux présentés dans le cadre d’une journée d’étude sur le malebranchisme, organisée en novembre 2015 par l’Institut d’histoire de la Réformation de l’Université de Genève, cet ouvrage propose une relecture de la philosophie de Malebranche à travers le kaléidoscope des controverses 399et des réceptions qu’elle a inspirées. Les contributions réunies dans le volume explorent, d’un côté, l’impact que les querelles ont eu sur le développement du malebranchisme, et leur écho chez les prétendus héritiers de cette philosophie ; de l’autre, la réception contemporaine de certains philosophèmes malebranchiens ainsi que, inversement, les modalités d’assimilation par l’auteur de théories incontournables pour la pensée moderne. »
– Elena Muceni : « Le rôle des controverses dans le développement de la philosophie de Malebranche. Remarques introductives » ; Giambattista Gori : « Le “Dieu obligé” : vicissitudes et contrariétés d’un syntagme malebranchien » ; Raffaele Carbone : « Malebranche et Hobbes : anthropologie et politique » ; Jean-Christophe Bardout : « La puissance ou la raison. Remarques sur l’anti-malebranchisme de Fénelon » ; Jean-Luc Solère : « Liberté et volonté chez Bayle et Malebranche » ; Antonella Del Prete : « Polémiques manifestes et influences tacites : Régis, Malebranche et la conscience » ; Mariangela Priarolo : « Un plaisir divin : Malebranche, Lamy (et les autres) » ; Marine Picon : « D’une querelle à l’autre : Leibniz et les adversaires de la noétique malebranchienne » ; Stuart Brown : « Les admirateurs de Malebranche dans l’Angleterre des années 1690 » ; Elena Muceni ; « Quand le malebranchisme s’invite dans l’histoire de la médecine : la théorie de l’influence de l’imagination maternelle sur le fœtus ».
– Bibliographie. Index des noms.
Myara Kelif (Elinor), L’Imaginaire de l’âge d’or à la Renaissance, Turnhout, Brepols Publishers, coll. « Études renaissantes », 2017, 510 p., nombreuses illustrations.
Cette enquête sur les traditions figuratives et interprétatives de l’âge d’or du xve au début du xviie siècles, de l’Italie à l’Europe du Nord, résulte d’une thèse en Histoire de l’art soutenue en 2012 à l’Université de Paris I, sous la direction de Philippe Morel.
« Depuis l’Antiquité, l’âge d’or est l’un des mythes les plus répandus et les plus prégnants dans l’imaginaire collectif occidental. Cet ouvrage ambitionne, en en retraçant les évolutions successives, de mieux comprendre et de mettre en lumière la popularité dont il a joui dans la culture visuelle de la Renaissance.
C’est tout d’abord dans les séries de gravures illustrant les quatre âges de l’humanité, notamment dans les éditions des Métamorphoses d’Ovide, que s’est jouée l’une des mises en place premières de l’iconographie de l’âge d’or, qui connaîtra ensuite une grande fortune dans l’Europe entière.
Image ovidienne, bucolique et nostalgique du bonheur originel, le mythe de l’âge d’or fut par la suite un formidable outil de propagande politique. Sa valeur hyperbolique ainsi que sa malléabilité en firent l’un des thèmes favoris de glorification du pouvoir politique ou religieux : Rodolphe II, les Médicis, les Farnèse, les Valois… autant de cas étudiés ici afin de mieux comprendre la place, le fonctionnement comme les manipulations dont ce 400mythe fut l’objet à la Renaissance. Enfin, un dernier volet, qui se veut plus original dans son approche, traite de la façon dont d’autres mythes ont pu être contaminés par le récit de l’âge d’or. Au travers des topoi qu’il véhicule, l’âge d’or vient enrichir de toutes ses hyperboles d’autres mythes, jusqu’à devenir un concept. Mythe polymorphe, polysémique, il en vient ainsi à se réduire à un ensemble abstrait de valeurs positives qui définissent un temps idéal : justice, paix, abondance, amour, harmonie […]. »
– Préface de Philippe Morel. Introduction.
– I. Le mythe ovidien. Archéologie du mythe de l’âge d’or. Les caractéristiques du mythe de l’âge d’or. Le cycle des quatre âges de l’humanité (Les éditions françaises des Métamorphoses d’Ovide. Les séries de gravures flamandes et hollandaises. Les quatre âges de l’humanité dans la gravure italienne). Théogonie ovidienne et genèse chrétienne : l’interdépendance de deux récits des origines de l’humanité (Structures, thèmes et motifs communs aux deux cycle. Confusion des genres). Fragmentation du mythe des âges (L’âge d’or : modèle utopique ou uchronie des temps moderne. L’âge d’or « bucolique » des maniéristes hollandais).
– II. Instrumentalisations et manipulations. De l’histoire au mythe : l’âge d’or des Médicis (La fabrication d’un mythe : convergence de tradition. L’appropriation du mythe et la mise en image du « retour » de l’âge d’or. Jupiter, dieu de l’âge d’or médicéen ?). Du mythe à l’histoire : l’âge d’or virgilien (L’âge d’or d’Auguste. Apollon, dieu de l’âge d’or virgilien). Pour une géographie de l’âge d’or (Le Latium, lieu de l’âge d’or étrusco-romain de Janus et Saturne. La villa Lante al Gianicolo et la tradition médicéenne). De l’âge d’or à la fin des temps (L’âge d’or chrétien existe-t-il ? La propagande pontificale. Les loges de Pie IV).
