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Classiques Garnier

Hercule-Christ, des éclats du mythe à l’allégorie en patchwork

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Hercule-Christ,
des éclats du mythe à lallégorie
en patchwork

Le « vrai sens » derrière la vie dHercule est censé se révéler par des interprétations allégoriques placées après les récits qui traitent de son mythe. Comme nous lavons observé supra, lallégorie prolongée qui suit le récit de la mort du héros, occupant les vers 873 à 1029 de lOM, établit une analogie entre Hercule et le Christ, qui Tout pechié vainqui et tout vice, / Toute errour et toute malice, / Et pour le pueple delivrer, / Valt son cors a paine livrer, / Et mort reçut joieusement / En la crois[](OM IX, 989-994). Dans la mesure où cette allégorie chrétienne cherche à accueillir tous les éléments du mythe précédent, y compris lépisode dHercule « filandier » et la jalousie de Déjanire, les interventions dautres personnages secondaires (comme Faunus et Lichas) et une sélection dexploits dHercule, elle est dune complexité considérable. Elle se construit à travers une série de correspondances partiellement enchevêtrées et non sans incongruités. Il paraît utile den présenter demblée les composantes essentielles, pour revenir ensuite plus en détail sur certaines dentre elles.

Contenus mythologiques

Correspondances allégoriques

OM IX, 487-489 : Hercule prend à femme Déjanire, en la gardant pendant moult lonc terme (488).

OM IX, 873-876 : Dieu li fors prend par espousement la Judée, la tenant pendant longtemps en paix.

490-506 : Hercule part en aventure et commence à délivrer le monde de monstres.

877-884 : Voyant que lerrour abonde au monde, Dieu veut descendre sur terre pour sauver lhumanité.

507-575 : Hercule se soumet à Iole et échange ses vêtements contre les siens

885-901 ; 919-931 : Pour lamour de la Vierge (une soie ancele,885), le Sauveur veut couvrir sa divinité / De labit de charnalité (889-890). Il endure maintes peines Sous les piez de sa chamberiere (923).

575-598 : Faunus est trompé par lapparence Hercule déguisé en femme

902-918 : Le diable ne reconnaît pas Dieu en forme humaine et vient le tenter, sans succès.

350

599-645 : Déjanire est jalouse quand elle apprend la nouvelle des amours de son mari pour Iole.

932-940 : Quand la Judée apprend que Dieu a trouvé nouvele amie dans la Sainte Eglise (Que noter puis par Ÿolent, 939), elle enrage.

646-713 ; 759-767 : Hercule revêt la chemise empoisonnée et est saisi de tourments mortels.

941-952 : La sainte char qui naît de la Vierge, elle-même née de la Judée, souffre la Passion.

768-790 : Lichas est métamorphosé en rocher

953-958 : La Passion du Christ est traitée dans lÉvangile selon Luc (Lucas), qui perdure comme témoignage stable au monde.

714-758 : Hercule énumère les exploits quil a accomplis durant sa vie.

959-995 : Dieu se soumet à des peines pour délivrer lhumanité de tout mal, toute malice, toute errour et tout vice (961-962). Suit une énumération plus précise des vices et défauts.

791-867 : Hercule meurt par le feu, puis est déifié par son père Jupiter.

996-1010 : La chair meurt, mais le Pere immortel (1003) la fait ressusciter et glorifier Aus cieulz en pardurableté (1011).

868-872 : Eristeüs (= Eurysthée) continue à poursuivre les enfants dHercule après la mort de ce dernier.

1011-1029 : Les folz juïf, ennemis du Christ, ne cessent de faire honte aux chrétiens.

Une fois de plus, on est enclin à se demander doù viennent les composantes de cette forêt danalogies, si lon peut en trouver des traces dans les paratextes dOvide ou dans dautres sources, et dans quelle mesure elles reposent sur linnovation de lauteur. Nous proposons daborder cette question en regardant dabord les interprétations dont font lobjet les travaux dHercule, ensuite lanalogie christologique dHercule, puis de formuler quelques réflexions sur la composition du segment dans lOM.

Les lectures allégoriques des exploits dHercule paraissent un bon point de départ pour chercher déventuels liens avec les paratextes dOvide, puisque le catalogue de ses travaux nous est déjà familier et que, comme nous lavons vu supra, ses composantes ont reçu des gloses dans divers commentaires dOvide. Dans lOM, seule une partie des travaux a reçu des interprétations ultérieures. Pour les résumer brièvement1 :

– le tor et le lyon sont censés signifier orgueil et presumpcion

le jaiant qui feu gitoit devient lardant reprouche [] de punaise detraction (la médisance)

351

Buxiris et Dyomedes sont Ceux qui font decevablement / Traïson, murtre et roberie

lydre ouGerion signifient Malice qui nuit triblement

li pors (le sanglier) devient glotonie

le baudré de Femenie (le baudrier des Amazones) et Antheon renvoient à luxure

Les différents antagonistes dHercule représentent des vices, des péchés et dautres transgressions du décalogue, ou des personnes qui les commettent. On a affaire à une série éclectique de correspondances.

