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Classiques Garnier

Les exploits d’Hercule dans quelques chroniques et histoires universelles latines

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Les exploits dHercule
dans quelques chroniques
et histoires universelles latines

Si lhistoire universelle de Diodore de Sicile nétait pas parmi les textes qui ont servi de relais primaires entre lAntiquité et le Moyen Âge, les sources qui ont fourni des matériaux pour lhistoire dHercule ne manquaient pas. Nous reviendrons à divers endroits aux modèles et sources antiques de grande importance pour lhistoriographie médiévale, tels les Historiae adversum paganos dOrose ou, dans un autre registre, le De excidio Troiae de Darès, qui ont tous les deux fourni des épisodes importants pour des compositions ultérieures impliquant Hercule. À ce stade, nous nous limiterons à regarder de plus près un texte – le Chronicon dEusèbe de Césarée tel quil a été traduit en latin vers la fin du ive siècle par saint Jérôme1 – pour évoquer ensuite quelques autres œuvres historiographiques qui en dérivent ou sen inspirent. Ce choix repose dun côté sur le fait que la traduction par Jérôme, survivant dans quelque cent quatre-vingt manuscrits dont les plus anciens remontent au ve siècle, est considérée comme lœuvre fondatrice de la tradition des chroniques universelles médiévales et figure parmi les modèles les plus importants sur lesquels sappuieront les historiographes tout au long de la période qui nous intéresse2. De lautre, sa chronique est intéressante parce quelle évoque une série dépisodes en rapport avec Hercule, situés dans des contextes variés. Une comparaison avec lœuvre de Diodore permettra ainsi de relever des différences fondamentales – et de souligner les éléments qui seront caractéristiques de lhistoriographie médiévale – mais aussi 144de déceler des échos intéressants, témoignant du fait que lœuvre dEusèbe-Jérôme ne correspond pas à un point de rupture totale avec celles de ses prédécesseurs3.

La chronique dEusèbe-Jérôme

Contrairement à lœuvre dhistoriographie païenne de Diodore, la chronique dEusèbe-Jérôme relate lhistoire de lhumanité dans une optique chrétienne. Cette qualité ressort dune autre caractéristique de lœuvre, sa façon de situer chaque événement retenu sur une échelle chronologique qui soriente selon la naissance du Christ et qui calcule à rebours à partir de cette date lâge du monde. Sur cette base, la chronique traduite par Jérôme traite des événements historiques des différents royaumes du monde depuis Abraham jusquà lan 378 (époque contemporaine du traducteur), présentés chronologiquement et disposés visuellement dans des tableaux parallèles. Aussi, contrairement à lhistoire de Diodore, qui est rédigée sous la forme dune narration développée, divisée en livres et chapitres, la chronique dEusèbe-Jérôme condense les données historiques dans des listes de notes concises. Sur un plan générique, notons que cette différence formelle matérialise la distinction entre historia et chronica, annoncée par Eusèbe, qui sobservera dans certaines œuvres historiographiques des siècles suivants4. À part loptique et la forme différente, lœuvre de Diodore et celle dEusèbe-Jérôme partagent néanmoins lobjectif de vouloir traiter de lhistoire du monde entier et de tous les peuples qui lont habité depuis laube de lhumanité. Cest ainsi que lon voit réapparaître dans les deux textes des segments ou des catégories qui se correspondent, en ce qui 145concerne par exemple les Égyptiens, les Grecs (sous-divisés chez Eusèbe-Jérôme en Argiens, Athéniens, etc.), les Macédoniens et les Romains. On peut donc sattendre aussi à retrouver, à lintérieur de ces segments, un certain nombre de contenus parallèles.

Les chronologies dEusèbe-Jérôme nous font découvrir aussi, parmi bien dautres contenus, quelques mentions dHercule. Tournons-nous vers ces dernières, en relevant des éléments qui continueront à marquer la présence du héros dans les histoires médiévales. Nous avons résumé ci-dessous les événements en question, avec les dates qui leur sont attribuées, daprès lédition de la chronique établie par Rudolph Helm5.