– III. Variations. Les topoi de l’âge d’or : exégèse visuelle et symbolique (Allégorisation du mythe. Le locus amoenus. Âge d’or et voluptas. Abondance et Harmonie). Pour une version anthropologique de l’âge d’or (Lucrèce et les origines de l’humanité. Piero di Cosimo et Lucas Cranach : des versions conjointes. Le mythe du bon sauvage).
– Conclusion. Bibliographie. Index.
O que nos faz pensar [Rio de Janeiro], vol. XXVI, no 41 (2017) : Spinoza. Novas perspectivas históricas. En ligne sur http://www.oquenosfazpensar.fil.puc-rio.br/index.php/oqnfp/issue/view/47
Maxime Rovere : Apresentação ; Filip Buyse : « Galileo Galilei, Holland and the Pendulum Clock » ; Giovanni Licata : « Leggere Spinoza alla luce della tradizione averroista ebraica. Un resoconto delle recenti acquisizioni storiografiche » ; Adma Fadul Muhana : « Controvérsia religiosa : os livros de Gabriel-Uriel da Costa » ; Luis Filipe Silverio Lima : « Aproximações para uma história do conceito de Esperança nas expectativas milenaristas do 401século xvii : Esperança de Israel, Esperanças de Portugal e Door of Hope » ; Raphaële Andrault : « O que pode o corpo ? Spinoza, na cabeceira dos esfolados » ; Delphine Antoine-Mahut : « Cartesianismos e spinozismos : rumo a uma teoria das histórias possíveis em filosofia » ; Maxime Rovere : « Spinoza collectif : la double écriture de la Préface aux Opera Posthuma » ; Mogens Lærke : « O Spinozismo de Tschirnhaus : da teoria das noções comuns à verdadeira física » ; María Jimena Solé : « Los amigos prusianos. Episodios de la recepción de Spinoza en el siglo XVIII » ; Rodrigo Nunes e José Francisco Andrade Alvarenga : « O silêncio de Marx : sobre a recepção de Espinosa em 1841-1845 » ; Pierre-François Moreau : « Spinoza : uma teoria do homem. Uma antropologia materialista ».
– Entrevista : Spinozismo, or how to raise higher political consciousness. Com Jonathan Israel (Por Maxime Rovere).
– Tradução : Karl Heinrich Marx, Spinoza, Tratado Teológico-Político (Por Rodrigo Nunes e José Francisco Andrade Alvarenga).
– Resenha : Tradição e Iluminismo em Uriel da Costa (Felipe Jardim Lucas).
– Varia. Fabiano Lemos : « As conversões de Friedrich Schlegel : filosofia política como mística do tempo » ; Rafael Henrique Teixeira : « Sobre máquinas e organismos. Canguilhem e os aspectos dissimulados do animal-máquina cartesiano ».
Paganini (Gianni), « Enlightenment before the Enlightenment : Clandestine Philosophy », dans G. Mori (dir.), Atheism, Religion, and Politics in Early Modern Europe (voir « Mori »), p. 183-200.
Au xviie siècle, tous les manuscrits n’étaient pas clandestins, il existait aussi des manuscrits écrits pour la circulation publique (d’abord et surtout les correspondances, qui étaient semi-publiques, ou certains recueils de poèmes qui circulaient d’abord sous forme manuscrite avant d’être imprimés), mais il est indéniable que la plupart des auteurs résolument “hétérodoxes” ont trouvé utile de confier leurs idées à des manuscrits, à la fois pour se protéger des représailles des autorités et pour contourner la censure à laquelle étaient soumis les livres imprimés. Ces manuscrits philosophiques étaient des messagers d’une “hétérodoxie totale” que l’on pourrait appeler “globale” et non “locale”. L’exclusion ne concernait pas tel ou tel contexte, mais tous – ou presque tous – les contextes de l’Ancien Régime, car ils exprimaient une dissidence radicale par rapport à toutes les orthodoxies de l’Europe moderne. Le colloque de Bodin, de même que le Theophrastus redivivus et le Mémoire de Meslier, n’auraient pu être publiés dans aucune pays, catholique ou protestant, sous aucune monarchie absolue ou république. Les auteurs clandestins étaient conscients qu’il leur serait impossible de diffuser leurs idées en dehors d’un cercle protégé par la forme manuscrite et le plus souvent par l’anonymat.
402Paganini (Gianni), (dir.), Curiosity and the Passions of Knowledge from Montaigne to Hobbes, Roma, Accademia Nazionale dei Lincei, Bardi Edizioni, 2018, 400 p.
