Éditorial Pour un dépôt des archives d’entreprises du bâtiment et des travaux publics dans les institutions publiques de conservation (XVIIIe – XXe siècle)
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Ædificare Revue internationale d’histoire de la construction
2019 – 2, n° 6. varia - Auteur : Carvais (Robert)
- Pages : 13 à 29
- Revue : Ædificare
Éditorial
Pour un dépôt des archives d’entreprises
du bâtiment et des travaux publics dans les institutions
publiques de conservation (xviiie – xxe siècle)
En hommage au professeur d ’ histoire médiévale Jean-Pierre Sosson,
Université catholique de Louvain (1936-2019).
Avant tout, nous souhaitons ici rendre hommage à ce médiéviste discret que fut Jean-Pierre Sosson, qui, à partir de sa thèse magistrale publiée en 1977 sur Les travaux publics de la ville de Bruges, xive-xve siècles. Les matériaux, les hommes1, a renouvelé le savoir en histoire économique et sociale des villes des Anciens Pays-Bas à partir d’exemples tirés du domaine de la construction. Nous nous souvenons que Valérie Theis, Philippe Bernardi et moi-même l’avions invité le 4 avril 2011 à parler dans le cadre du séminaire que nous organisions sur le thème « Économie et construction ». Jeune retraité, il n’avait pas perdu sa vigueur de démonstration et sa foi en la recherche. Pour lui, le thème des « travaux publics » dans le cadre des politiques et gestions économiques de l’État médiéval, avait peu ou pas retenu l’attention des médiévistes. Certes, l’importance des moyens financiers mis en œuvre tout autant que le poids de la conjoncture et le niveau des richesses accumulées sur l’avancement des travaux avait été bien mis en lumière à propos, par exemple, des chantiers des cathédrales. De même, les effets éventuellement négatifs – par raréfaction des investissements productifs, – des sommes englouties sur les économies urbaines avaient été soulignés par Robert Sabatino Lopez dans un article célèbre des 14Annales en 19522. Pour l’essentiel cependant, l’étude des « travaux publics » en tant que symptômes ou manifestations de politiques et de gestions économiques rationnelles demeurait un champ en friche, au moins pour le Moyen Âge. Il n’était peut-être pas dès lors sans intérêt, en prenant appui sur quelques exemples, de se poser deux questions : quelles politiques économiques ? Avec quels moyens ? L’ensemble de ses publications a, entre autre, contribué à essayer de répondre à ces questions fondamentales. Nous ne pouvons rappeler ici sa bibliographie tellement elle est riche3. Il a été l’un des premiers membres de notre association francophone d’histoire de la construction et a également fait partie de son Conseil d’administration. Notre champ vient de perdre un de ses acteurs les plus dévoués. Nous aurons l’occasion de revenir sur tous les aspects et apports de son œuvre. Il est fort probable qu’il eut approuvé la revendication qui suit concernant les archives des entreprises du bâtiment.
Pour un dépôt des archives d ’ entreprises du bâtiment et des travaux publics dans les institutions publiques de conservation (xviii e – xx e siècle)
Nous désirons appeler ici à une collecte plus systématique des archives des entreprises du bâtiment et des travaux publics (xviiie-xxe siècle) pour en faire bénéficier les historiens. Alors que, dans le domaine particulier de la Défense nationale, des historiens se sont récemment émus d’une restriction sans précédent de l’accès aux archives contemporaines au point qu’une tribune de l’Association des archivistes français titrait « Le crépuscule des archives ? Entre accès restreint pour les citoyens 15et les contraintes professionnelles pour les archivistes »4, nous voulons inciter les entreprises du bâtiment et des travaux publics à déposer leurs archives pour en faire profiter notre communauté.
Alors que les architectes ont su s’organiser pour déposer leurs archives dans des institutions de conservation fiables et reconnues5, les archives des entreprises, plutôt considérées comme des archives économiques contenant des « secrets », ne sont sauvegardées que très rarement, tardivement et en général que pour les grosses entreprises privées et publiques dans tous les grands secteurs de l’économie6. En effet, en dehors des grands ténors des BTP – ces derniers possèdent souvent en interne un service dédié –, pour ainsi dire aucune entreprise du bâtiment ne pense à déposer sa mémoire.
Cependant, les archives du monde du travail de Roubaix contiennent par exemple une quarantaine de fonds d’archives d’entreprises concernant le BTP, la construction agricole, mécanique et métallique dont certaines réputées, comme les Établissement Eiffel, la Société de construction des Batignolles qui a déjà fait l’objet de plusieurs études remarquables7. Si l’on 16consulte les archives départementales, on s’aperçoit aisément que nombre de dépôts de ce type ont été effectués et pourraient nous intéresser8.
Un guide-inventaire mériterait d’être tenté à l’instar de celui réalisé en 1989 pour les industries mécanique et textiles9, afin de dresser un état des lieux des fonds disponibles dédiés aux BTP. L’Association francophone d’histoire de la construction10 pourrait être à l’initiative de sa réalisation.
Les entreprises ne devraient plus de nos jours avoir la moindre crainte à déposer leur archives dans des institutions de conservation publique en raison de la mise en place d’assurances de sauvegarde et de protection des documents dans les meilleures conditions possibles, de garanties de classement opéré selon des critères scientifiques reconnus et du respect des desiderata des propriétaires des archives. La politique d’archivage se fonde aujourd’hui sur les principes suivants : la maîtrise des risques ; la conformité à l’environnement règlementaire et à l’optimisation économique des informations conservées et des conditions de conservation des informations.
