H. T. Engelhardt, Jr. et la question du relativisme
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Éthique, politique, religions
2014 – 2, n° 5. Scepticismes en politique - Auteur : Goffi (Jean-Yves)
- Pages : 139 à 155
- Revue : Éthique, politique, religions
H. T. Engelhardt, Jr.
et la question du relativisme
C’est une double mise en garde, suivie d’une paire d’excuses qui va introduire mon propos. Les mises en garde, d’abord : il sera question, dans ce qui va suivre, beaucoup plus de relativisme que de scepticisme ; ensuite, il sera question d’éthique bien plus que de politique. C’est là, semble-t-il, une transgression par rapport au thème du recueil et du colloque qui lui a donné naissance, consacrés l’un et l’autre au scepticisme en politique. Cependant, il est possible de faire valoir des excuses. Tout d’abord, relativisme et scepticisme sont souvent confondus. Il ne sera peut-être donc pas inutile de s’interroger sur les formes et sur le sens de cette confusion, les deux concepts (ou les deux notions) pouvant acquérir un surcroît de clarté de ce rapprochement. Par ailleurs, je souhaite également rendre intelligibles les analyses d’un auteur qui pense qu’il est impossible de comprendre les codes éthiques effectifs si on les sépare des communautés où ils prévalent. Pour qui raisonne en ces termes, la dimension politique de l’éthique n’est jamais très éloignée.
Mon propos n’est donc pas si étranger à l’objet du recueil ; simplement, il en traite de façon oblique.
Je procéderai d’abord à un toilettage conceptuel, visant à expliquer ce qu’est le relativisme éthique. Je partirai d’une littérature, pas forcément philosophique1, plutôt hostile au relativisme et qui présente celui-ci de façon caricaturale en l’assimilant à l’absence de courage dans les convictions ou à une forme de nihilisme. Je suggérerai que cette assimilation n’est pas l’effet d’un manque d’attention ou de vigilance : elle vise en réalité une thèse bien précise, qui n’a rien à voir avec le relativisme, mais qui semble redoutable aux conservateurs. J’indiquerai ensuite ce qui me semble être au cœur du relativisme philosophique. J’exposerai enfin l’interprétation du relativisme avancée par le bioéthicien contemporain
américain Hugo Tristram Engelhardt, Jr. et ferai apparaître, en conclusion, ses dimensions conservatrices et, indissociablement, progressistes, ce qui revient à dire que j’en montrerai la complexité.
Relativisme polémique
Je laisserai de côté les approximations relatives au relativisme relevant de la simple incompétence2 pour m’intéresser à celles qui manifestent au moins une intention ou un projet. Le relativisme a été condamné en ces termes par l’ancien ministre français de l’Intérieur, Claude Guéant, au cours d’un colloque, « Vaincre pour la France », organisé par l’UNI, à Paris le 4 février 2012 :
Contrairement à ce que dit l’idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas3.
De son côté, Benoît XVI, évêque émérite de Rome n’est pas moins critique. Dans un discours prononcé à l’occasion de l’ouverture du Congrès ecclésial diocésain dans la Basilique Saint Jean de Latran (6 juin 2005), on trouve la formule :
Aujourd’hui, un obstacle extrêmement menaçant pour l’œuvre d’éducation est constitué par la présence massive, dans notre société et notre culture, de ce relativisme qui, en ne reconnaissant rien comme définitif, ne laisse comme ultime mesure que son propre moi avec ses désirs, et sous l’apparence de la liberté devient une prison pour chacun, séparant l’un de l’autre et réduisant chacun à se retrouver enfermé dans son propre « Moi4 ».
Ce qui est intéressant dans ces deux citations, c’est qu’elles n’emploient pas le terme « relativisme » (ou sa forme adjective) pour parler de la même chose.
Pour Claude Guéant, qui manifeste ici des prétentions plutôt inattendues en matière de civilisation comparée, le relativisme est une thèse politique, selon laquelle aucune civilisation ne pourrait prétendre être supérieure à une autre. Or, selon lui, il y a des civilisations objectivement supérieures à d’autres ; il s’agit d’une supériorité axiologique et non, par exemple, d’une supériorité économique ou technique. Il aurait précisé son propos en expliquant que les civilisations qui défendent l’humanité, la liberté, l’égalité et la fraternité sont plus avancées que celles où se rencontrent la tyrannie, la minorité des femmes et la haine sociale ou ethnique. Le relativisme apparaît alors comme une sorte de cécité axiologique, rendant celui qui en est victime incapable de discerner les civilisations en fonction de leur valeur et de leurs avancées.
