Résumés des contributions
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Histoire de l’édition. Enjeux et usages des partages disciplinaires (xvie-xviiie siècle)
- Pages : 431 à 437
- Collection : Constitution de la modernité, n° 38
Résumés des contributions
Sophie Abdela, Maxime Cartron et Nicholas Dion, « Introduction. L’ordre et le support »
Grande refoulée d’une certaine historiographie constituée comme discipline globale, l’histoire de l’édition a pourtant un impact considérable sur les historiographes, qui fondent leurs analyses sur des choix matériels : le monde de l’édition conditionne par son agentivité l’histoire des disciplines.
Anthony Glinoer, « Les figurations d’éditeurs avant Illusions perdues »
Illusions perdues est généralement considérée comme l’une des premières œuvres littéraires à transformer la vie littéraire en roman. Mais la figure de Dauriat est-elle réellement exceptionnelle ? Le présent article explore les figurations antérieures de l’éditeur dans la fiction pour conclure que si Dauriat est devenu une figure notoire, c’est moins en raison de son originalité, que parce qu’il cadrait pour le mieux avec les autres figurations de la vie littéraire et du monde de l’édition.
Marie-France Guénette, « La traduction comme processus d’interférence éditoriale. L’agentivité au cœur de la question »
En retraçant l’itinéraire du concept de l’agentivité en traductologie au cours des trente dernières années et en montrant son utilité pour révéler les agents participant à la production et la dissémination des traductions, l’article démontre la fécondité du concept en faisant état de l’apport de l’agentivité aux études descriptives de la traduction (DTS), aux approches culturelles, à l’histoire de la traduction et à la sociologie de la traduction.
432Tiffany Premand, « Les transferts culturels avant la traduction. Le cas de Gamaches »
L’article se penche sur le Système du cœur de Gamaches et sur l’influence de l’Inquiry Concerning Virtue or Merit du philosophe anglais Shaftesbury que la pensée de l’auteur laisse voir, bien avant la traduction française qu’en donne Diderot en 1745. Il en ressort que les idées circulent d’un pays à l’autre en dehors des canaux traditionnels comme la publication d’une traduction.
Hans-Jürgen Lüsebrink, « L’édition des encyclopédies et de leurs traductions, xviie-xviiie siècles. Spécificités historiques, dimensions éditoriales, enjeux (inter-)disciplinaires »
L’article met à profit les récents outils numériques pour mesurer la pleine ampleur de la circulation des encyclopédies dans l’Europe de la première modernité et reconstituer l’évolution de ce champ éditorial, entre autres à la lumière du rapport entre le latin et les langues vernaculaires. L’étude du Dictionnaire universel du commerce des frères Savary des Bruslons révèle à quel point les impératifs du marché du livre ont influencé le contenu des différentes éditions de cette encyclopédie.
Benjamin Deruelle et Laurent Vissière, « La Nef des batailles (1502) de Robert de Balsac. Un traité militaire entre imprimé et manuscrits »
L’article examine un exemple de génétique éditoriale : celui de La Nef des batailles de Robert de Balsac. En appréhendant conjointement les sept manuscrits connus et les trois différentes versions imprimées de ce texte, il s’agit de dévoiler les effets de lecture induits par la prolifération de ses reprises et de ses réagencements. La Nef des batailles devient en quelque sorte un objet éditorial modulable et modelable en fonction des intérêts politiques de ses usagers.
Jean-François Vallée, « Métamorphoses d’un livre. Le cas du Cymbalum Mundi (première partie, xvie-xviiie siècles) »
L’article se penche sur les transformations matérielles, contextuelles et herméneutiques qui s’attachent à la publication de plusieurs éditions du Cymbalum mundi. En suivant la trace de ce recueil depuis sa première publication jusqu’au xviiie siècle, l’enjeu est de montrer la pérennité de l’opposition 433entre deux lectures radicalement différentes de cette œuvre : la première l’envisage comme libertine et dissidente, la seconde y voit au contraire un texte relativement inoffensif.