17Le moment est propice à cette démarche de rassemblement des archives d’entreprises de la construction pour deux raisons : d’une part, le mouvement de sauvegarde des sources s’est internationalisé avec une réflexion multiple dans ce secteur aboutissant à garantir le mieux possible la mise à la disposition des documents au service de la recherche et d’autre part, nous assistons depuis les années 2000 à un mouvement spectaculaire de renouveau européen en histoire de la construction11.
La collecte d’archives d’entreprise pourrait être justifiée par de multiples enjeux :
–leur rareté et leur préciosité en découlant (tant les archives des entrepreneurs que celles des ingénieurs ne sont pas conservées) ;
–servir de preuve aux engagements et à la réalisation des obligations de l’entreprise à l’égard de ses clients, de son personnel et de ses partenaires au-delà des temps règlementaires ;
–il apparaît gênant de ne travailler en histoire de la construction qu’à partir des archives architecturales et des dossiers administratifs des pouvoirs publics ;
–servir de références aux nouvelles actions entreprises par le biais de la mémorisation ;
–comprendre le positionnement stratégique de l’entreprise à l’égard des choix faits en matière de technologie du bâti, d’association ou non avec d’autres entrepreneurs ou certains architectes ;
–mettre en évidence l’identité et l’image de l’entreprise, bref sa culture.
Cette action permettrait sans nul doute deux résultats formidables, outre la découverte de fonds inédits :
–Mettre au jour la véritable identité des artisans-entrepreneurs dans tous les secteurs de l’économie et en particulier dans celui du bâtiment, ce qui pourrait ne leur être que bénéfique.
–Permettre une vague de recherche sans précédent dans ce monde encore très méconnu de l’industrie du bâtiment.
Prenons trois exemples récents d’utilisation de « nouvelles » archives d’entreprises du bâtiment :
18La mise en lumières des archives Blaton par nos collègues Belges fait l’objet d’une première histoire de cette entreprise dans un ouvrage richement illustré à partir de la documentation photographique et écrite dévoilée12. En juillet 2013, des semi-remorques, chargés des archives de l’entreprise bruxelloise de construction Blaton, créée en 1865 et toujours en activité aujourd’hui, se présentent aux portes des Archives d’Architecture Moderne à Bruxelles. Des quantités impressionnantes de plans, de dessins, d’épures y voisinent avec des notes de calcul, des devis et des correspondances ; le tout illustré de photographies : cathédrales de béton, arches monumentales de ponts, voûtes d’usines en majesté, coroles de hangars, poutres de garages aux portées inégalées… sans oublier d’innombrables vues de chantiers. De ces dizaines de milliers de documents émergent, parmi d’autres, des noms d’éminents architectes et ingénieurs : Victor Horta, Henry van de Velde, Victor Bourgeois, Jean-Jules Eggerickx, Gustave Magnel, Alfred Hardy… Un ensemble immense d’archives (255 mètres linéaires, soit plus de 70 m3 de papier) ouvre des perspectives inédites sur plus d’un siècle d’innovations constructives et de créations architecturales et permet de retracer l’histoire d’une entreprise restée familiale. Ce fonds exceptionnel demeure malgré tout incomplet – il existe des lacunes sur certaines périodes, sur certains projets, sur certaines activités, les documents conservés par dossier sont d’intérêt variable – et non véritablement classé, ni inventorié. Son étude permettra pourtant de compléter voire de renouveler l’histoire de la construction belge et coloniale, voire de l’histoire du génie civil et de ses ingénieurs, tant sur les réalisations emblématiques que sur celles totalement anonymes, comme sur les projets jamais réalisés, témoins d’une histoire inédite de la construction.
Le second exemple provient de l’élaboration et du contenu d’une plateforme numérique sur le savoir constructif des xixe et xxe siècles au Portugal, une sorte de cartographie de l’histoire de la construction de ce pays13. Ce procédé, sous le nom de « Portugal Builds 19-20 », permet 19de rassembler une quantité impressionnante de données sous quelques formes qu’elles se trouvent (textes, graphiques, images, sons, films, cartes14, etc.), croisant de ce fait de nombreuses indications sensibles pour une meilleure connaissance de l’histoire constructive du pays : la démographie, le droit, les statistiques sur l’industrie et le commerce, l’utilisation de carrières, les infrastructures, la transformation de paysages, les usines de production de ciment ou de métal, l’enseignement, le travail, le transport, etc. Ces informations proviennent de sources différentes publiées par les sociétés savantes d’histoire et des associations professionnelles du bâtiment et des travaux publics15 et ne font pas particulièrement appel à des archives inédites d’entreprises. Cependant en l’utilisant, on s’aperçoit de la richesse des sources présentées mais surtout combien des archives d’entreprises pourraient en démultiplier l’intérêt, d’autant qu’un des objectifs du projet est d’accroître les contacts et les échanges entre université et décideurs du secteur du bâtiment et de l’aménagement du territoire. Il faut espérer que l’accès aux archives d’entreprises s’ouvre à cette occasion. Le site propose trois modalités d’entrée : celui d’expositions virtuelles : la première est celle présentant les entrepreneurs du Portugal au xxe siècle ; la seconde (à venir) est dédiée aux 1100 travaux publics réalisés par les quatorze plus grandes entreprises du Portugal ; la troisième devrait concerner les chemins de fer et les ports dans la seconde moitié du xixe siècle. Une autre modalité pour voyager sur le site utilise le biais des collections autour de quatre axes : les acteurs collectifs (institutions, associations, administrations 20publiques, etc.), les acteurs individuels (entrepreneurs, architectes, ingénieurs), les objets concrets (bâtiments, travaux publics, matériaux et machines) et les objets abstraits (lois, brevets, publications, etc.). La dernière modalité est l’item, comme unité informationnelle.
