![André Suarès en pleine lumière - [Introduction]](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/YaeMS01b.png)
[Introduction]
- Publication type: Book chapter
- Book: André Suarès en pleine lumière
- Pages: 101 to 102
- Collection: Studies in Twentieth and Twenty-First-Century Literature, n° 109
Immense lecteur, Suarès fut également un magnifique amateur d’art. Dès son enfance, son père l’a emmené aux concerts et lui a appris à apprécier les tableaux. Toute sa vie, le Condottière en garda la passion. Très bon pianiste lui-même, il fut ami de plusieurs artistes, qui comptent parmi ses relations les plus chères : Louis Jou, Antoine Bourdelle, Georges Rouault, Gustave Fayet – pour ne citer que les plus intimes. Art du livre, peinture, gravure, tapis et vitrail, estampe et dessin, sculpture et architecture : tous les arts, en plus de celui – si sacré, si vénéré – de la musique1, ont retenu l’attention du condottière, qui a écrit de nombreux textes sur les artistes d’autrefois comme sur ceux de son temps.
Plusieurs articles de Christian Liger ont débroussaillé la question du rapport de Suarès aux arts – surtout à la peinture2. Yves-Alain Favre a, pour sa part, consacré son premier article sur Suarès au rapport de celui-ci à la musique ; puis ce furent des études sur des textes inédits (Beethoven, Rembrandt), une synthèse très utile sur « Suarès et la critique d’art », et puis l’édition de Pour un portrait de Goya (sujet qu’il développe par une étude comparée de la vision de Goya par Suarès et Malraux). L’édition d’une lettre de Rouault à Suarès non comprise dans l’édition parue en 1960 chez Gallimard témoigne aussi de son inlassable quête des inédits. Malheureusement, l’édition projetée de la grande étude de Suarès sur Rembrandt n’a pas pu être réalisée : il reste au moins un article majeur (jusqu’ici difficile d’accès) qui aide à prendre la mesure de son importance.
La réédition de Musiciens par Michel Drouin en 1986, l’article du même sur le rapport de Suarès à Bach et celui de Pierre Brunel sur la passion de Suarès pour Debussy, ont devancé de quelques années la thèse magistrale de Frédéric Gagneux sur Suarès et le wagnérisme3, et l’édition, due à Stéphane Barsacq, sous le titre Sur la musique, des articles de l’auteur 102parus de son vivant en revue4. Les pistes ne manquent cependant pas, tant sont nombreux les musiciens auxquels Suarès s’est intéressé et dont il a parlé, fût-ce négativement (l’opéra italien par exemple).
Dans le domaine pictural, si des articles récents ont traité des liens de Suarès avec Rouault et avec Picasso (par l’intermédiaire de Vollard)5, l’essentiel du travail reste à accomplir : car rien de consistant n’a été écrit sur l’amitié entre Suarès et Bourdelle, ni (malgré la publication de leur correspondance) sur celle qui réunit Suarès et Jou. (Notons toutefois les belles initiatives – expositions ou lectures – de la fondation Louis Jou et du Musée Bourdelle.) Quant aux relations établies avec Gustave Fayet et avec Jean-Gabriel Daragnès, il reste tout à dire à leur sujet6.
Le plus grand vivier de textes consacrés par Suarès à l’art demeure le Voyage du condottière ; or c’est rarement sous cet angle que l’œuvre la plus célèbre de l’auteur a été abordée (l’ouvrage récent de Giovanni Dotoli7 en propose de longs extraits). C’est qu’aux littéraires ne se sont pas encore associés des historiens de l’art, susceptibles de mettre en évidence ce que le regard de Suarès en Italie a amoureusement scruté et artistement évoqué. Rien non plus n’a été encore écrit sur l’approche suarésienne de la peinture moderne, de Cézanne à Picasso : grâce à Rouault et Vollard, mais aussi grâce à Gustave Fayet et à Jacques Doucet, l’écrivain a pourtant côtoyé des œuvres majeures de Gauguin, Van Gogh, des fauves et des cubistes, jusqu’aux créations les plus récentes.
Antoine de Rosny
1 Rappelons le livre de Jean Astier, La Passion musicale d’André Suarès, avec une préface de Yehudi Menhuin, Privas, Lucien Volle, 1975.
2 « André Suarès et les peintres », Cahiers du sud, no 389, 1966, p. 101-115 ; « Suarès, critique de Puget », Arts et livres de Provence, no 78, 1971, p. 159-161 ; « Suarès, critique de Paul Cézanne », Arts et livres de Provence, no 81, 1972, p. 11-22.
3 Suarès et le wagnérisme, Paris, Classiques Garnier, 2009.
4 Sur la musique, Arles, Actes Sud, 2013. Importante et belle préface p. 7-34.
5 Cf. Bruley 2008 et Rosny 2020a.
6 Cf. toutefois d’Abbadie 2016 et le texte de Fayet sur Suarès publié dans La Couronne littéraire d’André Suarès (Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 335-350).
7 Giovanni Dotoli, Les Artistes italiens d’après André Suarès, Paris, L’Harmattan, 2021.
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- ISBN: 978-2-406-12847-2
- EAN: 9782406128472
- ISSN: 2260-7498
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-12847-2.p.0101
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 03-30-2022
- Language: French