T. Orlandi : Parole di saluto. G. Paganini : Introduction : « Hobbes philosopher of curiosity » ; N. Panichi : « Montaigne between curiositas sciendi and généreuse ignorance » ; Ph. Desan : « “La curiosité, ce fléau de notre âme”, ou l’irrésolution retrouvée de Montaigne » ; E. Ferrari : « A passion for free mind. The “honneste curiosité” in Montaigne and Charron » ; R. Ragghianti : « Dal cabinet de curiosité alla biblioteca : la scoperta della “diversità” in Montaigne » ; T. Gontier : « Au delà des colonnes d’Hercule : Bacon et la curiosité intellectuelle » ; S. Ebbersmeyer : « Female curiosity. Preconditions and women’s voices from the Renaissance to the Early Modern Era » ; J.C. Laursen : « Robert Burton on curiosity, the passion of knowledge, and melancholy » ; J.-Ch. Darmon : « Approches nèo-épicuriennes de la curiosité et usages cognitifs de l’imagination de Gassendi à Saint-Evremond » ; Y. Tsuzaki : « La curiosité chez Descartes, lecteur de Charron » ; D. Kambouchner : « La concupiscence de l’esprit : Pascal, Nicole, Malebranche » ; A. McKenna : « La curiosité en théologie : autour de Jean le Clerc » ; P. Springborg : « Curiosity, anxiety and religion in Thomas Hobbes » ; F. Giudice : « Conoscenza e curiosità nella teoria ottica di Thomas Hobbes » ; D. Garber : « Curiosity, novelty and the politics of opinion in Hobbes » ; S.A. Lloyd : « The moral assessment of human curiosity in Hobbes’s Leviathan » ; P.-F. Moreau : « La curiosité chez Hobbes et Spinoza ».
Paschoud (Adrien) et Selmeci Castioni (Barbara), (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle. Entre littérature et philosophie, Berlin, Frank & Time, coll. « Romanistik », 2019, 208 p.
« Qu’est-ce que le matérialisme en France au xviiie siècle ? Ne faudrait-il pas plutôt parler des matérialismes ? Au temps des Lumières, la notion ne recouvre pas une doctrine unifiée. Usant des canaux de diffusion des écrits clandestins, les matérialistes (re)composent à leur guise sources antiques et modernes. Une diversité dont témoignent les supports dans lesquels se diffuse cette “affreuse doctrine” : traités philosophiques, bien sûr, mais aussi fictions libertines, dialogues, poèmes didactiques, gravures… S’ils sont souvent ouvertement subversifs, les écrits matérialistes savent également revêtir les atours d’une orthodoxie feinte pour mieux en saper les fondements. Réunissant philosophes et spécialistes de la littérature, ce volume contribue à affiner les enjeux d’une pensée protéiforme qui a accompagné, en s’en nourrissant, le déclin des grandes charpentes métaphysiques. »
– Adrien Paschoud et Barbara Selmeci Castioni : « Le matérialisme au xviiie siècle en France : enjeux et perspectives ».
403– Amplitudes du matérialisme. Franck Salaün : « Suffit-il d’être matérialiste pour être démocrate ? » ; Paolo Quintili : « De l’Angleterre à la France. Circulation des idées matérialistes au xviiie siècle ».
– Institutions et stratégies d’écriture. Maria Susana Seguin : « Des idées matérialistes dans le discours officiel sur les sciences : Fontenelle à l’Académie royale des sciences » ; Adrien Paschoud : « Matérialisme et exégèse biblique dans le Telliamed (1748) de Benoît de Maillet » ; Bénédicte Prot : « “La Vérité est le remède des maux du genre humain” : arts d’écrire, de découvrir et de guérir dans l’Essai sur les préjugés du baron d’Holbach ».
– Enjeux du matérialisme diderotien. Caroline Warman : « Comment écrire le vécu ? Diderot et le problème matérialiste de l’abstraction » ; Caroline Jacot Grapa : « Un matérialisme clivé. Autour de Sénèque (Diderot et La Mettrie) ».
– Matérialisme, Littérature, Image. Colas Duflo : « Les romans clandestins sont-ils matérialistes ? » ; Barbara Selmeci Castioni : « En quête d’une imagerie matérialiste au cœur des Lumières : le cas des Bijoux indiscrets de Diderot » ; Timothée Léchot : « Un ange dans les rouages : Jacques Delille et le matérialisme ».
– Résumés/Zusammenfassungen.
Paschoud (Adrien), « Matérialisme et exégèse biblique dans le Telliamed (1748) de Benoît de Maillet », dans idem (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle (ci-dessus), p. 71-86.
« Aux côtés d’une lutte terme à terme contre la physico-théologie, somme toute attendue, Maillet puise dans la doxa chrétienne pour en extraire des effets matérialistes, lorsque le personnage de Telliamed se fait exégète et traducteur de la Génèse. Sa démarche s’apparente en cela à un véritable hold-up herméneutique qui nous invitera à nuancer les lignes de partage habituellement admises entre norme religieuse et pensée clandestine. »
Peretti (François-Xavier de), « L’Entretien d’un philosophe chrétien et d’un philosophe chinois de Malebranche : témoignage philosophique d’une rencontre manquée », Dix-huitième siècle, 50, p. 389-412.
Malebranche publie cet Entretien en 1708 « dans le contexte tendu des derniers soubresauts de la célèbre querelle des rites chinois relative à la question de l’acculturation du christianisme. La publication de l’Entretien ouvre une polémique avec les Jésuites des Mémoires de Trévoux sur fond d’accusation de spinozisme dont Malebranche entend se démarquer ». Cependant ce texte « qui se présente en apparence comme un dialogue entre deux traditions de pensées demeure captif de controverses doctrinales et de prismes interprétatifs occidentaux et constitue moins une ouverture à la pensée chinoise qu’un traité apologétique à la gloire de Dieu et de la métaphysique malebranchiste […]. »
404Pink (Gillian), Voltaire à l’ouvrage. Une étude de ses traces de lecture et de ses notes marginales, Paris, CNRS Éditions, coll. « Textes et manuscrits », avril 2018, 270 p.
