Résumés
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Confiance, bonne foi, fidélité. La notion de fides dans la vie des sociétés médiévales (vie-xve siècles)
- Pages: 381 to 386
- Collection: Encounters, n° 364
- Series: History, n° 4
Résumés
Hervé Oudart, « Le serment des cités des Gaules au roi mérovingien du vie siècle. Un fondement oublié de la domination royale franque ? »
Cet article s’attache à l’accession au pouvoir du roi mérovingien dans les récits de Grégoire de Tours. Il montre, sur l’exemple de la succession du roi Chilpéric († 584), que celle-ci implique le ralliement de ses grands à ses successeurs, son fils et son frère, mais aussi l’engagement juré des cités de son royaume « d’observer la fides » à leur égard. Le royaume est donc un assemblage de cités, collectivités territoriales unies autour du prince par un lien de fides juré à l’instar du haut-Empire romain.
Osamu Kano, « Quelques réflexions sur les formes de la fides facta »
On a supposé que la forme principale de fides facta, une promesse solennelle et unilatérale de s’engager lui-même, était la remise de festuca, le bâton portant une marque de possesseur. En fait, cette thèse est étayée par l’assimilation de la festuca au wadium, un autre objet mobilier largement utilisé pour le cautionnement. Mais le domaine dans lequel la festuca a été employée et celui du wadium ne sont que partiellement communs, et ils évoluent au cours du Haut Moyen Âge.
Jean-Michel Picard, « “Nec in pace fideles”. Fides et fœdus en Irlande médiévale (viie-xe s.) »
Giraud de Barri, apologue de la conquête normande au Pays de Galles et en Irlande, dénonce dans ses textes les Bretons et Irlandais comme des fourbes et des traitres qui ne respectent ni la foi (fides) ni les traités (foedus). Ce témoignage est contredit par celui des sources irlandaises, où la foi et le respect des accords sont présentés comme des valeurs capitales pour le fonctionnement harmonieux de la société. L’article étudie le vocabulaire de ce domaine du contrat social dans les sources irlandaises.
382Paolo Cammarosano, « Paradoxe du féodalisme. L’infidélité de Tassilon de Bavière »
Maints auteurs ont contesté la véridicité du récit des Annales regni Francorum autour de Tassilon de Bavière, qui après avoir obtenu en bénéfice de Pépin le Bref, en 748, le duché des Bavarois, et après avoir prêté neuf ans plus tard un serment de fidélité à Pépin et à ses deux fils, brisa sa foi en 763. Cet article soutient la fiabilité substantielle du récit et en justifie certaines contradictions en les expliquant en fonction d’une interprétation féodale des tenures de nature publique.
Janet L. Nelson, « Trust and mistrust in the time of Charlemagne »
Trois capitulaires de Charlemagne – 789 (instructions en vue des prestations de serments, en lien avec la rébellion de 785), 805, 806 – montrent la relation étroite entre fides et confiance ; ils montrent aussi le prince et ses agents réfléchissant sur ce lien, les réponses qu’ils apportent, les différentes formes de connectivité familières à ces peuples, mais changeantes au fil du long règne de Charlemagne.
Olivier Guillot, « La fides prêtée à l’empereur Louis le Pieux par les grands laïques, à l’épreuve de l’épisode du Rotfelth (fin juin 833) »
Cette contribution s’attache à expliquer la scène du Rotfelth (833) où il suffit que Louis le Pieux soit réputé avoir perdu ce qu’il lui restait de suite pour permettre aussitôt à Lothaire, avec sa suite pléthorique, de s’arroger une potestas prééminente – en soulignant notamment que cet automatisme a vu le jour au moment où Charles Martel, parce qu’il avait la potestas, avait pu accéder au principatus sans aucune investiture formelle, par la reconnaissance implicite des grands, devenus ses fidèles.