Pour l’ancien Pontife, le relativisme est l’affirmation par l’individu d’une souveraineté totale, ne reconnaissant que l’autorité d’un moi pétri de désirs et justifiant cette prétention d’un définitif : « rien n’est définitif ». L’effet de ce relativisme-là est une insularité radicale de l’ego, incapable de comprendre le sens même d’un engagement collectif. Ce n’est sans doute pas sans intention que l’étudiant en philosophie à l’université de Munich qu’a été Josef Alois Ratzinger fait du relativisme la doctrine selon laquelle c’est le moi qui devient la mesure ultime. En effet, il s’agit pratiquement d’une citation de Stirner : « … on affirmera
maintenant que ce n’est pas l’homme mais le Moi qui est la mesure de toute chose » écrit le jeune hégélien pour présenter de façon concise les conséquences pratiques attachées au renversement de la manière de voir habituelle5.
Ces deux exemples révèlent que le terme « relativisme » est polysémique, c’est-à-dire susceptible de multiples usages. Pour certains, il est synonyme d’éclectisme frileux : le relativisme voit dans les pratiques et les institutions les plus inacceptables le simple indice de la diversité des civilisations. Pour d’autres, il est synonyme de nihilisme : livré au chaos de ses propres pulsions, le relativiste ne va jamais au-delà de l’arbitraire et du caprice, il est incapable de prendre quoi que ce soit au sérieux, à commencer par son propre corps sur lequel il se livre à toutes sortes d’expériences que l’authentique morale réprouve. Bref, le relativisme éthico-politique serait une forme extrême de scepticisme, c’est-à-dire ici d’indifférence à la vérité axiologique ou d’impuissance à la rechercher. Mais il semble que ceux qui avancent ce genre de critiques confondent deux thèses bien différentes, dont l’une seulement présente quelque analogie avec une interprétation du relativisme philosophiquement intéressante.
Il y a d’une part la thèse libérale classique selon laquelle l’individu doit pouvoir agir selon ses propres conceptions du bien et de la vie bonne, quand bien même les choix qu’il opérerait sur cette base lui seraient dommageables. Il y a d’autre part la thèse selon laquelle toutes les perspectives et tous les choix sont équivalents. Il est très vraisemblable qu’en donnant une forme dramatique et spectaculaire à la thèse selon laquelle rien n’est vrai et tout se vaut, généreusement attribuée à des adversaires plus ou moins fictifs, nos autorités visent en réalité la première. Mais la thèse libérale classique n’est en aucune façon une thèse relativiste au sens où elle poserait que tous les choix sont équivalents. Il suffit pour cela de la reconduire à celui qui l’a formulée avec le plus de netteté, à savoir John Stuart Mill. Dans On Liberty (1859), Mill se propose de traiter de la liberté civile ou sociale, par quoi il entend les limites au pouvoir qui peut être légitimement exercé par la société sur l’individu. Il écrit :
La seule fin en vue de laquelle les hommes sont légitimés, individuellement ou collectivement, à interférer avec la liberté d’action de l’un des leurs est l’autoprotection6.
Il suit de ce principe que seules sont légitimes les restrictions à la liberté d’action portant sur des actes qui constituent une menace pour autrui. Bien entendu, ce principe a besoin d’être précisé et nuancé, mais Mill est clair : seul le dommage à autrui (harm to others) justifie qu’on limite par la contrainte la liberté d’action d’un individu (supposé jouir de la plénitude de ses facultés). On ne peut pas s’autoriser pour cela de considérations liées au bien de cet individu ; on ne peut pas non plus faire valoir que ses actes constitueraient une offense pour les autres. Le principal argument avancé par Mill pour défendre ce principe est que « l’humanité gagne plus à supporter que chacun vive comme il lui semble bon qu’à contraindre chacun à vivre comme il semble bon aux autres7 ». C’est, bien sûr, un argument conséquentialiste ; mais il n’a rien de relativiste, pas plus que le principe lui-même qu’il justifie. J. S. Mill a souligné, en effet, quelques lignes auparavant, un point de méthode décisif :
Il convient de dire que je renonce à tout avantage que je pourrai tirer pour mon argumentation de l’idée d’un droit abstrait, indépendant de l’utilité. Je considère l’utilité comme l’ultime recours pour les questions éthiques8.