« C’est dans l’intimité de sa bibliothèque, vendue après sa mort à Catherine II et conservée à la Bibliothèque nationale de Russie, une bibliothèque gigantesque de 3867 titres et de plus de 7 000 volumes que nous introduit cet ouvrage.
Voltaire a écrit en marge de ses livres pendant plus de cinquante ans, de la veille de son départ en Angleterre en 1726 jusqu’à sa mort en 1778. Entre génétique textuelle, histoire du livre, histoire littéraire et étude littéraire, cet ouvrage montre comment Voltaire se servait de ses livres et des différentes sortes de notes qu’il avait l’habitude d’y laisser.
Espaces blancs portant des annotations mordantes, signes non verbaux comme les nombres ou des barres, signets marquant les opérations de reliure et commentaires développés de lectures nous découvrent comment Voltaire travaillait, réagissait aux ouvrages de ses confrères et pensait. »
Voir ici-même le compte rendu de G. Artigas-Menant dans la section ad hoc.
Prot (Bénédicte), « “La vérité est le remède des maux du genre humain” : arts d’écrire, de découvrir et de guérir dans l’Essai sur les préjugés du baron d’Holbach », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 87-100.
Dans l’Essai sur les préjugés, la Vérité est thérapeutique et ce motif n’est pas qu’une image : les préjugés religieux produisent des maux non seulement moraux, mais aussi physiques. En cela, d’Holbach semble bien s’inscrire dans le prolongement de La Médecine de l’esprit d’Antoine Le Camus, où est affirmée l’union et l’influence réciproque de l’esprit sur le corps. Guérir les esprits en proie aux préjugés impliquera donc que l’on « expose la vérité du corps et en révèle les mouvements internes et cachés. »
Puisais (Éric), Dom Deschamps. L’Autre face des Lumières, Paris, L’Harmattan, coll. « Rationalismes », 2018. 214 p.
« Ce livre [un recueil d’articles parus entre 2000 et 2010] cherche d’abord à saisir la pensée de Dom Deschamps dans son contexte historique et dans ses rapports, parfois complexes, à ses contemporains les plus illustres (Diderot, Voltaire, Rousseau, etc.) puis à présenter quelques-uns des éléments clés du système lui-même avant de questionner le destin de l’œuvre. Dom Deschamps nous invite à un voyage inédit dans la pensée des Lumières françaises. Il nous permet d’orienter notre regard sur cette face cachée et de découvrir une métaphysique matérialiste inédite dans l’histoire de la philosophie. »
405Avertissement. Éléments de situation historique (Les d’Argenson au xviiie siècle. Écriture philosophique et clandestinité au xviiie siècle : Dom Deschamps). La doctrine (La métaphysique critique de la métaphysique. Les Lettres sur l’esprit du siècle. La double hérésie. Métaphysique et révolution). Est-il… ? (Dom Deschamps utopiste ? Dom Deschamps matérialiste ? Matérialisme et dialectique. L’apôtre du matérialisme. Matérialiste malgré lui ? Stratigraphie. Derrière le voile. L’art d’écrire. Comment un moine peut-il être athée ?). Dom Deschamps et… (Deschamps entre Spinoza et Hegel. Dom Deschamps et Voltaire, chronique d’une rencontre impossible. Une archive inexploitée). La réception (Dévoilement et initiation. Le passager clandestin de l’histoire de la philosophie. La face cachée des Lumières. Dans l’ombre des Voyants. Sur la trace de quelques manuscrits clandestins). Index des noms cités.
Quincey (Katherine M.), Animals and Humans. Sensibility and representation, 1650-1820, Oxford, Voltaire Foundation, coll. « Oxford University Studies in the Enlightenment » (2017-4), 2017, 353 p.
« La culture européenne des xviie et xviiie siècles révèle une redéfinition radicale de l’“humanité” et de sa place dans l’environnement, ainsi que d’une nouvelle compréhension des animaux et de leur relation avec l’être humain. En examinant la dynamique des relations homme-animal telle que la décrivent la littérature, l’art, les pratiques agricoles, l’histoire naturelle, la religion et la philosophie de cette période, des spécialiste explorent les racines de nombreuses réflexions actuelles sur la moralité interspécifique et le bien-être animal »
Katherine M. Quinsey : Introduction. Ann A. Huse : « Edmund Waller’s whales : marine mammals and animal heroism in the early Atlantic » ; Lucinda Cole : « Guns, ivory and elephant graveyards : the biopolitics of elephants’ teeth » ; Anita Guerrini : « Animals and natural history in eighteenth-century France » ; Denys Van Renen : « “A hollow Moan” : the contours of the non-human world in James Thomson’s The Seasons » ; James P. Carson : « The great chain of being as an ecological idea » ; Kathryn Ready : « John Aikin, Joseph Addison and two eighteenth-century Eastern tales of remembered metempsychosis » ; Katherine M. Quinsey : « “Little Lives in Air” : animal sentience and sensibility in Pope » ; Rachel Swinkin : « “No, helpless thing” : interspecies intimacy in the poetry of Burns and Barbauld » ; Sarah R. Cohen : « Thomas Gainsborough’s sensible animals » ; Anne Milne : « Animal actors : literary pedigrees and bloodlines in eighteenth-century animal breeding » ; Irene Fizer : « “An egg dropped on the sand” : the natural history of female bastardy from Mark Catesby to Mary Wollstonecraft » ; Barbara K. Seeber : « Animals and the country-house tradition in Mary Leapor’s “Crumble Hall” and Jane Austen’s Mansfield Park ».