Pascal Gourgues, « Fides et gouvernement de la res publica au xe siècle »
Dans son Histoire, Richer de Reims se livre à une exaltation de la fides et dresse à plusieurs reprises le portrait du parfait fidèle. Mais surtout, écrivant dans une période troublée et prolongeant, à sa manière, la pensée politique du ixe siècle, Richer – comme son contemporain Abbon – considère que la fides au roi obéit à une logique particulière. Elle est due. Comme il l’écrit, celui qui la refuse agit « au-delà du droit » ; celui qui la viole est un desertor ou un tyran.
383Wendy Davies, « Fides in northern Iberian texts of the ninth and tenth centuries »
Dans les sources des ixe-xe siècles en provenance du nord de la péninsule ibérique, le mot fides renvoie normalement à la foi chrétienne. Fidelis et fideliter sont communément repérés dans les chartes et se réfèrent notamment au service que l’on doit aux rois. Mais ils peuvent aussi être utilisés pour être appliqués aux personnes dignes de confiance ayant légitimité à intervenir dans les affaires judiciaires. Fidiator, fidiare, fidiatura se réfèrent aux garants et aux actes de garantie.
Yves Sassier, « Fidélité au roi. Abbon de Fleury, Fulbert et Yves de Chartres »
Chez Abbon de Fleury, Fulbert et Yves de Chartres, la fidélité d’un dignitaire de l’Église au roi doit s’exprimer, lorsque les circonstances l’exigent, par l’avertissement ou le conseil qui déplaît. Les deux évêques de Chartres l’ont aussi exprimée, en la justifiant comme acte de fidélité, par l’abstention de participer à une action que l’on juge nuisible à l’âme du roi bien que voulue par celui-ci, car tout prélat se doit d’être d’abord un guide spirituel, responsable devant Dieu de la sécurité de l’âme du prince.
Caspar Ehlers, « Rereading the Speach of Otto of Northeim against the Tyranny of Henry IV in Saxony »
Le but de cette contribution est d’évaluer et de contextualiser le discours que le comte Otton de Northeim, comte de la Saxe orientale, est censé avoir tenu à l’été de l’année 1073 lors d’une assemblée des adversaires d’Henri IV et de s’interroger sur l’idée d’une « liberté des Saxons » à l’égard de la revendication salienne d’une domination de valeur universelle. Cette dispute à l’ombre de la querelle d’investiture était-elle signe d’une crise de la portée de la fides au cours du xie siècle ?
Wojciech Falkowski, « Les réactions sociales dans le cadre du serment de fidélité »
Le rituel de l’hommage et du serment de fidélité, la révolte contre celui auquel on a prêté serment, le comportement du seigneur à l’égard de vassaux qui ont rompu leur foi ou ont contrevenu aux règles de bienséance qu’impose la fidélité, donnent lieu à diverses réactions ou manifestations d’émotion que l’auteur de cette contribution s’attache à analyser.
384Guillaume Bernard, « Fides et Royauté chez les moralistes du xiiie siècle. L’exemple de Vincent de Beauvais »
Achevé vers 1260-1263, le De morali principis institutione fut la dernière œuvre de Vincent de Beauvais (1190-1264). Il se présente comme un ouvrage pédagogique à destination du roi chrétien, un « Miroir du prince ». La fides au sens religieux du terme est la condition de la fides politique et juridique. Elle contribue à la légitimité politique parce qu’elle permet la confiance mutuelle entre les gouvernés et le gouvernant, tous devant chercher à respecter un ordre cosmologique des choses qui les dépassent.
Martin Aurell, « Foi et perfidie à la croisade albigeoise selon les troubadours »
La fides (fe ou fei en langue d’oc) est une notion centrale dans les sirventes dénigrant la croisade albigeoise. Ces chansons récriminent contre les adversaires de leurs auteurs et commanditaires. Leurs attaques ad hominem se fondent largement sur les contrevaleurs de la foi, de la confiance et de la parole donnée que fomente la falsa croisada : perfidie, trahison, mensonge… Elles développent le thème de la décadence, qu’elles associent souvent au bouleversement du droit féodal que provoque l’invasion venue du nord.
