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Classiques Garnier

Note préliminaire: Les textes. - L'histoire de Tristan

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : Tristan et Yseut. Les Tristan en vers
  • Pages : I à V
  • Réimpression de l’édition de : 2010
  • Collection : Classiques Jaunes, n° 548
  • Série : Lettres médiévales
  • Thème CLIL : 3438 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moyen Age
  • EAN : 9782812427695
  • ISBN : 978-2-8124-2769-5
  • ISSN : 2417-6400
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-2769-5.p.0007
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 08/04/2014
  • Langue : Français
7 NOTE PRÉLIMINAIRE
Les textes — L'histoire de Tristan
La plus ancienne version de l'histoire est celle, malheureuse¬ ment perdue, que le Gallois Bréri fit connaître à la cour de Poitiers en 1135. Puis vint le Tristan de Béroul (avant 1170 ?) et celui, perdu lui aussi, d'un certain La Chievre ( ?). Avant 1170, Chrétien de Troyes a composé un Livre du roi Marc et d'Yseut la Blonde, dont nous ne connaissons que le titre. Le Tristan de Thomas aurait été écrit vers 1175. La Folie Tristan de Berne, puis celle d'Oxford, viendraient ensuite, de même que le Chèvrefeuille de Marie de France. Les adaptations allemandes, d'Eilhart d'Oberg et de Gottfried, datent de la fin du xue siècle (Eilhart) et du début du xine siècle (Gottfried). La Saga norroise a été composée en 1226 pour le roi de Danemark Haakon V. Tous ces textes sont mal¬ heureusement mutilés. Vers 1220, Gerbert de Montreuil insère un épisode dont Tristan, déguisé en ménestrel, est le protagoniste, dans sa Continuation du Perceval de Chrétien de Troyes. Tristan intervient dans un poème intitulé le Donnai des amants. Ce poème est une sorte de lai qui date probablement de la même époque. Vers 1230 apparaît le Tristan en prose. Une version néerlandaise, presque entièrement perdue, date de la fin du xme siècle. Le Sir Tristrem anglais est plus tardif, de même que le Tristano italien, dont il ne subsiste qu'un très court fragment. Tristan est l'un des héros de la Demanda del San Graal espa¬ gnole, de la Demanda portugaise, de la Tavola Ritonda italienne (xive siècle) et de la Morte d'Arthur de l'anglais Malory (fin du xve siècle). Il existe des versions slaves de la légende.
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Faut-il insister sur le Tristan de Wagner et sur celui que Joseph Bédier a reconstitué à la suite de ses travaux sur Thomas ? La tradition diverge sur les modalités de maint épisode ou sur leur succession. Mais on peut dégager de cet ensemble  : ι ) Un récit des enfances  : Tristan est le fils de Rivalen et de Blancheflor. Il perd très tôt ses parents. 11 est recueilli par son oncle maternel Marc, roi de Cornouaille, qui tient sa cour à Tintagel ou à Lancien, au S. O. du canal de Bristol. Un chevalier dévoué, Governal, lui enseigne la science des armes. 2) Les premières épreuves  : Un redoutable guerrier d'Irlande, le Morholt, impose à la Cornouaille un tribut de jeunes gens et de jeunes filles. Tristan tue le Morholt sur l'île Saint-Samson, en face de Tintagel. Mais le Morholt l'a blessé avec une arme empoisonnée. Marc installe son neveu sur une nef qui dérive vers l'Irlande. Yseut, fille du roi et nièce du Morholt, recueille et soigne le blessé qui se fait appeler Tantris. Épisode du cheveu d'or  : un oiseau l'apporte à Marc, qui jure d'épouser la femme qui possède une semblable chevelure. Tristan lui révèle qu'il s'agit d'Yseut. Il se rend à nouveau en Irlande. Combat de Tristan et du dragon. Le roi d'Irlande a promis Yseut au vainqueur du monstre. Mais un sénéchal usurpe la victoire. Yseut soigne une nouvelle fois Tristan et reconnaît à l'entaille de son épée le meurtrier de son oncle (elle avait recueilli dans la blessure du Morholt un fragment de l'arme). Elle obtient de son père qu'il accorde son pardon au libérateur de l'Irlande quoi qu'il ait fait dans le passé. Tristan révèle alors sa véritable identité et confond le sénéchal. Il obtient pour Marc la main d'Yseut et amène la jeune fille en son pays. 3) Le philtre  : Sur la nef qui les conduit, les amants boivent par méprise le philtre d'amour que la mère d'Yseut a confié à Brangien pour que sa fille et Marc connaissent une passion sans nuages. Tristan devient aussitôt l'amant de la princesse. Le soir des noces, Yseut demande à Brangien de se substituer à elle dans le lit conjugal. Puis elle veut faire disparaître sa
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complice et la confie à des serfs qui ont ordre de la tuer. Mais ses bourreaux ont pitié de la malheureuse et l'épargent. Brangien, revenue à la cour, se réconcilie avec Yseut que la mort de sa suivante plongeait dans le remords. 