– Epilogue. Summaries. Biographies of contributors. Bibliography. Index.
406Quintili (Paolo), « De l’Angleterre à la France. Circulation des idées matérialistes au xviiie siècle », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 31-47.
« Avec l’affirmation du terme “matérialiste” à la fin du xviie siècle, dans le contexte polémique des écrits des philosophes platoniciens de Cambridge, les thèses sur la matérialité de l’âme et sur la sensibilité de la matière contribuent au cours du siècle des Lumières à l’édification d’une nouvelle coneption de la nature humaine, de la morale et de la société. »
Rosellini (Michèle), « La physique sorcière de Cyrano de Bergerac », dans Christophe Martin, avec la collab. De Jean-Christophe Abramovici, Michèle Rosellini et Yannick Séïté (dir.), « Raconter d’autres partages ». Mélanges offerts à Nicole Jacques-Lefèvre, Lyon, ENS Éditions, 2017, p. 95-109.
Roux (Sandrine), L’Empreinte cartésienne. L’interaction psychophysique, débats classiques et contemporains. Préface de Steven Nadler, Paris, Classiques Garnier, coll. « Les Anciens et les Modernes. Études de philosophie », 2018, 437 p.
« En abordant le problème corps-esprit sous l’angle des difficultés engendrées par le cartésianisme, cet ouvrage propose un parcours menant de Descartes à la philosophie de l’esprit contemporaine, ainsi qu’une évaluation des positions, sur la base des faits qu’elles permettent ou non d’expliquer. »
– Introduction (La rupture cartésienne. La persistance des problèmes. Vers une confrontation transhistorique. Le matériel de la discussion. Structure de l’ouvrage).
– I. La communication du mouvement. Introduction. (1) Causalité mentale et dualisme cartésien. L’analyse de Kim (Un premier argument causal en faveur du matérialisme. L’objection d’Élisabeth. L’insuffisance des régularités de l’expérience. Le problème du couplage. Insérer les esprits immatériels dans l’espace : une solution ?). (2) Le problème de l’interaction causale chez La Forge et chez Cordemoy (Le problème corps-esprit redéfini. La question de la cause du mouvement. « Comprendre l’interaction : ce que Descartes aurait [pu] dire à Élisabeth » selon La Forge. Un autre problème de « couplage ». La critique de l’idée de cause chez Cordemoy). Conclusion.
II. La connaissance du mouvement. Introduction. (1) Ce qu’il est ou non permis d’ignorer lorsque l’on est cartésien (L’esprit peut-il mouvoir son corps sans le penser ? L’objection d’Arnauld. Ce que l’esprit uni au corps sait et ce qu’il peut ignorer). (2) Les actions insensibles contre les actions sensibles. L’argument de Malebranche (L’impossibilité de faire ce que l’on ne sait pas faire. Le mouvement corporel comme action « non basique ». Un nouveau pilote en son navire. Peut-on vouloir ce que l’on ne sait pas faire ?). (3) 407Nouvelles perspectives sur l’union cartésienne (La logique de la nature versus le « monstre logique ». L’union à la place du « vide ». Le mode d’action de l’âme unie au corps. Retour sur les questions métaphysiques et sur le « problème de Malebranche »). Conclusion.
– III. L’épreuve du mouvement. Introduction. (1) Les sentiments : quelle différence ? (Une réponse cartésienne au problème du couplage. Ce qu’il y a de véritablement « curieux » dans l’union de l’âme et du corps. Du problème cartésien des sensations au « mystère de la conscience »). (2) Le « physicalisme manqué » ou la « revanche de Descartes » (Le « réductionnisme conditionnel » pour sauver la causalité mentale. Expliquer les corrélations. La question du modèle de réduction. Arguments en faveur de la réduction fonctionnelle. Le mental est-il fonctionnalisable ?).
– Conclusion (Un cartésianisme indépassable ? Ce qu’a « manqué » le physicalisme).
– Épilogue. Bibliographie. Index nominum.
Salaün (Franck), « Suffit-il d’être matérialiste pour être démocrate ? », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 15-30.
Le matérialisme implique-t-il un type de pensée politique, en particulier démocratique ? Il existe en fait bien des façons d’être matérialiste : « ainsi les idées politiques de Diderot et celles de d’Holbach, qui sont proches sans être identiques, ne peuvent-elles être confondues avec celles de La Mettrie. »
Samzun (Patrick), Sexe, cosmos et utopie. Diderot, Rétif de la Bretonne et Fourier. Une pensée sexuelle utopique au tournant des Lumières, Paris, PUV/Université Paris 8, Coll. « La Philosophie hors de soi », 2018, 294 p.
« Entre 1759 et 1822, Diderot, Rétif de la Bretonne et Fourier coopèrent à distance et sur le mode de la fiction à la formation d’une utopie sexuelle libérale. À travers leur imagination utopique, qui oscille entre le cosmique, la science-fiction et le merveilleux, se dégage un nouveau mode d’organisation de l’amour, ni étatique ni marchand, à la fois coopératif, ludique et profondément gai. […] Un socialisme sexuel libertaire s’en dégage, qui accompagne les mouvements de la matière et de l’énergie sexuelle depuis les atomes jusqu’aux astres et ouvre à de nouveaux mondes amoureux sans frontières de sexe, de classe, de race ou de nation. »
– Introduction : Pourquoi et comment prendre soin de la pensée sexuelle utopique ?
