Pour une approche « paradoxale » de l’entreprise familiale
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Entreprise & Société
2020 – 1, n° 7. varia - Auteurs : Thelisson (Anne-Sophie), Meier (Olivier)
- Pages : 67 à 88
- Revue : Entreprise & Société
Pour une approche « paradoxale »
de l’entreprise familiale
Anne-Sophie Thelisson
ESDES Business School – UCLY
Olivier Meier
Paris Est University
INTRODUCTION
Des études soulignent que les entreprises familiales sont intrinsèquement paradoxales (Moores et Barrett, 2010 ; Ingram et al., 2016). En ce sens, les entreprises familiales engendrent des tensions paradoxales dans la mesure où elles impliquent deux dimensions simultanées, voire contradictoires : (1), les liens familiaux (Eddleston et al., 2012) et (2), la recherche du profit (Irava et Moores, 2010). Des auteurs décrivent les entreprises familiales comme des organisations impliquant deux logiques distinctes mais interdépendantes : (1) une logique familiale – i.e. « les liens familiaux » (Eddleston et al., 2012) – et (2) une logique « entrepreneuriale » (Meier et Schier, 2016 ; Tabor et al., 2018) – i.e. la recherche du profit (Irava et Moores, 2010).
Ces logiques, parfois contraires, sont mises en exergue lors d’un processus important dans le cycle des entreprises familiales : la succession intergénérationnelle (Gundolf et al., 2013 ; Meier et Schier, 2016). Dans la plupart des entreprises familiales, les fondateurs essaient de combiner l’optimisation de performance, tout en maintenant le contrôle 68de la famille à travers la succession intergénérationnelle (Schulze et al., 2003 ; Tàpies et Ward, 2008). Néanmoins, ce processus est complexe car il comprend de possibles interdépendances entre les deux logiques (familiale et entrepreneuriale) liées à la répartition du capital et actionnariat entre successeurs (non)familiaux (création de valeur financière pour les actionnaires, politique de dividendes et de réduction du capital, politique d’investissement, prise de risque et horizon temporel des investissements, etc.).
Aussi, seule une lecture intégrant ces éléments contraires est en mesure de questionner la transmission des entreprises familiales comme contexte porteur de dynamiques endogènes. Le prisme des paradoxes (Perret et Josserand, 2003 ; Smith et Lewis, 2011) permet de saisir les conflits d’intérêts engendrés par des dynamiques distinctes. La théorie des paradoxes offre en effet un cadre pour décrypter les tensions inhérentes aux organisations, dont certaines sont activées ou mises en exergue lors de changements organisationnels (Schad et al., 2016). Par conséquent, mobiliser ce prisme de lecture permet de rendre intelligible les contradictions simultanées liés à la nature même des entreprises familiales. Cette grille peut s’avérer particulièrement utile, lors de situations complexes, à l’instar des questions de transmission, qu’elle soit de nature intergénérationnelle ou externe à l’entreprise familiale.
Dès lors, notre question de recherche peut être formulée de la manière suivante : En quoi l’approche paradoxale permet-elle d’éclairer les logiques familiale et entrepreneuriale liées à la transmission des entreprises familiales ?
L’article prend appui sur les travaux de recherche en Family Business et sur une recherche menée auprès de sept entreprises familiales non cotées du secteur de l’industrie, du conseil et des services, de taille inférieure à 180 employés. Ces entreprises familiales disposent d’un chiffre d’affaires inférieur à 24 millions d’euros en 2016, et comptent entre 15 et 150 personnes. 21 entretiens ont été conduits sur une durée d’un an et demi. Chaque entretien a duré en moyenne deux heures en tête à tête, par un des deux auteurs de l’étude. Les récits analysés portent sur des situations de transmission volontaire, où l’entreprise familiale a été reprise par un membre de la famille ou des tiers sans lien de parenté avec le cédant. Les travaux sur les paradoxes sont également été mobilisés à des fins d’analyse et de compréhension des phénomènes observés.
69Nos résultats soulignent les difficultés et enjeux majeurs rencontrés lors du processus crucial de transmission des entreprises familiales. Nous identifions deux catégories de paradoxe au cœur des dynamiques endogènes, caractérisant les phénomènes d’appartenance, de performance et d’organisation impactés par ces paradoxes. De façon plus générale, notre étude illustre dans quelles mesures les entreprises familiales, de par leur interface entre différentes logiques, sont un cadre où s’activent différentes tensions paradoxales qu’il convient de bien identifier et de gérer pour atteindre ses objectifs de développement.