Kilyan Bonnetti, « De l’Épître à Uranie au Pour et le contre. Variation et diffusion d’un manuscrit philosophique clandestin de Voltaire au xviiie siècle »
L’article suit sur plus de cinquante ans le parcours éditorial de l’Épître à Uranie,poème composé par Voltaire en 1722, qui devient dans l’édition de Kehl Le Pour et le Contre. La confrontation de diverses copies manuscrites confirme l’importance de l’histoire de l’édition pour la compréhension des textes et de leur impact, et dévoile aussi bien les réseaux de sociabilités dans lesquels l’épître circule que certaines stratégies de publicité et de diffusion des manuscrits.
Hubert Aupetit, « Le pari d’Ernest ou comment éditer Pascal à contresens »
En rejetant les premières versions dérivées de l’édition dite « de Port-Royal » Victor Cousin s’appuyait sur les avancées de la philologie et proposait de lire dans les Pensées de Pascal une apologie de la religion chrétienne. Par la suite, Ernest Havet, modifiera l’ordre des parties et les fera précéder d’une démonstration, ce qui transformera en définitive une série de fragments en un traité polémique censée démontrer l’absurdité de la religion chrétienne.
Giovanni Ricci, « Une province à la guerre des mondes. À l’origine de la turcologie éditoriale (Ferrare, 1583-1607) »
L’intérêt de Francesco Patrizi pour l’empire turc transparaît dans sa Militia romana puis dans ses Paralleli militari. Or, en marge de ce traité plus connu se trouvent une série de tracts, de brochures et de petits ouvrages, ainsi que de traités techniques et de traductions de textes politiques et militaires à propos de l’empire Ottoman, qui sortent pour la plupart des presses du libraire Vittorio et que le présent article met en lumière.
Christophe Schuwey, « Des livres prétextes ? Supports et produits de librairie »
Imprimer des livres dans le but de les vendre : voilà une idée qui va de soi pour un libraire-imprimeur, mais qui servait déjà au xviie siècle à remettre en 434question la valeur esthétique et intellectuelle d’ouvrages jugés opportunistes. Or une telle démarche éclaire certains phénomènes, comme la publication de séries de livres autour d’un titre très populaire, ce que l’article étudie à partir des Précieuses ridicules de Molière, des Caractères de La Bruyère et du Mercure galant.
Hervé Drévillon, « Le rôle de l’imprimé dans la théorie militaire de 1763 à 1789 »
L’article étudie la publication de traités militaires pendant la période située entre la fin de la guerre de Sept Ans et la Révolution française et révèle certaines tensions entre la validité des théories de la guerre qu’un ouvrage expose au grand public et l’autorité qui émane de son auteur. Il analyse le rôle de l’habileté rhétorique et éditoriale des auteurs, qui entre en conflit avec les jugements reposant sur l’efficacité des théories, et donc portés par les militaires eux-mêmes.
Yohann Deguin, « Pour une histoire éditoriale des Mémoires d’Ancien Régime »
L’article propose de redéfinir les critères ayant servi jusqu’ici à baliser le corpus des Mémoires d’Ancien Régime en mobilisant les développements récents de l’histoire du livre et de l’édition. Il s’agit en effet d’un corpus construit par le biais des différentes réceptions auxquelles il a donné lieu, elles-mêmes conditionnées par les pratiques éditoriales qui en ont assuré la diffusion. Une telle démarche permet d’interroger l’usage que l’histoire et l’histoire littéraire font des Mémoires.
Stéphanie Favreau, « Contrôler la circulation du livre à Florence à la Renaissance. Une lutte de pouvoir entre l’Église et l’État »
L’article se penche sur les traces du contrôle exercé par la curie romaine sur l’imprimé à Florence au tout début du xviie siècle. À travers l’étude de quatre lettres tirées des archives de l’Inquisition florentine, il s’agit d’expliciter pour quelles raisons des imprimeurs florentins fortunés et très renommés ont obéi aux directives romaines.
435Antoine Champigny et Lyse Roy, « L’édition des récits de voyage à Paris au xviie siècle chez Louis Billaine. Enquête sur une proto-spécialisation éditoriale »
L’analyse du catalogue de Louis Billaine permet de dégager une proto-spécialisation de l’imprimeur parisien autour de la littérature viatique pendant les décennies 1660 et 1670. Les rôles qu’il endosse sont multiples, puisqu’il peut simultanément ou indépendamment éditer, financer, imprimer et vendre ces ouvrages, et que les nombreuses dimensions matérielles et éditoriales que ces derniers comportent en appellent souvent à des collaborations entre collègues libraires.