Gilduin Davy, « La saga de Vigfúss ou les aléas de la foi dans l’Islande des Sturlungar (fin xiie-milieu xiiie siècle) »
Dans l’Islande médiévale, la foi et l’honneur esquissent un « code » de valeurs primaires nécessaires à la cohésion de la société. Compensant la pauvreté des institutions exécutives, fides et honor participent alors d’un système juridique ancien qui s’attache à constamment préserver l’ordre et le tissu social. À la fin du xiie siècle, l’ère des Sturlungar révèle les carences de ce système et annonce la soumission de l’Islande à la couronne norvégienne.
Jacques Verger, « Juramentum et fides dans les statuts universitaires français du Moyen Âge »
Le serment était omniprésent dans les universités médiévales. Les étudiants en prêtaient à chaque étape de leur cursus, ainsi que les autorités qui avaient affaire aux universités et les gens de métier qui travaillaient pour elles. Les 385serments garantissaient la cohésion institutionnelle de l’université, sa sécurité face aux menaces extérieures et l’harmonie des relations entre ses membres. Mais, trop nombreux, ils pouvaient entrer en contradiction les uns avec les autres, suscitant tensions et conflits.
Thierry Dutour, « Le serment dans l’organisation de la vie publique (espace francophone, xiiie-xve siècle) »
La pratique du serment éclaire les conditions de la participation à la vie publique. Elle apparaît comme la mise en application systématique d’une méthode d’invalidation des raisons de ne pas faire confiance consistant à soumettre l’intervention dans la sphère publique à la promesse de la perpétuation d’une conduite dont l’attestation est déjà requise pour être admis à prêter serment. Elle témoigne du fait que le monde social est un monde moral. Tel est aux xiiie-xve siècles le contrat social.
Frédérique Lachaud, « Fidélité et allégeance dans le cadre des relations anglo-écossaises, fin du xiiie-début du xive siècle »
Dans le cadre des transferts d’allégeance consécutifs à la guerre entre le roi d’Angleterre et les Écossais à partir de 1296, les serments prêtés par les populations en vinrent à tenir un rôle essentiel dans la construction de la domination politique. L’on examine la manière dont le serment de fidélité fut, tout à la fois, utilisé comme une technique dans le processus de conquête de l’Écosse, et considéré comme un but de guerre à part entière.
Mary C. Sommers, « Fides as Fidelitas in Thomas Aquinas »
Chez Thomas d’Aquin le sens premier de fides est celui d’une vertu théologique, dont la définition est donnée à partir de l’Épitre aux hébreux, 11, 1. À côté de la fides existe la fidelitas que Thomas distingue de la foi en Dieu et qui est centrée sur l’exigence de « confiance, franchise, assurance, bonne foi, respect de la parole donnée, loyauté, droiture, acte de protection ou d’aide ». La présente contribution étudie la relation existant chez Thomas entre la vertu théologique de foi et la foi comme fidélité.
386Olivier Hanne, « La fides des Sarrasins et l’īmān des musulmans dans deux traductions latines du Coran (xiie-xiiie siècle)
Pour les lettrés du Moyen Âge, les Sarrasins avaient-ils la foi ou une certaine foi ? Cette perception de l’autre à travers le vocabulaire biblique et patristique correspond-elle à son pendant musulman, l’īmān ? En s’appuyant sur les traductions du Coran de Robert de Ketton (1143) et de Marc de Tolède (1210), l’article identifie dans les Alcoran le vocabulaire latin correspondant à l’īmān, et, à l’inverse, les notions traduites par la fides latine. À travers ces allers et retours sémantiques se joue l’enjeu de la compréhension de l’autre.
- CLIL theme: 3386 -- HISTOIRE -- Moyen Age
- ISBN: 978-2-406-07902-6
- EAN: 9782406079026
- ISSN: 2261-1851
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-07902-6.p.0381
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 08-27-2018
- Language: French