Bien loin de dire que tous les principes se valent, qu’il est impossible de départager entre les prétentions des uns et des autres et de conclure par un « Tout est égal » désabusé, Mill affirme au contraire qu’il existe un recours ultime en matière d’éthique et qu’il s’agit du principe d’utilité. On peut, bien entendu, contester la pertinence de ce principe, ce que les adversaires de l’utilitarisme n’ont pas manqué de faire ; mais on a du mal à comprendre pourquoi et comment une telle position serait exposée, à tout moment, au relativisme. Il semble bien, par conséquent, que les autorités politiques et religieuses auxquelles il vient d’être fait allusion soient surtout offusquées par un volet du programme libéral
qui les choque tout particulièrement. Mill écrit aussi, en effet : « Sur lui-même, sur son corps et sur son esprit, l’individu est souverain9 ». Cette souveraineté de l’individu réputé capable de se déterminer indépendamment des conseils ou des injonctions d’autrui est difficile à supporter pour ceux qui s’estiment dépositaires d’une autorité supérieure ; c’est donc sans surprise qu’on les voit interpréter l’énoncé : « L’humanité gagne plus à supporter que chacun vive comme il lui semble bon qu’à contraindre chacun à vivre comme il semble bon aux autres » comme s’il signifiait : « Les multiples façons dont les individus mènent leur vie sont équivalentes entre elles et il est impossible de prétendre à la vérité en cette affaire10 ». Si le relativisme n’est pas la thèse selon laquelle l’individu doit être tenu pour souverain dans ses choix, dès lors qu’ils ne causent pas de dommages à autrui, qu’est-il alors ?
Relativisme philosophique
Nous sommes ici devant un paradoxe. D’une part, très peu de philosophes se réclament explicitement du relativisme, surtout du relativisme éthique11. En même temps, on pourrait dire, selon la formule consacrée,
que le relativisme est légion, tant il semble en exister de variantes et de moutures. Je m’explique : si quelqu’un dit que la saveur des aliments n’est pas un absolu mais qu’elle est relative à la stimulation des récepteurs de la langue, il distingue deux choses12, l’objet et le contexte de la relativisation. Déterminer ce qu’est l’objet de la relativisation, c’est répondre à la question : « Qu’est-ce qui est relativisé ? » ; ici, il s’agit de la saveur des aliments. Déterminer ce qu’est le contexte de la relativisation, c’est répondre à la question : « À quoi ce qui est relativisé est-il relatif ? » ; ici, c’est à la stimulation des récepteurs de la langue. S. Haack a proposé un tableau des relativisations à partir des objets et du contexte de leur relativisation13 :
(1) La signification est relative au (a) langage.
(2) La référence est relative aux (b) schèmes conceptuels.
(3) La vérité est relative à la (c) théorie.
(4) L’engagement métaphysique est relatif au (d) paradigme scientifique.
(5) L’ontologie est relative à la (e) version ou à la description ou à la représentation.
(6) La réalité est relative à la (f) culture.
(7) Les valeurs épistémiques sont relatives à la (g) communauté.
(8) Les valeurs morales sont relatives à l’(h) individu.
(9) Les valeurs esthétiques sont relatives aux (i) périodes historiques.
Ainsi, la question de savoir ce qui fait partie d’une action et ce qui fait partie de ses conséquences (question ontologique) est relative à la description que l’on en donne ou à la représentation que l’on s’en fait14. On a reproché à ce tableau d’être trop complexe, dans sa volonté d’exhaustivité, tout en étant inadéquat par son incapacité à saisir la complexité des usages15. Ainsi, la distinction entre langage, théorie et schème conceptuel peut sembler artificielle et certains philosophes, comme Quine, la récuseraient. Symétriquement, les valeurs esthétiques peuvent être considérées comme relatives non seulement aux individus, mais encore aux cultures, aux langages, aux communautés et aux époques historiques. C’est pourquoi N. Baghramian propose de retenir seulement trois familles de relativisme selon qu’il est question des normes cognitives, morales ou esthétiques16. Nous nous intéresserons ici seulement au relativisme éthique. Il trouve probablement son origine dans l’expérience parfois sidérante de la rencontre avec des croyances et des pratiques morales radicalement différentes de celles que l’on tient pour allant de soi. Dans son Enquête (III, 38), Hérodote met en scène des Grecs et des Indiens, les Callaties, à la cour de Darius, l’Empereur de Perse. Par une construction en miroir de l’anecdote, les uns se retrouvent être les Barbares des autres à propos des rituels funéraires pratiqués dans leur pays (les Grecs brûlent les cadavres de leurs parents, les Callaties les mangent : tous sont horrifiés d’apprendre les us et coutumes des autres). Hérodote ne distingue pas clairement entre relativisme éthique et relativisme culturel. Mais la morale qu’il semble tirer de cette anecdote est assez claire : chacun tient plus que tout à ses coutumes. Une autre conséquence en est souvent tirée : nul ne doit juger et, spécialement, déprécier des pratiques morales qui ne sont pas les siennes.