Dans la première section, nous développons notre cadre théorique sur le contexte des entreprises familiales comme interface des logiques familiale et entrepreneuriale, ainsi que sur les tensions paradoxales engendrées par la transmission intergénérationnelle, ou externe à l’entreprise familiale. Dans la deuxième section, nous décrivons la méthodologie qualitative de cette recherche. Dans une troisième section, nous présentons et discutons nos résultats.
1. Les entreprises familiales,
une interface paradoxale
entre logiques familiale et entrepreneuriale
Les entreprises familiales sont définies par les liens familiaux qui unissent leurs parties prenantes (Meglio et King, 2019). La structure même de ces organisations affecte généralement le jugement des individus en matière de gestion, leurs motivations ainsi que leurs décisions concernant la mobilisation de ressources (Meglio et King, 2019). De nombreuses études soulignent le contexte des entreprises familiales comme combinant deux logiques : (1), une logique familiale, où l’attention et l’intérêt des parties prenantes privilégient « les liens familiaux » (Eddleston et al., 2012) ; (2), une logique « entrepreneuriale » (Meier et Schier, 2016 ; Tabor et al., 2018) où la recherche du profit est au cœur de l’organisation (Irava et Moores, 2010). Néanmoins, une des deux logiques peut dominer l’autre en fonction de données 70internes aux structures : influence des actionnaires (non) familiaux, etc. Ces logiques, parfois contraires, sont mises en exergue lors d’un processus important dans le cycle des entreprises familiales : le passage de l’entreprise entre générations (Gundolf et al., 2013 ; Meier et Schier, 2016).
En effet, les entreprises familiales génèrent des tensions liées aux transitions générationnelles (Ingram et al., 2016), comme par exemple, celles relatives aux questions d’autonomie et de contrôle entre le fondateur et le successeur (De Massis et al., 2008), ainsi que celles concernant la volonté des acteurs de changer ou au contraire de résister (Handler et Kram, 1988). Plus généralement, les entreprises familiales doivent faire face à des tensions liées aux changements (Ingram et al., 2016), car la nature même des entreprises familiales peut avoir une incidence sur le processus de prise de décision et le management des équipes (Ward et al., 1997).
Les entreprises familiales doivent aussi faire face à des paradoxes liés aux questions d’innovation, car la gouvernance de ces organisations influence leur volonté de favoriser les processus de changement et de création (Chrisman et al., 2015). De même, le modèle actionnarial composé d’actionnaires familiaux et non familiaux peut engendrer des conflits d’intérêts (Meier et Schier, 2016) et accentuer la délicate question des intérêts individuels et collectifs (Berent-Braun et Uhlaner, 2012), et de la gestion des projets à court et à long terme (Zahra et al., 2008). En effet, l’orientation à long terme et la recherche de stabilité sont généralement attribuées aux caractéristiques des entreprises familiales (pérennité du système familial, relations de confiance), alors que l’orientation à court terme et la recherche d’adaptation externe sont liées à l’entreprise en tant que telle (Zellweger et al., 2012).
De par leur nature et structure, les entreprises familiales impliquent des éléments contraires, des tensions et conflits que les dirigeants et managers de ces firmes doivent gérer (Ward et al., 1997). Ces logiques parfois contraires sont soulignées lors de transmissions familiales (Meier et Missonier, 2013). De plus, ces éléments sont interférents à différents niveaux (sur le plan individuel et collectif). Seule une lecture intégrant ces différentes dimensions est donc en mesure de questionner la transmission des entreprises familiales comme contexte porteur de dynamiques endogènes.
71Nous avons pu montrer que l’entreprise familiale agit en tant qu’interface entre logiques familiale et entrepreneuriale, dynamiques complémentaires et parfois concurrentes. La seconde partie de notre revue de la littérature nous montre que la lecture paradoxale nous permet d’éclairer la complexité identitaire des entreprises familiales répondant à la fois à des enjeux de développement, de croissance, de pérennité, de gestion patrimoniale, mais également de gérer des problématiques spécifiques et centrales à l’instar de la transmission.
2. L’entreprise familiale
comme lieu de tensions paradoxales
Les conflits d’intérêts propres aux entreprises familiales peuvent amener à des situations complexes, parfois difficiles à résoudre. Une façon de rendre intelligible ces contradictions est de recourir au prisme des paradoxes (Smith et Lewis, 2011). Plus généralement, des approches sociologiques et philosophiques de la stratégie des organisations (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999) ont proposé la notion de paradoxe en associant des termes à la fois complémentaires et antagonistes. Les paradoxes sont en effet un cadre, pour décrypter les tensions inhérentes aux organisations (Schad et al., 2016 ; Cunha et Putnam, 2019). Ainsi, la lecture paradoxale peut permettre de proposer une analyse globale des éléments contradictoires et inter-reliés à l’œuvre au sein des entreprises familiales. Le prisme des paradoxes est de ce point de vue, un outil particulièrement utile, pour capter ces dualités. Smith et Lewis (2011) définissent un paradoxe comme « des éléments contradictoires mais interdépendants (des dualités) qui existent simultanément et persistent dans le temps » (Smith et Lewis, 2011, p. 287)1.