En comparant ces analogies avec les données relatives aux exploits dHercule dans les commentaires allégorisants dorigine française, on relève un certain nombre de parallèles, plutôt ténus, concernant le contenu des expositions. Le lion de Némée, par exemple, reçoit dans le Commentaire Vulgate une interprétation analogue : Per leonem intelligitur superbie elatio quam editus virtuti, id est Alcides, gloriose debellauit (« Par le lion, on entend lélévation de lorgueil que celui né de la vertu, cest-à-dire Alcide, vainquit glorieusement2 »). Busiris et Diomède ne reçoivent dinterprétations allégoriques ni dans le Commentaire Vulgate ni dans le Vat. lat. 1479, mais sont historicisés – comme dans lOM – comme des malfaiteurs ayant lhabitude de tuer les étrangers quils hébergent et qui sont, à leur tour, tués par Hercule. Le commentaire Vat. lat. 1479 précise, par exemple, dans deux gloses très semblables à propos de ces deux personnages3 :

Busirum Bisuris [ sic ] fuit rex Egipti, et hospites suos Iovi sacrificabat. Hercules enim hospitatus fuit in domo eius, et, dum dormiret, Busiris voluit ipsum interficere et Iovi sacrificare, sed Hercules eum interfecit. Hoc habet rei evidentiam veritatis.

Quid, com Tracis, id est Diomedis, regis Tracie, qui hospites suos interficiebat et equis feris ad comedendum aponebat ; hunc Hercules interfecit et eum equis suis ad comedendum apposuit, quod possibile est.

Lauteur de lOM regroupe ces malfaiteurs dans son allégorie, en les exposant collectivement en tant que ceux qui font decevablement / Traïson, murtre et roberie (OM IX, 974-975). Si dans cette interprétation le poète ne reprend pas déléments verbaux aux commentaires latins cités, il pourrait toutefois sen être inspiré sur un plan général pour en dégager les caractéristiques essentielles quil attribue aux personnages comme Busiris et Diomède. On peut faire une observation du même ordre à propos dAntée. Le Commentaire 352Vulgate comporte, entre autres, une interprétation allégorique au sujet de cet antagoniste dHercule, qui dans lOM est censé signifier la luxure. Après avoir observé que per Antheum intelligimus contrarietatem uitiorum (« par Antée nous comprenons la contrariété des vices »), le commentateur décrit la victoire dHercule, obtenue en soulevant Antée de la terre et en létranglant entre ses bras, comme une victoire sur la luxure : illum a regno suo, id est a carnis impotentis domicilio, castigando corpus et carnalitati non consentiendo, segregat. (« il la séparé de son royaume, cest-à-dire du domicile de la chair impotente, en châtiant son corps et en ne pas consentant à la luxure4 »). Ici encore, le parallèle entre le commentaire et lOM réside dans le noyau sémantique de lallégorie à propos dAntée, et non dans son articulation littérale. Pour ne pas tirer de conclusion hâtive sur la genèse textuelle de ces allégories, nous nous contenterons de faire remarquer pour ces deux exemples que les commentaires autant que lOM montrent une tendance à allégoriser les antagonistes dHercule en tant que vices. Mais cette tendance de fond commune nautorise pas à déduire de liens génétiques directs et assurés entre lOM et les commentaires, pas plus que les correspondances thématiques que nous venons dobserver.

Au reste, une comparaison symétrique entre les commentaires et lOM se révèle parfois décevante, et, quant au catalogue des travaux herculéens, lon nest pas toujours en mesure de trouver de correspondance même thématique entre les données de lun et les données de lautre. Le taureau nest associé à lorgueil dans aucun des commentaires que nous avons considérés, et on cherchera en vain des liens entre le baudrier des Amazones et la luxure ou encore entre Géryon et la malice qui nuit triblement. En prenant de la hauteur,ce dernier exemple peut cependant nous éclairer sur la façon dont lauteur de lOM a travaillé, en « compilant » et en redistribuant les éléments exégétiques. En effet, si elle ny est pas associée à Géryon, la « triplicité » de la malice est toutefois invoquée dans la mythographie antérieure au sujet dun autre travail dHercule : sa victoire sur Cacus5. Comparons ce que dit le traité du Mythographe III à propos de Cacus et ce que dit lOM à propos de Géryon6 :

353

Mythographe III

OM

Cacus autem fumum et nebulam, quae visui nocent, emittit, quia malitia occultas semper deceptiones molitur. [ ] Triplici namque modo nocet malitia, aut evidenter, ut potentior, aut subtiliter, ut falsus amicus, aut occulte, ut fur.

« Cacus, quant à lui, exhale des nuages de fumée qui nuisent à une bonne vision car la méchanceté toujours ourdit des machinations cachées. [] Et de fait, la méchanceté exerce ses nuisances de trois manières : elle se manifeste en toute clarté, et cest la loi du plus fort ; ou bien elle avance avec ruse, et ce sont les faux amis ; ou bien encore elle se cache et cest le vol. »

(chap. 13, § 1)

LYdre ou Gerion signifie

Malice qui nuit triblement :

L un apert, l un repostement,

Et li tiers fet plus a blasmer

Qui nuist sous faulz semblant d amer.

