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Classiques Garnier

L’écriture vive

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Valère Novarina
  • Auteur : Née (Laure)
  • Pages : 7 à 16
  • Collection : Écrivains francophones d’aujourd’hui, n° 2
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782812438424
  • ISBN : 978-2-8124-3842-4
  • ISSN : 2430-8080
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3842-4.p.0007
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 30/07/2015
  • Langue : Français
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Lécriture vive

Lécriture de Valère Novarina pratique le « débordre ». Demblée, le lecteur a limpression dhorizons diffractés1 sans possibilité de saisir lunité de lœuvre, qui joue avec les frontières génériques et ne se limite pas à un champ de savoir particulier. La traversée du temps la rend plus vertigineuse encore tant est dense la ramification dun livre à lautre, en quarante années décriture. De lexpérience que nous faisons à lire Valère Novarina, grand lecteur de Lautréamont, on pourrait reprendre ce que Blanchot dit dans la préface aux Chants de Maldoror : « Lire Maldoror, cest consentir à une lucidité furieuse dont le mouvement denveloppement, dembrassement, se poursuivant sans trêve, ne se laisse reconnaître quà son terme et comme laccomplissement dun sens absolu, indifférent à tous les sens momentanés par lesquels cependant doit passer le lecteur pour atteindre le repos dune suprême signification totale2 ». Et lon pourrait continuer à suivre la préface de Blanchot car, mot pour mot, les phrases du critique épousent mon sentiment de lectrice de Valère Novarina : « Oui, la “raison” est étonnamment ferme chez Lautréamont, aucun lecteur “raisonnable” ne peut en douter. Mais justement cette raison est si forte, elle est dune telle étendue quelle semble aussi embrasser tous les mouvements de la déraison et pouvoir comprendre les plus étranges forces aberrantes, ces constellations souterraines sur lesquelles elle se guide et quelle entraîne cependant avec elle sans se perdre et sans les perdre ».

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Cette folie méthodique, principe essentiel de lécriture vive de Valère Novarina, nous entraîne dans un vertige. Discours de la méthode3 qui aurait la tentation de brasser et dembrasser une totalité : de lieux, de personnes, de situations, dans le temps et sans délimitation de discipline particulière. Littérature, théâtre, philosophie, théologie, linguistique, musique4, sont interrogés par cette œuvre arborescente. Des réflexions dans ces domaines sont donc nécessaires pour appréhender la démesure de lœuvre, et son caractère insaisissablement mouvant, sans quaucune de ces disciplines suffise à elle seule à embrasser lœuvre, ni que leur addition permette den faire le tour. Serait-on en présence dune œuvre dont le centre est partout et la circonférence nulle part ? La définition de Dieu par Pascal, se référant lui-même ici à des théologiens, physiciens et philosophes avant lui, outre quelle est récurrente dans lœuvre de Novarina, et quelle en constitue comme le vide sur lequel repose la structure philosophique, permet de traduire limpression du lecteur : celle dun centre mouvant et dune absence de bords. La diversité des domaines des contributeurs du présent ouvrage témoigne de létendue de la matière labourée par lauteur. De surcroît, la pratique de la peinture par Valère Novarina et sa réflexion sur cet art rendent plus dense encore la matière à étudier5. Les regards croisés de ces champs de savoir – et encore faudrait-il en convoquer dautres pour rendre compte au plus juste de létendue des horizons abordés6 – outre quils manifestent la perception de son étendue, laissent à lœuvre son ouverture, son inachèvement, son devenir. Engageons-nous dans les chemins de cette œuvre, non pour en chercher le système, mais pour en percevoir,

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dans ses paradoxes, dans ses nœuds féconds, certains principes, parfois irréductibles les uns aux autres, mais tous vrais. De cette juxtaposition sans recherche de perspective logifiée – cest en tout cas mon souhait – apparaîtra peut-être, le moins infidèlement possible, le paysage divers, et pourtant unitaire, de lœuvre. Si « tout est chaos dans le détail », « un grand recul laisserait apercevoir le point perspectif, lordre absolu », écrit Novarina. « On multiplie pour faire apparaître du un » dit-il7.