En ce qui concerne le troisième exemple, nous nous permettons de renvoyer à une expérience personnelle. Nous avons exhumé et étudié aux Archives départementales d’Ille-et-Vilaine les papiers de l’entrepreneur des travaux publics de Rennes Pierre-Théodore-Marie Louise (1782-1841) qui déroule ses activités constructives depuis les années 1820. La constitution de ce fonds (65 J 1-35) est assez inattendue puisqu’il a été dans un premier temps acheté pour une grosse partie en 1991 (vingt-cinq lots), puis acquis lors de deux ventes aux enchères successives : trois lots en 2003 et sept lots en 2004. Lors de cette dernière vente, nous nous sommes rendu acquéreur d’un lot de papiers divers de l’entreprise, par peur de les voir disparaître entre les mains de particuliers, ignorant à ce moment que le reste avait été acquis par une institution de conservation publique16. Les ouvrages concernés sont des plus divers : des travaux publics, comme la construction du Canal d’Ille-et-Rance, des travaux pour la ville de Rennes, comme l’élévation du théâtre de ladite ville ou la percée de la rue Victor Hugo, et des travaux privés, comme des immeubles d’habitations, des maisons individuelles ou des ateliers. Les dossiers peuvent aussi n’intéresser que des réparations ou des aménagements d’éléments architecturaux (portiques, clocher, pignon de magasins et bureaux). L’intérêt historique d’un tel fonds se révèle immense tant la nature et le contenu des documents qui s’y trouvent apportent des réponses multiples, précises et parfois totalement neuves à une foule d’interrogations complexes que les chercheurs se sont posées sur le déroulement des chantiers de construction à travers le temps. Nous ne devons pas ignorer la prudence et les précautions avec lesquelles ces archives incomplètes et souvent désordonnées doivent être traitées (usage du sens critique, remise en contexte interne et externe, accepter les trous noirs, etc.). Dans les archives de l’entreprise Louise, nous avons repéré cinq axes de recherches novateurs pour l’histoire du chantier : 1/- la radiographie du bâtiment construit à travers l’étude et l’analyse des plans et des croquis aux multiples facettes (gravures de présentation, plans d’exécution tant de la structure que des détails architecturaux, dessins techniques 21de mécanique pour les machines, dessin d’appareillage de maçonnerie, dessins d’assemblage de charpenterie, etc.) ; 2/- les mentalités des gens de chantier à travers l’examen des correspondances dont sont souvent conservés les brouillons des requêtes allant de pair avec les réponses : celles-ci dévoilent les relations de confiance ou de méfiance à l’égard des partenaires, des confrères, des concurrents, les rapports hiérarchiques dans les relations de travail, les considérations sur la main d’œuvre ouvrière locale, étrangère, et l’humeur à l’égard des tracasseries administratives et judiciaires ou des mauvais payeurs ; 3/- L’organisation du travail sous l’angle social, économique voire comptable : les archives permettent d’approfondir les directives sur le travail, les modalités du temps dédié au labeur, la vie sur le chantier, de découvrir les « sans voix » au bas de l’échelle sociale à travers les feuilles de paie, les contestations à leur égard, le tableau comptable du suivi des opérations réalisées selon les devis, en dehors des devis, voire supprimées, comme les modifications du projet en cours de chantier ; 4/- la mesure, qualité et forme des matériaux, des machines, des outils et accessoires : les archives conduisent à suivre ces objets de leur production ou extraction à leur usage et utilisation, elles exposent le choix des produits grâce aux procédés d’échantillonnage ou d’expérimentation, les variantes des méthodes de toisé, l’examen des processus de fabrication des voûtes, des escaliers, des planchers, des charpentes, etc. ; 5/- les rapports juridiques entre les parties à l’acte de bâtir d’après les marchés et devis, les cahiers des charges, les adjudications, les contrats de fourniture, les procès-verbaux de réception des travaux avec les réserves le cas échéant, la règlementation contre l’incendie, la livraison et décharge de responsabilité, les procès-verbaux d’expertise, comme les dossiers judiciaires préparatoires avec confrontation d’arguments entre les parties17.
22Les archives d’entreprises du bâtiment sont essentielles pour faire de nouvelles découvertes, approfondir nos acquis en histoire de la construction et ouvrir de nouvelles perspectives. Dans cette aventure, il est incontournable d’associer les organisations syndicales du bâtiment à l’échelle française, voire à l’internationale, à notre démarche. Celles-ci auraient tout à gagner, même si nos objectifs par définition comme chercheurs sont complémentaires de ceux des entreprises. Ainsi nous souhaitons ici lancer un appel aux Fédérations patronales du bâtiment comme aux syndicats ouvriers pour inciter les entreprises à déposer leurs archives dans des lieux de conservations publics. L’éthique de ces établissements garantirait leur sauvegarde et leur mise en valeur.