La justification du relativisme en ce sens consiste à alléguer, d’une part la diversité et l’incommensurabilité des codes ou des systèmes moraux ; d’autre part l’impossibilité de départager en termes autres qu’arbitraires les prétentions des uns et des autres à valoir universellement. Mais il existe un autre niveau du relativisme éthique, qui porte cette fois ci sur la sémantique des jugements moraux et sur leur aptitude à la vérité. Ici, un énoncé comme :
(1) Il est moralement condamnable de brûler des cadavres humains
est considéré comme radicalement incomplet et inintelligible. En revanche, si (1) est modifié de la façon suivante :
(2) Pour des Callaties du vie siècle avant J. C., il est moralement condamnable de brûler des cadavres humains,
il devient un énoncé parfaitement respectable : complet, intelligible et vrai de surcroît (à supposer que les Callaties mis en scène par Hérodote soient représentatifs des Callaties de cette époque, ou du moins de la majorité d’entre eux). Un relativiste estime que les jugements moraux complètement décontextualisés, comme l’est (1), ne sont tout simplement pas susceptibles d’être vrais ou faux, leur sens étant indéfini. Mais si on se donne la peine de les mettre en contexte, comme en (2), la situation change du tout au tout.
Ces analyses mettent en évidence une différence cruciale entre le relativiste et le scepticisme moraux. Dans son étude « Moral Skepticism and Justification17 », W. Sinnott-Armstrong distingue diverses sortes de scepticisme. Très classiquement, il estime que le scepticisme moral est une mise en cause des prétentions de la raison en éthique. Le scepticisme pratique met en cause le fait qu’il existe toujours de bonnes raisons d’agir moralement (la question : « Pourquoi être moral ? » n’est donc pas toujours susceptible de recevoir une réponse rationnelle). Une version du scepticisme épistémique met en cause la justification en matière de croyance morale ; une autre version du scepticisme épistémique met en
cause la vérité des croyances morales (On ne peut pas répondre rationnellement aux questions : « Est-on capable de justifier une croyance morale ? » et « Une croyance morale est-elle susceptible d’être vraie ? »). Le scepticisme linguistique, autrement nommé : « non-cognitivisme », met en cause la capacité des énoncés moraux à être vrais ou faux, au motif qu’ils expriment les états mentaux de celui qui les affirme18. Enfin, le scepticisme ontologique dénie l’existence de faits moraux ou de propriétés morales19. Dans la mesure où un relativiste soutient que les jugements moraux sont susceptibles, sous certaines conditions de spécification du contexte, d’être vrais ou faux, le relativisme éthique se distingue donc très nettement du scepticisme éthique. Dans ces conditions, on ne peut pas tenir le relativisme pour la forme radicale du scepticisme : ce sont deux modes différents du rapport à la vérité20.
Relativisme en politique :
l’objection d’Engelhardt
Une position typiquement sceptique consiste donc en l’affirmation selon laquelle on n’est jamais capable de parvenir à justifier une croyance morale substantielle, quelle qu’elle soit ; une position typiquement relativiste consiste en l’affirmation selon laquelle il existe une pluralité de croyances morales substantielles justifiables, mais dont la justification, n’est ni absolue, ni universelle, ni objective. Le relativisme est donc
directement confronté à un problème politique : comment parvenir à faire « coexister » des croyances et des pratiques morales tout aussi (peu) justifiées les unes que les autres ?
Si l’on admet, ce qui semble raisonnable, que les croyances et les pratiques ne flottent pas au-dessus des sociétés mais deviennent effectives dans les communautés qui les mettent en œuvre, on a exactement affaire au problème auquel fait face le philosophe et bioéthicien américain contemporain H. T. Engelhardt, Jr. Né en 1941, c’est un philosophe (Ph. D. de philosophie, 1969) et un docteur en médecine (M. D., 1972). Il est institutionnellement rattaché à la Rice University (Houston, Texas). Son livre majeur : The Foundations of Bioethics, date de 1986. En 1991, Engelhardt s’est converti au christianisme orthodoxe (il était initialement catholique). Pour autant, The Foundations of Biethics de 1986 ne reflète pas du tout, on va le voir, la doctrine officielle de Rome21.