(IX, 977-980)

En comparant le passage du Mythographe III et celui de lOM, on observe que lallégorie en question, traditionnellement appliquée à Cacus, a été transférée sur deux référents qui se caractérisent, de manière évidente, par une « nature triple » : Géryon est censé avoir trois torses et lhydre est un monstre auquel (selon certaines versions du mythe) trois nouvelles têtes naissaient pour chacune qui lui est tranchée. Contrairement aux exemples présentés plus haut, cette parfaite superposition du contenu exégétique ne peut pas être le résultat dune polygenèse. Le mythe auquel il se rapporte a cependant changé. Sans souci du développement sous-jacent de linterprétation, le sens final se greffe simplement sur dautres antagonistes dHercule qui sont susceptibles, de par leur apparence, de rentrer dans le moule prédéfini de lexposition en circulation. La prédilection des exégètes pour des séries ternaires et lidée générale que les adversaires dHercule symbolisent des vices et péchés ouvre toute une panoplie de permutations envisageables à ce propos.

Étant donné la pluralité des éléments relevant du mythe et leur ressemblance sur le plan de lexégèse, la recherche de parallèles nets 354entre lOM et les commentaires à propos des exploits herculéens savère donc difficile. On peut cependant se demander sil est possible de trouver des pistes plus significatives à légard du personnage qui est censé les accomplir. Revenons un instant aux allégories à propos du lion et dAntée daprès le Commentaire Vulgate, en y ajoutant un autre exemple, à propos de Cerbère7 :

– Per leonem intelligitur superbie elevatio, quam editus virtuti , id est Alcides gloriose debellavit .

– Hercules vero vir sapiens et fortis Antheum, id est contrarietatem vitiorum armis debellat.

– Cerberum ergo, id est terrene corruptionis gravedinem, Hercules, virtutis venerabilis et sancte vincit et captivat dum nostram sensualitatem virtutis galea et bonorum armis domat .

Hercule est, pour résumer, « celui qui est issu de la vertu », « lhomme sage et fort », ou encore celui qui « combat la lourdeur de la corruption terrestre par la sainte et vénérable vertu, alors que, protégé par le casque de vertu et muni des armes du bien, il soumet notre sensualité ». La force dont Hercule est ici qualifié – sa virtus – sintègre clairement dans un cadre de morale chrétienne. Néanmoins, elle se rapproche bien davantage des interprétations morales déjà présentes dans la mythographie antérieure que de lanalogie christique que propose lOM8.

Comme lavait constaté de bonne heure Franco Gaeta dans son étude sur Hercule entre Antiquité et Renaissance, déjà à propos des allégories de Fulgence : « Ercole è sempre luomo virtuoso, ben lontano ancora dallessere la prefigurazione di Dio o di Cristo9. » Le philologue italien proposait de situer le « grand tournant » vers les interprétations théologico-chrétiennes justement dans laetas ovidiana, cette période qui a vu lessor des études dOvide et des commentaires à son œuvre, en évoquant en particulier le commentaire anonyme de Vat. lat. 147910. Le premier véritable rapprochement entre Hercule et le Christ quil évoque survient pourtant dans lOM. Or il nous semble possible de préciser davantage la piste proposée par Gaeta, en regardant de plus près le manuscrit Vat. lat. 1479.

355

Commençons par quelques observations à propos de la glose sur laquelle sétait déjà arrêté Gaeta11. Située dans la marge à côté des vers ovidiens qui parlent de la mort corporelle dHercule par le feu, la note propose une allegoria spiritualis à propos de son personnage et de sa vie. En voici le début12 :

Allegoria spiritualis talis est : Hercules interpretatur vita contemplativa vel vir vitam contemplativam ducens, et dicitur ab her, quod est lis, et cleos, quod est gloria, quasi gloriosus in lite vel labore vite, tamen aperte prelii corporis et anime. Multa monstra interfecit, quia multas temptationes carnis superavit secundum quod multis modis caro temptatur ; flumina, monstra, feras, reges, terras superavit, idest inundationes, vicia, motum carnis, copiam terrenorum superavit.

« Lallégorie spirituelle est la suivante : Hercule sinterprète comme la vie contemplative ou comme lhomme qui règle la vie contemplative. Son nom vient de her, qui signifie litige, et cleos qui veut dire la gloire, en dautres termes “glorieux dans les litiges ou dans les tourments de la vie”, cependant dune vie clairement faite de combat du corps et de lâme. Il tua de nombreux monstres, parce quil triompha de nombreuses tentations de la chair en fonction des multiples façons dont la chair est tentée ; il triompha de fleuves, de monstres, de bêtes sauvages, de rois, de terres, cest-à-dire dinondations, de vices, de passions charnelles et de la richesse des biens terrestres. »

Hercule est tout dabord celui qui mène une vie contemplative, qui est – à travers létymologie présumée de son nom – « glorieux dans les litiges ou dans les tourments de la vie [] ». Précisons à cet égard quHercule, qui arrive à vaincre tous les obstacles que lui envoie sa marâtre Junon, est souvent associé, dans la mythographie dorientation ovidienne, à lhomme vertueux qui sadonne à la vie contemplative ayant surpassé toutes les épreuves que lui avait imposées la vie active13. Cest lidée 356que le commentateur de Vat. lat. 1479 rend par prelii corporis et anime, en présentant Hercule comme celui qui a, en fin de compte, vaincu toutes les entités qui renvoient au corpus et à la caro (« la chair »). Les monstres quil aurait vaincus deviennent multas tempationes carnis. Les entités figurées qui apparaissent dans lénumération du commentateur rejoignent bien le plan des interprétations allégoriques proposées par lauteur de lOM. Hercule est celui qui vesqui sans cunchiement / Et sans ordure de pechié, / Dont tuit autre sont entechié. / Tout pechié vainqui et tout vice, / Toute errour et toute malice (OM IX, 986-990).