– Cosmo-fictions amoureuses. Introduction : Textures du cosmos sexuel utopique. I. Diderot cinérographe. II. Métempsycose et sexualités. Conclusion. Le cosmos contre le « lamentable petit secret familialiste »
408– (Re)faire sexuellement société : qu’est-ce qu’une politique sexuelle utopique ? Introduction : Sur la Terre comme au ciel, logiques de la comprescence. III. Critique cosmique du couple exclusif. IV. Mécanique et dynamique des amours plurielles. V. Rétif : le retour du « familisme » et du patriarcat ? Conclusion. Manifeste pour une politique sexuelle « transambulatoire ».
– La gaieté utopique. Enquête sur la composition affective de la coopérative sextuelle DRF. Introduction : Les affects sextuels utopiques. VI. Diderot gaillard. VII. La gaieté procréative de Rétif. VIII. Fourier ou la gaieté baroque. Conclusion. La vection affective des êtres de fiction sexuelle utopique.
– Conclusion : Penser avec les fictions sexuelles utopiques.
– Bibliographie des ouvrages cités.
Schino (Anna Lisa), « Hobbes et les libertins : comparaison sur le rôle politique de la religion », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 239-267.
« Dans les pages de Thomas Hobbes, on retrouve un développement de la réflexion libertine sur la religion : l’origine de la religion est la même (passions, crédulité, croyance en les démons), mais sa fonction est très différente. Hobbes, grand contractualiste, met en crise la conception libertine selon laquelle, sans religion, sont impossibles aussi bien la société humaine que le respect de la loi. Pour les libertins, seule la peur de Dieu peut tenir la bride aux instincts égoïstes ; Hobbes préfère s’en remettre à la raison et à ses calculs, donc au libre consentement des citoyens qui s’engagent à obéir au souverain qui garantit ordre et sécurité. »
Seguin (Maria Susana), « Des idées matérialistes dans le discours officiel sur les sciences : Fontenelle à l’Académie royale des sciences », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 51-69.
Dans les publications de l’Académie des sciences, Fontenelle « diffuse de manière subtile certaines des idées exprimées ailleurs dans les écrits clandestins, et notamment des principes matérialistes fort, tout en tirant profit de l’autorité qu’apporte le statut royal de l’institution. »
Selmeci Castioni (Barbara), « En quête d’une imagerie matérialiste au cœur des Lumières : le cas des Bijoux indiscrets de Diderot », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 147-164.
En quoi Les Bijoux indiscrets servent-il de support à la pensée matérialiste ? Leurs illustrations « dévoilent des processus de traduction visuels de certains 409philosophèmes matérialistes » et attirent l’attention du lecteur sur « la dimension heuristique de l’imagination comme faculté d’un entendement en quête de vérités expérimentales ; la définition d’une matière en mouvement perpétuel dont les êtres vivants ne seraient que des formes transitoires ; la nécessité enfin d’une observation inlassable de la nature. »
Séverac (Pascal), (dir.), Spinoza : entre anthropologie et psychologie. Dossier d’Astérion. Philosophie, histoire des idées, pensée politique, no 19-2, 2018.
En ligne sur https://journals.openedition.org/asterion/
« Quelle est cette nature humaine dont Spinoza parle partout et qu’il ne définit nulle part ? S’il est permis de dessiner les contours d’une anthropologie spinoziste, quelle psychologie peut-on alors en tirer ? Les réflexions que propose ce dossier ont été menées à la fois à l’intérieur de la philosophie spinoziste, comme pistes d’interprétation du système, mais aussi à l’extérieur de cette philosophie, comme questions sur l’usage que l’on peut en faire. Le dossier est constitué de six articles. Celui d’Ursula Renz interroge la pertinence, appliqué à Spinoza, d’un concept qui connaît actuellement un regain d’intérêt, celui de “forme de vie” ou “life-form”, dans sa double dimension biologique et morale. Si l’on peut parler d’anthropologie chez Spinoza, il ne peut s’agir, comme le montre la contribution de Sophie Laveran, que d’une anthropologie à la fois “critique” et “pratique”. L’article de Pascal Sévérac appréhende quant à lui la question de l’anthropologie et de la psychologie chez Spinoza à travers le prisme de l’enfance. Raphaël Chappé confronte l’interprétation de François Zourabichvili avec celle d’Althusser, afin de comprendre comment tous deux posent le problème de la vie psychique, l’un à travers l’idée de forme, l’autre à travers celle de structure. On trouvera enfin dans les articles que proposent Julie Henry et Yves Clot des exemples vivants de ce que peut être un usage actuel de Spinoza, dans le champ de l’anthropologie et dans celui de la psychologie. »
– Dossier. Pascal Sévérac : « Spinoza : entre anthropologie et psychologie » ; Ursula Renz : « Y a-t-il une forme de vie humaine chez Spinoza ? » ; Sophie Laveran : « Les idées de la nature humaine : l’anthropologie critique et pratique de Spinoza » ; Pascal Sévérac : « L’enfant est-il un adulte en plus petit ? Anthropologie et psychologie de l’enfance à partir de Spinoza » ; Raphaël Chappé : « “Physique de la pensée” et “anti-humanisme Théorique” : le “Spinoza” de Zourabichvili face à celui d’Althusser » ; Julie Henry : « Voir la personne derrière la pathologie : enjeux anthropologiques et psychologiques d’une recommandation de bonne pratique » ; Yves Clot : « Travail et psychologie : Vygotski avec Spinoza ».