La question posée par Engelhardt est la suivante : dans des sociétés laïques, c’est-à-dire sécularisées et pluralistes, peut-il exister une autorité en morale à laquelle on se référerait pour élaborer les institutions et les pratiques d’une bioéthique générale ? Pour la comprendre, il est important de relever que les sociétés en question sont des sociétés d’après les Lumières, ou mieux, d’après l’échec des Lumières. C’est A. McIntyre22 qui semble avoir guidé Engelhardt dans cette affaire. McIntyre estime que l’échec des Lumières en éthique est d’abord l’échec de la tentative pour justifier de façon rationnelle la morale (morality) comprise comme une sphère où des règles de conduite qui ne sont ni théologiques, ni juridiques, ni esthétiques, se voient reconnaître un espace culturel propre23 . En quoi l’échec de cette tentative consiste-t-il exactement ? Selon MacIntyre, les philosophes de l’Antiquité et du Moyen-Âge ont une conception de la nature humaine telle qu’il est possible de distinguer
nettement entre l’être humain comme il est en fait et l’être humain comme il pourrait être s’il développait son télos. Dans ces conditions, l’éthique est « la science qui met les hommes en état de comprendre comment ils opèrent la transition du premier état au second24 ». Mais la sécularisation de la théologie et le rejet de l’aristotélisme ont conduit à l’abandon de la notion de l’homme tel qu’il pourrait être s’il réalisait son télos. Restent donc aux penseurs des Lumières un ensemble d’injonctions et de préceptes d’une part, et la notion de l’homme tel qu’il est d’autre part. Cela revient à dire que la relation est perdue entre les préceptes de la morale et le fait de la nature humaine : en réalité, la situation des penseurs des Lumières est inextricable parce qu’ils n’ont jamais été capables de reconstituer, sur des bases simplement rationnelles, la dimension normative du concept de nature humaine. Transposée en termes sociaux et politiques, cette situation malheureuse s’énonce ainsi : est-il possible dans les sociétés laïques et pluralistes de déterminer une perspective morale qui soit correcte et que des individus ou des institutions puissent légitimement mettre en œuvre ? Une autre façon de poser cette question consiste à demander ce qui peut légitimer l’autorité morale d’une instance susceptible, parmi ses multiples attributions, de mettre en œuvre une politique de Santé. La difficulté majeure consiste en ceci qu’il s’agit de sociétés où l’on va rencontrer de multiples conceptions de la vie bonne qu’il est, prima facie, impossible de départager. Il en est ainsi parce que les systèmes éthiques renvoient à des visions du monde qui restent incommensurables, en l’absence d’une conception unique de la nature humaine permettant d’arbitrer entre les prétentions diverses en provenance de ces conceptions du monde.
Voici comment notre auteur va tenter de résoudre la difficulté25 : sans mettre en cause l’idée que l’éthique relève, en un sens, du for intérieur, il l’envisage également comme une entreprise permettant de résoudre les différents ou les controverses26. Après avoir examiné et rejeté différentes possibilités (résolution par la force, conversion au point de vue de l’autre, administration de la preuve par une démonstration concluante), il conclut
que le seul mode de résolution des conflits éthiques recevable dans une société laïque et pluraliste dont les membres veulent coexister de façon pacifique est l’adoption de procédures admises par toutes les parties, à la suite de négociations excluant le recours à la violence. Quelles sont les conditions de possibilité d’une telle résolution ? La principale est le respect de la liberté de ceux qui sont parties prenantes dans une telle entreprise. L’originalité de sa thèse consiste en ceci que « le respect de la liberté des individus est une contrainte pesant sur la politique publique à titre de condition de possibilité de l’autorité morale (mais pas nécessairement une valeur que l’on recherche, en ce sens que les individus peuvent, sans incohérence, décider librement de ne pas donner beaucoup de valeur à la liberté)27 ». Il y a, évidemment, quelque chose de kantien à poser la question transcendantale : « Quelles sont les conditions de possibilité de la résolution pacifique des conflits en éthique ? ». Mais Engelhardt cesse d’être kantien lorsqu’il parle de l’autonomie : dans une perspective kantienne, l’agent n’est pas libre de choisir d’agir de telle façon qu’il n’affirme pas, en même temps, l’autonomie comme une valeur et, en réalité, comme la valeur qui lui est inhérente et constitue sa dignité. Chez Engelhardt on peut penser l’autonomie sans lui donner de contenu déterminé ; comme l’autonomie n’est pas une valeur qui doit être constamment réaffirmée mais une simple contrainte pesant sur les individus et sur les institutions, sitôt que ceux-ci empiètent sur la liberté des autres contre leur consentement ou même seulement en l’absence de leur consentement, ils perdent toute légitimité morale, quelle que soit par ailleurs la nature des motifs (altruistes, charitables, chevaleresques) qui les poussent à agir de la sorte. Ce n’est, bien entendu, pas du relativisme : il existe, en effet, un point de vue à partir duquel il est possible d’évaluer le caractère immoral d’un acte, d’une pratique ou d’une institution. Il est vrai qu’il s’agit d’un principe ultra-minimal, en deçà duquel on ne peut même plus parler d’éthique. Mais dès lors qu’on a affaire à l’usage de la violence contre un innocent qui n’y a pas consenti, cet usage doit être absolument, objectivement et universellement tenu pour digne d’être condamné.
