Avant-propos
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Enquête sur Le Fantôme de l’Opéra de Gaston Leroux
- Pages : 9 à 10
- Collection : Études romantiques et dix-neuviémistes, n° 137
Avant-propos
En 2004, les archives de Gaston Leroux, données par la famille de l’écrivain, ont fait leur entrée à la Bibliothèque nationale de France. Les manuscrits, les lettres, les documents et les photographies qui constituent depuis lors le fonds du département des Manuscrits ont permis de lever un coin du voile sur l’œuvre et la personnalité de son auteur.
Longtemps identifié aux seuls succès du Mystère de la chambre jaune (1907), du Fantôme de l’Opéra (1910) et aux aventures de Chéri-Bibi commencées en 1913, Gaston Leroux a pu ainsi être mieux appréhendé grâce aux archives enfin rendues accessibles. Des dix années de journalisme de Gaston Leroux, à L’Écho de Paris dès 1891, puis au Matin de 1894 à 1907, seul un carnet de notes lui ayant appartenu a survécu.
Pour reconstituer la carrière de chroniqueur judiciaire puis de grand reporter de Gaston Leroux, force est de recourir à des éléments du contexte, unes de journaux ou photographies des événements et des protagonistes. Le travail du romancier, en revanche, s’est trouvé éclairé de façon inédite grâce aux manuscrits. Pendant près de vingt ans, à partir du moment où il renonce à son métier de journaliste, Gaston Leroux a fourni la presse et l’édition à grands tirages en feuilletons et autres « romans à vivre », selon l’expression qu’il forge, le 22 août 1903, dans une lettre à Maurice Bunau-Varilla pour désigner « Le chercheur de trésors », qui deviendra La Double Vie de Théophraste Longuet. On trouve dans la correspondance de Leroux, et parfois sur les manuscrits eux-mêmes, les traces des commandes, délais, échéances, calibrages, rendements… auxquels il est astreint. Certains dossiers documentaires utilisés par Gaston Leroux pour écrire ses romans ont également été conservés. Constitués de coupures de presse regroupées par thèmes, ils ont accompagné la conception du sujet ou précédé de près le premier travail d’écriture en fournissant des éléments de contexte. Parfois, Gaston Leroux colle ces coupures de presse dans ses carnets de travail. Avec ce procédé, c’est un fragment prélevé sur le réel et inséré sur la double 10page du carnet qui vient étayer l’imagination du romancier. Le plus souvent, le collage permet d’archiver l’image mentale d’un moment de la réflexion, d’une piste à explorer, d’une bifurcation possible.
Une fois le sujet documenté et organisé selon un scénario, Gaston Leroux passait à l’écriture du texte en continu. Sur les manuscrits, le remplissage des feuillets est toujours très dense : l’effet produit est celui d’une écriture « au kilomètre », qui ne doit pas occulter cependant le travail de reprise et d’ajustement sans cesse opéré par l’auteur. En pratique, les manuscrits montrent que Gaston Leroux a sans doute cherché un compromis entre les contraintes éditoriales et sa liberté de créateur. Plusieurs strates de composition successives peuvent alors apparaître. Dans le cas du Fantôme de l’Opéra, le manuscrit qui nous est parvenu fait alterner passages autographes et fragments d’une copie, d’une autre main que celle de Gaston Leroux, dont des fragments sont collés sur le manuscrit « définitif » pour faire la jonction avec le passage réécrit. Que d’énigmes entre les lignes…
Martine Kahane s’est penchée sur la malle aux trésors et nous livre avec ce nouvel ouvrage plus qu’une réévaluation : une renaissance du Fantôme, un nouvel épisode de sa légende.
Guillaume Fau
Directeur du département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-16977-2
- EAN : 9782406169772
- ISSN : 2258-4943
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16977-2.p.0009
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 03/07/2024
- Langue : Français