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Classiques Garnier

Résumés et présentations des auteurs

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résumés
et présentations DES AUTEURS

François Rigolot, « Prologue. Versants et versions du Mont de Vertu : dHésiode à Montaigne via Pétrarque et Rabelais »

François Rigolot est Professeur émérite à lUniversité de Princeton, États-Unis. Ses recherches ont surtout pour champ létude de la poétique, de la rhétorique et de la stylistique à lépoque prémoderne. Ses ouvrages portent surtout sur Marot, Rabelais, Louise Labé et Montaigne. Ses travaux actuels portent sur la querelle au sujet de Marie Stuart dans les lettres françaises et anglaises du xvie siècle.

En retraçant lévolution de la fameuse image dHésiode et du proverbe latin (per angusta ad augusta), on saperçoit que lidée du sentier montagneux qui conduit à la vertu, avec lascension pétrarquienne du Mont Ventoux et lîle de « Gaster » chez Rabelais, aboutit à un retournement quopère Montaigne en plaçant la vertu dans une vallée agréable, un locus amoenus où elle nest plus qu« esjouissance constante ». Ceci fait lobjet dune méditation sur les retombées éthiques et esthétiques dun étonnant paradoxe.

Kathleen Wilson-Chevalier, « Claude de France. La vertu de la littérature et limaginaire dune princesse vertueuse »

Kathleen Wilson-Chevalier est Professeur dHistoire de lArt à lAmerican University of Paris. Spécialiste de Fontainebleau et du mécénat des femmes au xvie siècle, surtout celles de lorbite de François ier, ses livres et ses articles incluent des études de la duchesse dÉtampes, de Louise de Savoie, dÉléonore dAutriche, de Madeleine de Savoie et de Claude de France, sur qui elle prépare un livre.

Cette étude iconographique interroge la légende de la « bonne reine Claude », première femme de François Ier, louée pour sa vertu, et pose deux questions. Comment la reine Anne de Bretagne et le roi Louis XII, ses parents, se sont-ils servis de la vertu de la littérature pour forger en elle une princesse modèle ? Et comment la littérature de ses contemporains, surtout Le beau roman de

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Palamon et Arcita de sa dame de compagnie Anne de Graville, consolide-t-elle son image de « paragon de vertu » ?

Hervé-Thomas Campangne, « Les vertus du récit dans les Histoires Tragiques de François de Belleforest »

Hervé-Thomas Campangne est Professeur de littérature française de la Renaissance à lUniversity of Maryland, College Park, États-Unis. Il a publié des éditions critiques (Cinquiesme tome des histoires tragiques de François de Belleforest, Droz, 2013, Trasibule, tragi-comédie de Montfleury, Euno Edizioni, 2013), ainsi que louvrage Mythologie et rhétorique aux xve et xvie siècles en France (Honoré Champion, 1996), et de nombreux articles consacrés à la littérature des xvie et xviie siècles.

Dans les cinq volumes de nouvelles quil publie entre 1559 et 1582, François de Belleforest veut mettre en évidence les vertus de lHistoire tragique, genre souvent critiqué par les moralistes de son temps pour son caractère prétendument pernicieux. Cette démarche le conduit à définir lethos dun lecteur idéal, mais aussi à sinterroger sur la fonction de lécrivain, de même que sur les effets du discours littéraire, de la poésie et de lhistoire.

Stéphan Geonget, « La parole vertueuse du juriste. Les exemples de Jean Papon, Louis Le Caron et Claude Le Brun de la Rochette »

Stéphan Geonget, ancien élève de lENS Fontenay / Saint-Cloud (1994), agrégé de Lettres modernes (1996), est Maître de conférences au Centre dÉtudes Supérieures de la Renaissance de Tours. Membre junior de lInstitut Universitaire de France, il consacre ses travaux actuels aux rapports entre droit et littérature. Il vient de soutenir une Habilitation intitulée « Le mariage de lEstude du Droict avec les Lettres humaines » qui porte sur lœuvre du juriste lettré Louis Le Caron Charondas.

Cet article examine, à la lumière dun corpus de juristes de la seconde moitié du xvie siècle (Jean Papon, Louis Le Caron et Claude Le Brun de la Rochette), la question de la vertu de la parole que porte lavocat. Comment défendre son client sans perdre son âme ? À quelles conditions léloquence peut-elle être compatible avec la pratique du barreau ? La parole véritable nest-elle pas nécessairement brève ? Mais alors comment peut-elle donner lieu à un plaidoyer ?