Combat dun inactuel

La singularité de lœuvre dans le paysage littéraire depuis les années 1970 est frappante8. Clément Rosset et Marcel Bozonnet, qui ont connu Novarina jeune, ont pressenti loriginalité de cette œuvre et la place majeure quelle allait occuper dans le paysage littéraire. Eugène Green en témoignera à son tour : en marge dun théâtre qui crie la haine universelle de lhumanité, le verbe incarné de La Chair de lhomme recentre le spectateur sur lessentiel. Comment lœuvre de Valère Novarina, en reprenant les questionnements théâtraux et moraux dArtaud et Beckett, ouvre-t-elle lespace, souvent fermé, pessimiste ou désenchanté des dramaturgies des années 1970 et au-delà ? Sans doute est-ce parce que son œuvre sait, par-dessus lépoque et les problèmes contemporains, renouer avec des questionnements et des temps plus anciens, en se donnant une liberté totale de penser9. Nietzsche, linactuel, sen prenait à la bonne conscience de ses contemporains dincarner des valeurs dobjectivité dans la lecture de lhistoire. Et si finalement, pour

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être de son temps, il fallait être un intempestif10 ? Cest ce que donne à voir lattitude de Valère Novarina par rapport à son temps. Il nen épouse pas les prétendues évidences. Alors que la présence du malheur, de la maladie et de la mort occupe le devant de la scène du monde, et du théâtre qui sen fait le reflet, son théâtre mise sur louverture de possibles jamais clos, sur laventure infinie, sans toutefois faire abstraction de la difficulté à vivre. Le regard aigu de lauteur sur les maux auxquels les vivants sont confrontés se double dune confiance dans leur force à les combattre. Échapper au « boléro réaliste », à « la toujours même petite courte valse de reconnaissance et de reproduction11 », opérer un « débarrassement12 » du monde lavent le théâtre de ses habitudes et lui permettent de naître neuf. Le geste médiatique, par exemple, qui se donne pour être un devoir de vérité, il importe à Novarina de le montrer sur scène pour en exhiber le mensonge et le rendre ainsi inopérant. « La communication veut tout dire, tout vider, nous informer de tout, tout expliquer, mais nous savons très bien quau bout de toute explication ça nest jamais quune chaîne de causes mortes qui sest déroulée devant nous13 ». Novarina stigmatise de façon comique, en lappelant « Machine à dire la suite14 », le présentateur de télévision, personnage représentant, dans ses pièces, létourdissement dangereux qui voudrait faire croire à lenchaînement des causes et des conséquences. Miroir aux alouettes, la rhétorique médiatique, par le biais de sondages pseudo-scientifiques, sidère lauditeur par un flot de paroles, prétend agir dans limmédiat, et se fait passer pour de largent comptant lors même quelle paie en monnaie de singe lauditeur étourdi par la force centrifuge des mots, auditeur floué mais devenu incapable de se rebeller.

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Pour répondre à ce danger, il faut faire du plateau lespace dun combat, dune réflexion active, dune provocation, dun rire aussi sur les questions graves, qui renouent avec la santé du théâtre de Molière. Le comique est ici, comme le développera Christine Ramat, au cœur du sacré : un rire cruciforme à la croisée de la joie et du tragique. La scène théâtrale opère une reconquête de territoire sur les faux-semblants, désaveugle le spectateur et lui redonne, sans soumission à une nouvelle autorité, sa légitimité à penser par lui-même. Il ya chez Novarina une horreur de loccupation15 de terrain. De lair ! De lair ! A lasphyxie dun système clos et verrouillé, répond le vide des certitudes. La position philosophique de linactuel permet douvrir un temps de deuil : celui de la maîtrise dune vérité enfin saisie une fois pour toutes. La vérité, celle que Zarathoustra16 comprend, et Valère Novarina, ses personnages, ou ses spectateurs avec lui, est quil ny a pas de progrès, pas de direction, pas de terre dasile, et que la recherche qui est la sienne naura pas de fin. Mais en même temps, ce constat, qui pourrait être amer de voir sans cesse se dérober lhorizon dune étape finale plus heureuse, se double dun sentiment joyeux : la seule assurance étant que la quête vaut par elle-même, et que labsence de garantie fait la valeur de laventure, à la manière dont Pascal lui aussi conçoit son pari.