Année av. J.-C.

Évocations d Hercule

1574

Hercule le premier (Hercules primus) vainc Antée dans un combat de lutte.

1511~1509

Hercule, surnommé Desinaus, est considéré comme important en Phénicie.

1397

Hercule libère Thésée des enfers.

(Thésée était descendu aux enfers avec Pirithoüs pour ravir Proserpine, mais, Pirithoüs ayant été dévoré par Cerbère, Thésée se trouvait alors en danger mortel.)

1352

Époque où vivait Tityus, contemporain de Léto, mère dApollon ; ce dernier et Hercule servent Admète.

1264

Linus, maître dHercule, est connu de tous.

1261

Époque du Sphinx, dŒdipe, et des Argonautes, dont furent Hercule, Asclépius, Castor et Pollux.

1246

Hercule accomplit ses exploits, tue Antée et détruit Ilion.

On dit quAntée était le fils de la terre parce quil excellait dans lart de la lutte, qui se fait sur le sol, cest pourquoi on disait quil était aidé par la terre, sa mère.

Par ailleurs, lhydre était, comme le confirme Platon, une sophiste ingénieuse.

1212

Hercule institue les jeux olympiques, à partir desquels on compte 430 ans jusquà la première Olympiade.

1200~1198

Hercule tue Antée en Libye.

1196

Hercule, souffrant dune maladie pernicieuse, se jette dans les flammes pour remédier aux douleurs. Il meurt ainsi à lâge de 52 ans. Certains disent cependant quil a péri dans sa trentième année.

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Tout dabord, on na pas ici une véritable « vie » dHercule. Il sagit dune série danecdotes6 courtes qui se trouvent éparpillées à travers des tableaux censés couvrir près de quatre cents ans7. En effet, en les considérant, on a bien limpression davoir affaire à plusieurs personnages du nom dHercule qui ont vécu à différentes époques et à différents endroits. Les occurrences ne sont pas sans prêter à confusion : en lannée 1574 av. J.-C., un Hercules primus aurait vaincu Antée. Serait-ce le même qui, quelque soixante ans plus tard, était connu en Phénicie sous le nom dHercules Desinaus ? Et comment doit-on comprendre les anecdotes ultérieures qui surviennent plus de trois cents ans plus tard dans la chronologie, et qui évoquent à nouveau le combat contre Antée : Hercules consummat certamina, Antaeum interficit (en 1246 av. J.-C.) et Hercules in Libya occidit Antaeum (vers 1200 av. J.-C.)8 ? De tels dédoublements soulignent que lincertitude autour des dates de vie dHercule et de sa provenance qui se reflétait chez Diodore, loin de sêtre perdue, se réaffirme de façon encore plus nette dans cette chronique9. Elle perpétue en effet non seulement les incertitudes présentes dans la tradition précédente mais finit aussi par mettre en évidence les éléments contradictoires, parce quelle se limite aux coordonnées essentielles afin de situer les différents événements et personnages sur le fil de lhistoire. Les informations fournies dans lanecdote sur la mort dHercule sont représentatives à cet égard : Hercules [] morte finitus est anno aetatis .lii. Quidam ante triginta annos eum perisse scribunt10. On simagine dautres historiens, avant Eusèbe et Jérôme, qui ont donné leur propre avis sur le sujet – dautant plus que ni cinquante-deux ni trente ans nont de sens 147selon léchelle chronologique dEusèbe-Jérôme –, ce qui attirera lattention de leurs successeurs sur les incertitudes en jeu.