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Bérengère Basset, « Lire Plutarque à la Renaissance, un passe-temps vertueux. Exempla et anecdotes dans Le Passe-temps de François Le Poulchre »

Bérengère Basset, agrégée de lettres classiques, est lauteur dune thèse accomplie à luniversité Toulouse-Jean Jaurès, sous la direction dOlivier Guerrier, intitulée : « Anecdotes et apophtegmes plutarquiens à la Renaissance : des “contre-exemples” ? – Anormal et anomal au xvie siècle ». Elle a aussi participé à la traduction des Adages dÉrasme, parue aux Belles Lettres sous la direction de Jean-Christophe Saladin.

Le Passe-temps de François Le Poulchre, recueil de réflexions morales, philosophiques et politiques, sinscrit dans la filiation des Essais de Montaigne, modèle revendiqué. Lauteur puise en abondance sa matière chez Plutarque. La lecture du philosophe et historien grec semble informer la relation qui se noue entre la vertu et lécriture. Pour cerner loriginalité de cet auteur, cette étude confronte son utilisation de Plutarque avec celle dautres auteurs de son temps : Montaigne mais aussi Guillaume Bouchet.

Elizabeth Hodges, « La vertu de mémoire »

Elisabeth Hodges est Professeur titulaire de lettres françaises et de cinéma à Miami University (Ohio), États-Unis. Elle est lauteur de Urban Poetics in the French Renaissance (Ashgate, 2008) et de nombreux articles portant sur lurbanisme, lespace et lexcentricité dans lœuvre de Gilles Corrozet, Hélisenne de Crenne, François Rabelais et Barthélemy Aneau entre autres. Elle a aussi publié sur le cinéma et les médias, notamment la série télévisée « The Wire » pour la revue Labyrinthe et sur le film « JLG/JLG : Autoportrait de décembre » de Jean-Luc Godard. Son projet de livre sintitule, Introspective Cinema, et interroge le phénomène dintériorité dans le cinéma français contemporain (1990-2011).

Cette contribution propose de lire la vertu dans son rapport à la mémoire chez Montaigne. Si on conçoit la vertu en termes déthique, cela permet de considérer la mémoire dans les Essais comme un phénomène qui conduit non pas au souvenir, mais à lindexation du moi. Quoique Montaigne déplore son insuffisance mémorielle, ce manque savère au final une preuve de lexemplarité de lauteur et cette absence mène à lexpression dun choix vertueux : celui non pas de se souvenir mais de ne pas oublier.

Pierre Martin, « Lemblème scévien, moniment de vertu »

Pierre Martin, Professeur des Universités, enseigne la littérature française de la Renaissance à lUniversité de Poitiers. Il a publié chez Atlande une édition scientifique

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demblèmes de la Contre-Réforme, les Linguae vitia et remedia dAntoine de Bourgogne, et vient de faire paraître aux P. U. de Tours une édition commentée des Emblemes nouveaux dAndreas Friedrich, recueil demblèmes luthériens de 1617.

Lamant scévien porte en lui-même, gravée dans son corps, une image de Délie qui est aussi une image ou reflet de lIdée de Vertu. Cette image soffre à une contemplation intérieure où la part intellective de lâme doit trouver lélan qui lui permette de se délier dun monde sensible dans lequel la replonge la part sensitive. Ce conflit intérieur est la matière dun nouveau discours amoureux, discours auquel participent pleinement, à leur manière, les devises – ou « emblèmes » – qui jalonnent le recueil.

Anthony Russell, « “Sans artifice est ma simplicité”. Sincérité et vertu dans Les Regrets et Astrophil et Stella »

Anthony Russell est Professeur de littérature anglaise de la Renaissance et de littérature comparée à lUniversité de Richmond, États-Unis. Dans ses articles et ses essais, il se penche sur la poésie de John Donne, les œuvres de Rabelais et de Folengo, la notion dauthenticité chez Tommaso Campanella, et la Vita Nuova de Dante. Ses recherches actuelles portent sur la relation entre le magique et lesthétique dans les théories artistiques et poétiques à la Renaissance. Son livre aura pour titre “The Conspiracy of Our Spacious Song” : Magic, Vitality, and theSpiritus Phantasticusin Late Medieval and Renaissance Aesthetics.