Présentation du numéro
Ce sixième numéro de la revue est le second à être constitué tel un varia, sans thème fédérateur, depuis la naissance d’Ædificare, au gré des envois de contributions librement proposées à publication. S’il fait apparaître le thème des matériaux comme central en histoire de la construction, puisque cinq articles sur sept y consacrent le cœur de leur démonstration (dans l’ordre le fer et le plomb, le grès cérame, l’acier et le bois, la terre crue et le bois), les auteurs adoptent souvent des approches différentes. Tantôt les sources varient pour retracer l’histoire de l’usage du matériau : les comptabilités de fabriques (Charles Viaut), l’analyse archéologique et matérielle (Maxime L’Héritier), la littérature technique (Valentin Gilet) ou encore la règlementation de métier (Camille Fabre). Tantôt le matériau est un prétexte pour poser et tenter de répondre à une question de fond transversale comme par exemple, quelle autorité détient le pouvoir de normaliser un matériau (Carles Sánchez) ? Ou bien comment des systèmes constructifs préfabriqués, légers et démontables en acier et bois, inventés dans un contexte colonial, ont contribué à développer plus tard la préfabrication des façades légères et des cloisons intérieures associées à des structures en béton armé dans un tout autre contexte politique (Laura Greco) ? Ou encore comment comprendre le véritable enjeu du renouveau de l’utilisation des briques en terre crue en 23Afrique du Nord : la renaissance d’une méthode vernaculaire ou la mise en application d’un passé colonial plus récent (Nadya Rouizem Labied) ?
– Sur ce thème récurrent des matériaux, dans ce numéro, Maxime L’Héritier dresse un bilan interdisciplinaire des travaux réalisés, ces vingt dernières années, sur les usages du métal (fer et plomb) dans les grands monuments médiévaux, principalement religieux, mêlant les sources archivistiques comptables, les données archéologiques (emplacement du métal dans le bâti, quantification) et les résultats d’analyse archéométrique (nature métallographique, comportement mécanique, identification du processus de production et de sa provenance, datation). Ces dernières renouvellent entièrement les connaissances antérieures sur le métal médiéval (sa nature hétérogène, la complexité de ses origines et l’importance du recyclage).
Valentin Gillet propose, quant à lui, l’histoire de la fabrication du carreau de grès cérame en France qui servit de revêtement aux ossatures de béton armé lors de l’introduction de ces derniers dans l’architecture parisienne au début du xxe siècle. L’auteur fonde principalement son propos sur l’analyse de la littérature technique entre 1840 et 1920. Il expose le processus complexe de fabrication du matériau à travers une suite de multiples manipulations et l’utilisation de puissantes machines (appareils servant au broyage des pâtes, presses hydrauliques façonnant les carreaux et fours à flamme inversée pour la cuisson). Son analyse devrait permettre de pouvoir identifier et interpréter les marques laissées à la surface des carreaux qui évoluent tout au long de leur fabrication.
Laura Greco expose les systèmes constructifs préfabriqués développés par des entreprises italiennes des années 1930 à destination de ses colonies (hôpitaux, baraques militaires, habitats résidentiels et bureaux administratifs), caractérisés par des principes flexibles et peu coûteux de rapidité d’assemblage et de réversibilité. Pour certains, les cloisons en sandwich privilégiaient une isolation thermique et acoustique et la couverture était réalisée par des feuilles d’acier et des plaques de fibrociment ; pour d’autres, le système s’organisait autour de poutres en treillis aménagées par des piliers métalliques avec une couverture constituée de fermes métalliques posées sur lesdits piliers. Au-delà des modes constructifs proposés, l’auteur démontre comment ses entreprises ont su, malgré la Seconde Guerre mondiale, transformer leur production de l’époque pour 24le marché intérieur du bâtiment en développant une nouvelle expérimentation de façades légères et de cloisons intérieurs préfabriquées.
Nadya Rouizem Labied tente de comprendre pourquoi et comment un processus constructif local, traditionnel, voire vernaculaire, en l’occurrence l’usage de la terre crue, a pu être récupéré dans un contexte néo-colonial. En effet, l’ingénieur Français Alain Masson propose la construction de 2750 unités d’habitation sociale dans le quartier Daoudiate de Marrakech au Maroc en briques de terre crue. En usant d’une structure fonctionnaliste dans le découpage de l’espace, et malgré la conservation de l’introversion de l’habitat et d’un patio, ce constructeur ne détourne-t-il pas les valeurs culturelles de ce pays du Maghreb ? L’usage d’un matériau traditionnel, tout en rationalisant sa production par l’usage de presses mécaniques, sa pose grâce au ciment et en en développant une quasi préfabrication, a-t-il permis de faire accepter à l’État la modernisation de la construction locale ? Une telle expérimentation pourrait-elle servir de point de référence dans le contexte actuel de crise environnementale que nous rencontrons ?