Déconstruire, creuser,
faire place au possible

À la préhension, compréhension « qui veut prendre et croit posséder », lauteur oppose le saisissement17. Nous ne pouvons embrasser la vérité. « Saisir sans prendre. [] Toute chose nommée, nous ne la possédons pas, nous lappelons18 ». Il sagit moins de savoir que de connaître, donc de naître avec, dans le mouvement et le temps mêmes de la parole19. Le souffle lemporte

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sur la volonté de comprendre. Amador Vega cherche dans ce geste les principes dune théologie : lascèse de la parole évite la fossilisation des individus, des mots, des images, des pensées. On ne possède pas lhomme, et les sciences qui sautoproclament humaines, selon lauteur, sont dans lerreur. « Annoncer partout que lhomme na pas encore été capturé20 ! ». Contrairement à ce prétendu savoir sur lhomme cadastrable, qui repose sur la croyance en lÊtre, lœuvre de Novarina déconstruit lontologie, se développe en un art de la fugue, en une pensée fuguée, qui compose avec linattendu et inscrit dans son geste un perpétuel renouvellement, ce dont Olivier Dubouclez fera la matière de son propos. Affirmer limpossibilité de la capture de lhomme suppose que limage ne fixe pas une fois pour toutes les représentations humaines car alors le processus infini du devenir pourrait sarrêter. Marie-José Mondzain, philosophe, témoigne ici dun voyage heureux, avec Valère Novarina, dans cette Russie des icônes, dont limmobilité, seulement apparente, est, au contraire de limage pétrifiante, promesse de résistance à la violence du réel et à lidolâtrie. Remettre lhumain en question, défaire son image21, comme cela sest produit aussi dans les arts plastiques au début de xxe siècle, est un moyen den finir avec lidolâtrie, et de libérer le champ des possibles. Chez Novarina aussi, le « moi » est haïssable et les risques de réduire lhomme à des représentations figées sont grands. Le théâtre novarinien nen finit donc jamais son travail de sape pour libérer lhomme des filets de la représentation et de lauto-idolâtrie. Au fond de lhomme « personne ». Et cest paradoxalement dans ce vide de la représentation que peuvent sinscrire une infinité de personnes. La tâche de lécrivain sen trouve modifiée : elle consiste à opérer une sortie du statut de « créateur », et à seffacer, dans un acte de dépossession, permettant aux choses dexister par elles-mêmes, au livre de sécrire comme en dehors de lécrivain. Cest la main idiote de la parole, dont Isabelle Babin parlera.

Et sil y avait, pour se désencombrer des représentations figées sur lhomme, à réinterroger le langage ? Le langage est « la chair de lhomme ». Le questionnement philosophique présent dans lœuvre de

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Novarina passe nécessairement par un questionnement philologique. De cette « passion logoscopique » et de ses sources, Michel Arrivé nous entretiendra. Là encore, le travail de lécrivain consiste à vider la langue de ses habitudes, à la tordre pour quon la réentende autrement. Lécoute attentive de la langue de Novarina, sa prosodie, son rythme, ce quil nomme le « langage tambouriné », sera évoquée de son point de vue de musicien et compositeur par Michaël Levinas qui a crée un opéra dont Je, Tu, Il 22 est le prologue. Les acteurs23 qui portent au théâtre la parole novarinienne, parmi lesquels Valérie Vinci, André Marcon, Dominique Parent, Nicolas Struve, René Turquois, évoquent aussi, chacun à sa façon, cette langue folle, dabord déstabilisante et incompréhensible, dans laquelle, ensuite, ils se jettent à corps perdu pour ouvrir des chemins aux spectateurs désorientés. Les acteurs sont mus par cette langue et aiment lauteur qui, sans les diriger, leur ouvre la forêt dun langage inconnu et pourtant familier. De la mise en scène quelle a faite de plusieurs pièces de lauteur et en particulier de LOpérette imaginaire, Claude Buchvald dira, elle aussi, quil sagissait de se laisser emporter par un mouvement continu de figures, lacteur acceptant de se laisser déposséder, non pour disparaître, mais pour devenir danseur de la langue. Entreprise de poète donc. Pour Novarina : « La vraie syntaxe déchaîne tout24 ». Paradoxe fécond, si lon se rappelle létymologie du mot syntaxe. Novarina choisit le mouvement qui ouvre, multiplie, dissémine. « Je procède par prolifération, écartement, parenthèses []. » Il évoque le fait que parfois, pendant des semaines, le livre est comme mort, mais quil peut avancer « de manière arborescente, comme par un travail printanier25 ». Ainsi le spectateur du théâtre de Novarina, peut-il être pris dans le tourbillon de phrases-fleuves, ou de listes interminables de noms appelés, suspendant la logique discursive. Ces énumérations démesurées, de plusieurs pages souvent, acrobatiques pour les acteurs, comblent, par leur existence sonore ou graphique, le manque de possession des choses, compensent limpossible saisie,

