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Classiques Garnier

Choix éditoriaux

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CHOIX ÉDITORIAUX

Proposer la première édition de textes connus par un manuscrit unique ne va pas sans dilemmes. Le respect des normes retenues par les éditions Classiques Garnier en résout certains. Ainsi sest-on conformé à la distinction requise entre i et j, u et v à valeur vocalique ou consonantique, ainsi quà lemploi des caractères conjoints æ et Æ, œ et Œ. Les recommandations de référence figurant dans les Conseils pour lédition des textes médiévaux, fascicules I et III, Paris, École nationale des Chartes, 2001-2002 ont été suivies. Il a cependant fallu, entre des injonctions parfois contradictoires, opérer certains choix, guidés par le souci de faciliter laccès au texte à un public francophone, et peut-être majoritairement latiniste occasionnel.

Nonobstant les interventions induites par le travail dédition – développement tacite des abréviations, uniformisation ponctuelle motivée, correction –, la graphie des deux textes originaux a été scrupuleusement respectée. Il est cependant apparu nécessaire, pour De sinistro fato Gallorum apud Veromanduos, dadopter un parti radical pour les diphtongues, diversement et sans cohérence apparente transcrites dans le manuscrit e, ȩ, ae ou æ, e, oe ou œ, jusquà poser de réelles difficultés de lecture avant dêtre reconnues (v. 251). Les graphies æ et œ ont été systématiquement retenues, bien moins par hypercorrection que pour assurer lidentification des mots, aider la lecture et favoriser la comparaison des vers avec leurs sources imprimées contemporaines, lesquelles privilégient ces formes. La consultation de loriginal numérisé permettra au lecteur qui le souhaiterait de retrouver lexacte graphie initiale1.

Fixer la syntaxe de longues périodes, voire de suites de phrases dépourvues de ponctuation, aura été une étape parfois déterminante pour comprendre et arrêter le texte. Le lecteur ne peut être privé de cette élucidation, et le latin a ainsi été ponctué selon lusage moderne, de façon analogue à la traduction proposée en regard.

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Les conventions utilisées sont par ailleurs les suivantes : les crochets droits [] indiquent une restitution ; les crochets pointus <…> signalent interpolations et additions ; les doubles croix encadrantes †…† constatent des passages désespérés.

Les remarques relatives à létablissement du texte, mais aussi à sa métrique, ont toutes été réunies dans les pages introductives de chacune des tragédies. Lespace ainsi libéré pour les notes infrapaginales a été aussi rigoureusement que possible cloisonné pour lagrément des latinistes comme des non-latinistes : au bas de la traduction, les notes et références historiques et culturelles ; au bas des vers latins, les précisions concernant les sources, requérant citations latines et confrontation avec le texte original. Appelées dans le texte, ces informations nont pas été constituées en un sévère apparatus fontium, afin de permettre explicitations et, en cas de besoin, renvois vers les introductions. La complexité de nombreux remplois et la proximité de pans entiers des deux pièces avec le centon auraient autrement abouti à une hypertrophie des notes et à des décalages difficiles à compenser entre texte et traduction proposée en regard.

Les jeux intertextuels sur lesquels reposent les tragédies dAbel Souris et de Jean Rose justifient limportance accordée à lexamen de leurs emprunts. En raison de la subtilité de nombreuses variations, la citation des sources les plus suivies imposait de recourir aux éditions dont se sont servis les auteurs, du moins à létat du texte le plus approchant, déterminé par comparaison ou daprès les catalogues de la bibliothèque du collège de Navarre. Une part dentre elles – aldine des tragédies de Sénèque2, Pœmata de Claude Roillet, Histoires de Robert Gaguin et de Paul Émile notamment – ne bénéficie pas à ce jour dédition scientifique. Nous avons ainsi recouru aux ouvrages du xvie siècle, en prenant soin de toujours en citer le texte, auquel ont été appliquées de façon cohérente les normes de composition de la collection (distinction i/j et u/v, utilisation des caractères æ et œ). Le cas échéant, la numérotation des vers est de notre fait.

La traduction sefforce de préserver le mouvement, les images et les échos verbaux des vers latins. Si les stiques pouvaient paraître adaptés 63à lélévation des passages les plus travaillés, labondance des rejets et contre-rejets aurait souvent abouti à un texte inutilement précieux et pénible à lire : le choix de la prose sest ainsi imposé. La solution juxtalinéaire a cependant été retenue pour les chœurs, ainsi opportunément distingués comme ils le sont en latin par le changement de registre et de mètre.

1 Texte accessible en ligne à ladresse https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9080854t.

2 Lidentification tardive de lédition de 1536 comme probable source des deux auteurs, le caractère relativement fragile de cette hypothèse et lintérêt de se référer à une autorité moins confidentielle ont amené à maintenir les citations de Sénèque dans le texte de lédition de 1517, dont dérivent les suivantes (voir supra, p. 57-59).