La dimension théologique chrétienne de lallégorie devient encore plus manifeste dans la suite de la glose, qui décrit la « chute » et puis la « rédemption » dHercule. Même lhomme qui mène une vie contemplative nest pas immunisé contre les « pièges » de lamour. Cest ainsi que sexplique comment ad ultimum Deianira illum intouxicavit [sic], quia ad ultimum amore mulierum illicito caro noxia laqueatur. La chemise envenimée devient donc un signe du désir damour charnel pour la femme qui laurait « happé14 ». Toutefois, lhomme vertueux arrive à se racheter15 :

Dicitur quod in igne se combuxit, idest fornace penitentie et igne caritas motus suos illicitos decoxit. Deificatus fuit, quia [espace blanc] erat in divina contemplatione, et ad ultimum vir talem vitam eligens, super ethera exaltatur. Iuno invidit, idest mondus et princeps mondi, scilicet dyabolus, indoluit.

Le feu par lequel se fait brûler Hercule devient la « fournaise de pénitence » et le « feu de charité » qui consument et éliminent les « désirs illicites » qui lavaient tourmenté. Hercule aurait finalement été déifié parce que, en sadonnant à la divine contemplation et en choisissant une « telle vie », il aurait été élevé aux cieux. On retrouve ensuite son antagoniste et le signe de la vita activa, Junon, qui devient dans le contexte symbole du monde et du diable (le princeps mundi) qui est affligé parce que son antagoniste est parvenu à le dépasser pour de bon.

On retrouve dans ces lignes quelques nouveaux éléments relatifs aux « ennemis » dHercule qui résonnent directement dans lOM. On 357se souvient par exemple de lallégorie à propos dAchéloüs, censé représenter la chair, le monde et le diable, élément qui réapparaissent tous dans lallégorie latine au sujet dHercule. De manière générale, la vie dHercule est représentée, dans son ensemble, comme allégorie de la lutte contre les forces « mondaines » et « terrestres » de laquelle Hercule sort vainqueur. Mais lallégorie latine diverge par un point crucial de celle du texte français : dans le commentaire Vat. lat. 1479 – comme dans les passages du Commentaire Vulgate cités supra – il est question dun homme vertueux qui surmonte ces forces du mal afin daccéder à la divine contemplation, alors que dans lOM Hercule incarne lui-même lessence divine qui lutte au nom de toute lhumanité. Le commentaire Vat. lat. 1479 témoigne, certes, dun niveau de lecture théologico-chrétien, mais Hercule na pas encore été assimilé au Sauveur de la chrétienté.

Le saut conceptuel en question nest pas présent explicitement dans les commentaires dOvide que nous avons pu considérer dans le cadre de ce travail. Mais il lest – circonstance heureuse – dans un texte qui accompagne le commentaire anonyme dont nous venons de parler dans son contexte manuscrit. Comme le souligne Frank Coulson, le commentaire Vat. lat. 1479 est transmis dans un manuscrit qui réunit un ensemble dautres textes – « used as primary teaching tools in the Middle Ages and frequently designated by the term liber Catonianus16 ». Le manuscrit Vat. lat. 1479 comporte, comme les libri Catoniani en général, dautres textes lus fréquemment dans les écoles médiévales17. En font partie les Distiques de Caton (doù lappellation de ces manuels), ainsi que, entre autres, les Ecloga Theoduli, un poème du xe siècle qui met en scène un débat poétique entre la vérité du christianisme et le mensonge du paganisme. Ces entités sont personnifiées sous la forme du berger Pseustis et de la bergère Alithia, qui présentent alternativement des mythes païens et des légendes chrétiennes, dune façon qui nest pas sans rappeler la structure générale de lOM, avec lalternance entre fables païennes et allégories chrétiennes18. On y retrouve aussi 358des éléments du mythe dHercule, qui sont suivis directement par des vers à propos de Samson19.

PSEUSTIS :

Alcidæ vigilem spoliavit clava draconem ;

Gerionis pompam rapit et consumpserat ydram ;

Cacus cessit ei, succumbit ianitor Orci :

Incendit demum pælex Deianira superbum.

ALITHIA :

Samson exuviis indutus membra leonis

Sternit mille viros, devastat vulpibus agros,

Urbis claustra tulit, nervorum vincula rupit :

Fraude sua tandem præcidit Dalida crinem.

Les passages en question noccupent chacun quun quatrain et mettent en rapport une sélection dexploits du héros païen avec des exploits de son « confrère chrétien », pour se terminer sur la fin comparable des deux hommes, vaincus par une femme (respectivement Déjanire ou Dalila20). Pour notre propos, les éléments les plus intéressants appartiennent toutefois moins aux vers de lEcloga quà la glose que ces derniers ont reçue dans le manuscrit Vat. lat. 1479.