72Il existe des différences dans l’approche d’un paradoxe se retrouvent dans la conduite de la recherche et dans les résultats présentés dans les livres et articles académiques. Une partie des travaux tend à appréhender les tensions paradoxales dans une vision pragmatique (Lüscher et Lewis, 2008 ; Smith et Lewis, 2011), alors que d’autres travaux tentent d’analyser le paradoxe dans une vision holistique (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999). Le premier type de travaux cherche à matérialiser le paradoxe, ses antécédents et ses conséquences. Ils proposent des typologies qui aident à décrypter le paradoxe (Lüscher et Lewis, 2008). Les travaux appartenant à la seconde catégorie permettent de rendre compte de la complexité des organisations. Le cadre d’analyse y est plus large. Le paradoxe n’est plus dès lors un outil de gestion, mais un prisme de lecture d’une situation complexe peu rationnalisée. Dans cette étude, nous considérons que ces approches sont complémentaires et non antinomiques, elles permettent de rendre compte d’une manière exhaustive d’un phénomène complexe et mouvant dans les organisations (i.e. les paradoxes).
Smith et Lewis (2011) derniers proposent une grille originale, visant à classer les paradoxes dans les organisations. Ils distinguent quatre grandes catégories : les paradoxes de l’apprentissage (sur la base des tensions créées entre l’ancien et le nouveau) (i.e. catégorie nommée dans la grille Apprentissage), les paradoxes de l’organisation (sur la base des forces divergentes de contrôle et de flexibilité) (Exécution), les paradoxes d’appartenance (découlant de la tension entre le moi et l’autre dans un contexte organisationnel) (Appartenance), et enfin, les paradoxes de l’exécution et de la performance (découlant de la pluralité des objectifs des parties prenantes internes et externes) (Performance). Les auteurs subdivisent cette typologie en six sous-groupes, certains paradoxes se trouvant à l’interface de deux catégories.
Nous présentons dans le tableau 1 une première grille de synthèse de la littérature sur les différentes tensions paradoxales adaptée aux entreprises familiales. Pour cela, nous enrichissions la grille proposée par Smith et Lewis (2011) afin de comprendre et identifier les possibles dynamiques endogènes à l’œuvre en contexte d’entreprise familiales.
73Tab. 1 –Enrichissement de la grille d’identification des tensions paradoxales proposée Smith et Lewis (2011) adaptée aux entreprises familiales.
Types de tensions |
Les tensions identifiées en contexte d ’ entreprise familiale à travers une relecture de la « Littérature » sur les Paradoxes |
Apprentissage |
- Détruire le passé et construire l’avenir (March, 1991 ; Weick et Quinn, 1999) |
Appartenance |
- Intérêts individuels et intérêts collectifs (Smith et Berg, 1987 ; Apker, 2004) - Confiance et contrôle/confiance et défiance (Lewicki et al., 1998 ; Schilke et Cook, 2013) |
Exécution |
- Coopération et compétition (Clarke-Hill et al., 2003) - Délégation et direction (Denison et al., 1995 ; Beech et Huxham, 2003) - Contrôle et flexibilité (Adler et al., 1999 ; Osono et al., 2008) |
Performance |
- Objectifs multiples et concurrents à long terme et à court terme des parties prenantes (Smith et Lewis, 2011) - Exploitation et exploration (March, 1991 ; Raisch et al., 2009) - Contrôle des coûts et de la qualité (Apker, 2004) |
Apprentissage - Appartenance |
- Nécessité de changement et besoin de stabilité (Leana et Barry, 2000 ; Klarner et Raisch, 2013) - Nécessité de changer et désir de rester (Ibarra, 1999 ; O’Mahony et Bechky, 2006) - Innover rapidement et rester enstatu quo (Puranam et al., 2006) |
Performance – Appartenance |
- Buts lucratifs et non lucratifs (Collins et Porras, 1997) - Négociation entre identités individuelles et exigences sociales ou professionnelles (Dukerich et al., 2002 ; Kreiner et al., 2006) |
Appartenance – Organisation |
- Actions individuelles et collectives (Smith et Berg, 1987 ; Andriopoulos et Lewis, 2009) - Autonomie et dépendance (Graebner, 2004) et interdépendance (Smith et Lewis, 2011) |
Performance – Organisation |
- Interaction entre moyens et fins, niveau d’engagement et niveau de performance (Kaplan et Norton, 2007 ; Eisenstat et al., 2008) |
Apprentissage-Organisation |
- Les routines et les capacités organisationnelles recherchent la stabilité, la clarté, la concentration et l’efficacité tout en permettant la flexibilité et l’évolution des résultats (Eisenhardt et Martin, 2000) |
Apprentissage – Performance |