– Varia. Mate Paksy : « Leibniz et les questions de l’ontologie juridique : la science, les règles et le concept du droit » ; Anatole Lucet : « L’éducation comme création de soi chez Max Stirner » ; Marie Goupy : « Le non-droit, l’état d’exception et l’incertitude juridique comme outils de domination politique. »
410Silvera (Myriam), (dir.), Esilio e persecuzione, Exil et persécution. Sguardi incrociati su ebrei e ugonotti, Canterano, Aracne editrice, 2016, 180 p. (Judaica Collana di storia, letteratura e cultura ebraica, 1).
« Lorsque, après la Révocation de l’Édit de Nantes (1685), les Huguenots fuient la France, ils trouvent, dans certaines des villes où ils sont établis, une présence juive substantielle et organisée. Les deux groupes, juifs et huguenots, ont souffert de la persécution, de l’abus, de la prison et de la mort, certains dans la péninsule ibérique, d’autres en France. Ils partagent une dénonciation commune de la politique d’intolérance dans leur pays d’origine, et avec une préoccupation commune, ils suivent le sort de leurs anciens coreligionnaires demeurés dans les pays de persécution. Les essais publiés ici se veulent une sorte de “voix croisée” : témoignages sur les rencontres entre juifs et huguenots, regards portés sur les juifs sépharades par les catholiques et les protestants, débats entre les uns et les autres. »
Myriam Silvera : « Ebrei e ugonotti : alcuni spunti di riflessione » ; Yosef Kaplan : « Ordine e disciplina all’interno della Sinagoga portoghese di Amsterdam » ; Myriam Yardeni : « Persécution et élection aux alentours de la Révocation » ; Hans Bots : « La question de la tolérance à l’égard des Juifs étudiée à travers les journaux de Hollande » ; Harm den Boer : « La controverse religieuse d’Abraham Gómez Silveira » ; Bertram E. Schwarzbach : « Le martyre comme indicateur d’humanité » ; Dominique Bourel : « Deux minorités pour une modernité : Juifs et Huguenots à Berlin au xviiie siècle » ; Eckart Birnstiel : « L’Église huguenote de Berlin et les Juifs (xviie-xixe siècles) ».Indice dei nomi.
Sordet (Yann), (dir.), Bruxelles et le livre (xvie-xxe s.) / La Médiatisation des révoltes en Europe (xve-xviiie s.) : dossiers, Histoire et civilisation du livre. Revue internationale, vol. XIV, no 120, 2018, 408 p. et 89 ill.
– Bruxelles et le livre (xvie-xxe s.). Renaud Adam et Claude Sorgeloos : « Bruxelles et le livre : regards sur cinq siècles d’histoire (xvie-xxe s.) » ; C. Sorgeloos : « Bruxelles dans l’historiographie du livre » ; R. Adam : « Le commerce du livre à Bruxelles au xvie siècle » ; R. Adam et L. Meunier : « Une enquête de police dans les milieux du livre à Bruxelles en avril 1689 » ; J. Hellemans : « La contrefaçon belge sans frontières : les imprimeurs bruxellois à l’assaut des marchés italiens et québécois » ; B. Liesen : « Sur les traces des imprimeurs bruxellois dans l’entre-deux-guerres : l’imprimerie J. Felix et fils » ; M. Cornaz : « Les Éditions Ysaÿe » ; M. Fincoeur : « Aperçu du champ éditorial bruxellois durant la seconde occupation allemande (1940-1944) ».
– La Médiatisation des révoltes en Europe (xve-xviiie s.). S. Haffemayer : « Introduction » ; J. Haemers : « Diffuser des lettres pour contracter des alliances : la communication des rebelles en Flandre et en Brabant au bas 411Moyen Âge » ; A. Würgler : « Rébellions et gazettes. La médiatisation des guerres des paysans en Autriche (1626) et en Suisse (1653) » ; S. Haffemayer : « “Great Conspiracy” et “Bloody Plot” : la médiatisation de la révolte irlandaise et le déclenchement de la guerre civile anglaise (1641-1642) » ; D. Pimenta Oliveira de Carvalho : « La diplomatie d’une révolte entre information et publication : le cas des ambassades portugaises en France, 1642-1649 » ; D. Boerio : « Texts, publics, and networks of the Neapolitan Revolution of 1647-1648 » ; D. de Boer : « For the True Religion and the Common Cause : Transnational Publicity for the War of the Camisards (1702-1705) » ; M. Barget : « “Rebelle malgré lui” – récits de réconciliation et de réintégration dans les biographies politiques britanniques du xviiie siècle ».
– Études d’histoire du livre. A.E. Tatay et C. Tatai-Balt : « Observations sur le livre illustré imprimé à Bucarest (xvie-xixe s.) » ; G. Proot : « Damned usury, “Cologne”, “1715” : Delusion or bona fide ? Typographical evolution on title pages in the Southern Netherlands in the 18th century and its potential as a means of identification » ; O. Desgranges : « L’affectation des bibliothèques confisquées à Rochefort, ville-arsenal de la Marine (1790-1803) » ; N. Bourguinat : « Le livre à Strasbourg sous le Premier Empire ».