Après les quatre vers traitant du mythe dHercule dans le manuscrit en question, on trouve une longue suite de gloses enchaînées qui commentent dabord les différents « épisodes » mythologiques auxquels fait allusion le texte, et présentent des interprétations, y compris quelques allégories21. Lune dentre elles livre la clé de lecture que nous cherchions. En voici le début22 :

Allegorice : Sicut Alcides, id est virtus, id est dominus Iesus Christus, qui fons est totius virtutis et glorie, cum devicisset alia monstra terre, id est cum per predicationem suam docuisset monstra, id est peccata, ab omnibus evitari []

« Sens allégorique : Cest comme lAlcide, cest-à-dire la vertu, cest-à-dire le Seigneur Jésus-Christ, qui est la source de toute vertu et de toute gloire, comme il vainquit les monstres de la terre, cest-à-dire comme il apprenait à tous comment éviter ces monstres, à savoir les vices [] »

Lidée présente dans ce passage résonne à son tour dans des vers de la vie dHercule selon lOM : Mes Diex et sa saintisme foi / Vaint le 359monde et si nous aprent / A le vaintre [] (IX, 274-276). La découverte dune telle allégorie christique dans le commentaire aux Ecloga dans le même manuscrit Vat. lat. 1479, qui nest séparé que dune vingtaine de feuillets du texte des Métamorphoses et de leur commentaire, incite évidemment à la réflexion. Nous navons pas mené à ce stade une étude approfondie sur les Ecloga (survivant dans quelques 200 manuscrits) et leurs paratextes, mais la structure même du texte, le traitement de multiples mythes anciens qui senchaînent en alternance avec les récits bibliques, fournissent un ample champ détude qui pourrait potentiellement livrer dautres correspondances sur le plan des allégories de type biblique dans lOM. Les contenus mystérieusement absents des commentaires dOvide pourraient apparaître, potentiellement, dans la proximité immédiate des textes concernés, si lon se permet de considérer le contexte manuscrit des paratextes ovidiens23.

En létat actuel, les interprétations allégoriques chrétiennes restent les parties de lOM dont la provenance est la plus incertaine. Cela concerne aussi une bonne partie de léchafaudage allégorique à propos des péripéties de la vie dHercule, dont nous navons précédemment regardé que des bribes particulières. En labsence de sources prometteuses, on peut présumer que lauteur du texte français est lui-même responsable de certains développements. Des incohérences et dédoublements ne manquent toutefois pas, résultant peut-être dune compilation maladroite de matériaux. Lintrigue allégorique correspondant à la relation triangulaire Hercule-Déjanire-Iole, encadrant lajout à propos dHercule « filandier », est exemplaire à cet égard24. Rappelons que Déjanire est censée être la Judée (soit, par métonymie, le peuple juif) qui devient hostile lorsquelle apprend Que Diex avoit nouvele amie / Sage et cortoise et bien aprise / Acointie – cest sainte Yglise / Que noter puis par Ÿolent [] (OM IX, 936-939), ce qui lincite à faire don de la chemise à son seigneur25 :

360

La sainte char que Diex ot prise

En la Vierge fu la chemise

Que Judee li presenta

Qui la Vierge Mere enfanta

Dont Diex vault nestre charnelment

Pour recevoir mort et torment.

Ces interprétations enchevêtrées (la Judée enfante la Vierge, dans laquelle Dieu sest fait homme, sincarnant en Jésus-Christ) simbriquent en partie dans le développement allégorique concernant lépisode de léchange des vêtements entre Hercule et Iole qui se greffe sur la toile narrative provenant des Métamorphoses. Sur le plan de lallégorie, cela mène à des dédoublements. Comparons les éléments dallégorie cités supra avec ceux dans lextrait cité ci-dessous, concernant lépisode de la soumission dHercule à Iole26 :

Sama tant une soie ancele –

Cest la glorieuse pucele,

Ou Diex pour humaine nature

Vault prendre charnel vesteüre

Et couvrir sa divinité

De labit de charnalité

Et soi metre en subjection – ;

En considérant les deux extraits, on remarque que lIncarnation est représentée à la fois par le don de lhabit empoisonné par Déjanire et par léchange de vêtements avec Iole qui le précède. À cet égard aussi, lapparition de Iole dans le rôle de sainte Yglise (OM IX, 938) paraît en décalage avec la trame allégorique précédente, où la soumission dHercule à son amante est déjà mise en parallèle avec limage du Créateur qui sumelia [] / Sous les piez de sa chamberiere (OM IX, 923-924)27. Le fait que lintrigue de la soumission dHercule à Iole et léchange des vêtements manque dans les Métamorphoses laisse imaginer que ce nœud de rapprochements supplémentaires entre fable et allégorie a été élaboré par lauteur de lOM, pour répondre au besoin de fournir une exposition intégrant également les passages interpolés de son mythe. Cela a pu le mener accessoirement à juxtaposer un certain nombre déléments se trouvant « en conflit » les uns avec les autres.