Conclusion
Pour Engelhardt, si l’on admet que les controverses éthiques peuvent se régler pacifiquement, on doit admettre le principe d’autonomie28 selon lequel la liberté des personnes doit être respectée. C’est lui qui assure la cohérence minimale de la morale comme pratique ; il est toujours possible de s’en affranchir. Mais qui s’en affranchit n’institue pas une nouvelle pratique, aussi recevable et estimable que n’importe quelle autre, comme serait forcé d’admettre un relativiste : il se place en dehors de la sphère de la moralité et, concrètement, s’expose à des représailles légitimes de la part de ceux qui s’inscrivent dans cette sphère. En revanche, tout ce qui va au-delà de ce principe dépend d’une conception particulière de la vie bonne et ne peut prévaloir que dans une communauté qui a adopté cette conception : c’est ce qu’exprime le principe de « bienfaisance » (principle of beneficence) qui n’est plus un principe pour des étrangers moraux, mais pour des proches et vise à donner un contenu concret à la vie morale. Contrairement à ce que des lecteurs superficiels d’Engelhardt comprennent parfois, les deux principes sont complémentaires plutôt qu’incompatibles, même si cette complémentarité est difficile et, potentiellement, conflictuelle. Engelhardt indique de façon particulièrement nette en quoi sa position n’est pas relativiste :
Mettre les personnes au centre de la vie morale n’est pas la même chose qu’y mettre une personne, ou un groupe déterminé de personnes. C’est ceci et non cela qui constitue un authentique relativisme moral29.
L’éthique d’Engelhardt est une éthique des personnes, définies comme les agents moraux susceptibles des performances minimales suivantes : accès à la conscience de soi, mise en œuvre de la raison, capacité d’attacher de l’importance à l’éloge et au blâme. On ne peut parler de personne au sens strict que là où ces capacités sont effectivement mobilisées, Engelhardt défend donc une conception personniste plutôt que personnaliste30. Il
attribue aux personnes, dans la plus pure tradition libérale, le maximum de liberté compatible avec le respect de la liberté des autres personnes, c’est-à-dire, en réalité, la souveraineté dont parlait Mill. Mais il se trouve à la peine pour élaborer une éthique envers les êtres, humains ou autres, qui ne sont pas, ou plus, ou pas encore, des personnes.
Laissons maintenant de côté Engelhardt. Il semble que, comme toujours et nonobstant la popularité dont jouissent les thèses lévinassiennes qui semblent affirmer le contraire, les questions éthiques ne soient pas premières. Elles sont, à tout le moins, précédées par des questions conceptuelles. J’ai relevé, en introduisant cette réflexion, certaines confusions, les unes grossières (entre conséquentialisme et relativisme) les autres plus subtiles (entre éclectisme ou nihilisme et relativisme). Elles semblent découler du fait que l’on raisonne en termes de tout ou rien : ou bien les valeurs et les normes s’imposent d’elles-mêmes, absolument ou universellement, où bien elles sont laissées au caprice et à l’arbitraire. Mais il semble qu’une telle opposition soit bien pataude et peu apte à saisir la complexité des situations effectives. En amont, est donc requise une entreprise de clarification conceptuelle.
Jean-Yves Goffi
Université Grenoble Alpes, Philosophie, langages & cognition / EA 3699
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1 Allocutions politiques, discours pontificaux, journalisme d’opinion, etc.
2 Dans Choisir sa mort. Les débats sur l’euthanasie, Paris, PUF, « Partage du savoir », 2012, p. 118, E. Fourneret semble considérer que le relativisme est une conséquence structurelle du conséquentialisme. Mais c’est une affirmation qui semble très difficile à justifier et même à comprendre. Il est vrai que certains partisans du conséquentialisme ont récemment proposé une version relative à l’agent de cette théorie normative. Mais une théorie est neutre quant à l’agent lorsqu’elle attribue le même but (ou le même ensemble de buts) à tout agent moral ; elle est relative à l’agent dans le cas contraire. C’est, évidemment, tout à fait autre chose que du relativisme ! Lorsque Kant, qui n’est pas franchement connu pour ses sympathies relativistes, formule l’impératif : « Tu dois tenir tes promesses », il opte pour une théorie relative à l’agent. Puisque les promesses de l’un ne sont pas les promesses de l’autre, chaque agent moral a des buts différents. En revanche, le commandement : « Maximise le solde net du plaisir sur les peines » est bien neutre quant à l’agent, puisqu’il ne contient pas de termes indexiques, renvoyant à quelqu’un en particulier. Bien entendu, les moyens par lesquels ce but sera réalisé sont une fonction de la position et des capacités de chaque agent ; mais si c’est du relativisme, c’est en un sens tout à fait inoffensif. C’est la platitude selon laquelle le caractère correct ou incorrect d’une action donnée dépend de faits relatifs aux circonstances dans lesquelles se trouve placé l’agent (il est mal pour un champion de natation qui assiste par hasard à une noyade de ne pas intervenir ; mais ce n’est pas condamnable pour un infirme en fauteuil roulant). Sur la tentative de donner un tour relatif à l’agent au conséquentialisme, traditionnellement neutre quant à l’agent, l’article le plus connu est celui de D. Portmore, « Can an Act-Consequentialist Theory be Agent-Relative ? », in American Philosophical Quaterly, 2001, 38 (4) : 363-377.