– Trois autres thèmes essentiels en histoire de la construction sont abordés dans ce numéro : l’un est un thème émergent prometteur : celui de la réparation et de l’entretien des constructions ; les deux autres sont des thèmes classiques aujourd’hui revisités : celui des conditions de travail et de financement du chantier et celui de l’organisation de métiers du bâtiment. Si construire et démolir sont des actions initiales et terminales de l’acte de bâtir – voire inversement car souvent la démolition précède la construction –, les réparations et travaux d’entretien, d’agrandissement, de restructuration voire d’amélioration, se déroulent régulièrement durant la vie du bâtiment. La dégénérescence du bien construit par l’effet naturel du temps, autrement dit par sa vétusté ou par la négligence des propriétaires ou des occupants, bref du manque d’entretien, pose inévitablement une question fondamentale qui a peu retenu l’attention des historiens, celle de la durée potentielle d’une construction18. Au regard du droit, nous rattachons cet aspect du temps 25d’épreuve comme garantie à la durée de la responsabilité du maître d’œuvre (origine romaine de la biennale et de la décennale). Il s’agit des modes de responsabilité mettant en cause les actions fautives du maître d’œuvre (en cas de responsabilité délictuelle) ou l’inexécution d’une clause d’un contrat (en cas de responsabilité contractuelle), des dommages causés et des « réparations » du préjudice pour parler en termes juridiques. Mais alors quid de la vétusté naturelle sur les constructions et des moyens d’y remédier ? C’est ici la question essentielle de l’entretien et des réparations19. En ce qui concerne la construction, nous avons démontré qu’en théorie, la question est traitée abondamment, et avec détail, dans le droit du xviiie siècle, voire auparavant20. Dans la recherche que nous menons actuellement collectivement sur les expertises du bâtiment21, nous pouvons dès à présent affirmer qu’environ 30 % des procès-verbaux concernent principalement, voire accessoirement, des travaux de réparations, c’est dire leur importance en pratique. Nous pouvons nous poser 26alors la question du sens à donner à cette protection réparatrice du bâti. Doit-on y voir une volonté de profit ou une conscience patrimoniale ?22
Dans ce numéro, Charles Viaut présente une analyse serrée de la comptabilité de la Châtellenie de Talmont (Vendée) datée du xve et du début xvie siècle, consacrée à l’entretien et à la réparation des bâtiments de cette seigneurie rurale. Cette étude archivistique approfondie permet à l’auteur des comparaisons utiles avec des données archéologiques afin d’apprendre davantage sur le thème de l’organisation des chantiers quant aux acteurs engagés (si le seigneur est le commanditaire, ses officiers jouent le rôle de contrôleurs des travaux des ouvriers qualifiés qui demeurent les plus nombreux à œuvrer et qui sont regroupés dans des métiers où la tradition familiale reste déterminante) et celui de l’économie de la construction (quel type de marché pour quels matériaux ?).
Quant aux deux thèmes classiques revisités, celui du chantier dans ses modalités salariales et financières et celui de l’organisation des métiers, rappelons ici l’état des lieux dressé par l’Institut international d’histoire économique Datini lors de ses 36e rencontres consacrées à la construction avant la révolution industrielle23, le contenu des nombreux congrès nationaux et internationaux d’histoire de la construction qui dédient souvent des axes entiers au chantier sous l’angle historique24 ou la première synthèse réalisée sur la rémunération du travail sur le vaste territoire européen et sur le long Moyen Âge, voire au-delà, sous l’angle de l’histoire sociale25. Quant à la règlementation des métiers, si souvent analysée depuis la fin du xixe siècle jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale, elle a été un champ souvent remis en cause et critiqué du fait de son accaparement par des juristes et de son détournement par les idéaux vichyssois. Elle fait l’objet depuis 2017 d’une série de quatre 27colloques sur le thème des « formes de réglementation des métiers dans l’Europe médiévale et moderne : créations et renouvellements » dédiés successivement aux types de contenant de la règle, aux auteurs, aux contenus et modalités ainsi qu’à leurs inscriptions spatiales26.
Dans ce numéro, Carles Sánchez démontre, à partir de l’étude de nouvelles et volumineuses archives juridiques (contrats, accords, bénéfices, etc.), la part importante de protection que l’Eglise et le roi accordent aux maîtres d’œuvre (« architectes » et gens de métier) dans l’Espagne médiévale telles des exemptions du paiement de certaines taxes, mais aussi le choix de nouvelles modalités de rémunérations plus confortables que celles ordinaires (salaire à la journée, au mois ou à la tâche), comme un traitement annuel ou l’allocation de prébendes, réservés habituellement au clergé, et de privilèges spécifiques.
Dans la seconde partie de la revue qui propose des articles de nature et de forme différentes des articles scientifiques courants, Camille Fabre propose l’édition critique, et la traduction en français, du préambule en latin et du corps du texte en occitan, du statut édicté en 1422 par les capitouls de Toulouse, réglementant le métier des fustiers (marchands de bois d’œuvre) de cette ville. C’est toujours un immense plaisir de pouvoir découvrir, par la lecture d’abord, une nouvelle source marquante et inédite de l’histoire des métiers du bâtiment et ensuite de pénétrer l’analyse d’un texte emblématique dans sa mise en contextes. Tout d’abord, nous apprenons, contrairement à ce que l’on aurait pu croire, que la copie du statut édité provient des archives d’un notaire qui cumulait ses activités au service de la commune avec sa pratique privée et qu’elle possède autant d’autorité que les versions du statut écrites pour les capitouls et pour les bayles des fustiers. Ce texte constitue, selon l’expression de Florent Garnier, comme nous le rappelle l’éditeur, une « chaîne de statuts », c’est-à-dire qu’il reprend et intègre toutes les versions antérieurs du texte de 1273 à 1422 (ordonnancement respecté, articles identiques), tout en s’en distinguant (amplification du champ 28concerné : apparition du « rasal »27 et commerce du bois de chauffage, utilisation de l’occitan à la place du latin). Alors que le statut de 1273 est d’autorité royale, le statut ici édité apparaît d’emblée comme une affirmation et une consolidation du pouvoir consulaire (maîtrise de l’approvisionnement en période de pénurie de bois d’œuvre, police des mesures et des prix face à des troubles monétaires). Mais, à y regarder de près, ce texte correspond aussi et surtout à l’affirmation des professionnels du secteur. Répondant à une plainte portée par les bayles et les « probi homines » du métier et faisant suite à une enquête menée par les mêmes acteurs, il apparaît que le texte a été rédigé par les fustiers eux-mêmes et proposé à l’approbation des capitouls. Cette rupture est accentuée par l’aboutissement d’un mouvement d’unification entre les différentes organisations composant géographiquement le métier (association des fustiers de Tounis et celle de Saint-Cyprien). Mais elle représente probablement aussi un moment de clarification dans la direction du métier assurée informellement par des « probi homines » et la nomination systématique des bayles. Enfin, suite à l’analyse par l’éditeur des caractères confraternels dans le statut de 1422, il ressort que ce dernier apparaît comme la confirmation d’un renforcement de structure du trafic de bois autour de Toulouse.