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creusent par labondance de la parole. En même temps quelles marquent une rupture avec le flux continu de la phrase dont elles interrompent le cours, elles mettent en place un nouvel ordre : celui dune continuité de fragments, qui jamais, pourtant, ne pourra épuiser le réel, mais qui, comme par magie, fait advenir une réalité lespace dun instant. LInfini romancier de LOpérette imaginaire, comme Alice Zeniter le dira, a lart de susciter dans limaginaire, comme en une pluie de confetti, de nouveaux rêves de lecteur, aussi vite nés quabandonnés. Voilà réaffirmées les lignes de force dune esthétique du fragment, liée pourtant au rêve dun roman total, opposant à ce Tout rêvé la fragile mais tenace trace dune présence aléatoire.

La langue est rendue à sa liberté imprévisible dans une forme théâtrale réinventée. Ce théâtre de lœil et des oreilles, qui emprunte des éléments au cirque, à lopérette, au music hall, fait naître un nouveau rapport au spectateur, surprend, déstabilise, force lécoute du texte. Surgissement dune nouvelle manière de penser le monde devant la chose en vrai qui se dit et se fait sous nos yeux. Débarrassé du modèle aristotélicien, de la mimèsis, de la terreur ou la pitié, des mythes du personnage, de la psychologie, de la fable, le théâtre se renouvelle dans sa forme, imagine des dispositifs qui accordent de nouvelles places à lobjet et à la parole. Richard Pierre, depuis sa double place de régisseur et douvrier du drame, parle de son expérience dans les pièces de Novarina : porteur dobjets et porteur de parole sur le plateau de théâtre. Les spectateurs assistent à une naissance du théâtre dans un présent en train de se faire. En sortant du temps historique et de laction scénique, les spectateurs accèderaient à un temps primordial, un Autre temps, nous montrera Michel Corvin, en sappuyant sur lanalyse de La Scène. À ce temps primordial, cosmique, correspond aussi un espace que Philippe Marioge, de par sa fonction de scénographe, comme il nous le dira, semploie à vider pour laisser résonner la parole portée par des acteurs vidés deux-mêmes. Mais le silence des espaces infinis neffraie pas les personnages de Novarina26 ni les acteurs qui portent leur parole. Bien au contraire, lespace désencombré redevient un champ de forces où lénergie dune parole première rendue à son animalité peut à nouveau se déployer.