- Construire l’avenir et assurer le présent (Smith et Tushman, 2005) - Se réinventer dans un environnement changeant en restant efficient (Junni et al., 2015) |
Cette typologie est une aide pour décrypter les paradoxes dans un cadre organisationnel car elle offre un cadre pour identifier les paradoxes dans un cas d’étude avec un contexte spécifique. Néanmoins, cet outil propose une identification et une description statique des éléments en contradiction. Cependant, les tensions peuvent être identifiées au niveau micro ou macro (Schad et al., 2016). Par exemple, la tension entre les liens familiaux et la recherche du profit est liée au niveau organisationnel, tandis que la tension entre le besoin d’autonomie et le contrôle du fondateur au successeur s’applique au niveau individuel. Par conséquent, de nouvelles études sont demandées pour identifier les tensions présentes dans les études empiriques afin de comprendre quels paradoxes sont présents, ainsi que pour comprendre à quels niveaux d’analyse ils interfèrent (Schad et al., 2016).
3. Méthodologie
Notre méthodologie est articulée en deux étapes :
(1) Nous proposons dans un premier temps une grille d’analyse conceptuelle des tensions paradoxales appliquée au contexte de l’entreprise familiale (tableau 1). En effet, nous avons enrichi la grille proposée par Smith et Lewis (2011) afin de comprendre les possibles dynamiques endogènes à l’œuvre dans un tel contexte. Cette grille revisitée est devenue un « outil interne » nous permettant de nous approprier les tensions, leurs différences, et possibles interdépendances.
Dans cette première étape, nous avons détaillé les dix sous-catégories proposées pour mieux cerner les polarités identifiées. Par exemple, la catégorie de l’apprentissage-appartenance comporte trois sous-parties dans notre tableau :
(1) Nécessité de changement et besoin de stabilité (Leana et Barry, 2000 ; Klarner et Raisch, 2013)
(2) Nécessité de changer et désir de rester (Ibarra, 1999 ; O’Mahony et Bechky, 2006)
(3) Innover rapidement et rester en statu quo (Puranam et al., 2006)
75Cette catégorie a été définie comme « créer des capacités pour l’avenir tout en assurant le succès dans le présent » (Smith et Lewis, 2011, p. 383). Dans notre grille, nous distinguons trois tensions pour tenter de mieux cerner la dynamique ciblée.
(2) Cette grille a été une aide pour coder les paradoxes dans nos études de cas, et comprendre ensuite à quels niveaux d’analyse ils se référaient. En effet, cet article s’appuie sur sept mini-cas de PME (Petites et Moyennes Entreprises) et ETI (Entreprises à Taille Intermédiaire) familiales non cotées en bourse opérant dans les secteurs du conseil, de l’industrie et des services en France. Ces entreprises familiales disposent d’un chiffre d’affaires inférieur à 24 millions d’euros en 2016, et comptent entre 15 et 180 personnes. Le tableau 2 synthétise les caractéristiques principales des sept entreprises.
Tab. 2 – Caractéristiques des entreprises.
Secteur |
Taille (nombre employés) |
Implantation |
|
E1 |
Industrie |
180 |
Rhône-Alpes |
E2 |
Industrie |
55 |
Lorraine |
E3 |
Services |
35 |
Ile de France |
E4 |
Services |
110 |
Ile de France |
E5 |
Conseil |
35 |
Ile de France |
E6 |
Services |
22 |
Ile de France |
E7 |
Services |
15 |
Normandie |
Vingt et un entretiens ont été conduits sur une durée d’un an et demi. Chaque entretien a duré en moyenne deux heures en tête à tête, par un des deux auteurs de l’étude. Le guide d’entretien administré était semi-directif : le début d’entretien était consacré au contexte de l’entreprise, le sujet du processus de transmission familiale a été abordé en accordant une attention particulière aux difficultés intervenues au cours de l’opération. Certains acteurs ont été mobilisés plusieurs fois (plus de la moitié des acteurs de l’échantillon) dans un souci de compréhension et de validation faciale des propos recueillis. Les cas comprennent exclusivement des situations de transmission volontaire, où 76l’entreprise familiale a été reprise par un membre de la famille ou des tiers sans lien de parenté avec le cédant. Aussi, l’étude ne prend pas en compte les reprises d’activités liées au décès de l’ancien dirigeant ou à un changement volontaire d’activités. Les reprises étudiées ne concernent pas l’achat d’entreprises en difficulté. Elles portent sur des cas de transmissions ayant donné lieu à des résistances et des freins de la part de l’ancien dirigeant, sans que des facteurs objectifs majeurs, d’ordre financier ou économique, puissent expliquer cette situation (valorisation trop élevée, difficultés de trésorerie, perte de clients majeurs durant le processus, etc.).