La nouvelle décennie s’ouvre sur des mouvements sociaux devant lesquels notre revue ne peut rester ni insensible ni indifférente. Le comité éditorial a décidé de soutenir le mouvement des revues en lutte contre le projet de réforme des retraites et la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR). Telle qu’elle est annoncée la LPPR est très loin de répondre aux principales difficultés auxquelles sont confrontés les chercheurs, enseignants-chercheurs, ingénieurs et techniciens. Ces orientations menacent l’emploi scientifique statutaire, les moyens de fonctionnement des laboratoires, les conditions de travail et risquent d’accentuer encore le déclin du potentiel de recherche au sein des universités, des grands établissements et du CNRS.
Nous appelons les parlementaires à écouter la communauté des chercheurs et enseignants-chercheurs unanimes à rejeter ce projet et nous les invitons à mener une vraie concertation pour améliorer le potentiel des 29unités de recherche, notamment dans le secteur des sciences humaines et sociales, pour lesquelles les procédés d’investigation s’opèrent sur le long, voire très long, terme et sont par nature incompatibles avec la mise en place systématique de contrats précaires, notamment des « contrats de chantier ». Nous les inciterions à méditer cette phrase d’Albert Camus …
L’histoire n’est que l’effort désespéré des hommes
pour donner corps aux plus clairvoyants de leurs rêves.
Albert Camus, Combat, 1948
in Actuelles, I, Chroniques (1944-1948),
Paris, Gallimard, 1950, p. 169.
Bonne lecture.
Robert Carvais
1 Bruxelles, Crédit communal de Belgique. Collection Pro Civitate, série in-8o, 48.
2 Robert Sabatino Lopez, « Économie et architecture médiévales : Cela aurait-il tué ceci ? », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 1952, no 4, p. 433-438.
3 Nous renvoyons cependant nos lecteurs à la base de données bibliographique médiévale du site des Regesta Imperii[Ce projet de l’Académie des sciences et de la littérature de Mayence (Allemagne) entend rassembler, sous forme d’extraits, des éléments de l’histoire médiévale à partir des sources juridiques et littéraires du Saint-Empire romain germanique entre ca. 751 et 1519] qui recense soixante entrées pour Jean-Pierre Sosson (http://opac.regesta-imperii.de/lang_en/autoren.php?name=Sosson%2C+Jean-Pierre, consulté le 08/03/2020).
4 https://www.archivistes.org/Le-crepuscule-des-archives-Entre-acces-restreint-pour-les-citoyens-et (consulté le 08/03/2020)
5 Sonia Gaubert et Rosine Cohu sous la direction de David Peyceré, Gille Ragot avec le concours de Christine Nougaret, Archives d’architectes : États des fonds, xixe-xxe siècles, Paris, Institut Français d’Architecture, Direction des Archives de France, la Documentation française, 1996 ; Déborah Pladÿs, Les archives des architectes conservées aux Archives nationales du monde du travail(Roubaix), Liste des fonds disponibles arrêtés au 8 septembre 2017, disponible en ligne [consultée le 13/10/2018, http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr/camt/fr/publications/donnees_brochures/Architectes_BR.pdf]. Certaines régions ont constituées des commissions à des fins de collecte des archives des architectes locaux. Voir à ce sujet celle des archives d’architecture, d’urbanisme et du paysage de Midi-Pyrénées : voir le site dédié : http://archives.haute-garonne.fr/que_faire/architectes4.html, consulté le 13/10/2018.
6 Zuber Henri, « Les archives d’entreprise en France : bilan et perspectives », La Gazette des archives, no 213, 2009-1, Les archives, patrimoine et richesse de l’entreprise, p. 43-51, DOI : https://doi.org/10.3406/gazar.2009.4529. Consulter également un autre éclairage sur ce sujet auquel la revue Entreprises et Histoire consacre un numéro en 2009/2 (no 55) « Tendances de l’histoire des entreprises ». Sur les archives, consulter spécialement l’article de Roger Nougaret, « Les archives d’entreprises en France en 2009 » (p. 67-73) et le débat sur « Les archives d’entreprises : ressource potentielle ou nouvelle contrainte ? » (p. 111-123). Voir à titre comparatif pour la Belgique, Madeleine Jacquemin, « Les fonds d’archives d’entreprises conservés aux Archives générales du Royaume », in Martine Aubry, Isabelle Chave et Vincent Doom (dir.), Archives, archivistes, archivistique dans l’Europe du Nord-Ouest du Moyen Âge à nos jours. Entre gouvernance et mémoire, Villeneuve d’Ascq, Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion, 2012, p. 81-89. Consultable en ligne [consulté le 13/10/2018] https://books.openedition.org/irhis/148?lang=fr.