Staquet (Anne), « De l’athée vicieux à l’athée vertueux : genèse du démontage d’une idée toute faite », Libertinage et philosophie à l’époque classique (xvie-xviiie siècle), no 15 (Pierre Bayle et les libertins), p. 59-79.
« C’est Bayle qui le premier, dans ses Pensées diverses sur la comète, a énoncé l’idée de la viabilité d’une société d’athées. Sa proposition s’appuie sur un long raisonnement au sein duquel il réhabilite la possibilité pour les athées d’être vertueux. Or, plusieurs de ses arguments avaient déjà été présentés par d’autres philosophes modernes : Cardan, Vanini, La Mothe le Vayer ou Hobbes. Ceux-ci seront soulignés au sein de l’argumentation de Bayle, afin d’en montrer l’originalité. »
Vidoni (Nicolas), La Police des Lumières. Paris, xviie-xviiie siècle, Paris, Perrin, 2018, 368 p.
« Les forces de police entretiennent une histoire d’amour et de haine avec les populations qu’elles doivent servir et encadrer. Portées aux nues lorsqu’elles protègent, elles sont en partie rejetées lorsqu’elles contraignent. Cette dualité ne date pas d’hier ; pour mieux la comprendre, Nicolas Vidoni propose un essai sur la naissance et le développement des “politiques policières” pratiquées par les agents de la lieutenance de police de Paris entre 1667 et 1789.
Forte de sa “capacité à agir” dans et sur l’espace urbain, la lieutenance a en effet réussi à s’imposer comme un des acteurs majeurs dans la ville d’Ancien Régime. Comprendre la police exercée par cette dernière revient donc à envisager une expérience forgée au contact de la ville capitale et sa population et 412qui remodèle finalement l’État royal. Cette histoire est enfin d’une grande modernité, puisque si les termes ont changé, la question du rapport entre police et population dans la cité reste d’une brûlante actualité. Mais au-delà de cette dimension politique – entendue au sens large – de la lieutenance, c’est bien son action pratique, donc le cœur de son activité, qui est le sujet de ce livre. »
Warman (Caroline), « Comment écrire le vécu ? Diderot et le problème matérialiste de l’abstraction », dans Adrien Paschoud (dir.), Matérialisme(s) en France au xviiie siècle… (voir « Paschoud »), p. 103-113.
Les penseurs matérialistes s’opposent à l’abstraction et entendent par conséquent penser par cas empiriques ou idées incarnées. Mais, répétés ou recyclés, ces cas qui ont partie liée avec la fiction commencent à se rapprocher de l’abstraction. L’auteur examine « comment Diderot reprend, critique et corrige ces tendances à l’abstraction dans son summum matérialiste, les Éléments de physiologie. »
Yardeni (Myriam), Minorités et mentalités religieuses en Europe moderne : l’exemple des huguenots. Études recueillies par Michael Green, Paris, Honoré Champion, 2018, 334 p.
« Durant ces trente dernières années, Myriam Yardeni a étudié l’histoire des huguenots : migrations, intégration, persécutions religieuses, développement intellectuel et relations interreligieuses. Cet ouvrage est un recueil d’études sur les mentalités de minorités religieuses, et plus particulièrement sur celle des huguenots de l’époque moderne (xvie-xviie siècle). »
– Introduction et note biographique.
– « Autour de quelques textes de Calvin sur jérusalem » ; « French calvinist political thought (1534-1715) » ; « La pensée politique de la première historiographie huguenote : Pierre de La Place et Louis Régnier de la planche » ; « Traités monarchomaques et propagation de la Réforme » ; « Eruditio ancilla reformationis : Theodore Beza and the uses of History in the icones » ; « Prédestination, vocation et décisions morales et politiques chez Théodore de Bèze » ; « Éducation, instruction et institution chez les Duplessis-Mornay » ; « Les juifs dans les écrits politiques et théologiques de Philippe Duplessis-Mornay » ;« Protestantisme et utopie en France aux xvie et xviie siècles » ; « Comment se comporter ? Les dilemmes d’une minorité persécutée » ; « L’apologétique protestante des années 1683-1685 » ;« Persécution et élection aux alentours de la Révocation » ; « Le portrait religieux et moral du bon réfugié » ; « The birth of political consciousness among the huguenot refugees and their descendants in england, c. 1685-1750 » ; « Langue française et identité réfugiée. Jean Rou et Pierre Bayle » ; « La vision d’une civilisation protestante dans l’œuvre de Pierre Bayle » ; « French calvinism and judaism » ; 413« Fissures et paradoxes dans la théologie politique d’Élie Merlat (1634-1705) » ;« Huguenot traces and reminiscences in John Toland’s conception of tolerance » ;« Between faith, religion and ethics :the metamorphoses of the huguenot faith in the refuge ».
– Sources des articles. Liste de publications de Myriam Yardeni. Bibliographie. Index nominum. Index locorum.
- Thème CLIL : 3129 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie moderne
- ISBN : 978-2-406-09278-0
- EAN : 9782406092780
- ISSN : 2271-720X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09278-0.p.0357
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 02/06/2019
- Périodicité : Annuelle
- Langue : Français