En labsence de sources antérieures, il est donc permis de supposer que la trame allégorique, avec ses rapprochements entre Déjanire et la Judée, 361Iole et lÉglise ou encore Iole et la Vierge, est née de la plume de lauteur français. Ce dernier sest toutefois servi, dans ses allégories, de termes, tournures et figures conventionnellement employés plus génériquement dans les textes bibliques. On pense à « chambrière » ou « ancelle » pour désigner la Vierge, « épouse/amie de Dieu » pour lÉglise, et limage figurée de la Judée qui engendre Marie28. On remarque en même temps quune partie de ces termes fait écho, sémantiquement ou verbalement, aux contenus du mythe dHercule tels que lauteur français les relate. Autrement dit, lauteur de lOM a pris soin de construire ses récits mythologiques et allégoriques à laide de reprises intratextuelles manifestes et de « lieux communs ». Il semble avoir adapté sa translation en la parsemant, dès le début, dindices de lessence christique dHercule : limage du vainqueur qui Enfer brisa en domptant le portier Cerbère rappelle celle de Jésus ouvrant les portes de lenfer chrétien pour libérer les âmes de la damnation29. Le titre même de terrien vengeour qui est censé rendre le vindice terrae ovidien (Mét. IX, 241) acquiert une résonance chrétienne évidente dans le contexte de lOM, où Hercule devient lincarnation terrestre de Dieu30. Dans la mesure où de tels signaux se multiplient au cours du texte, Hercule commence, pour ainsi dire, à se métamorphoser tacitement en figure christique, avant même le terme de son histoire.

Ces parallèles sintensifient notamment dans la partie finale du texte, qui raconte la mort du héros. Le discours de Jupiter annonçant la déification de son fils dans lOM ressemble de près (de par son contenu et son lexique) aux lignes finales de lallégorie qui parle de lapothéose du Christ – alors quil séloigne dans le détail du passage correspondant des Métamorphoses31 :

362

Ovide, Mét.

OM

Omnia qui uicit, uincet, quos cernitis, ignes,

nec nisi materna Vulcanum parte potentem

sentiet ; aeternum est a me quod traxit et expers

atque immune necis nullaque domabile flamma.

Lui qui a triomphé de tout triomphera des feux que vous voyez. Il ne ressentira leffet du puissant Vulcain que pour la part qui vient de sa mère ; la part quil a retirée de moi est éternelle, exempte et dispensée de mort ; aucune flamme ne peut la dompter.

(IX, 250-253)

[] quar la mort sans doute

Ne porra sor lui seignorir.

Ja mes filz ne porra morir

Par le mors de la mort amere,

Fors la char quil trait de sa mere :

Cele est corrompable et mortel ;

Tout le sorplus est immortel

Et pardurable comme gié.

Ce ne puet estre damagié

Ne mis a mortel dampnement.

(IX, 818-825)

Par lenging de ses anemis

La char certainement mori,

Mes onc la mort ne seignori

Ne pooir n ot de seignorir

Sor cele qui ne puet morir :

Cest la Deïtez pardurable

Qui nest morteulz ne corrompable

Mes samblable au pere immortel.

(IX, 996-1003)

Le translateur a bien modulé les contenus de son hypotexte afin de les adapter au contexte chrétien : sil a repris lidée essentielle de la nature double dHercule – humain de par sa mère, divin de par son père – il a visiblement adapté son lexique, en introduisant toute une série de termes à marquage religieux32. Il a surtout évacué dans ce contexte la mention du feu de Vulcain qui détruit le corps dHercule au profit de limage, aux allures distinctement chrétiennes, de la chair qui est corrompue par le mors de la mort amere33. Le passage correspondant de lallégorie paraît être une image réfléchie du récit mythologique, faisant appel à un jeu de reprises lexicales et déchos de rimes. Au moyen du discours du père (Jupiter-Dieu) sur la mort du fils (Hercule-Christ), la fable se projette ainsi entièrement sur lallégorie, préfigurant son issue :

363

Fin de la fable sur Hercule

Fin de l allégorie sur Hercule

[] Aussi par la mort transitoire

Se vesti de vie et de gloire

Herculés en eternité.

(OM IX, 863-865)

Si fu la char vivifiee,

Exaucie et glorefiee

Aus cieulz en pardurableté.

(OM IX, 1009-1011)

La transposition est ainsi parachevée, dans laquelle les identités des deux personnages se confondent.

Voilà comment se termine la vie merveilleuse de lHercule-Christ, analogie dapparence parfaite, forgée à laide dune architecture complexe de parallélismes structurels, renforcée par de multiples échos formels et lexico-sémantiques. La présence de cette allégorie permet enfin à notre demi-dieu païen – qui sest soumis à des femmes et qui a mis fin à sa vie par un suicide – de retrouver la voie de lapothéose. À lissue de notre petite enquête sur cette allégorie, on est toujours loin de connaître la provenance précise de tous les matériaux ainsi que la part des associations entre mythe et allégorie issues de la créativité de lauteur de lOM. On est néanmoins capable démettre quelques hypothèses plus précises à propos des sources présumées et connues de la matière. Ainsi, il semble envisageable, compte tenu des commentaires des Métamorphoses que nous avons pu regarder aux cours de nos recherches, que bon nombre des interprétations que lauteur exploite nexistaient pas telles quelles, associées au même mythe auquel il les liera, dans les paratextes dOvide, mais quil sest plutôt servi de composantes « discursives » individuelles circulant en partie dans ces mêmes commentaires, quil a réorganisées et recombinées à sa propre manière. Comme nous lavons vu plus haut avec lexemple du Commentaire Vulgate, les renvois intertextuels, ainsi que les liens intratextuels font partie intégrante de certains paratextes. Il semble probable que lauteur de lOM était familier – jusquà un certain degré – avec ce « réseau » de coordonnées et de références. Ces constats soulignent lutilité de connaître les paratextes dOvide dans leur ensemble – et de regarder au-delà des seuls passages correspondants du texte ovidien. Ils nous incitent par ailleurs – comme nous lavions vu avec lexemple du commentaire à lEcloga Theoduli dans le manuscrit Vat. lat. 1479 – à prendre en compte le contexte manuscrit des commentaires dOvide. Quen conclure pour la manière de travailler de lécrivain français ? Cest difficile à dire. À ce stade, il nous paraît aussi probable que 364lauteur de lOM ait travaillé en roue libre, à partir de ses lectures et en fonction de sa formation, quil ait consulté, entre autres, un manuel scolaire et/ou un manuel de savoir encyclopédique et mythographique, semblables à ceux que nous avons déjà abordés à plusieurs reprises dans ce travail.