7 Rang-Ri Park-Barjot, La société de construction des Batignolles. Des origines à la Première Guerre mondiale (1846-1914), Paris, Presses de l’université de la Sorbonne, 2005 ; Anne Burnel, « La Société de construction des Batignolles de 1914 à 1939, histoire d’un déclin », Histoire, économie et société, 1995, 14e année, no 2. Entreprises et entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics (xviiie-xxe siècles) sous la direction de Dominique Barjot, p. 301-315. DOI : https://doi.org/10.3406/hes.1995.1775.
8 Voir par exemple, Archives départementales du Rhône, Entreprise Pommerol, Bâtiment et travaux publics, 1882-1982, 118 J 1-209, Répertoire méthodique rédigé par Olivier Ferré, adjoint du patrimoine, 2009, 10 pages (http://archives.rhone.fr/accounts/mnesys_cg69/datas/medias/IR_pour_internet/118 %20J.pdf, consulté le 08/03/2020) ou Archives départementales de la Côte d’Or, Entreprise Detouillon, Travaux publics de la commune de Talant (21240), 1948-1982, 27j 1-73, Classement retroconverti par Antoine Lachot, stagiaire, sous la direction d’Edouard Bouyé, Dijon, 2015 (consulté le 08/03/2020, https://archinoe.fr/console/ir_ead_visu.php?PHPSID=c44d8ba569d2afe20bf2632b5922984e&ir=23516#.XmUlgPRCfIU) [Nous y apprenons qu’à la suite de multiples transactions, les documents de l’entreprise ont été abandonnés dans un terrain vague, protégés des intempéries par une bâche. Elles ont été récupérées en septembre 1984, suite au signalement de Maître Curé, syndic à Dijon. La plupart des documents étaient dans un tel état qu’il a été impossible de les identifier. Environ un dixième du fonds seulement a pu être remis aux Archives départementales. Nous pourrions également citer les archives de l’entreprise Silviéro, constructeur d’immeubles d’habitation dans le département, 1959-1978, Archives départementales des Yvelines, 88 J 1-148.
9 Bibliothèque nationale de France, Département des livres imprimés, Département des entrées étrangères, Archives d’entreprises du xixe Siècle. Industrie mécanique, industrie textile, avec une introduction de Claire Moisset, Alain Cottereau, Jean-Pierre Daviet, et Laurent Thévenot, Paris, Bibliothèque nationale de France, 1989 (Collection Études Guides et Inventaires no 13).
10 http://www.histoireconstruction.fr/ (consulté le 08/05/2020).
11 Antonio Becchi, Robert Carvais et Joël Sakarovitch (dir.), L’Histoire de la construction/ Construction History. Relevé d’une chantier européen/Survey of a European Building Site, Paris, Classiques Garnier, 2 vol., 2018.
12 Voir Yaron Pesztat (dir.), avec Maurice Culot, Rika Devos, Bernard Espion, Armande Hellebois, Yaron Pesztat, Michel Provost et Jens Van de Maele, Blaton. Une dynastie de constructeurs. Een dynastie van bouwers, Bruxelles, Éditions AAM, 2017.
13 Le site est consultable en anglais et portugais à l’adresse : https://portugalbuilds.org/ (consulté le 09/03/2020). Ce projet est dirigé par João Mascarenhas Mateus (FAUL-CIAUD), président de l’association sœur portugaise Sociedade Portuguesa de Estudos de História da Construção et l’équipe y travaillant est composé de chercheurs venant de plusieurs horizons disciplinaires (architecture, ingénierie, histoire sociale et économique, humanités numériques et patrimoine culturel de l’université de Lisbonne et de la Nouvelle Université de Lisbonne (Nova) : co-IR Sandra M.G. Pinto (CHAM-NOVA FCSH), José Aguiar (FAUL-CIAUD ARCHC_3D), Ivo Veiga (FAUL-CIAUD), Ana Paula Pires (IHC, NOVA FCSH), Daniel Alves (IHC, NOVA FCSH), Manuel Caiado (FAUL-CIAUD) et Julia Lyra (IHC, NOVA FCSH). Pour plus d’information sur le projet, cf. João Mascarenhas Mateus y Ivo Veiga “Portugal Builds : una plataforma digital para la historia de la construcción en Portugal en los siglos XIX y XX”, Estudos Históricos. Rio de Janeiro, vol. 33, p. 88-110, Janeiro-Abril 2020 (DOI : http://dx.doi.org/10.1590/S2178-14942020000100006.
14 Chaque siège d’entreprise et lieu d’implantation des constructions devraient être géo localisés.
15 Toutes les sources sont référencées. Elles proviennent principalement des périodiques spécialisés en construction, architecture, génie civil, industrie etc., mais aussi d’archives publiques comme celles des Archives nationales de Torre do Tombo, de la bibliothèque nationale digitale, des blogs d’anciens ouvriers d’entreprise du bâtiment mais aussi des sites des entreprises elles-mêmes.
16 Nous nous engageons à faire don des dossiers acquis aux AD d’Ille-et-Vilaine.
17 Ces archives nous ont permis de publier « Le renouveau des recherches sur les populations du bâtiment. Une histoire de sources et d’échelles » (avec Valérie Theis) dans Arnaldo Sousa Melo et Maria do Carmo Ribeiro (dir.), História da Construção : Os construtores, Colóquio História da Construção : A população dos construtores, 29-30 octobre 2010, Universidade do Minho, CITCEM, Braga (Portugal), 2011, p. 11-31 ; « La construction de la salle de spectacles de Rennes (1831-1839) ou L’incroyable expérience d’une maître d’œuvre d’exécution, seul responsable à ses dépens », in Robert Carvais et Cédric Glineur (dir.), L’État en scènes. Théâtre, opéras, salles de spectacles du xvie au xixe siècle. Aspects historiques, politiques et juridiques, Amiens, Ceprisca/Lextenso, 2018, p. 33-55. Beaucoup reste à écrire à partir de ces archives.