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Linachèvement du devenir

Le monde qui apparaît dans lœuvre de Novarina est en perpétuel mouvement. Tout se passe comme si, à linstar des théories de Giordano Bruno remettant en question la cosmologie et la physique aristotéliciennes, un omnicentrisme était à lœuvre qui éradique toute illusion de centre absolu. On y trouve léclatement du monde, du lieu, du temps, du personnage, de la langue. Pourtant, dans lunivers novarinien, cet éclatement nest accompagné daucun sentiment douloureux de dépossession ni de nostalgie dun temps et lieu heureux, ni dun effondrement du moi lié au sentiment dune perte de valeurs, comme une certaine littérature post-moderne le donne à voir. Tout au contraire même, labsence dun temps de référence, comme celle dun lieu dancrage, permet à lerrant quest le personnage novarinien de poursuivre sans relâche la route, de ne se sédentariser jamais, dêtre en devenir, dans un mouvement ininterrompu de naissance. Dégagé de toute crispation identitaire, et par sa non-inscription dans un lieu ou un temps définitifs, il se révèle étonné de sa chute, mais joyeux du désancrage qui est le sien. Cest que, sil ny a pas de centre, il fait lexpérience que le foyer est partout où il se trouve. Pour les personnages de Novarina, comme pour lauteur lui-même, qui se plaît à redire louverture aux langues dans le pays du Léman où il est né, la langue est lespace mouvant où habiter. Les langues étrangères sont importantes pour lauteur, et les langues décrivains aussi, chacune avec son sceau rythmique propre, ont marqué le lecteur-écouteur Novarina. De fait, nous lecteurs, sommes pris dans une parole qui circule dun auteur à lautre, sans quil y ait plus de propriété bien délimitée. Dans cette peau textuelle, quest-ce qui appartient à lun des penseurs, quest-ce qui est en propre à Novarina ? Ce procédé nous met en mouvement et ouvre un formidable horizon : dune part, il attise en nous la curiosité de lenquêteur, activée pour saisir, dans ce brouillage, les textes « sources » – jeu intellectuel stimulant, qui oblige à être sur ses gardes27 – dautre part, il suscite un vaste et profond questionnement, faisant de ses questions les nôtres.

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Je parlerai, pour montrer comment ils participent de lécriture du devenir, de ce gai savoir ainsi que de la féconde inquiétude qui lui fait pendant. Nous nous trouvons ainsi au cœur dun dialogue, inscrits dans ce palimpseste des échanges, participant à ce mouvement qui ouvre le temps.

Laure Née

Laure Née remercie vivement Sidonie Han, Gilles Bonnet et Valère Novarina pour leur aide précieuse. Une gratitude toute particulière à Isabelle Babin pour le travail sur la bibliographie de cet ouvrage.

1 Dautres critiques en ont fait lexpérience. Je renvoie les lecteurs à tous les ouvrages collectifs déjà parus – et dont on trouvera les références complètes à la fin de ce volume – depuis linaugural Valère Novarina, Théâtres du verbe, sous la direction dAlain Berset, José Corti, 2001. Les livres dentretiens dOlivier Dubouclez et Marion Chénetier confirment ce foisonnement de domaines présents dans lœuvre. Respectivement, Paysage parlé, Éditions de La Transparence, 2011 et LOrgane du langage, cest la main, Argol, 2013.

2 Maurice Blanchot, Préface à Lautréamont, Les Chants de Maldoror, « Lautréamont ou lespérance dune tête », Paris, José Corti, 1973, p. 107. Ibidem, p. 109 pour la 2e citation.

3 Pour le lien de Novarina avec Descartes, se référer à lentretien avec lauteur en fin de volume.

4 Lanalyse de certaines questions convoquent de multiples disciplines : lintérieur et lextérieur, la matière, lespace, le temps, le fragment et le tout, la présence, le vide, le même et lautre, le langage, le mot et la chose, la naissance, lhomme, le sujet et lobjet, lêtre, le “moi”, la mélancolie, la vie, la mort, Dieu, etc.

5 Cet aspect de lœuvre sera présent dans lentretien avec V. N. à la fin du volume.

6 Dautres champs de savoir pourraient être évoqués : je pense en particulier à la physique. Des notions comme la matière, le vide, la singularité pourraient, à lévidence, bénéficier de cette approche. Valère Novarina exprime fréquemment lidée que létude du langage devrait être redonnée aux physiciens : « La linguistique est une branche de la physique des fluides », Valère Novarina, Observez les logaèdres !, P.O.L, 2014, section « Une pierre vide », proposition 30, p. 20. Le corps, la souffrance psychique, la parole comme saut dans linconnu – terme que V. N. préfère à celui dinconscient – montrent aussi lintérêt de lauteur pour la psychanalyse, lui qui, jeune, écrit à Lacan, et assiste à des présentations de malades à Sainte Anne.

