Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Formes de la relation à Dieu aux xvie et xviie siècles
- Pages : 285 à 287
- Collection : Rencontres, n° 382
- Série : Colloques, congrès et conférences sur la Renaissance européenne, n° 101
Résumés
Luce Giard, « La Fable mystique de Michel de Certeau »
Cette contribution relit La Fable mystique, de M. de Certeau, qui ouvrit un champ de recherche entre spiritualité, littérature et histoire. Elle réaffirme en particulier l’attention de M. de Certeau à l’historicisation des écrits mystiques et son renoncement au déchiffrement des textes, pour garder ouvertes les interrogations qu’il pose. Celles-ci concernent particulièrement le statut du je déployé dans les textes mystiques, qui tirent toute leur autorité de l’expérience dont ils font le récit.
Audrey Duru, « Dire je avant l’invention du moi. Questions de méthode et interprétation, à partir du discours spirituel (xvie-xviie siècle) »
Cet article montre comment, dans la poésie et les traités de spiritualité, l’emploi de la première personne évite la substantivation du je en un « moi » anachronique, récusant toute volonté de faire du locuteur un agent autonome. Le retour sur soi présent dans les textes tend à la simple reconnaissance d’une nature corrompue et mortelle. Dire je exprime une insignifiance, moyen de fusion de la nature et de la grâce. Dans la poésie, le rapport à soi devient le simple instrument d’une éloquence sacrée.
Hélène Michon, « L’extase, remise en cause de l’altérité ? Par l’être, par l’amour, par la grâce »
Cette contribution examine la définition de l’extase depuis saint Paul jusqu’à saint François de Sales, afin de déterminer si l’union mystique ainsi considérée favorise la fusion des êtres ou maintient une forme d’altérité. Elle distingue l’extase ponctuelle, brève rencontre caractérisée par une dépossession de soi, et l’extase continuée, état stable qui implique une nouvelle existence. Or la Contre-Réforme voit le moment la perception de l’union mystique sous la forme de l’extase ponctuelle l’emporte, malgré les efforts de conciliation salésienne.
286Philipp John Usher, « Double-je en terre sainte. Le Dialogue du crucifix et du pèlerin (1486) de Guillaume Alexis »
Cet article étudie le Dialogue du Crucifix et du Pèlerin, récit fictif d’un voyage peut-être réel, vers un lieu qui permet un dialogue du pèlerin et du Christ à la première personne. L’entretien porte sur les événements de la Passion, et promet la restauration d’une communication authentique, transmissible grâce à la poétique des rhétoriqueurs : Dieu et le pèlerin échangent en moyen français, dans une langue poétique ; cette grâce récompense le voyageur de son voyage pénitentiel.
Anne-Sophie De Franceschi, « Je au miroir de l’âme pénitente »
Le récit de Jérôme Durant compose une rencontre fictive avec Marie-Madeleine, où les péripéties semblent donner une grande place au je. Mais il permet également à sa lectrice désignée de s’approprier le je pénitentiel de l’énonciateur par un jeu de miroir où il invite sa lectrice à expérimenter une conversation sacrée similaire avec le Christ. Son je d’inventeur utilise une forme de personnalisation fictive pour rendre communicable une expérience qui reste dans le secret du cœur du pèlerin.
Marie-Christine Gomez-Géraud, « Les singularités du je. Jean Boucher et son Bouquet sacré »
Cet article étudie le Bouquet sacré des fleurs de la Terre sainte du père Boucher comme le lieu même d’une rencontre du lecteur avec le divin par l’intermédiaire d’un je, d’abord singulièrement personnalisé au fil de péripéties romanesques. Puis, un je plus méditatif se déploie, expression de l’élan vers Dieu, que le corps traduit en déplacements et en effusions, afin d’émouvoir le lecteur avant qu’un je auctorial seul demeure et laisse place à celui même du lecteur, pèlerin en esprit.
Catherine Déglise, « “Avec les anges”. Le je entre dimension singulière et collective dans la chanson spirituelle aux xvie et xviie siècles »
Cette contribution étudie la chanson spirituelle qui, par la technique du contrafactum, oscille entre profane et sacré, exprime l’élan mystique comme le discours catéchétique. Le chant énonce un je lyrique, mais bloque sa 287personnalisation, car il est dédié à l’appropriation d’un lecteur-chanteur. Mais le plain chant communautaire fait place à une polyphonie où s’entendent les voix singulières, en un moment de sociabilité privée qui se veut proche du chœur angélique.
Anne Mantero, « Dire je. Les Cantiques spirituels de Surin »
Cette contribution montre comment, même neutralisé par le genre lyrique, je peut entrer en résonance avec l’expérience singulière, dans les Cantiques spirituels de Surin. Alors qu’il chante l’abandon à Dieu, je s’affirme comme sujet. Le plaisir et la simplicité des airs populaires, qui excluent la forme de la prière, favorisent l’acceptation d’un itinéraire personnel marqué par l’aphasie. Porté par l’« esprit de cantique », Surin côtoie ainsi les abîmes de son existence, à distance d’une entreprise biographique.
Marie-Clartée Lagrée, « Un je ligueur ? Persona et mystique dans le cercle Acarie »
Cet article analyse l’utilisation du je mystique dans les écrits de l’entourage de Barbe Acarie et son lien avec des pratiques attestées par les biographes. En cette décennie 1590, les flagellations mortifient un corps devenu obstacle au désir d’anéantissement qui permet de « se rendre » au Christ, dans un contexte où les catholiques zélés cherchent à sortir d’une temporalité humaine angoissante et entrer dans un temps immobile, malgré le calme politique obtenu par Henri IV.
Marie-Domitille Porcheron, « Sous le regard de Dieu, je de peintre et je de commanditaire. L’affirmation des rapports personnels au divin dans quelques tableaux de la Renaissance »
Cet article analyse la présence d’un je de peintre et de commanditaire, à partir de 1430, au gré d’une intimité qui se développe alors entre œuvre, auteur et commanditaire. Entre Mantegna et Dürer, elle montre qu’avec la conscience du pouvoir mimétique de la peinture, apparaît une conscience de soi qui ne libère pas de la pratique, de l’histoire et de la justification, mais qui permet au peintre de se placer, à l’égal du commanditaire, sous le regard de Dieu, par les voies de la peinture.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-07339-0
- EAN : 9782406073390
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-07339-0.p.0285
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 19/02/2019
- Langue : Français