18 Voir néanmoins, Hélène Dessales, « De Architectura, construire pour durer : Vitruve face à l’obsolescence » in Julien Zurbach (dir.), Passés croisés, passés composés. Perspectives à partir des « classiques », colloque international ICSCC Fudan – Labex Transfers, 25-26 janvier 2019 (à paraître aux Presses de l’ENS). L’autrice trouve chez Vitruve finalement les traces d’une durée potentielles de certaines maçonneries n’excédant pas ses 80 ans. Des critères intrinsèques des matériaux permettent d’établir une capacité de durabilité aux bâtiments. Si certains bâtiments sont destinés à défier l’obsolescence, il convient que le bâtiment ait été élevé sans défaut de construction (uitia) et sans action du temps (vetutas) ce qui semble peu crédible pour obtenir des bâtiments éternels ! Voir pour aujourd’hui, Marc Méquignon, « Durée de vie et développement durable », Les cahiers de la recherche architecturale et urbaine, 2012, 26/27, p. 225-232.
19 Charles Davoine, Ambre d’Harcourt et Maxime L’Héritier (dir.), Sarta Tecta. De l’entretien à la conservation des édifices. Antiquité, Moyen Âge, début de la période moderne, Aix-en-Provence, Presses Universitaires de Provence, 2019 (Bibliothèque d’Archéologie Méditerranéenne et Africaine, 25). Au-delà de la construction, la question a été renouvelée par Liliane Hilaire-Pérez, La pièce et le geste. Artisans, marchands et savoir technique à Londres au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, Coll. L’évolution de l’Humanité, 2013 ; voir également le colloque international sur « Les réparations de la préhistoire à nos jours : cultures techniques et savoir-faire », Paris, 26-28 juin 2019, organisé par Gianenrico Bernasconi (Université de Neuchâtel), Guillaume Carnino (UTC-COS-TECH), Liliane Hilaire-Pérez (Université de Paris-ICT/EHESS-Centre Alexandre Koyré), Olivier Raveux (CNRS/TELEMMe) (à paraître).
20 Voir notre contribution « Entretenir les bâtiments. Une préoccupation juridique essentielle chez les architectes sous l’Ancien Régime », in Charles Davoine, Ambre d’Harcourt et Maxime L’Héritier (dir.), Sarta Tecta, op. cit., p. 23-35.
21 Nous portons un projet de recherche pluridisciplinaire soutenu par l’ANR (2018-2022) sur « Pratiques des savoirs entre jugement et innovation. Experts, expertises du bâtiment, Paris 1690-1790 » qui associe les partenaires suivants : Michela Barbot (historienne de l’économie, CNRS, IDHES Cachan, UMR 8533), Emmanuel Château-Dutier (historien de l’art et spécialiste en humanités numériques, Faculté des arts et sciences – Université de Montréal) et Valérie Nègre (historienne des techniques, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – IHMC) et les collaborateurs : Juliette Hernu-Bélaud, Léonore Losserand et Josselin Morvan.
22 Ces hypothèses de réponses ne sont pas exclusives l’une de l’autre. Peut-être y-a-t-il même d’autres explications ? Seule une analyse fine au cas par cas de notre corpus permettra de distinguer les fondements multiples des réparations.
23 Simonetta Cavaciocchi (ed.), L’Edilizia prima della Rivoluzione industriale secc. XIII-XVIII, Atti della « Trentaseiesima Settimana di Studi », Istituto Internazionale di Storia Economica « F. Datini », Prato (Italie), Le Monnier, 2005.
24 Il serait trop long de citer ici toutes ces publications. Contentons-nous de mentionner les actes du 3e Congrès francophone (Nantes, 21-23 juin 2017) qui viennent de paraître et qui sont éloquents à ce sujet : Gilles Bienvenu, Martial Monteil et Hélène Rousteau-Chambon (dir.), Construire ! Entre Antiquité et époque contemporaine, Paris, Picard, 2019, 1314 p.
25 Patrice Beck, Philippe Bernardi et Lauren Feller (dir.), Rémunérer le travail au Moyen Âge. Pour une histoire sociale du travail, Paris Picard, 2014.
26 À l’initiative de Philipe Bernardi (CNRS) et d’Arnaldo Sousa Melo (Université de Minho, Braga, Portugal), le groupe de recherche est constitué de Caroline Bourlet (IRHT), Catherine Kikuchi (Université de Versailles Saint-Quentin), Maxime L’Héritier (Université Paris 8), Corinne Maitte (Université Paris-Est Marne-la-Vallée), Mathieu Marraud (EHESS-CRH), Judicaël Petrowiste (Université Paris-Diderot), François Rivière (EHESS), Jean-Louis Roch (Université de Rouen – GRHis) et moi-même (CNRS).
27 Sur le canal du Midi, pièce de bois de 12 à 14 mètres de longueur.
- Thème CLIL : 3076 -- TECHNIQUES ET SCIENCES APPLIQUÉES -- Architecture, Urbanisme
- ISBN : 978-2-406-10690-6
- EAN : 9782406106906
- ISSN : 2649-177X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10690-6.p.0013
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 09/08/2020
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : Archives d'entreprises, matériaux, réparation et entretien, condition de travail, financement du chantier, organisation des métiers