Marie-Ange Croft et Marie-Ève Mousseau-Lajeunesse, « Et Frontenac répondit “par la bouche de ses canons” »
L’article analyse le cas du siège de Québec en octobre 1690 à partir de deux sources qui n’avaient pas encore à ce jour été prises en considération : la « Relation de Canada », parue dans le Mercure galant de janvier 1691, et la « Relation de la levée du siège de Québec » publiée dans la Gazette de France en février de la même année. Il se penche notamment sur les spécificités de ces organes de presse de la première modernité et sur leur importance pour l’historiographie du Québec et du Canada.
Kim Gladu, « “L’épisode de l’opération manquée” en Nouvelle-France. Les politiques éditoriales de la presse européenne pendant la guerre de Succession d’Espagne »
L’examen de nouvelles diffusées en Europe en lien avec la Nouvelle-France à l’époque de la guerre de Succession d’Espagne dans le Mercure galant par rapport aux autres journaux publiés en France permet de dégager les affinités électives entre les collaborateurs qui peuvent influencer le traitement d’une même nouvelle. Le présent article amène donc à saisir les jeux de pouvoir qui irriguaient les relations entre le pouvoir royal et ses dépositaires en Nouvelle-France.
Bernard Gainot, « Aux racines du populisme “cocardier”. Le Père Duchesne en 1799 »
Le Père Duchesne de René-François Lebois permet de développer une forme de pré-histoire du populisme. En effet, Lebois, farouche défenseur 436de la liberté de la presse, qu’il envisage comme un magistère public, utilise son journal pour exprimer sa défiance envers les élites et exalter les supposées vertus « populaires ». Il apparaît assez nettement qu’à lui seul, en se servant de nombreuses manœuvres éditoriales, Lebois veut être à la fois Marat et Hébert.
Michèle Rosellini, « Madame Ulrich, une éditrice de La Fontaine invisibilisée par l’histoire littéraire »
Alors que les premiers éditeurs de La Fontaine ont d’emblée reconnu le travail de Madame Ulrich, l’éditrice des Œuvres posthumes de La Fontaine en 1696, la situation se renverse à partir des travaux tendancieux de Charles Athanase Walckenaer. Pourtant, une étude sérieuse des pièces liminaires et de la constitution du recueil permet plutôt de constater que Madame Ulrich maîtrisait très bien les stratégies éditoriales de l’époque et qu’elle était une véritable femme de lettres.
Christina Contandriopoulos, « Madame de Maisonneuve, critique d’art et d’architecture »
Un angle mort tenace de l’histoire des idées est la place des femmes dans le discours architectural de la première modernité. Cette présence longtemps occultée est étudiée dans le présent article par le biais de la « Lettre d’une dame au sujet du dôme des Invalides » qu’insère Catherine-Michelle de Maisonneuve en 1764 dans l’un des premiers numéros du Journal des dames qu’elle dirige.
Andrée-Anne Venne et Peggy Davis, « “Gravé d’après feu Bernard Picart le Romain”. La valeur ajoutée de l’illustrateur comme figure auctoriale »
L’article analyse la réutilisation de sept planches tirées des Cérémonies et coutumes religieuses dans l’Histoire des Yncas imprimé par Jean-Frédéric Bernard afin de mettre en avant la participation du graveur Bernard Picart, décédé quelques années auparavant, ce qui permettait au libraire-imprimeur de tirer profit de la célébrité de l’artiste en reconnaissant son auctorialité au détriment des autres artistes ayant travaillé au projet.
437Marjorie Charbonneau, Camille Payeur et Marie-Lise Poirier, « Les visées scientifiques du récit de voyage évaluées à l’aune de ses gravures. Une analyse comparée »
Les gravures servant à appuyer un discours scientifique fonctionnent, lorsqu’il s’agit de récits de voyages, comme autant de gages d’authenticité pour les livres qu’elles illustrent. Le présent article analyse en ce sens trois cas de figure : les Mœurs de Sauvages amériquains du père Lafitau, les Voyages du sieur de Champlain, ainsi que l’Histoire naturelle de Buffon.
- Thème CLIL : 4127 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie éthique et politique
- ISBN : 978-2-406-14549-3
- EAN : 9782406145493
- ISSN : 2494-7407
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14549-3.p.0431
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 24/05/2023
- Langue : Français