4) La harpe et la rote  : Un mystérieux harpeur irlandais vient exiger que la reine Yseut, sur laquelle il se prétend des droits, le suive. Tristan le rejoint sur le rivage et le retarde en le charmant de sa rote (instrument de musique à cordes pincées), jusqu'à ce que la mer se soit retirée. Il ramène Yseut à la cour de Marc. /) Les pièges  : Tristan partage sa chambre avec Mariadoc; celui-ci, qui suit les traces de son compagnon dans la neige, découvre le secret des amants et s'en désole. Il avertit Marc de prendre garde, sans toutefois lui révéler tout ce qu'il sait. Eilhart et Gottfried situent à cet endroit du récit l'épisode des faux. Marc, ou un nain hostile aux amants, dispose entre la couche de Tristan et le lit royal des faux sur lesquelles Tristan se blesse. Le hasard veut qu'Arthur et ses chevaliers soient aussi dans la chambre et se blessent volontairement à leur tour pour déjouer les soupçons. A partir d'ici, divergent les traditions de Béroul et de Thomas. Selon Béroul, dont le fragment commence à cet épisode, Marc, averti par le nain, se cache dans un pin pour épier les amants. Mais ils aperçoivent à temps son visage dans le reflet d'une fontaine et ne se trahissent pas. Ensuite, toujours selon Béroul, vient l'histoire de la fleur de farine répandue autour du lit royal. Tristan évente le piège en rejoignant Yseut d'un bond, mais une blessure récente qu'il s'est faite à la chasse se rouvre. Le sang marque les draps. Les amants sont condamnés au bûcher. Tristan parvient à échapper à ses gardes et libère Yseut que Marc avait livrée à des lépreux. Ils s'enfuient dans la forêt du Morois, avec Governal, et le chien de Tristan, Husdent, les y rejoint. Marc, sur la dénonciation d'un forestier, surprend le couple dans une loge de feuillage. Mais entre leurs deux corps endormis, Tristan a posé son épée. Troublé par ce signe qui permet de croire à la chasteté des amants, Marc les épargne. Libérés de l'aliénation provoquée par le philtre, les amants consentent à se séparer. L'ermite Ogrin négocie le retour
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d'Yseut auprès de Marc. Au lieu de partir pour l'exil, comme il s'y était engagé, Tristan demeure près de Tintagel. Les ennemis du couple contraignent Yseut à un serment solennel. Tristan, déguisé en lépreux, aide Yseut à franchir le bourbier du Mal Pas en la portant sur son dos. Yseut jure sur les reliques qu'elle n'a tenu aucun autre homme entre ses jambes que Marc et le lépreux. Thomas et Gottfried présentent une autre version de la légende  : chez eux, les amants, avertis que Marc les surveille, communiquent par le moyen de copeaux que Tristan jette dans un cuisseau qui passe au-dessous de la chambre d'Yseut. Vient alors le récit du rendez-vous épié, puis celui de la fleur de farine, aussitôt suivi du serment d'Yseut, qui est une ordalie, c'est-à-dire un jugement de Dieu  : Yseut doit tenir entre ses mains une barre de fer rougi. Préalablement, Tristan s'est déguisé en pèlerin et a porté Yseut sur son dos de la barque où elle se tenait jusqu'à la terre ferme. Tristan s'exile et conquiert le chien Petitcru sur le géant Urgan le Velu. Le grelot de l'animal fait oublier toute souf¬ france. Il envoie Petitcru à Yseut qui, pour mieux compatir aux maux de son ami, arrache le grelot et rompt l'enchantement. Yseut obtient de Marc le retour de Tristan. Mais les impru¬ dences du couple provoquent la colère du roi qui les chasse. Ils se réfugient dans une grotte merveilleuse, où Marc les décou¬ vre endormis, séparés par l'épée. Le roi leur permet de revenir à la cour. Ici se situe la scène du verger, premier fragment conservé de Thomas. Surpris une fois de plus par Marc, les amants doivent se séparer. Yseut donne son anneau à Tristan qui s'enfuit en Espagne, où il vainc un redoutable géant. Puis Tristan se rend en Armorique, où il épouse la princesse Yseut aux Blanches Mains. 6) La vengeance de Tristan  : Cette suite d'épisodes est relatée par Béroul. Tristan tue ses ennemis. Le fragment de Béroul s'achève sur la relation de ces meurtres successifs. 7) Les dernières épreuves  : Tristan revient à plusieurs reprises en Grande-Bretagne, sous des déguisements divers. Il est accompagné, la première fois, par son beau-frère Kaherdin, qui devient l'ami de Brangien.
11 NOTE PRÉLIMINAIRE ν Mais un malentendu éclate  : Tristan et Kaherdin ont dû quitter précipitamment leurs maîtresses; Brangien croit que Kaherdin a fui Cariadoc. Ce chevalier a en effet défié Kaherdin, et prétend d'autre part à l'amour d'Yseut. Brangien, lors d'un nouveau voyage de Tristan en Bretagne, l'écarté d'Yseut, et Tristan va mourir de chagrin, quand un heureux concours de circonstances lui permet de regagner l'amitié de la jeune femme et de connaître un peu de bonheur auprès de la reine. Revenu en Armorique, Tristan combat Estout l'Orgueilleux Castel Fier et ses frères, pour reconquérir l'amie de Tristan le Nain qu'Estout a enlevée. Tristan le Nain périt, et Tristan, blessé par une arme empoisonnée, demande à Kaherdin d'aller quérir Yseut en Grande-Bretagne. Yseut aux Blanches Mains, cachée derrière une cloison, apprend ainsi le secret de son mari. La nef qui ramène Kaherdin avec Yseut en Armorique est retardée par une tempête, puis par le calme plat. Quand elle paraît au large, Yseut aux Blanches Mains répond à Tristan qui l'interroge que le navire arbore des voiles noires  : ce signal implique l'échec de Kaherdin. Tristan se laisse alors mourir. Yseut a débarqué. Elle rejoint son ami, s'étend à ses côtés et meurt à son tour de chagrin 1.
i. La mort des amants se retrouve dans le texte syrien (xne siècle) de Km s et Lobna  : Kais, amant de Lobna, a lui aussi épousé une autre Lobna et fait venir son amie au moment où, blessé à mort, il ne peut attendre que d'elle son salut.