3 http://www.lanouvelletribune.info/index.php/actualite/etranger/10027--toutes-les-civilisations-ne-se-valent-pas--cest-gueant-qui-le-dit. Consulté le 04 septembre 2013.
4 http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2005/june/documents/hf_ben-xvi_spe_20050606_convegno-famiglia_fr.html. Consulté le 04 septembre 2013.
5 M. Stirner, Œuvres complètes. L’unique et sa propriété et autres écrits, trad. fr P. Gallissaire et A. Sauge, Lausanne, L’Âge d’homme, 1972, p. 384. Le renversement dont il est question consiste en ceci qu’est censée être adoptée une pensée absolument sans présupposition.
6 J. S. Mill, On Liberty (edited by David Spitz), New York / Londres, W. W. Norton & Company, 1975, p. 10. Je traduis.
7 Ibid., p. 14.
8 Ibid., p. 12.
9 Ibid., p. 11.
10 Il va de soi qu’il s’agit ici du libéralisme politique, la question du libéralisme économique relevant de considérations différentes. Les réserves de l’Église Catholique Romaine envers le libéralisme économique sont exprimées, comme chacun sait, dans les Encycliques Rerum Novarum (15 mai 1891) et Quadragesimo Anno (15 mai 1931). Mais elles s’inscrivent dans une longue tradition de contestation de la modernité libérale, inaugurée par l’Encyclique Mirari Vos (15 août 1832) de Grégoire XVI. On pense, notamment aux Encycliques Qui Pluribus (9 septemebre 1846) et Nostis et Nobiscum (8 décembre 1849) de Pie IX. À un degré moins élevé de la hiérarchie catholique, les textes pullulent ; on pense notamment à l’opuscule de Don Felix Sardá y Salvany, El liberalismo es pecado, écrit en 1884 et encore couramment réédité. Ce prêtre catalan fait du libéralisme une nouvelle hérésie dont les principes sont : la souveraineté absolue entièrement indépendante de Dieu et de son autorité (la absoluta soberananía con entera independencia de Dios y de su autoridad), El Liberalismo es Pecado, Barcelona, Libreria y Tipografia Catolica, 1887, p. 14) de l’individu, des sociétés et des peuples ainsi que la liberté sans aucun frein, ni en politique, ni en morale, ni en religion. Don Felix Sardá y Salvany a parfaitement identifié ce qui fait la différence entre ses amis et ses ennemis : la localisation de la souveraineté.
11 On mentionnera deux exceptions notables : G. Harman, The Nature of Morality, New York, Oxford University Press, 1977, « Moral relativism », in Gilbert Harman & Judith Jarvis Thomson, Moral Relativism and Moral Objectivity, Cambridge (MA.) – Oxford (UK), Blackwell, 1996, p. 3-64 et D. B. Wong, Moral Relativity, Berkeley-Los Angeles-Londres, University of California Press, 1984. Ces deux auteurs défendent une forme sophistiquée de relativisme. G. Harman estime que le relativisme est le mieux à même d’expliquer la nature et la portée de la diversité des morales (« Moral relativism », op. cit., p. 8) ; D. B. Wong estime qu’une certaine forme de relativisme est le mieux à même de réconcilier les éléments de l’expérience suggérant l’objectivité de la morale et ceux qui suggèrent sa subjectivité (Moral Relativity, p. 5). Il est intéressant de noter que D. Wong qui, comme son nom l’indique, est d’origine chinoise, organise la diversité des morales autour de deux pôles : celui des éthiques centrées sur les droits, essentiellement modernes et occidentales, et celui des éthiques centrées sur les vertus, essentiellement anciennes ou orientales, confucéenne en particulier.
12 Dans ce qui suit, je m’inspire des analyses de M. Baghramian dans Relativism, Londres-New York, Routledge, 2004, p. 5 sq. Il s’agit d’une superbe introduction à la question du relativisme ; on doit aussi mentionner d’ A. Coliva, l’excellent I modi del relativismo, Rome-Bari, Laterza, 2009.