1 Les éléments résumés par la suite se trouvent tous entre OM IX, 963 et 984.

2 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1598, f. 92r, en marge de droite.

3 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1479, f. 123v, en marge inférieure (à propos de Busiris) ; 124r, en marge de gauche (à propos de Diomède). Nous nous appuyons sur Un commentaire médiéval [], éd. Ciccone, op. cit., en maintenant cependant la leçon du manuscrit sans rectifications.

4 On peut rappeler que des interprétations similaires apparaissent dans les traités de mythographie. Cf. supra, p. 106 pour linterprétation de Fulgence, reprise, entre autres, par leMythographe III(chap. 13, 2) ; cf. D. Brumble, Classical Myths and Legends in the Middle Ages and Renaissance : A Dictionary of Allegorical Meanings, op. cit., p. 26, pour dautres exemples de la même interprétation.

5 Cf. déjà les observations supra, p. 84, 104-105.

6 Le Mythographe III est cité daprès léd. Bode, op. cit., et sa traduction daprès Mythographe du Vatican III, trad. Dain, op. cit. Rappelons que Cacus, fils de Vulcain, qui crachait feu et fumée, avait déjà dans lAntiquité tardive subi un rapprochement avec le terme grec κακόν « mauvais ». Cest le cas chez Servius, où il est, en outre, historicisé en voleur ou méchant serviteur qui habite une caverne obscure (cf. supra, p. 85). À partir de Fulgence, ensuite, on retrouve une interprétation allégorique lassociant à la méchanceté qui est nuisible de trois manières – triplici etiam modo nocet malitia (Mitologiae,livre III, chap. 3) – idée reprise ici par le Mythographe III.

7 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1598, f. 91r ; les gras sont de nous.

8 Pensons aux interprétations accueillies dans le traité du Mythographe III que nous avons présentées dans la première partie de ce livre (supra, p. 104 sqq.), reprises en partie aux Mitologiae de Fulgence. Voir aussi notre discussion à propos des acceptations flottantes du terme virtus dans le traité du Mythographe II.

9 Gaeta, « Lavventura di Ercole »,art. cité, p. 238.

10 Ibid., p. 240 ; 242 sqq.

11 Ibid.

12 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1479, f. 124v, marge de gauche, glose à Mét. IX 240, cité daprès Un commentaire médiéval [], éd. Ciccone, trad. Possamaï-Pérez, avec une légère modification.

13 Voir, entre autres, Jean de Garlande : Hercules est virtute virens activaque vita / Juno (Integumenta Ovidii, éd. Ghisalberti, op. cit., v. 347-348). Limage dHercule vertueux qui mène une vie contemplative après avoir accompli ses travaux (interprétés comme des vices) est présente également dans le Commentaire Vulgate. Elle se manifeste notamment en rapport avec le prétendu dernier travail dHercule, le fait davoir soutenu le ciel à la place dAtlas (ou, sur le plan de lexégèse, après avoir appris lastronomie de ce dernier) : Hercules contemplationi celestium vacavit, viciis omnibus extinctis. Hic enim debet esse ultimus labor Herculis. Sic est illud quod ad cognitionem creatoris a cognitione creaturarum procedendum est et ad cognitionem theologie a preludio artium. (« Hercule resta oisif à contempler le ciel, quand tous les vices avaient disparu. Ceci doit ainsi être lultime travail dHercule. Cest ainsi quil faut avancer de la connaissance des créatures à la connaissance du Créateur, et à travers le prélude des arts à la connaissance de la théologie. ») (ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1598, f. 92r) La même interprétation est présente dans le traité De natura deorum du Mythographe de Digby, op. cit., chap. 145. De Hercule et Atlante.

14 Voir aussi les Integumenta Ovidii :Tandem vipereum mulieris virus in illum / Sevit et invictum vincit amara venus (éd. Ghisalberti, op. cit., v. 379-380).

15 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1479, f. 124v, marge de gauche. Nous citons la glose ici daprès Un commentaire médiéval [], éd. Ciccone, op. cit., en ajoutant la précision à propos de lespace blanc.