Les contenus « mythologiques » des anecdotes se prêtent également à quelques observations intéressantes. Si lon se souvient de notre esquisse initiale du mythe de lHéraclès antique et de notre développement sur les douze travaux herculéens11, on constate que les exploits mentionnés par Eusèbe-Jérôme correspondent largement à des exploits « accessoires » du héros. Outre la lutte contre Antée, qui est mise en évidence par son évocation à trois reprises, on apprend notamment quHercule a sauvé Thésée des enfers, quil faisait partie des Argonautes, quil a institué les jeux olympiques et quil a détruit la cité dIlion, à savoir Troie. Une allusion à lensemble des « travaux » se trouve peut-être dans lanecdote Hercules consummat certamina (« Hercule a accompli ses exploits12 »). Si lon suppose que les anecdotes herculéennes incluses dans le texte résultent dune sélection opérée par le chroniqueur, cest peut-être que les faits choisis sont des éléments qui servent à mettre Hercule en rapport avec dautres personnages ou événements mentionnés au fil de la chronique. Lévocation dHercule en rapport avec Thésée pourrait être motivée par le fait que Thésée figure ailleurs dans la chronologie comme dixième roi dAthènes13. Lanecdote à propos des jeux olympiques se justifie peut-être parce que le chroniqueur la met en relation avec la « première Olympiade » et, de manière générale, avec le décompte des années en Olympiades, élément auquel Jérôme renvoie à maintes reprises14. De même, la destruction dIlion par Hercule est peut-être évoquée parce quelle préfigure en quelque sorte la guerre de Troie à proprement parler – événement qui reçoit une place dimportance particulière dans la chronique dEusèbe-Jérôme. Comme Marc-René Jung lavait observé, la prise de Troie est mise en avant dans les manuscrits de cette chronique : les mots Troia capta qui annoncent lévénement ne sont pas écrits à lintérieur de lune des colonnes de la chronologie parallèle, mais traversent ces colonnes en figurant au centre de la page dans les manuscrits et en introduisant de fait une coupure entre un avant et un après, qui concerne lensemble des nations15. Fait intéressant, la mention 148de la première Olympiade est en effet disposée elle aussi dune façon à couper toutes les colonnes, rappelant ainsi la prise de Troie, car le texte spécifie à cet endroit : A captivitate Troiae usque ad olympiadem primam anni ccccv16. Les deux sont donc considérés comme des événements « tranchants » au sens littéral.

On peut également supposer que la compilation des éléments répond à un certain souci de vraisemblance de la part dEusèbe-Jérôme, comme il ressort entre autres dans la façon dont le chroniqueur traite de deux épisodes liés à Hercule qui paraissent peu compatibles avec la réalité historique : sa descente aux enfers pour sauver Thésée de Cerbère et sa rencontre avec lhydre. Le premier des deux épisodes est dès le début démasqué en tant que fabula ; quant au second, le récit « fabuleux » impliquant le monstre serpentin aux multiples têtes est entièrement absent, remplacé par une interprétation reprise à Platon qui compare lhydre à une femme sophiste habile à qui on ne peut couper une tête-argument sans quil nen repousse aussitôt plusieurs autres à sa place17. Le fait que ces deux anecdotes impliquant des créatures fantastiques nécessitent comme une justification de la part du chroniqueur explique peut-être aussi labsence dautres « monstres » vaincus par Hercule et donnant corps à des exploits qui risquent dêtre jugés indignes de figurer dans une chronique. Hercule nest plus vu comme un demi-dieu qui a vaincu des créatures mythologiques ; cest un homme – ou une série dhommes – figurant dans la chronologie universelle parce quil(s) aurai(en)t accompli des faits qui ont influencé le cours de lhistoire. Lanecdote relatant la fin du héros qui se suicide à un moment déterminé de sa vie – sans aucune allusion à une transformation en constellation ou une apothéose – est révélatrice à cet égard. En fin de compte, Hercule nest quun nom dans une longue série de noms dhommes mortels qui interviennent dans lhistoire du monde.

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La postérité dEusèbe-Jérôme

La chronique dEusèbe-Jérôme est importante parce quelle a servi de modèle ou de source à de très nombreuses chroniques tout au long du Moyen Âge, qui ont pu, à leur tour, devenir des modèles pour leurs successeurs18. Les œuvres qui sen inspireront reprendront souvent aussi une partie des anecdotes relatives à Hercule, en les intégrant dans leurs propres chronologies. Nous névoquerons ici que quelques textes latins qui transmettent, en suivant Eusèbe-Jérôme, une série déléments se rapportant à Hercule et dont limpact sur lhistoriographie médiévale est notoire.