7 Devant la parole, P.O.L, Paris, 1999, p. 57.

8 Michel Corvin le rappelle dans la Préface de LActe inconnu : « dramaturge unique qui œuvre sans presque aucune ressemblance avec ceux de ses contemporains », LActe inconnu, Gallimard, 2009, p. 8.

9 De ces figures nombreuses avec lesquelles se tisse la parole de linactuel quest Novarina, trop nombreuses pour être toutes nommées, je retiendrai celles-ci, qui couvrent des champs de savoir différents et vastes : les Pères de lÉglise, Rabelais, Montaigne, Molière, Pascal, Bossuet, Jeanne Guyon, Rousseau, Jarry. Liste par définition incomplète, car les sources sont multiples et participent dun jeu de lauteur avec les pensées les plus diverses. Figures auxquelles sajoutent les Cyniques, les Stoïciens, Héraclite, Spinoza, Hegel, Nietzsche, Bergson, Jankélévitch, Levinas, et Lacan, dont les pensées sont présentes, comme en une basse continue.

10 « Adressons à lhomme moderne cette question, à vrai dire peu agréable : sa fameuse “objectivité” historique lui donne-t-elle le droit de se considérer comme fort, cest-à-dire juste, plus juste que les hommes dautres époques ? []. » Nietzsche, Crépuscule des idoles, op. cit., chapitre « Divagations dun inactuel », paragraphe 39 intitulé « Critique de la modernité », p. 84.

11 « Arrêtez le boléro réaliste ! la toujours même petite courte valse de reconnaissance et de reproduction : jérémiades des petits faits vrais []. », Pour Louis de Funès, in Théâtre des paroles, P.O.L, 2007, p. 170.

12 Ce terme de « débarrassement » a à voir avec la catharsis qui purge le spectateur de lencombrante actualité. Cf Paysage parlé, Olivier Dubouclez, Éditions de la transparence, 2011, p. 108.

13 Valère Novarina, Notre parole, article publié dans le quotidien Libération, le 27 juillet 1988, repris dans Le Théâtre des paroles, p. 235.

14 Novarina décline sur ce principe les noms des Machines : Machines à dire voici, la Machine à faire lhomme, etc.

15 Lhorreur de toute dictature de la pensée entre peut-être en résonance avec lépisode historique de lOccupation dont quelques éléments percent dans Le Monologue dAdramélech.

16 « Also sprach Louis de Funès », écrit Novarina dans Devant la parole, p. 135.

17 Notre parole, repris dans Le Théâtre des paroles, p. 235.

18 Ibid., p. 236.

19 Ibid., p. 235.

20 Valère Novarina, Observez les logaèdres !, op. cit., « Lamour géomètre », dans la section « Le déséquilibre spirituel », proposition 321, p. 118. Idée récurrente, présente déjà dans Lumières du corps : « Allez annoncer partout que lhomme na pas encore été capturé ! », Valère Novarina, Lumières du corps, section « Panique dans la matière », op. cit., p. 22.

21 « Pratiquer une défiguration », selon lexpression dÉvelyne Grossman, La Défiguration, Artaud – Beckett – Michaux, Éditions de Minuit, 2004.

22 Je, Tu, Il, Arfuyen, 2012. Opéra de Michaël Levinas, La Métamorphose, créé à lOpéra de Lille, en mars 2011.

23 Faute de temps, ou de place dans louvrage, beaucoup dacteurs nont pu témoigner de leur travail dacteur novarinien. La parole des acteurs présents essaie de donner place aux acteurs absents et aux acteurs disparus : Christine Fersen, Daniel Znyk, Michel Baudinat.

24 Notre parole, repris dans Le Théâtre des paroles, op. cit., p. 236.

25 Devant la parole, P.O.L, Paris, 1999, p. 58.

26 Peut-être ici a-t-on une trace du jeune homme Novarina qui écrivit un Contre-Pascal.

27 Enquêteur ou archéologue : comme dans un site archéologique, le sol de lécriture de Novarina est plein de strates superposées.