16 Coulson, « Ovids Metamorphoses in the School Tradition of France », art. cité, p. 79.

17 Pour une liste des exemplaires de libri Catoniani, voir létude de M. Boas, « De librorum catonianorum historia atque compositione », Mnemosyne, 42, 1914, p. 17-46, voir p. 42 à propos du manuscrit Vat. lat. 1479.

18 Comme George Hamilton lavait noté dans une étude précoce sur le texte, « The poem offered occasion for those moral and allegorical interpretations so dear to the mediaeval mind, for which the eclogue seemed the chosen vehicle in which to convey the hidden truth » (G. Hamilton, « Theodulus : A Mediaeval Textbook », Modern Philology, 7:2, 1909, p. 175). Voir aussi, à propos du texte, R. P. H. Green, « The Genesis of a Medieval Textbook : the Models and Sources of the Ecloga Theoduli », Viator, 13, 1982, p. 49-106.

19 Voir Teodolo, Ecloga : il canto della verità e della menzogna, éd. F. Mosetti Casaretto, Florence, SISMEL-Edizioni del Galluzzo, 1997, v. 173-180.

20 Voir N. Henkel, « Die Sinnerschliessung des Mythos : Der Schultext der Ecloga Theodoli (10./11. Jh.) und seine Kommentare », Mythos im Alltag – Alltag im Mythos : die Banalität des Alltags in unterschiedlichen literarischen Verwendungskontexten, éd. C. Schmitz, Munich/Paderborn, Fink, 2010, p. 182-184, à propos de la construction et de la réalisation didactique des quatrains relatifs à Hercule et Samson, p. 182-184.

21 Ms. Vatican, BAV, Vat. lat. 1479, f. 20v-21r.

22 Ibid., f. 21ra.

23 Il serait intéressant denquêter sur lexistence dautres libri Catoniani comportant les Métamorphoses (ou dautres œuvres ovidiennes) ainsi que des recueils composites ayant des contenus semblables afin de cerner davantage les matériaux quavait lauteur de lOM à sa disposition. Entre les exemplaires de tels libri décrits dans larticle précurseur par M. Boas, « De librorum catonianorum historia atque compositione », art. cité, il y a au moins un autre témoin, Cambridge, Gonville and Caius College, 202, comportant le texte des Métamorphoses.

24 Cf. déjà Gaeta, « Lavventura di Ercole »,art. cité, p. 244, pour un commentaire détaillé sur ces rapports.

25 OM IX, 947-952.

26 OM IX, 885-891.

27 Marylène Possamaï-Pérez y voit toutefois un « glissement assez fréquent » qui se produit dans le cadre de linterprétation allégorique (cf. LOvide moralisé, op. cit., p. 450).

28 Pour des exemples des trois premiers termes, cf. p. ex. DMF, chambrière, sous-sens B. [À propos de Marie] ; ancelle, B. [P. allus. à lexpr. biblique ancilla Domini, Luc 1, 38] ; épouse, B.1. [Dans la langue religieuse, désigne lÉglise dans sa relation à Dieu]. Limage de Marie qui surgit de la terre de Judée est une figure biblique (cf. Isaïe XI, 1 sq.) quon retrouve dans la liturgie latine, p. ex. chez Fulbert de Chartres : Sicut spina rosam, genuit Iudaea Mariam (Nativité de Marie, répons III, 2 ; cité dans P. De Clerck, « La liturgie au temps de Fulbert », Fulbert de Chartres, précurseur de lEurope médiévale ?, éd. M. Rouche, Paris, Presses de lUniversité Paris-Sorbonne, 2008, p. 98).

29 Cf. p. ex. le passage suivant du Bestiaire divin de Guillaume le Clerc (xiiie s.) : Austresi fist nostre seignor / Jesu Crist, nostre salveor, / Quant les portes denfer brisa / Et le diable defula. (Le bestiaire. Das Thierbuch des Normannischen Dichters Guillaume le Clerc, éd. R. Reinsch, Leipzig, Reisland, 1890, v. 2757-2760).

30 Voir les exemples retenus dans GdfC, vengeor, « T. de lÉcrit., celui qui punit », avec les exemples Li terriens vengieres est venus (Hist. de Joseph, Bnf, fr. 2455, f. 17r ; cf. éd. Ponceau § 49) ; Nostres sires est voingerres de poichié[](Nativité Nostre Dame, Bnf, fr. 988, f. 188) (t. 10, p. 838c).

31 Nous mettons en gras les reprises verbales entre les deux passages de lOM.

32 Cf. Possamaï-Pérez, LOvide moralisé, op. cit., p. 160-161, à propos des différences conceptuelles entre Ovide et lOM dans le passage en question.

33 Les mêmes termes et des jeux de mots comparables qui se réfèrent clairement à Dieu et au Christ se retrouvent dans dautres textes. Citons les exemples suivants dans deux textes de Rutebeuf : []Dieu le Pere / Qui por souffrir la mort amere / Envoia en terre son Fil. (Complainte dOutremer, v. 27-29) ; Cest cil qui por nous reçut mort ; / Cest li sires qui la mort mort, / Cest cil par qui la mors est morte[] (Vie sainte Marie lEgiptianne, v. 1065-1067), cité par J. Dufournet, Lunivers de Rutebeuf, Orléans, Paradigme, 2005, p. 211.