Le Chronicon dIsidore de Séville (viie siècle), qui condense encore plus drastiquement les événements, retient néanmoins plusieurs éléments à propos dHercule19. Contrairement à Eusèbe-Jérôme, Isidore nuse pas de tableaux parallèles afin de disposer ses informations, mais les intègre dans un seul fil narratif qui associe verbalement les événements qui se seraient passés en même temps au sein des différents « royaumes » du monde20. Les éléments dhistoire païenne grecque sont de cette façon directement situés par rapport aux éléments dhistoire biblique qui figuraient à la même hauteur des colonnes parallèles dans lœuvre dEusèbe-Jérôme. Isidore recourt par ailleurs à une division macro-structurelle explicite de lhistoire en « six âges », sinspirant dun modèle proposé par saint Augustin21. À lintérieur de cette grille structurelle, les mentions dHercule se situent au « troisième âge », allant dAbraham à David, sorientant, à lintérieur de cet âge, selon les périodes de gouvernement des différents Juges dIsraël. On apprend ainsi, par exemple, quHercule a fondé les jeux olympiques à lépoque à laquelle gouvernait le juge Jaïr, ou encore quil est mort à lépoque du juge Jephté22. Citons en guise dexemple le passage concis qui relate à quel moment de lhistoire sest éteint le héros23 :

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Iepte, ann [ os ] VI .

Huius tempore Hercules quinquagesimum secundum annum agens ob morbi dolorem sese flammis injecit.

Per idem tempus Alexander Helenam rapuit Trojanumque bellum decennale surrexit.

Jephté (gouverna) pendant six ans.

Dans ce temps-là, Hercule, vivant dans sa cinquante-deuxième année, se jeta dans les flammes à cause de la douleur provoquée par une maladie.

Dans ce même temps, Alexandre ravit Hélène, et la guerre décennale de Troie éclata.

Voilà une suite d« entrées » typiques dans cette chronique, regroupant les événements considérés comme importants qui se sont passés pendant un règne particulier. La condensation des informations mène à une association plus étroite entre les différents éléments qui se seraient passés approximativement en même temps. À part la contemporanéité du héros avec certains juges bibliques, il se trouve ici encore plus explicitement associé à lépoque de la guerre de Troie.

Le modèle des six âges du monde ainsi que les anecdotes à propos dHercule au troisième âge du monde, de même que la proximité de la guerre de Troie, seront repris dans dautres chroniques encore, comme celle de Bède le Vénérable (viie/viiie siècle) ou encore le Chronicon in aetates sex divisum dAdon de Vienne (ixe siècle)24. Au xiie siècle, les données herculéennes récupérées chez Eusèbe-Jérôme ont été reprises en grande partie dans une autre œuvre qui incorpore des anecdotes dhistoire païenne dans un cadre orienté principalement selon lhistoire biblique et qui a connu une vaste diffusion. Il sagit de lHistoria scholastica de Pierre le Mangeur, rédigée vers 1160 et transmise dans plus de 800 manuscrits, influençant également des histoires en langue vernaculaire25. Comme 151la observé Bernard Guenée, le titre sous lequel est connue cette histoire souligne son importance comme ouvrage de référence dans les écoles médiévales26. Lœuvre se présente comme un abrégé de lhistoire sainte inséré dans le cadre dune histoire universelle. Pour revenir à la terminologie générique évoquée plus haut, lœuvre de Pierre le Mangeur est bien une « histoire » et non une « chronique »au sens traditionnel, puisquelle relate des événements dans le cadre dune narration plutôt que de les inventorier dans des chronologies de notices succinctes. Cette histoire suit globalement lordre des livres de la Bible, maisreprend bon nombre danecdotes dhistoire païenne aux chroniques existantes.