Dans une seconde étape, nous avons rapproché nos codes de premiers ordre issus de la première grille d’analyse (tableau 1) avec les codes de second ordre issus de nos données (retranscription des entretiens). Cette deuxième étape nous permet d’identifier quels paradoxes sont présents dans le cadre spécifique de la transmission des entreprises familiales (analyse des sept entreprises sélectionnées).
4. Résultats
Nous répondons à la problématique soulignée : En quoi l’approche paradoxale permet-elle d’éclairer les logiques familiale et entrepreneuriale liées à la transmission des entreprises familiales ?
À l’appui des travaux de recherche étudiés et de l’analyse terrain effectuée auprès des entreprises familiales concernées, nous pouvons relever deux grandes catégories de tensions paradoxales auxquelles ont à faire ces organisations lors de transmission.
Il est proposé ci-après une mise en perspective des conflits identifiés dans les sept études de cas sous l’angle des tensions paradoxales.
77Tab. 3 – Conflits en jeu dans le processus de succession
des entreprises familiales et identification de tensions paradoxales.
Nature du conflit ( entre qui ? ) |
Objet du conflit (à propos de quoi ?) |
Comment les conflits interfèrent dans le processus de succession et/ou façonnent la marge de manœuvre du gestionnaire en place |
Tensions paradoxales assimilées : (1) Exécution-appartenance : Conflit entre identification et objectifs alors que les acteurs négocient des identités individuelles avec des exigences sociales et professionnelles (iDukerich et al., 2002 ; Kreiner et al., 2006) |
Tensions paradoxales assimilées : (2) Organisation-appartenance : Interaction entre moyens et fins, demandes des employés par rapport aux clients, engagement fort par rapport aux performances élevées (Eisenstat et al., 2008 ; Kaplan and Norton, 2007) |
Actionnaires familiaux et non familiaux |
Création de valeur financière pour les actionnaires |
Divulguer la valeur « réelle » des actions (intérêt des actionnaires non familiaux) et réduire le risque que les actionnaires familiaux minoritaires choisissent de vendre leurs actions au moment de la succession (intérêt des actionnaires majoritaires de la famille) par rapport à la réduction des coûts fiscaux de la succession (intérêt des actionnaires familiaux) |
Négociation entre identité individuelle (intérêt familial actionnaire) et exigences contextuelles (intérêt non familial) pour créer de la valeur pour les actionnaires → Rentabilité commerciale à court terme vs rente à long terme → Adopter une politique de transparence en indiquant la valeur réelle des actions et en diminuant le risque que les actionnaires familiaux minoritaires choisissent de vendre leurs actions au moment de la succession, sans afficher la valeur réelle des actions (politique de la terre brûlée) et de réduire l’impôt sur les successions |
Conflit entre les objectifs multiples et concurrents des actionnaires → Augmentation du contrôle à long terme des actionnaires familiaux par rapport au déclin à court terme des actionnaires familiaux sur la gouvernance |
78 |
Politique de dividendes et de réduction du capital |
Rachat d’actions (intérêt familial actionnaire) par rapport au versement de dividendes (intérêt actionnaire autre que familial et intérêt actionnaire familial minoritaire au moment de la succession) |
Différences dans la nature et les objectifs de la politique en matière de dividendes (rachat d’actions par rapport au paiement de dividendes) et incidence de ces choix sur l’entreprise → Privilégie la politique d’investissement à long terme de la société en raison du rachat d’actions (capacité d’innovation accrue, capacité d’endettement supérieure, etc.) par rapport aux gains privilégiés à court terme liés au paiement de dividendes → Émettre des réserves (risque de gestion du risque plus élevé)ou accroitre les réserves (politique de gestion du risque faible ou modérée) |
Interactions entre actions collectives et individuelles résultant d’un accord et d’une confrontation entre demande de dividendes et augmentation du capital des actionnaires familiaux → Augmenter le capital pour les actionnaires familiaux ou non familiaux et consolider le pouvoir et l’influence des actionnaires familiaux ou non familiaux par rapport au maintien du capital et de la gouvernance existants en versant des dividendes (contrôle d’accès élevé au capital) |
Politique d’investissement, prise de risque et horizon temporel des investissements |
- Investir dans des projets à faible risque avec une période de récupération à court terme et encourager une politique d’investissement attentiste (intérêt des actionnaires familiaux) par rapport à l’investissement dans des options de croissance d’entreprise (notamment externe) et gérer le risque de dévaluation de l’actif de l’entreprise (intérêt des actionnaires non familiaux) |