13 S. Haack, « Reflections on Relativism : From Momentous Tautology to Seductive Contradiction » in J. E. Tomberlin (ed.), Philosophical Perspectives, 10, Metaphysics, 1996, p. 297-315. En réalité, S. Haack laisse (9) sans corrélat du côté de son contexte de relativisation : c’est M. Baghramian qui a créé une rubrique (i), « périodes historiques ». Mais cette création est plausible. À ma connaissance, elle n’a jamais été démentie par l’intéressée.
14 Cette question d’ontologie a d’importantes retombées éthiques, comme on voit avec le débat sur le principe (ou la règle) des actions à double effet : plus on intègre de conséquences prévisibles de l’action dans la description de celle-ci, moins le principe (ou la règle) est plausible.
15 M. Baghramian, op. cit., p. 6.
16 En fait, elle subdivise le relativisme cognitif selon qu’il porte sur les normes du vrai, de la rationalité, du raisonnement, de la justification, de l’ontologie, des concepts, des théories, etc.
17 « Moral Skepticism and Justification » in Moral Knowledge. New Readings in Moral Epistemology, W. Sinnott-Armstrong & M. Timmons (eds), New York-Oxford, Oxford University Press, 1996, p. 3-48.
18 Pour une interprétation différente de l’expressivisme, voir Mark Schroeder, Noncognitivism in Ethics, Londres & New York, Routledge, 2010, en particulier le chap. iv.
19 Si l’on adopte une telle position, il s’ensuit que tous les énoncés qui prétendent « dire » ces propriétés morales (en les décrivant, par exemple) sont faux. C’est la fameuse théorie de l’erreur de J. L. Mackie, Ethics. Inventing Right and Wrong, Harmonsdworth, Penguin Books, 1977. Le scepticisme linguistique et le scepticisme ontologique débouchent, normalement, sur une forme de scepticisme épistémique.
20 En revanche, on peut remarquer que, classiquement, le mode du relatif est un moment de la démarche sceptique, comme dans les Esquisses pyrhonniennes ; J. L. Mackie, dont il vient d’être question, écrit, par exemple : « Les considérations qui vont dans le sens du scepticisme moral sont : premièrement, la relativité (relativity) ou la variabilité de certains points de départ essentiels de la pensée morale et ce qui apparaît comme leur dépendance par rapport aux façons de vivre effectives » (Ethics. Inventing Right and Wrong, op. cit., p. 49, je traduis).
21 The Foundations of Bioethics, New York-Oxford, OUP, 1986. La seconde édition de The Foundations of Biethics se fait l’écho du changement que je viens d’évoquer ; cependant, sa perspective est encore celle d’une bioéthique laïque. En revanche, The Foundations of Christian Bioethics, Lisse, Swets & Zeitlinger, 2000, s’attache à mettre en évidence les fondements d’une bioéthique chrétienne et à en préciser les frontières dans une culture postchrétienne.
22 Dont l’ouvrage After Virtue est cité à deux reprises avec éloge dans The Fondations of Bioethics, op. cit., p. 3-4 et surtout p. 63.
23 After Virtue. A Study in Moral Philosophy, Londres, Duckworth, 1981(2 nd ed.), p. 39. Engelhardt cite MacIntyre d’après le texte de la première édition ; il ne reprend d’ailleurs pas ce passage.
24 After Virtue, op. cit., p. 52. Je traduis.
25 Dont il dit tout de même qu’elle conduit au bord du nihilisme.
26 À peu près à l’époque où il a publié The Foundations of Bioethics, il a co-dirigé et préfacé Scientific Controversies. Case Studies in the Resolution and Closures of Disputes in Science and Technology, H. T. Engelhardt, Jr. & Arthur L. Caplan (eds), New York-Cambridge, CUP, 1987.
27 The Foundations of Bioethics, op. cit., p. 45.
28 Rebaptisé « principe de permission » dans la seconde édition de The Foundations of Bioethics.
29 Foundations of Bioethics, op. cit., p. 386.
30 À propos de la différence entre les deux interprétations de la personne, je me permets de renvoyer à mon étude, « Personne, personnalisme, personnisme » in R. Mache (dir.) La personne dans les sociétés techniques, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 13-41.
- Thème CLIL : 3133 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie contemporaine
- ISBN : 978-2-8124-3358-0
- EAN : 9782812433580
- ISSN : 2271-7234
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3358-0.p.0139
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 29/11/2014
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : H. T. Engelhardt Jr., relativisme, scepticisme, éthique minimale, personne