Les événements en lien avec Hercule mentionnés par Pierre le Mangeur sont en grande partie rangés dans des segments rubriqués incidentia, placés après certains chapitres se rapportant à lhistoire biblique. Ces segments réunissent des remarques concernant des événements qui auraient eu lieu à la même époque que les éléments dhistoire biblique situés au premier plan. Les éléments en question sont largement repris aux chroniques précédentes27 et sont nombreux dans les parties du texte relatant lhistoire du livre des Juges. Ainsi, parmi les incidentia suivant le chapitre « De Thola duce Israel », on lit que eo tempore Hercules Antheum vicit in palaestra, et Illum[sic]vastavit, et, après le chapitre parlant, entre autres, du juge Jephté, on apprend que eo tempore Hercules flammis se injecit28. Pour citer Jean Seznec à propos de lœuvre en général, « le parallélisme des deux histoires, sacrée et profane, est présenté avec une étrange rigueur29 ». Le fait même quune histoire biblique choisisse dintégrer les éléments en question semble témoigner du fait que les anecdotes païennes, telles quelles étaient diffusées par les chroniques, ont dû être considérées comme faisant partie intégrante de lhistoire et, ainsi, comme indispensables pour lhistoriographie. On retrouve aussi, par ailleurs, des reflets des dédoublements dont témoignait la chronique dEusèbe-Jérôme et qui remontaient à lhistoriographie grecque antérieure : comme chez Jérôme, la victoire dHercule sur Antée 152est premièrement évoquée à un moment de lhistoire qui précède de loin lépoque des Juges, où se situent la plupart des autres mentions dHercule. Dans le livre II de lHistoria scholastica qui relate lhistoire correspondant au Livre de lExode, le chapitre De diebus aegyptiacis intègre un renvoi qui situe lévénement circa tempora Moysi : et sub eo[= Moïse]Hercules Antheum vicit30. On observera que cette dernière mention nest pas traitée dincidentium. Ce premier Hercule est donc considéré comme faisant partie intégrante de lhistoire biblique, ce qui ne rend pas moins déroutante sa reprise plus loin dans le Livre des Juges.

On voit donc que si le mode de présentation change (chronologies parallèles, abrégé chronologique unique, histoire narrée), et si les différentes œuvres ne retiennent pas toutes les mêmes anecdotes, une sélection déléments herculéens ainsi que les contextes historico-géographiques grossiers auxquels ils se trouvent associés se maintiennent depuis le modèle mis en place par Eusèbe-Jérôme. Les coordonnées chronologiques de la vie du héros ainsi que certains noyaux narratifs se retrouvent décidément peu changés dans un texte comme lHistoria biblique de Pierre le Mangeur, qui a connu une circulation ample durant lépoque où les premières histoires vernaculaires ont été composées. Les « coordonnées de base » mises en place dans cette tradition précédente, ainsi que lidée générale de faire alterner ou, au moins, de mettre en rapport histoire biblique et histoire païenne, se perpétueront dans certaines des chroniques en langue vernaculaire que nous examinerons dans la suite.

1 La version originale grecque de lœuvre est perdue. Elle survit par ailleurs dans une traduction arménienne.

2 À propos des témoins de lœuvre, cf. B. Lambert, Bibliotheca Hieronymiana manuscripta. La tradition manuscrite des œuvres de saint Jérôme, t. 2, Steenbrugge, Abbaye St. Pierre, 1969, p. 33-42. Lédition de référence du texte reste celle de R. Helm, Die Chronik des Hieronymus / Hieronymi Chronicon, Berlin, Akademie-Verlag, 1956, réimpr. De Gruyter 2012.