Impact de la gestion des risques et de la temporalité sur la stratégie globale de l’entreprise → Focus sur une stratégie de croissance risquée à court terme avec des bénéfices plus importants plus rapidement pour l’entreprise, par opposition à une stratégie à long terme comportant des risques plus modérés et moins rentable à court terme → Envisager des solutions de croissance externe défavorables pour les actionnaires familiaux (fusion-acquisition, alliance) et abandonner ces options de croissance externe pour une croissance interne |
Interaction entre différents points de vue sur la gestion des risques et la temporalité des projets → Gestion des risques impactée par la baisse potentielle de l’influence des actionnaires familiaux (croissance externe) par rapport au maintien de la gouvernance actuelle (croissance interne) → Politique des actionnaires agressive et risquée axée sur les rendements immédiats des actions (augmentation de la pression sur les actionnaires, augmentation possible du verrouillage de certains actionnaires) par opposition à |
|
79 |
- Investir dans des projets ayant un horizon temporel correspondant à l’horizon de la succession familiale (intérêt familial des actionnaires) par rapport à des projets ayant un horizon à plus long terme (intérêt des actionnaires non familiaux) - Prise en compte des successions entre principaux actionnaires minoritaires non familiaux (intérêt des actionnaires non familiaux) par rapport à la réorganisation des actifs de l’entreprise par successions familiales (intérêt des actionnaires familiaux) |
?Préférer une politique de rationalisation avec une gestion du risque faible (stabilité) plutôt que de saisir les opportunités, y compris un niveau d’incertitude élevé (gestion du risque plus élevée) |
une politique modérée axée sur le long terme (probabilité de mouvements au sein de la gouvernance moins importante) → Améliorer les projets à court terme pour favoriser les intérêts des actionnaires familiaux (ou la succession familiale) au lieu d’investir dans des projets à plus long terme que la succession familiale |
|
Politique d’emploi axée familiale (bénéfice privé familial) |
Concentration des postes de direction et du contrôle au sein de la famille (intérêt familial actionnaire) par rapport au renforcement de la gestion externe et du contrôle indépendant (intérêt non familial) |
Interaction possible entre l’engagement familial et non familial et la performance de l’organisation → Risque d’appauvrissement interne |
Équilibre entre contrôle et autonomie de gestion du personnel Dilution du pouvoir des actionnaires familiaux (recrutement externe) vs contrôle renforcé au sein de la gouvernance (peu ou pas de recrutement externe) |
|
Politique d’ouverture de capital et de dette (financement externe) |
Refuser d’ouvrir des capitaux ou d’émettre de nouvelles dettes pour des raisons de contrôle (intérêt des actionnaires familiaux) par rapport au financement d’opportunités de croissance (intérêt des actionnaires non familiaux) |
Interaction possible entre les moyens d’atteindre la croissance financière de l’entreprise (croissance externe ou interne) → Contributions externes au financement du capital accepté (incertitude et opportunités privilégiées) vs politique d’endettement stricte (contrôle et stabilité privilégiés) |
Équilibre entre contrôle et autonomie en matière financière → Dilution du pouvoir des actionnaires familiaux (capital d’ouverture) vs rétention du pouvoir (refus d’ouvrir du capital) |
|
80
Actionnaires familiaux majoritaires et actionnaires minoritaires familiaux |
Besoins de liquidité des actionnaires familiaux minoritaires (dividendes requis) |
Augmentation des dividendes (intérêt des actionnaires familiaux minoritaires) par rapport à l’affectation de fonds supplémentaires pour renforcer le contrôle familial (intérêt des actionnaires familiaux majoritaires) ou pour la croissance à long terme de l’entreprise (intérêt des actionnaires non familiaux et intérêt des actionnaires majoritaires de la famille une fois le contrôle familial renforcé) |
Impact financier sur le (non) transfert de dividendes au sein de l’entreprise → Améliorer l’horizon à court terme des actionnaires familiaux et amortir le pouvoir d’investissement de l’entreprise (verser des dividendes) par rapport à une croissance privilégiée à long terme de l’entreprise et allouer davantage de fonds pour renforcer le contrôle familial |
Interactions entre actionnaires familiaux et non familiaux concernant la vente ou le transfert de dividendes → Améliorer le contrôle de la gouvernance pour les actionnaires familiaux par rapport aux positions ouvertes et accroître la diversité dans la structure de propriété |
Avantages familiales privées |