Cet article interroge la relation complexe entre vertu et sincérité telle que représentée par les locuteurs des Regrets de Du Bellay et dAstrophil et Stella de Philip Sidney. Lengagement « vertueux » à être authentique conduit à laveu problématique de la fausse conscience du locuteur qui est à la fois ironique, sincère et paradoxal. Cet article suggère également la dette spécifique de Sidney à légard de Du Bellay dans lexpression du problème de la valeur véridique de lénonciation du je lyrique.

Nathalie Dauvois, « Passe-temps et vertu de la littérature. Un modèle horatien ? »

Nathalie Dauvois est Professeur de littérature française de la Renaissance à luniversité de la Sorbonne nouvelle. Spécialiste de poésie, elle sest intéressée aux rapports de la prose et des vers, notamment dans le prosimètre pastoral à la Renaissance. Elle se consacre aujourdhui à létude de la réception dHorace à la Renaissance, dans le cadre dun projet qui vise à redéfinir le cadre et les enjeux dune poétique de lâge moderne.

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La Renaissance nhérite pas seulement de lart poétique dHorace des préceptes concernant les enjeux de la littérature, plaire et/ou instruire, prodesse et delectare. Elle tire aussi profit dune réflexion densemble de son œuvre sur les vertus dun passetemps qui, pour nêtre guère utile, nest du moins, notamment in tempore belli, ni intéressé ni nuisible. Telle est lanalyse que nous proposons de lhéritage horatien chez Bouchet, Erasme, Rabelais et Montaigne.

Myriam Marrache-Gouraud, « Lecteurs vérolés et texte de petite vertu. Enjeux “tresprecieux” de la littérature rabelaisienne »

Myriam Marrache-Gouraud, docteur en Littérature française de la Renaissance, et agrégée de Lettres Modernes, est Maître de Conférences en Littérature du xvie siècle à Brest, à la Faculté des Lettres de lUniversité de Bretagne Occidentale, et membre de léquipe HCTI (E.A.4249). Elle est webmestre du site curiositas. Elle est lauteur dune thèse intitulée Hors toute intimidation, Panurge ou la parole singulière (Genève, Droz, 2003). Outre de nombreux articles parus sur la fiction rabelaisienne, elle a dirigé et co-écrit Rabelais, aux confins des mondes possibles, Paris, PUF, 2012.

Rabelais revendique les vertus thérapeutiques de sa littérature de passetemps. Sil choisit de ladresser aux goutteux et aux vérolés, cest que leurs peines physiques et douleurs morales, pourtant extrêmes, sen verront soulagées bien mieux que par des récits de martyres, rejetés en tant que vaines superstitions. Sesbaudir et pouvoir rire en lisant est une vertu petite ou modeste peut-être, mais qui pourrait bien constituer, selon la médecine antique, le commencement de la guérison.

Pascale Chiron, « Combien vaut le passetemps ? »

Pascale Chiron est Maître de conférences à luniversité de Toulouse-Jean Jaurès. Spécialiste de la Renaissance, des grands rhétoriqueurs aux poètes de La Pléiade, elle sintéresse aux relations entre Histoire et littérature. Ses études portent en particulier sur la notion de passetemps dans lécriture littéraire.

La question du passetemps pose celle de la représentation du temps : dans une période où celle-ci est orientée par la quête du salut, lutilité de la lecture-passetemps se mesure à sa capacité à provoquer le plaisir, bénéfique au corps comme à lesprit, enraciné dans lexpérience du hic et nunc, et en marge dun contexte éthique ou civique pour mieux y retourner. Mais, de fait, ce détour invente le désir individuel de lire et la notion de « goût » personnel de lecture.

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Michel Jourde, « Épilogue. “Vertu” des lettres et “valeur” des livres en France au xvie siècle »

Michel Jourde est Maître de conférences en littérature française du xvie siècle à lENS de Lyon et Membre de lInstitut dHistoire des Représentations et des Idées dans les Modernités (UMR 5037). Il a édité avec Jean-Charles Monferran lArt poétique de Jacques Peletier du Mans (Champion, 2011) et a publié plusieurs études sur les pratiques de publication en France (en particulier à Lyon) au xvie siècle.

Quelles relations pouvait-on établir, au xvie siècle, entre la valeur des lettres et celle des livres, au moment où sorganisait un marché du livre inédit dans lhistoire ? Les témoignages réunis expriment des attitudes diverses : si la dimension commerciale est parfois savamment occultée, elle peut apparaître comme une contrainte inévitable, mais aussi comme une image de la diversité des goût des lecteurs, voire des lettres elles-mêmes, dont la « valeur » apparaît en constante négociation.