3 Il est intéressant de noter dailleurs que Jérôme mentionne le nom de Diodore de Sicile comme historiographe grec dans son œuvre, sous lannée correspondant à 49 av. J.-C. (cf.ibid., p. 155)

4 Voir à ce propos la contribution succincte de B. Guenée, « Histoire et Chronique. Nouvelles réflexions sur les genres historiques au Moyen Âge », La chronique et lhistoire au Moyen Âge. Colloque des 24 et 25 mai 1982, éd. D. Poirion, Paris, Presses de lUniversité Paris-Sorbonne, 1984, p. 3-12. La contribution reprend et actualise la discussion autour des différents genres (auxquelles on ajoutera les annales) menée par B, Guenée dans Histoire et culture historique dans lOccident médiéval, Paris, Aubier Montaigne, 1980, p. 203-211. Au sujet de la chronique de Jérôme comme œuvre fondatrice, voir M. Chazan, « La Chronique de Jérôme : source, modèle ou autorité ? », Apprendre, produire, se conduire : le modèle au Moyen Âge. XLVe Congrès de la SHMESP (Nancy-Metz, 22 mai-25 mai 2014), Paris, Publications de la Sorbonne, 2019, en ligne : <http://books.openedition.org/psorbonne/27027>

5 Die Chronik des Hieronymus, éd. Helm, op. cit. Les différentes anecdotes sur Hercule retenues se trouvent aux p. 40b, 43b, 49b, 56b, 57b, 59b 60b.

6 Nous employons ici et ailleurs le terme danecdote dans le sens dun « petit fait historique survenu à un moment précis de lexistence dun être, en marge des événements dominants et pour cette raison souvent peu connu », premier sens du terme en question donné par le TLFi sous « anecdote », en ligne : https://www.cnrtl.fr/definition/anecdote). De ce fait nous ne lutilisons pas en supposant nécessairement une dimension divertissante ou exemplaire du court récit impliqué. À propos de la place de ce dernier type danecdotes dans lhistoriographie, voir par exemple, P. Courroux, LÉcriture de lhistoire dans les chroniques françaises (xiie-xve siècle), Paris, Classiques Garnier, 2016, p. 704-717.

7 On constate néanmoins quil y a une accumulation de différents éléments dans la période correspondant aux années 1260 à environ 1190 av. J.-C., qui pourraient constituer les coordonnées dune vie du personnage.

8 Die Chronik des Hieronymus, éd. Helm, op. cit., p. 57b et 59b, respectivement.

9 Pour relever un parallèle intéressant, chez Diodore aussi, la victoire dHercule sur Antée est mentionnée à trois reprises : une fois au livre I en rapport avec lhistoire dÉgypte (ce serait le Hercules primus suivant Eusèbe-Jérôme), puis deux fois à lintérieur de la portion du livre IV consacrée à la vie dHéraclès. Voir supra, p. 43, n. 40 à propos des deux occurrences au livre IV. Celle au livre I identifie Antée comme contemporain dOsiris qui aurait été puni par Héraclès (cf. léd. Oldfather, op. cit., livre I, chap. 21, 4).

10 Die Chronik des Hieronymus, éd. Helm, op. cit., p. 60b.

11 Cf. supra, p. 33-50 et 56 sqq.

12 Die Chronik des Hieronymus, éd. Helm, op. cit., p. 57b.

13 Atheniensium X. Theseus, ann. .XXX. (1235-1205 av. J-C.) (ibid., p. 57b-59b).

14 Voir p. 148, n. 16 infra. Eusèbe-Jérôme évoquent le décompte des années en Olympiades dans la partie introductive à la chronique. (cf. p. 11 sqq. de léd. Helm, op. cit.).

15 Jung, Die Vermittlung historischen Wissens zum Trojanerkrieg im Mittelalter,Berlin, De Gruyter, 2001, p. 13.

16 Die Chronik des Hieronymus, éd. Helm, op. cit., p. 86a. De même, juste au-dessous de lindication Troia capta, on trouve lindice A captivitate Troiae usque ad primum olympiadem fiunt anni .ccccvi. (p. 60a).