Incidence financière sur la relocalisation d’avantages privés au sein de l’entreprise → Prendre de l’argent pour les avantages privés familiaux vs réinvestir de l’argent dans l’organisation |
Tensions entre les objectifs multiples et concurrents des actionnaires → Augmenter les prestations familiales par rapport aux augmentations globales → Accroître le contrôle et la surveillance des gestionnaires de famille par rapport à l’extension du pouvoir et de l’influence des actionnaires familiaux |
||
Financement de la politique de réduction de capital (financement externe) |
Accumulation de liquidités au sein de l’entreprise pour le rachat d’actions (intérêt majoritaire de la famille) par rapport à la vente d’actions pour encaisser au détriment du pouvoir de vote familial (intérêt minoritaire de l’actionnaire familial) |
Impact de la gestion de la réduction de capital sur la viabilité de l’entreprise → Augmenter le pouvoir d’endettement de l’organisation pour racheter des actions et restreindre d’autres projets de croissance par rapport à la sortie de l’argent de l’organisation et à la vente d’actions (liberté de lancer d’autres projets de croissance) |
Interactions entre différentes stratégies : rachat d’actions ou vente d’actions pour encaissement → Augmenter le contrôle et l’influence de la gouvernance actuelle (achat d’actions) par rapport à l’ouverture du capital (actions vendues) |
De manière générale, il ressort de l’analyse que les paradoxes liés à l’appartenance sont au cœur de toutes les problématiques car ils concernent les actionnaires familiaux et non familiaux (la catégorie appartenance est présente dans les deux paradoxes identifiés). Selon cette logique, l’identité des actionnaires favorise les tensions entre les objectifs individuels et collectifs, et met en lumière les tensions de valeurs, des rôles et des différences d’intérêt entre les parties.
D’une part, les tensions performance-appartenance ont une incidence sur la performance et souligne les oppositions potentielles entre les intérêts de l’actionnaire familial et les exigences ceux des actionnaires non familiaux. Ces tensions sont également liées à l’interaction entre moyens et fins. En conséquence, ces tensions sont liées à des problèmes de développement et de croissance, et à la façon d’appréhender et de créer de la richesse selon la nature des parties en présence (performance économique versus gestion patrimoniale ; court terme versus long terme, rentabilité versus stabilité ; adaptation versus continuité).
D’autre part, les tensions exécution-appartenance sont liées aux interactions entre les actions collectives et les actions individuelles / de groupe, ainsi qu’aux tensions entre l’individu et l’ensemble des autres acteurs. Ils sont généralement associés à des problèmes de gouvernance. Cette seconde catégorie reflète l’opposition entre le fait de créer et structurer une organisation avec des ressources techniques, technologiques au service du développement de l’activité (standardisation, coordination, où l’on retrouve les critères d’efficience et d’efficacité) par opposition aux notions de confiance, d’entraide, de solidarité, de liens directs avec la famille fondés sur des relations informelles ou affectives.
5. Discussion
La lecture paradoxale met en lumière les difficultés, enjeux et questionnements rencontrés par un dirigeant de PME – ETI. Les entreprises familiales sont au cœur de différents jeux d’influence et d’intérêt à la fois sous différents angles : politique, stratégique, financière, émotionnel et affective (Tabor et al., 2018). De par leur interface entre différentes logiques 82(familiale et entrepreneuriale), elles sont un cadre où s’activent différents paradoxes issus de logiques interdépendantes et parfois contradictoires de nature familiale et entrepreneuriale (Gundolf et al., 2013).
Les deux catégories de paradoxes soulignés dans nos résultats reflètent les phénomènes d’appartenance, de performance et d’organisation impactés par ces dynamiques endogènes.
Nous étude apporte ainsi une illustration sur la façon dont peut s’opérer la transmission d’entreprises familiales (cf. tableau 3). Cette approche ne prétend pas à une analyse exhaustive. Elle constitue une première étape visant à interpeler la communauté scientifique sur l’intérêt de la lecture paradoxale pour la transmission des entreprises familiales. En cela, ce prisme de lecture permet de comprendre et d’analyser la nature profonde de la structure familiale, en impliquant les notions de culture et d’organisations au service de la performance des entreprises familiales
La lecture paradoxale contribue aussi à aller au-delà d’une dimension purement descriptive et compréhensive, en laissant entrevoir une capacité à proposer une grille de nature plus explicative, voire proactive, en vue de résoudre des problèmes majeurs de l’entreprise familiale, à l’instar des questions de reprise et de transmission familiale.
La lecture paradoxale est proposée dans cette étude comme une lecture compréhensive d’un phénomène en mettant en relief la richesse des dimensions de l’entreprise familiale. Aussi, la lecture des entreprises familiales via le prisme des paradoxes permet une lecture intégrative des dynamiques à l’œuvre, donnant aux managers la possibilité d’avoir une lecture différente des contradictions en présence. La grille 2 propose d’aller plus loin en donnant une lecture explicative dans l’aide à la résolution d’enjeux majeurs tels que la transmission intergénérationnelle.
La capacité d’un dirigeant (ou plus largement d’un acteur) de formuler, de verbaliser des paradoxes inhérents aux situations de changement organisationnel peut améliorer la prise de conscience individuelle voire collective de ces dualités. Cette prise de conscience est une première étape dans la recherche de solutions. La prise de conscience de l’existence de paradoxes peut permettre aux parties prenantes d’adopter des décisions stratégiques plus « équilibrées » (Smith et Tushman, 2005), c’est-à-dire combinant les deux pôles de la dynamique.
Enfin et comme énoncé en revue de la littérature, il existe des différences dans l’approche d’un paradoxe entre deux écoles : (1), d’une 83part, une partie des études mobilisent les tensions paradoxales dans une vision pragmatique en proposant une lecture paradoxale comme outil de décryptage des pôles opposés en tension (Smith et Lewis, 2011) ; (2), d’autre part, d’autres travaux conservent le paradoxe comme un prisme de lecture dont l’objectif est de garder en son essence la complexité et l’aspect « multifacettes » des phénomènes observés (Morin, 1990 ; Le Moigne et Morin, 1999).
Cet article vise à instaurer un dialogue entre ces deux écoles, en conservant (1) une lecture holistique d’une situation paradoxale dans la lignée des travaux de Morin, (1990), Morin et Le Moigne (1999) (lecture des différents paradoxes à l’œuvre), (2), en « utilisant » le paradoxe tel un outil de gestion (et de pilotage du changement) – dans la lignée des travaux de Smith et Lewis (2011) (compréhension des dynamiques activées dans le cadre d’entreprises familiales). Nos résultats mettent en évidence que la compréhension du contexte des entreprises familiales et la prise de décision associée à ce contexte doit englober des cadres paradoxaux : il existe une nécessité de garder dans une perspective holistique le paradoxe pour y faire face et l’utiliser.
Conclusion
Notre article visait à intégrer les travaux de Smith et Lewis (2011) en étendant leur grille de lecture des paradoxes au contexte spécifique des entreprises familiales et à la question de la transmission/succession. À notre connaissance, peu d’études ont transposé les travaux de Smith et Lewis (2011) dans un tel contexte organisationnel. Or cette grille d’analyse peut se révéler particulièrement utile, pour comprendre et cerner les différents niveaux de tensions dans ce type de situations. Cette grille pourra être communiquée aux cédants et repreneurs dans ce type de structure afin d’avoir une vision holistique des possibles conflits au cours du processus. Notre étude souligne notamment l’imbrication de différentes logiques de nature à la fois économique et familiale, ainsi que le caractère dominant des paradoxes performance-appartenance et organisation-appartenance dans le contexte de transmission des entreprises familiales.
84L’identification de ces paradoxes et leur maîtrise constituent en soi de nouvelles clés pour parvenir à une gestion réussie d’une transmission d’entreprise familiales. Nos résultats empiriques reflètent le contexte de l’étude en soulignant la nature dominante des paradoxes liés à l’appartenance dans le contexte de transmission des entreprises familiales. En ce sens, notre article complète les travaux de Meier et Missonnier (2013) en caractérisant les dynamiques endogènes à l’œuvre dans un tel contexte.
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1 Nous résumons les principaux apports de la littérature définissant un paradoxe en trois dimensions : (1) la notion de temps : les deux éléments doivent être en contradiction simultanément (Poole et Van de Ven, 1989 ; Smith et Lewis, 2011) ; (2) la notion de spatialité : les deux éléments doivent être reliés dans leur opposition, c ’ est-à-dire dans leur cadre d ’ analyse (Smith et Lewis, 2011) ; (3) les deux éléments doivent être complémentaires et doivent se renforcer mutuellement. En ce sens, les éléments se définissent les uns les autres et ne pourraient pas exister indépendamment (Smith et Lewis, 2011).
- Thème CLIL : 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
- ISBN : 978-2-406-10787-3
- EAN : 9782406107873
- ISSN : 2554-9626
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10787-3.p.0067
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 26/10/2020
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : Entreprises familiales, transmission, lecture paradoxale, étude qualitative, multi-cas