17 Voir à propos de lexemple chez Platon, E. Jouët-Pastré, « Chapitre ii. Le mythe platonicien lieu de limagination rationnelle », La mythologie de lAntiquité à la modernité : Appropriation-Adaptation-Détournement,éd. C. Bonnet, C. Noacco et J.-P. Aygon, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, édition en ligne : http://books.openedition.org/pur/39583. (dernière consultation : 27-08-2022). De manière intéressante, non seulement le récit mythologique, mais aussi la majeure partie de linterprétation sous-jacente – cest par son ingéniosité quHercule aurait su se mesurer contre cette hydre sophiste, pullulante darguments fallacieux – sont absents dans la chronique. Si lomission de ces informations est voulue (et non, par exemple, liée à la transmission des données), cest vraisemblablement un indice que le récit en question était très connu.

18 Cf. encore M. Chazan, « La Chronique de Jérôme : source, modèle ou autorité ? », Apprendre, produire, se conduire : le modèle au Moyen Âge, art. cité.

19 Cf. Isidorus Hispalensis Chronica, éd. J. C. Martín, Turnhout, Brepols, 2003.

20 Cf. larticle de P. M. Bassett, « The Use of History in the Chronicon of Isidore of Seville », History and Theory, 15, 1976, p. 279 sqq.

21 Voir Guenée, Histoire et culture historique dans lOccident médiéval, op. cit., p. 149 sqq. à propos des modèles de découpage de lhistoire universelle. Il faut souligner que les chroniqueurs médiévaux adaptent le concept des « six âges » sans quils reprennent nécessairement un découpage identique à celui dAugustin.

22 Isidorus Hispalensis Chronica, éd. Martín, op. cit., p. 51-52, l. 86-90.

23 Ibid., l. 89-91.

24 Bède incorpore une Chronica minora dans son traité De temporum ratione (cf. chap. 66), édité par C. W. Jones : Beda Venerabilis, Opera didascalia. 2. De temporum ratione, éd. C. W. Jones, Turnhout, Brepols, 1997. La chronique dAdon de Vienne a été publiée par J.-P. Migne dans la Patrologia Latina, 123, 1852, col. 23-138, voir aetas tertia aux col. 33-42 (évocations dHercule dans la col. 37).

25 Il ny a à ce jour aucune édition moderne intégrale de lHistoriaScholastica. Le texte publié par J.-P. Migne, Patrologia Latina, 198, col. 1053-1722, reproduit lédition de 1699 par Emanuel Navarrus, comme le souligne A. Sylwan, « Petrus Comestor, Historia Scholastica : une nouvelle édition », Sacris erudiri, 39, 2000, p. 350. Sylwan prépare actuellement une édition de lœuvre, dont vient de paraître le premier volume (comprenant le livre de la Genèse), Petri Comestoris Scolastica historia. Liber Genesis, éd. A. Slyvan, Turnhout, Brepols, 2005. Un second projet dédition, suivant dautres principes que celui de Sylwan, est également en cours par M. J. Clark, « How to edit the Historia Scholastica of Peter Comestor ? », Revue bénédictine, 116:1, 2006, p. 83-91. Compte tenu du fait que la plupart des anecdotes sur Hercule se retrouvent non pas dans la partie sur la Genèse, mais dans le livre des Juges notamment, nous renverrons ici au texte reproduit dans la Patrologia, tout en soulignant que létat de celui-ci nest pas toujours fiable. Une étude plus poussée des anecdotes herculéennes suivant des témoignages manuscrits du texte pourrait apporter de nouveaux aperçus.

26 Guenée, Histoire et culture historique dans lOccident médiéval, op. cit., p. 32-33.

27 M.-R. Jung, « Lhistoire grecque : Darès et les suites », Entre fiction et histoire : Troie et Rome au moyen âge, op. cit., p. 187.

28 Pierre le Mangeur, Historia Scholastica, éd. Migne, op. cit., col. 1283, pour le chap. 10. « De Thola duce Israel », ainsi que des Incidentia qui le suivent.

29 La survivance des dieux antiques, op. cit., p. 26.

30 Pierre le Mangeur, Historia Scholastica, éd. Migne, op. cit., col. 1153B.